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Mise au point
Chirurgie réparatrice en cancérologie ORL : principales méthodes et indications Reconstructive surgery in head and neck oncology: indication and technic F. Kolb *, M. Julieron Département de cancérologie cervicofaciale, institut Gustave-Roussy, 39, rue Camille-Desmoulins, 94895 Villejuif, France Accepté le 6 janvier 2005
Résumé La chirurgie oncologique cervicofaciale et la chirurgie réparatrice ont évolué simultanément et ont chacune bénéficié l’une de l’autre au cours de ces 50 dernières années. Les problèmes posés par la chirurgie oncologique ont poussé la chirurgie réparatrice à trouver de nouvelles solutions, les avancées de la chirurgie réparatrice ont ouvert de nouvelles options thérapeutiques en oncologie cervicofaciale. Nous revoyons les étapes essentielles de cette évolution conjointe et présentons l’état actuel des possibilités offertes par la chirurgie réparatrice à l’oncologie cervicofaciale. © 2005 Publié par Elsevier SAS. Abstract Oncologic cervicofacial surgery and plastic surgery have had a common evolution over the last 50 years where progress erasing from one was beneficial to the other one. We review here the historical evolution of these specialties and present the state of the art of plastic surgery in the field of cervicofacial oncology. © 2005 Publié par Elsevier SAS. Mots clés : Chirurgie réparatrice ; Cancers ORL Key words: Plastic and reconstructive surgery; Oncology; Head and neck
1. Introduction et principes généraux de la chirurgie réparatrice appliquée à l’oncologie cervicofaciale La reconstruction de la région cervicofaciale est probablement un des domaines de la chirurgie plastique les plus difficiles car la prise en charge de certains cas cliniques dans cette région relève du défi. Effectuée dans le cadre de l’oncologie cervicofaciale, la tâche est rendue encore plus difficile par l’impératif respect de contraintes supplémentaires. L’évolution de la chirurgie plastique permet de disposer aujourd’hui de possibilités complexes qui ne doivent cepen-
* Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (F. Kolb). 1278-3218/$ - see front matter © 2005 Publié par Elsevier SAS. doi:10.1016/j.canrad.2005.01.005
dant pas modifier les indications chirurgicales fondées sur la réalisation d’exérèses carcinologiques au large de la tumeur et si possible en monobloc. De la même façon, l’exérèse de la lésion ne doit en aucun cas tenir compte du procédé de réparation prévu, c’est pourquoi il est à notre sens préférable que la résection et la reconstruction soient entre les mains de chirurgiens différents, celui assurant la reconstruction devant s’adapter aux exigences de la chirurgie d’exérèse. La plupart des auteurs s’accordent pour que le geste de reconstruction se fasse dans le même temps opératoire que l’exérèse, technique dite de reconstruction primaire. En effet, la rétraction tissulaire, fréquemment aggravée par la radiothérapie postopératoire, rend les reconstructions secondaires techniquement beaucoup plus difficiles et leurs résultats plus aléatoires [36].
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La plupart des lambeaux utilisés en carcinologie cervicofaciale tolèrent la radiothérapie postopératoire sous réserve que la cicatrisation soit obtenue avant la mise en traitement [59]. Lorsque des reconstructions complexes par lambeau libre sont utilisées en chirurgie de rattrapage ou en terrain irradié, il faut savoir que la radiothérapie ne semble pas augmenter directement le risque de thrombose mais que les complications postopératoires inhérentes au terrain irradié peuvent mettre en péril les pédicules des lambeaux [61], au même titre que les vaisseaux carotidiens, en favorisant l’infection locale et les fuites salivaires. Par ailleurs, même si aucune étude n’a comparé les résultats fonctionnels des reconstructions complexes en chirurgie de rattrapage par rapport à ceux de la chirurgie première, il apparaît, dans notre expérience, que les premiers sont nettement moins bons. En effet, les complications locales postopératoires, telles que la fibrose et la rétraction des tissus irradiés sont autant de facteurs qui peuvent nuire à la qualité des résultats, notamment pour les reconstructions de la cavité buccale et de l’oropharynx. La priorité de la chirurgie de rattrapage reste donc la couverture des gros vaisseaux et d’assurer une sécurité postopératoire. Les reconstructions complexes à visée fonctionnelle ou esthétique sur ce terrain ne doivent être proposées qu’à des patients très sélectionnés auxquels on a expliqué clairement les risques et les limites de cette chirurgie [97]. La prise en charge d’une perte de substance de l’extrémité céphalique doit dans un premier temps tenir compte des spécificités anatomiques de cette région constituée d’une suite de lignes et de courbes, d’excroissances et de creux dont les frontières tracent des zones de transition entre ombre et lumière, cet ensemble définissant la personnalité d’un individu. Toutes ces structures constituent un équilibre fragile prêt à se rompre sous l’effet d’un traumatisme, même mineur, dont peuvent découler des conséquences sociales et psychologiques majeures. Au sein de cette enveloppe sont inclus des organes comme le larynx, le pharynx, la langue et les yeux impliqués dans des fonctions aussi essentielles que l’alimentation, la respiration, la parole et la vision.
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2. Anatomie chirurgicale de la tête et du cou appliquée à sa reconstruction Compte tenu de la complexité de l’anatomie de l’extrémité céphalique et de l’impossibilité de réaliser une reconstruction « ad integrum » la prise en charge d’une perte de substance de cette région demande une vue synthétique et schématique visant à simplifier sa structure et souligner les éléments fondamentaux à restaurer. Cet objectif a poussé plusieurs auteurs à concevoir des classifications des pertes de substances de l’extrémité céphalique permettant d’établir une vision concise et la conception d’arbres décisionnels réglant le geste de reconstruction. Il est difficile de présenter ici toutes ces classifications et arbres décisionnels, mais, d’une manière abrégée, la prise en charge des pertes de substances de l’extrémité céphalique suit les deux buts fondamentaux que nous avons précédemment fixés : restauration plastique d’une part et fonctionnelle d’autre part. La restauration plastique peut être scindée en deux parties : • remplacement des tissus de couverture : la classification des pertes de substances cutanées est consensuelle et suit la règle des unités anatomiques et esthétiques placées sur les zones de transition entre ombre et lumière où les cicatrices sont estompées (Fig. 1), [10,12] ; • restauration de l’infrastructure ostéocartilagineuse dont les deux constituants principaux sont la mandibule et le maxillaire supérieur : plusieurs classifications ont été proposées pour la mandibule mais toutes séparent les interruptions mandibulaires de l’angle de celles de la symphyse comme
La restauration de ces organes et de leurs fonctions est un défi encore plus grand que celui représenté par l’enveloppe tégumentaire et l’infrastructure osseuse du visage car ils sont constitués de tissus très spécialisés, dont la structure est unique au sein du corps humain. Leur reconstruction « ad integrum » devient dès lors impossible et le geste de reconstruction doit se montrer humble en se limitant à supporter et faciliter l’action des structures fonctionnelles préservées par le geste d’exérèse. Tout geste de reconstruction de l’extrémité céphalique a donc un double but, plastique et fonctionnel. Compte tenu de l’ampleur de la tâche, il requiert des procédés sophistiqués dont la maîtrise demande l’habilité, l’expérience et les qualités artisanales et artistiques d’un chirurgien reconstructeur rôdé à ce type de chirurgie.
Fig. 1. Unités anatomiques du visage (d’après Larabee F.W. dans « principles of facial reconstruction » Lippincott-Raven – 1995.
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Tableau 1 Classification des pertes de substance de l’étage moyen de la face. L’étage moyen de la face est subdivisé suivant ces unités anatomiques (région oculopalpébrale, nasale, jugale et labiale). Chaque but à atteindre par la reconstruction est représenté (fermeture des barrières anatomiques, reconstruction du soutient ostéocartilagineux, couverture des pertes de substances des tissus de revêtement, restauration des fonctions) Cranio-facial reconstruction The classification of the defect: Exhaustive & Surgical The side (L & R) Oculo-palpebral Nasal Jugal Labial
Framework ZM Olw Of ELc FM Nb Na Nt Ns ZM PM FM PM
Skull base Covering tissues Eli ELs Elm ELl Nd Nt Nc Na Nl Nst
Function E ELS ELI CL CM LD NMv NMa NMc
Cm Cl Cz Cb
M VI VIIels VIIl V2
Ll Lp Lc
1/4 1/3 1/2 T
Palate
celle d’Urken que nous employons [100,5,102–104]. Les classifications des pertes de substance du maxillaire supérieur sont moins consensuelles et témoignent déjà des nombreuses approches pour le reconstruire [17,19]. Nous proposons ici notre classification (Tableau 1), qui s’étend à l’ensemble des structures constituant l’étage moyen de la face, tissus de couverture, architecture osseuse, organes fonctionnels et barrières anatomiques. La base de notre classification concernant l’infrastructure ostéocartilagineuse reprend les travaux de Yamamoto [106] (Fig. 2) qui synthétisait la structure du maxillaire supérieur en trois piliers fondamentaux, zygomaticomaxillaire, frontomaxillaire et ptérygomaxillaire. La restauration fonctionnelle a suscité des classifications de pertes de substance par organe ou par région. Nous ne pouvons pas les reprendre toutes ici mais nous les présenterons lorsque nous aborderons les techniques de reconstruction de ces organes. Nous reprenons cependant la classification de Urken [102] concernant la cavité buccale car elle a été conçue par cet auteur pour compléter celle de la mandibule vue plus haut. Nous allons maintenant présenter les techniques principales à notre disposition pour prendre en charge chacune de ces
structures en retraçant leur évolution et soulignant celles qui sont aujourd’hui devenues des standards.
3. Remplacement des tissus de couverture Le remplacement des tissus de revêtement ouvre le domaine très large de la chirurgie des lambeaux. Ce n’est pas par hasard que le lambeau dont nous avons la première trace dans l’histoire de la médecine était destiné à la couverture d’une perte de substance de l’extrémité céphalique. Sushurata, un médecin indien, présenta dans un livre écrit près de huit siècles avant notre ère un lambeau prélevé aux dépens du front pour la reconstruction des amputations nasales chez les femmes adultères. Ce lambeau a été depuis régulièrement décrit dans cette indication. Ce lambeau illustre également le tournant principal pris par la chirurgie des lambeaux, d’un prélèvement au hasard vers les lambeaux à flux axial. Cette évolution n’a été possible que grâce aux connaissances apportées par des travaux fondamentaux sur la vascularisation des plans cutanés. Les premières études sur ce sujet remontent au XIXe siècle [51]. Puis, la première et deuxième guerre mondiale ont permis
Fig. 2. Piliers maxillaires selon Yamamoto et al.
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des avancées décisives dans le domaine de la chirurgie des lambeaux grâce à l’œuvre de pionniers comme Sir Harold Gillies [29,92]. Cependant, l’énoncé de la théorie des lambeaux à flux axial n’a été clairement présenté qu’en 1973 par Mc Gregor et Jackson dans leur article axial pattern and random skin flaps [57]. Depuis, les travaux fondamentaux sur la vascularisation des plans cutanés ont permis d’avoir une cartographie complète de l’ensemble du corps grâce aux travaux d’auteurs comme Nakajima et al. [62] ou Taylor et al. [87–91]. Ces auteurs ne se sont pas arrêtés à une simple description cartographique des perforantes pour la peau mais ont utilisé leurs résultats pour énoncer des règles de prélèvement pour rendre les lambeaux plus fiables. Cela conduit aujourd’hui à délaisser les lambeaux cutanés « au hasard » au profit des lambeaux à flux axial. La région cervicale illustre cette évolution. Dans les années 1960, l’ensemble de la peau du cou était prélevé au hasard et sa vascularisation n’était pas connue. Le lambeau de platysma décrit par Coleman et Fultran à la fin des années 1970 recherchait à inclure un pédicule vasculaire dans le lambeau et était le fruit de travaux anatomiques fondamentaux. La dernière évolution provient de Martin qui a décrit le lambeau sous-mental prélevé en îlot vasculaire sur les vaisseaux sous-mentaux. Aujourd’hui, de nombreux lambeaux cutanés sont à notre disposition pour couvrir de petites comme de larges pertes de substance cutanée de la tête et du cou. Le choix entre toutes ces possibilités suit des règles bien précises. Les tissus locaux doivent être préférés aux lambeaux à distance pour éviter des différences de couleur, de texture et d’élasticité qui altèrent la qualité du résultat final. Les incisions, les voies d’abord et l’orientation des cicatrices doivent respecter les unités anatomiques et les sousunités esthétiques, ce qui permet de les estomper par l’effet de transition entre les zones d’ombre et lumière. Cela peut amener au sacrifice de peau saine dont l’exérèse n’était pas nécessaire compte tenu de l’infiltration tumorale. Les pertes de substance cutanées peuvent être trop grandes pour être couvertes par des tissus locaux. L’évolution des lambeaux a permis de disposer également de lambeaux prélevés à distance, amenés dans un premier temps de manière pédiculée. Depuis les années 1980, l’introduction et le développement de la microchirurgie a permis la réalisation de lambeaux libres qui marquent l’évolution ultime de la chirurgie des lambeaux. Leur structure a également évolué, ne se limite pas à la peau, mais est constituée de plusieurs types de tissus associant peau, muqueuse, muscle, fascia et os. Plusieurs familles de lambeaux peuvent être décrites en fonction de leur structure tissulaire. Nous avons présenté les lambeaux cutanés et fasciocutanés en premier. Les lambeaux musculocutanés sont apparus en chirurgie oncologique ORL à la fin des années 1970 avec le grand pectoral puis le grand dorsal et ont transformé les suites postopératoires. Les lambeaux digestifs, dont la première description à la fin des années 1940 marque l’une des premières descriptions
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de lambeau libre se sont développés à la fin des années 1970 également. Le lambeau libre de jéjunum est actuellement le plus couramment utilisé : la 2e ou 3e anse jéjunale est prélevée par laparotomie et positionnée entre l’oropharynx et l’œsophage cervical en isopéristaltique. Les taux de nécrose de ce transplant jéjunal sont de 5 à 8 % [30,39,43,70], y compris après radiothérapie postopératoire. Les lambeaux comportant un os vascularisé ont été introduits au cours des années 1980, principalement la crête iliaque et le péroné et ont marqué une nouvelle étape en permettant la reconstruction des structures osseuses, éventuellement en territoire irradié, avec une grande fiabilité [59]. L’avantage majeur des lambeaux osseux vascularisés par rapport à des greffons osseux est leur résistance à l’infection. Ils peuvent donc être largement utilisés pour la réparation de la cavité buccale (chirurgie propre contaminée) et ne subissent pas de résorption au cours du temps [20,34]. La radiothérapie postopératoire est généralement parfaitement tolérée [28], sous réserve que la cicatrisation muqueuse soit terminée et que l’os ne soit pas exposé au niveau de la cavité buccale [59]. Le large éventail de choix de ces lambeaux permet de réaliser des reconstructions complexes, chacun de ces lambeaux pouvant être osseux pur ou composite avec un contingent musculaire (comblement) ou cutané (réparation cutanée et muqueuse). La plupart permettent la mise en place d’implants pour faciliter la réhabilitation dentaire. Cependant, du fait des risques d’ostéoradionécrose, cela n’est pas recommandé si le lambeau a préalablement été irradié. Par conséquent, si une radiothérapie postopératoire est prévue, il est préférable de mettre en place les implants en peropératoire afin que la radiothérapie débute lorsque la cicatrisation endobuccale est achevée [101]. Plusieurs sites « donneurs » sont à notre disposition en carcinologie. Le péroné utilisé pour la reconstruction mandibulaire a été décrit la première fois par Hidalgo en 1989 [35,36]. Ce site « donneur » a l’avantage d’une importante longueur d’os disponible (25 cm utilisable en moyenne) et d’une double vascularisation (périostée et médullaire), qui permet la réalisation de plusieurs ostéotomies sans danger pour la vitalité des fragments osseux [66]. Une palette cutanée peut être prélevée et l’épaisseur de l’os permet la mise en place d’implants. La morbidité au niveau du site donneur est limitée à la cicatrice car il n’y aucune séquelle fonctionnelle. En revanche, l’utilisation du péroné est formellement contreindiquée en cas d’artérite sévère des membres inférieurs du fait du risque d’ischémie du membre après ligature de l’artère péronière. Une analyse des vaisseaux par échodoppler préopératoire est donc indispensable. Le lambeau de crête scapulaire comprend la portion latérale de l’omoplate [85,86,93], là ou l’os est comparable à un os corticodiaphysaire. La longueur d’os qu’il est possible de prélever est de 10 à 14 cm. Le prélèvement d’une palette cutanée scapulaire ou parascapulaire [64,85], totalement mobile par rapport à l’os, est possible, ainsi que le prélèvement d’une palette cutanée de grand dorsal, car l’artère circonflexe scapulaire naît le plus souvent du même pédicule. Les avantages de ce site « donneur » sont nombreux : l’épaisseur de l’os qui
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permet la mise en place d’implants, la possibilité de reconstruire des pertes de substance muqueuse étendues grâce aux palettes cutanées, la faible morbidité (cicatrice discrète, pas de séquelle au niveau de l’épaule sous réserve d’une rééducation précoce). La crête iliaque [38,60] est plus rarement utilisée en carcinologie car la palette cutanée associée est peu mobile par rapport à l’os ce qui rend difficile la reconstruction des pertes de substance muqueuse associées. La morbidité postopératoire est importante avec des douleurs persistantes et éventuellement un risque d’éventration. Enfin, le transplant antébrachial radial ou lambeau « chinois » est rarement utilisé pour son contingent osseux (baguette de radius) [108]. Les ostéotomies ne sont pas recommandées et l’os doit donc être positionné au cordeau. Enfin il existe un risque de fracture de l’avant-bras au niveau du radius restant. Le développement ultime des lambeaux est représenté par l’association au sein d’un même prélèvement de plusieurs tissus que l’on nomme lambeaux composites ou chimériques. Ceux-ci ont permis au cours des années 1990 de prendre en charge des pertes de substances de plus en plus en plus complexes demandant une reconstruction tridimensionnelle [45,105].
4. Restauration de l’infrastructure ostéocartilagineuse L’infrastructure de la tête et du cou est composée de multiples os, parmi lesquels la mandibule et le maxillaire, qui jouent un rôle principal. L’assemblage de tous ces os réalise un échafaudage complexe fait d’arches et de piliers responsables des contours, de la hauteur et de la projection de la face. Nous allons présenter les techniques à notre disposition pour la reconstruction de la mandibule et du maxillaire. 4.1. Réparation mandibulaire L’os mandibulaire est une structure fondamentale de l’architecture de la face et donc de l’esthétique et de la personnalité du visage. Sur le plan fonctionnel il intervient dans la déglutition par le maintien de la sangle du plancher, la mastication (dentition, insertions des muscles masticateurs) et également la respiration par le maintien symphysaire de l’antéposition de la langue. Les indications de la reconstruction de l’os mandibulaire dépendent essentiellement de la localisation de la résection mandibulaire et de son étendue. Plus la perte de substance est antérieure et plus elle est étendue, plus il sera nécessaire de reconstruire la mandibule avec un procédé fiable et durable. En effet, les conséquences des résections antérieures sont multiples (Fig. 3) : • rétropulsion de la langue entraînant des difficultés respiratoires; • troubles de déglutition à type d’impossibilité de propulser le bol alimentaire vers l’arrière ou de fausses routes; • difformité faciale avec absence de relief mentonnier.
Fig. 3. Séquelle d’interruption de la symphyse mandibulaire. Déformation classique dite de « Andy gump ».
L’intérêt de la reconstruction mandibulaire lors des résections latérales est beaucoup plus controversé [101,8]. Sur le plan esthétique, la conservation du relief de l’angle mandibulaire est importante surtout chez les patients au visage mince (Fig. 4). En revanche sur le plan fonctionnel, l’apport osseux permet d’envisager un appareillage dentaire mais, en ce qui concerne la déglutition et la phonation, une étude déjà ancienne de Komisar ne montrait pas de bénéfice significatif des lambeaux [42]. Les progrès des stratégies de reconstruction de la mandibule ont certainement entraîné une amélioration des résultats [34], mais il reste que le facteur fonctionnel pronostique prédominant est la résection linguale associée et que la reconstruction osseuse est un problème secondaire dans les résections muqueuses étendues de la cavité buccale et de l’oropharynx. Dans ces cas, la reconstruction des tissus mous doit être privilégiée, sachant que le résultat esthétique peut être diminué par l’utilisation d’une prothèse guide provisoire (sous réserve que le patient soit denté au maxillaire supérieur), qui évite la latérodéviation mandibulaire. Chez les patients édentés, la mise en place d’un lambeau myocutané de comblement réduit la déviation mandibulaire et la dépression inesthétique au niveau de l’angle. De nombreux procédés ont été décrits mais c’est la reconstruction par lambeaux libres osseux qui a pris le pas sur les autres techniques ces dernières années. Les lambeaux pédiculés avec contingent osseux ont été peu à peu abandonnés car les prélèvements osseux, en règle limités, sont difficiles à positionner (limitation de mise en place due au pédicule) et il existe une résorption osseuse au cours du temps liée à une vascularisation osseuse qui reste précaire. Les plaques d’ostéosynthèse pontant la perte de substance nécessitent le plus souvent une couverture par un lambeau musculocutané, ce d’autant que la perte de substance est antérieure. Malgré l’utilisation de plaques en titane [82] dont la tolérance est meilleure, l’écueil majeur de ce type de réparation est l’expulsion du matériel qui survient dans 25 à 50 %
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Fig. 4. Séquelle classique de l’interruption latérale de la mandibule et résultat d’une reconstruction par lambeau de péroné.
des cas et nécessite le plus souvent son ablation définitive [41,74]. Les greffons non vascularisés iliaques et des greffons costaux ont été utilisés. Ces greffons non vascularisés ont l’inconvénient majeur d’être sensibles à l’infection qui peut entraîner leur résorption et leur élimination [46]. Ils ne peuvent être proposés qu’en l’absence d’abord endobuccal pour éviter la contamination peropératoire, ce qui n’est pas le cas en chirurgie carcinologique. Les ostéomèches ou les diverses prothèses associées ou non à des greffons osseux, la poudre d’os compactée, la remise en place de la mandibule du patient après irradiation ou congélation, ont été proposées. Ces techniques sont toutes grevée d’un taux important de complications et se heurtent toujours aux problèmes de la contamination par le milieu buccal, de l’infection avec expulsion du matériel et finalement résorption de l’os [42]. Les lambeaux libres revascularisés sur les vaisseaux du site donneur représentent donc actuellement l’option principale des techniques de reconstruction mandibulaire. La comparaison avec les autres techniques en termes de complications ou de résultats a montré un avantage certain des lambeaux libres [6,41,46,74], notamment dans la reconstruc-
tion de la symphyse mandibulaire [41]. La reconstruction mandibulaire par lambeau libre osseux est également toujours indiquée en cas de mandibulectomie subtotale dans le cadre, par exemple, des sarcomes mandibulaires. En effet, le contrôle carcinologique local de ce type de tumeurs est étroitement dépendant de la qualité de la résection, qui doit passer nettement au large de la tumeur. Les possibilités de reconstruction par lambeau libre osseux offrent non seulement un bénéfice fonctionnel et esthétique à ces patients souvent jeunes mais permettent également au chirurgien d’effectuer sans « contrainte » une exérèse très au large. Shusterman et al. ont montré que le fait d’avoir la possibilité d’utiliser un lambeau libre osseux améliorait la qualité histologique de la résection osseuse mandibulaire [80]. Tous les auteurs s’accordent pour réaliser la reconstruction dans le même temps que l’exérèse, cette stratégie permettant une restitution « ad integrum » de la morphologie et de la fonction. Enfin, il n’est pas anodin de disséquer à nouveau ces régions car on s’expose à une atteinte du nerf mentonnier, voire du tronc du facial en cas de reprise après désarticulation [104].
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Quel que soit le lambeau libre osseux utilisé, la reconstruction mandibulaire est réalisée selon quelques grands principes communs à toutes les équipes : modèle moulant l’arc mandibulaire avant résection, procédure de blocage du ou des moignons mandibulaires avec le maxillaire supérieur maintenu pendant toute la durée des ostéosynthèses et enlevé en fin d’intervention, début des ostéotomies et ostéosynthèses à l’aide du modèle mandibulaire au niveau du site donneur avant ligature du pédicule. Lorsque la tumeur est très exophytique (sarcomes) les mesures sur la pièce sont difficiles. Il est alors utile de disposer d’une scanographie préopératoire en trois dimensions, qui donne les mesures (angles et longueur) de la mandibule saine controlatérale. 4.2. Reconstruction du maxillaire supérieur La reconstruction de l’étage moyen de la face a bénéficié grandement du développement des lambeaux chimériques. Les pertes de substance de cette région sont en trois dimensions et demandent l’apport de plusieurs composantes tissulaires indépendantes les unes des autres [105,45]. L’unité de base de l’anatomie de l’étage moyen de la face peut être résumée en la superposition de trois plans tissulaires fondamentaux : un plan muqueux profond tapissant une structure osseuse et cartilagineuse, elle-même protégée de l’extérieur par un plan cutané. Le respect de cette organisation architecturale lors de la reconstruction, s’il n’est pas systématiquement réalisable, doit cependant être recherché dans le plus grand nombre de cas. Comme nous le verrons plus tard, cette règle ne doit pas s’appliquer aux parties volumineuses et étendues comme les cavités sinusiennes, notamment du maxillaire supérieur. Le comblement de celles-ci lors de la reconstruction doit au contraire être privilégié [17]. Cependant, pour des structures plus fines, la reconstruction en trois plans est la solution idéale. Cette approche doit être privilégiée dans les cas de reconstruction palpébrale, nasale [9,58] ou encore labiale [11]. Comme nous l’avons vu, la complexité de l’architecture de l’étage moyen de la face et la présence de nombreuses cavités aériennes ne permet pas de respecter dans tous les cas la règle de reconstruction en trois plans. Pour ces régions, le but de la reconstruction est d’assurer un comblement de l’espace mort afin d’éviter les régions de turbulences aériennes et de stase ainsi que la restitution des piliers principaux. Deux approches principales ont été décrites dans la littérature : • théorie du carré : Coleman [17] a réduit le sinus maxillaire à quatre côtés fondamentaux : le rebord orbitaire inférieur, le mur sinusonasal, le palais, le contrefort zygomaticomalaire. Le centre du carré est à combler. Le seul élément osseux à remplacer obligatoirement est le rebord orbitaire et son plancher. Les autres limites peuvent être recréées par des tissus mous ; • théorie des piliers et contreforts [44,106] : Yamamoto et al. [106] ont proposé une approche plus biomécanique en restituant les piliers principaux de l’étage moyen de la face
à chaque fois qu’ils sont interrompus. En effet, chacun d’entre eux conditionne une partie primordiale de la projection de la forme et des contours de l’étage moyen de la face. Le pilier zygomaticomaxillaire conditionne la hauteur externe du visage et notamment sert de soutien aux tissus jugaux. Le pilier frontomaxillaire donne la hauteur médiale de la face et définit la base d’implantation de la pyramide nasale. Enfin, le pilier ptérygomaxillaire sert de soutien au palais et à l’arcade dentaire supérieure. L’une des questions les plus débattues est de choisir sous quelle forme ces structures osseuses doivent être apportées : greffon osseux ou os vascularisé. La limite des indications bien que floue peut cependant être précisée par un certain nombre de paramètres. Les principaux sont l’importance des forces et des contraintes infligées à l’os, l’importance de la contamination par l’air ou la salive, enfin la notion d’irradiation pré- ou postopératoire. Lorsque la structure osseuse reconstruite est soumise à des contraintes biomécaniques faibles dans un territoire ne risquant pas d’être au contact avec la cavité buccale ou nasale et que la zone à reconstruire n’a pas été irradiée ou ne le sera pas après la chirurgie, l’apport d’un greffon osseux est concevable et même préférable. Cela s’applique principalement à la reconstruction du rebord orbitaire inférieur et de son plancher. Lorsque l’os doit à la fois soutenir d’importantes forces de pression, au contact de l’air et de la salive dans un territoire irradié, le taux de risque d’échec d’un greffon osseux dépasse 70 à 80 % et le matériel doit être apporté sous forme de greffon libre. Le cas de la reconstruction de la voûte palatine est l’exemple caractéristique. Il devient clair que la reconstruction de l’étage moyen de la face est tridimensionnelle. Les impératifs de reconstruction osseuse, de comblement des espaces morts et de restitution du volume demandent des lambeaux composites dont les différents constituants ont un grand degré d’indépendance. Notre expérience nous a conduit à privilégier deux lambeaux donneurs d’os vascularisés. La région scapulodorsale [27,32,77,93,95,96], zone donneuse du lambeau de grand dorsal, est la seule à permettre le prélèvement de plusieurs tissus différents, indépendants les uns des autres et vascularisés par le même pédicule vasculaire. Les vaisseaux sub-scapulaires se divisent rapidement en thoracodorsaux et circonflexes scapulaires à partir desquels peuvent être prélevés simultanément le lambeau musculocutané de grand dorsal, le fascia du grand dentelé, le muscle grand dentelé et sa côte vascularisée, l’angle de l’omoplate, deux lambeaux fasciocutanés scapulaire et parascapulaire et le bord latéral de l’omoplate. L’inconvénient majeur de ce lambeau réside dans les variations anatomiques de son pédicule vasculaire qui demande une adaptation de la stratégie de reconstruction peropératoire. Le lambeau composite de péroné [2,6,26,25,71,74,47] : décrit en reconstruction maxillofaciale dans les indications de mandibulectomie par Hidalgo [37], il a vu ses indications s’étendre à l’ensemble de la reconstruction de la tête et du cou. Son avantage principal est de procurer la plus longue
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baguette osseuse vascularisée disponible sur le corps humain. Ses indications dans la reconstruction de l’étage moyen de la face sont réservées au remplacement de la totalité de la voûte palatine ou aux pertes de substance combinées du maxillaire supérieur et de la mandibule. Au contraire de la région scapulodorsale, l’indépendance de ses différents constituants tissulaires est limitée notamment en ce qui concerne sa palette cutanée. Le développement des techniques de reconstruction microchirurgicale ne doit cependant pas faire omettre les cas où la microchirurgie ne peut être proposée. Les lambeaux de la région temporopariétale permettent de disposer d’une source de tissus indépendants prélevés localement et sont particulièrement indiqués dans ces situations [18,23,37,49,73,108]. Quatre lambeaux prélevés sur deux pédicules vasculaires différents sont à notre disposition. Sur les vaisseaux temporosuperficiels, les lambeaux de fascia temporopariétal, fascia innominé et fascia temporal, ont été décrits. Ils sont fins et plastiques, particulièrement indiqués dans les cas de couverture superficielle. Sur le pédicule maxillaire interne, le muscle temporal permet de disposer d’un lambeau volumineux adapté dans les indications de comblement. Un os calvarien vascularisé peut être associé à ces lambeaux. Certaines exérèses impliquent l’interruption de la base du crâne. Dans ces cas, la reconstruction demande une fermeture étanche de celle-ci. En effet, la fermeture étanche du cerveau est l’élément fondamental et vital de la reconstruction de l’étage moyen de la face lors de son effraction. La survenue d’une fuite de liquide céphalorachidien peut compromettre le pronostic vital en favorisant le développement de méningites. Les indications techniques et les lambeaux varient en fonction de la localisation et de l’étendue de la perte de substance. Le remplacement du plan duremérien peut être assuré par un feuillet aponévrotique prélevé localement sous forme d’un greffon galéopériosté ou par l’aponévrose du fascia lata. La suture doit être totalement étanche, assurée par des points rapprochés et complétée par l’utilisation d’une colle biologique. Ces techniques ont l’avantage d’utiliser des tissus autologues. La reconstruction de la structure osseuse de la base du crâne ne nécessite que fort rarement l’apport de greffon osseux et peut être remplacée par des tissus mous hernie du cortex cérébral vers le bas. Au contraire, l’apport d’os est déconseillé car il augmente les risques d’infection. L’étage antérieur de la base du crâne n’engendre le plus souvent que des pertes de substance limitées qui pourront être fermées par des lambeaux locorégionaux et particulièrement le lambeau galéofrontal ou les lambeaux de la région temporopariétale. Il en va de même pour les interruptions des étages moyen et postérieur. Lorsque l’interruption de la base du crâne s’étend à deux étages, elle est le plus souvent associée à des exérèses étendues des structures de l’étage moyen de la face. De vastes cavités sont alors à combler par des lambeaux volumineux et épais qui sont amenés sous forme de lambeaux libres [3,13,14,76,81]. Les lambeaux de grand droit de l’abdomen et de grand dorsal sont utilisés par la majorité des équipes.
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Le palais représente une frontière inférieure mais ne demande pas comme la base du crâne une fermeture étanche. Son remplacement par des tissus autologues n’est également pas systématique et les indications de sa reconstruction dépendront du type et de la localisation de la perte de substance ainsi que d’autres facteurs associés. Une interruption du cadre osseux du maxillaire supérieur représente le cas d’une résection classique de l’infrastructure, qui correspond à une interruption du pilier ptérygomaxillaire. Lorsque l’interruption de la voûte palatine ne franchit pas la ligne médiane, l’appareillage du patient par une prothèse palatine associée à une balle obturatrice est depuis longtemps le traitement de choix et demeure toujours la meilleure option pour le patient. L’absence de dents sur l’hémiarcade controlatérale est un facteur associé poussant à la reconstruction osseuse de la perte de substance afin de proposer au patient une réhabilitation dentaire par implants osseux. Dans les cas d’exérèse franchissant la ligne médiane, s’étendant au plancher des fosses nasales et au-delà, l’appareillage prothétique devient plus difficile et moins bien toléré par le patient. Ils représentent les indications électives de reconstruction par greffon osseux vascularisé compte tenu, comme nous l’avons dit précédemment, de l’importance des forces appliquées à l’os et au milieu septique environnant. Une reconstruction subtotale est l’indication du greffon d’angle de l’omoplate mais lorsque l’exérèse s’étend à la totalité du palais, nous avons l’habitude d’utiliser le lambeau libre de péroné. Dans le cas d’une résection palatine avec respect du cadre osseux du maxillaire supérieur, l’exérèse emporte le palais membraneux ou la portion centrale du palais osseux. Aucun pilier principal de soutien de l’étage moyen de la face n’est interrompu, ce qui explique que l’apport de greffon osseux n’est pas indispensable. Les problèmes principaux posés par ces pertes de substance sont leur appareillage et l’insuffisance vélaire qui en découle. La fermeture de la communication bucco-sinusienne est au mieux assurée par un greffon cutané vascularisé qui cherchera également à rétrécir la communication entre le rhinopharynx et l’oropharynx. Le lambeau antébrachial est l’option la plus souvent utilisée dans ces indications. Il possède le double avantage de procurer un long pédicule vasculaire afin de réaliser une microanastomose au niveau du cou et d’être fin et pliable pour restaurer à la fois le plan muqueux endobuccal et endonasal. Il sera complété par une plastie pharyngée postérieure qui réduira la voie de passage rhino-oropharyngée. L’utilisation du muscle temporal est une alternative aux techniques microchirurgicales. La reconstruction de l’étage moyen de la face est donc complexe et doit faire appel à de nombreuses techniques. La difficulté est de choisir les mieux adaptées et de savoir les panacher. Les règles fondamentales de reconstruction de l’étage moyen de la face sont une base qui permet d’envisager un certain nombre de cas que la classification aura présenté d’une manière synthétique. Elles répondent principalement au problème de revêtement cutané, de restauration des frontières supérieure et inférieure et au remplacement de l’infrastructure ostéocartilagineuse.
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La restitution des fonctions et des organes hautement spécialisés de la face fait appel à de nombreuses techniques appartenant à plusieurs disciplines chirurgicales dont les résultats sont dans certains cas médiocres et les limites nombreuses. Les principales fonctions à restaurer sont la région orbitopalpébrale impliquée dans la vision, la pyramide nasale et les voies aériennes supérieures impliquées dans la respiration, la région jugale qui joue un rôle dans l’expression du visage, la mobilité labiale et la sensibilité de l’étage moyen, enfin la région labiale supérieure essentielle dans la mastication. La restauration de ces fonctions est souvent impossible et il faudra faire appel aux possibilités du remplacement prothétique et épithétique. Cette spécialité à part entière est bien sûr en première ligne dans de la restauration fonctionnelle après résection de l’infrastructure. La confection de prothèses occlusives endobuccales est essentielle pour l’amélioration des fonctions masticatoire, phonatoire et respiratoire. Mais cette spécialité permet également de pallier les insuffisances de la chirurgie reconstructrice et prend une place considérable dans l’amélioration de la qualité de vie des malades opérés de l’étage moyen de la face. Elle est également impliquée comme complément indispensable de la prise en charge esthétique par l’intermédiaire de la confection de prothèses et d’épithèses notamment oculaires ou nasales.
5. Prise en charge des pertes de substances des organes fonctionnels La tête et le cou renferment des organes aux fonctions uniques et complexes. Si leur reconstruction demeure encore loin d’être parfaite, la prise en charge de leur perte de substance a également bénéficié de l’évolution de la chirurgie reconstructrice. 5.1. La réparation du pharyngolarynx 5.1.1. Chirurgie partielle du pharyngolarynx La majorité des interventions partielles du pharyngolarynx font appel à des procédés de pexie entre les structures pharyngolaryngées restantes et ne nécessitent pas de procédé de reconstruction. Seules les interventions d’exérèse des cancers de la paroi pharyngée postérieure et latérale avec conservation du larynx nécessitent souvent une réparation. En effet lorsque la résection de la muqueuse pharyngée postérieure est étendue à la paroi latérale d’un ou des deux sinus piriformes, la large brèche pharyngée doit être reconstruite pour éviter les fuites salivaires et permettre la réalimentation. Le fait de conserver le larynx impose de choisir un lambeau très fin afin de ne pas rétrécir le néopharynx ce qui aurait pour conséquence des fausses routes majeures sources de pneumopathies sévères. Le lambeau de peaucier et surtout le lambeau antébrachial radial (plus fiable) sont les plus utilisés dans ce type d’indication [40]. La réhabilitation fonctionnelle après ce type d’intervention est souvent longue et il n’est pas rare qu’il faille attendre quelques mois après la fin de la radiothé-
rapie pour obtenir une alimentation orale exclusive. Cependant, compte tenu des difficultés d’irradiation de cette localisation et de son pronostic redoutable, le traitement chirurgical suivi de radiothérapie postopératoire est justifié par un meilleur contrôle local des lésions étendues et la possibilité de conserver le larynx grâce aux techniques de reconstruction [40]. 5.1.2. Reconstruction laryngée comme alternative aux pharyngolaryngectomies totales pour les tumeurs justiciables d’une pharyngolaryngectomie totale Dans les tumeurs latéralisées avec hémilarynx fixé, il peut être carcinologiquement possible de réaliser une chirurgie emportant l’hémilarynx y compris l’hémicricoïde. C’est le principe de la near total laryngectomy décrite par Pearson et al. [69]. Les patients sont alors porteurs d’un trachéostome définitif et présentent une voix de shunt. Cependant, plutôt que de réaliser un shunt, il est possible, chez des patients très sélectionnés, de reconstruire l’hémilarynx restant afin de restituer la filière laryngée. Cela permet de fermer la trachéotomie et la voix obtenue sera de meilleure qualité [33,99]. Cette technique ne peut s’appliquer qu’aux patients en bon état général chez lesquels il est possible carcinologiquement de préserver au moins un hémicricoïde et un hémicartilage thyroïde. Elle peut être proposée d’emblée aux patients porteurs d’une tumeur du sinus piriforme classée T3 ou T4 (lyse cartilagineuse modérée et latéralisée) ou en cas de non-réponse à la chimiothérapie. La reconstruction est réalisée grâce à un lambeau antébrachial microanastomosé dans lequel on positionne éventuellement, entre la peau et le tissu sous-cutané, un greffon cartilagineux costal. L’ensemble va reconstituer la face interne de l’hémilarynx et l’extrémité de la palette cutanée va reconstruire la muqueuse du sinus piriforme réséquée. Les résultats fonctionnels des séries publiées paraissent très encourageants avec plus de 80 % des patients à qui on a ôté la canule et qui ont repris une alimentation orale. 5.1.3. Pharyngolaryngectomie totale circulaire (PLC) avec œsophagectomie totale Deux procédés de reconstruction sont utilisés pour l’axe digestif : l’estomac, tubulisé ou non, est le procédé de réparation le plus courant. Celui-ci est ascensionné dans le médiastin postérieur jusqu’à la région cervicale. Son extrémité est suturée à l’oropharynx. Cependant, la conformation de certains patients ne permet pas toujours d’effectuer cette suture sans tension ce qui expose à un risque de fistule salivaire cervicale. Le côlon est utilisé comme procédé de réparation lorsque le tube gastrique est de longueur insuffisante ou en cas de gastrectomie antérieure. En effet, la dissection du côlon est plus complexe et sa vascularisation plus précaire. Son utilisation augmenterait le taux de complications postopératoires et la mortalité [108]. 5.1.4. Pharyngolaryngectomie totale circulaire Les lambeaux libres microanastomosés sont de plus en plus couramment utilisés pour la réparation de l’axe digestif car
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ils permettent une reconstruction en un temps et une réhabilitation en règle rapide de la déglutition [21,72]. Le lambeau libre de jéjunum est le plus utilisé. Les taux de mortalité de cette intervention dans les séries importantes sont faibles, entre 2 et 4 % [43,78]. La morbidité est dominée par les pneumopathies en rapport avec la laparotomie chez des patients souvent bronchitiques et insuffisants respiratoires. Les taux de nécrose du transplant jéjunal sont de 5 à 8 % [30,39,43,70]. Le délai moyen de reprise de l’alimentation est de 11 à 16 jours, la durée moyenne d’hospitalisation de 16 à 27 jours selon les séries [39,75]. La tolérance à la radiothérapie postopératoire est bonne, n’augmentant pas le risque de sténose ou de fistule. La majorité des patients retrouve une alimentation orale exclusive, en revanche, les résultats de la rééducation vocale sont extrêmement médiocres [16,39,70]. Le transplant libre antébrachial représente un second choix dans ce type de réparation. Il a deux intérêts essentiels : sa fiabilité [20,83] qui est plus importante que celle du jéjunum, notamment chez les patients artéritiques, et le fait d’éviter une laparotomie ce qui diminue le risque de complications pulmonaires. Le lambeau latéral de cuisse est également utilisable dans ce type de réparation [63]. Il permet de prélever une large palette fasciocutanée vascularisée par des pédicules perforants provenant de l’artère fémorale profonde. La surface de la palette est plus importante que celle du lambeau antébrachial et le résultat esthétique moindre mais, en pratique, ces lambeaux ne sont utilisables que chez l’homme de faible corpulence car sinon ils sont trop épais pour être tubulisés. Les lambeaux pédiculés musculocutanés thoraciques sont de moins en moins utilisés dans cette indication. Il s’agit essentiellement du grand pectoral et surtout du grand dorsal. Ce dernier est plus plastique et peut être soit totalement tubulisé, soit positionné en fer à cheval sur l’aponévrose prévertébral. Cette aponévrose est laissée cruentée ou est recouverte d’une greffe de peau selon la technique décrite par Fabian [24]. La mise en place d’un tube de Montgomery diminuerait le risque de fistule salivaire. La technique en deux temps dérivée de la technique de Wookey [104] et appelée de « triple stomie » fait également appel aux lambeaux myocutanés thoraciques : après exérèse, la peau cervicale est appliquée sur l’aponévrose prévertébrale. On confectionne trois stomies (orostome, œsophagostome, trachéostome). Au moins trois semaines plus tard la peau cervicale est tubulisée et suturée à la berge antérieure de l’œsophage en bas, à l’oropharynx en haut. L’ensemble est alors recouvert par un lambeau myocutané thoracique dont la palette cutanée reconstitue la peau cervicale. Chez les patients fragiles ou en cas de mauvaise surprise opératoire, cette technique peut rendre de grands services. Cependant, elle présente l’inconvénient majeur de nécessiter deux temps opératoires et une hospitalisation prolongée et inconfortable pour le patient. Que ce soit en un ou deux temps, les techniques utilisant les lambeaux cutanés ou myocutanés, qu’ils soient libres ou non, exposent à un risque plus important de fistule et de sténose que les lambeaux digestifs [4,65].
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5.2. Réparation de la langue La langue est un organe hautement spécialisé et de structure unique. Une reconstruction « ad integrum » est dès lors impossible. Pour reconstruire la langue au mieux il faut en comprendre la physiologie. La place de la langue dans la phase pharyngée a été longtemps sous-estimée jusqu’au travaux de Mc Connel et al. [52]. Aguilar et al. [1], dans leur article de synthèse sur les problèmes de déglutition chez les patients opérés de la tête et du cou, ne citaient que les interventions sur le larynx comme cause de dysphagie par atteinte de la phase pharyngée. Cependant, la base de la langue a un rôle essentiel dans le bon déroulement de cette phase. Staple et Ogura soulignaient dès 1966 l’importance du volume et de la mobilité de la base de langue afin d’assurer un bon contact avec l’épiglotte et la paroi postérieure du pharynx. L’importance de ce mouvement postérieur de la langue était encore soulignée par Bocca et al. et par Lange et Beck [68]. Des éléments associés à l’exérèse de la base de langue viennent aggraver l’importance de la dysphagie. La perte de la sensibilité du larynx par interruption des nerfs laryngés supérieurs augmente le risque de fausse route pour la majorité des auteurs sauf Bocca et al [7]. La conservation de ces nerfs est donc essentielle pour diminuer le risque de fausses routes. La perte du mouvement d’élévation du larynx qui vient appliquer l’épiglotte à la base de langue a déjà été soulignée par Goode [31]. L’exérèse de la base de langue associée à l’impossibilité d’élévation du larynx élimine les deux mouvements opposés assurant la protection du larynx et augmente les risques de fausses routes. L’élévation du larynx est assurée par les muscles sus-hyoïdiens qui forment une véritable bande de soutien sous-mandibulaire tendue entre l’os hyoïde et l’arche mandibulaire. Les muscles formant cette bande sont le mylohyoïdien, le géniohyoïdien, le génioglosse, le thyrohyoïdien et le digastrique. À l’exception du muscle thyrohyoïdien, les autres font souvent partie de l’exérèse carcinologique notamment lors des glossectomies totales. Devant ces handicaps, le patient met en place des mécanismes compensatoires. Ils sont nombreux et extrêmement divers et permettent une très grande et variable aptitude d’adaptation d’une exérèse et surtout d’un patient à l’autre. Ils peuvent être regroupés en mécanisme contournant le déficit, mécanisme renforçant une des fonctions amputées, apprentissage à prendre son temps. Tous ces mécanismes d’adaptation sont contraignants pour le patient et le but ultime de toute rééducation sera de lui permettre d’atteindre un niveau de confiance et de fonction suffisant pour se nourrir en société aussi bien à la maison qu’au restaurant. La connaissance de ces mécanismes compensatoires influence le geste de reconstruction. Ce dernier cherchera à redonner du volume à la base de langue restante afin de restaurer partiellement la pression positive de la force de propulsion linguale. Ce volume doit être stable dans le temps et le choix du lambeau doit dépendre de ce paramètre. De plus, cet apport de volume doit être associé à une technique de suspension laryngée ainsi que le soulignait Sultan [84].
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Depuis, de nombreux auteurs ont décrit et raffiné cette technique de suspension [28,50,79,84,94,107]. Elle doit privilégier l’attachement sur l’os hyoïde si c’est possible et se fait entre ce dernier et l’arche mandibulaire par l’intermédiaire d’aponévroses ou de tendons prélevés avec le muscle du lambeau utilisé pour la reconstruction. À côté des troubles de déglutition, le patient a des troubles de l’élocution. Peu de travaux se sont consacrés aux troubles de l’élocution liés à la résection de la base de langue tant il est vrai que les défauts de prononciation sont souvent rattachés aux lésions de la langue mobile. Cependant, le volume apporté par la base de langue est essentiel au contact indispensable linguopalatin. De la même manière, peu d’informations sont disponibles sur les mécanismes d’adaptation de l’élocution spécifiques à la base de langue. Ils peuvent cependant être catégorisés de la même manière entre mouvements adaptatifs de la langue restante et articulation compensatoire des structures paralinguales restantes. Le volume de la base de langue prime cette fois dans la récupération d’une phonation correcte. Cependant, la motricité de cette langue est également importante. L’apport d’un nerf moteur avec le muscle transféré et la réalisation d’une microanastomose nerveuse devraient être évalués en même temps que la qualité de l’élévation laryngée. L’association des séquelles décrites précédemment est responsable d’un niveau de perte fonctionnelle souvent insurmontable pour le patient dont l’expression sera incompréhensible et la déglutition impossible ou dangereuse devant l’importance des fausses routes. Les résultats fonctionnels sur la déglutition ne sont pas excellents puisque un grand pourcentage de patients se voit contraint de se nourrir par sonde de gastrostomie et que d’autres nécessitent une réintervention à type de laryngectomie pour fausses routes itératives. L’adaptation de l’élocution est souvent possible, la perte de l’action de propulsion de la langue est compensée par l’action puissante de la musculature buccale, l’inclination du nouveau plancher buccal, la prédominance de la force de propulsion de la musculature pharyngée postérieure et du palais mou. L’exagération de la phase pharyngée de la déglutition compense la perte de l’action de propulsion de la langue. Cependant, les résultats fonctionnels demeurent médiocres et sont principalement liés à l’étendue de l’exérèse linguale et non aux lésions des structures associées, ce qui montre que la perte de la structure linguale semble prédominer sur la perte de la mobilité des structures restantes. La reconstruction cherchera à associer le plus de paramètres possibles afin d’éliminer les séquelles les plus importantes qui sont dominées par les fausses routes. Le lambeau devra apporter un volume stable, une possibilité de suspension laryngée satisfaisante et être sensible. En revanche, la recréation d’un sillon pelvilingual peut avoir un résultat négatif en augmentant l’effet de « pooling » antérieur. En effet, il ajoute une niche supplémentaire dans la cavité buccale qu’aucune structure ne permettra de nettoyer. C’est lors des exérèses subtotale et totale de langue qu’un certain nombre de structures de voisinage peuvent être lésées. Cependant, certaines sont
plus importantes que d’autres à préserver. Tous les auteurs s’intéressant à la reconstruction de la langue, hormis Bocca et al. [7], ont souligné l’importance de préserver les nerfs laryngés supérieurs. Edgerton et Duncan [22] ont été les premiers à souligner leur importance dans la récupération de la déglutition après glossectomie totale en les présentant comme le chien de garde du larynx. Depuis, de nombreux auteurs ont confirmé leur importance [67,84]. La préservation de la sensibilité du palais et du pharynx est également importante car elles peuvent représenter les dernières structures sensibles de la cavité buccale. Cela explique que l’effet bénéfique de la prothèse palatine sur le contact langue–palais peut être inférieur à son inconvénient majeur qui est de cacher une des dernières zones sensibles. L’extension tumorale peut pousser à la réalisation d’interruption de la symphyse mandibulaire. La restauration de l’arche mandibulaire doit précéder toute reconstruction linguale [100]. Enfin, les complications associées aux larges exérèses de langue, notamment les fausses routes, ont poussé à la réalisation de gestes associés dont l’efficacité est diversement appréciée encore aujourd’hui. Parmi ces techniques, on peut citer la myotomie cricopharyngée, l’épiglotopexie, la laryngoplastie. Pour guider le geste de reconstruction et le type de lambeau à utiliser, un regroupement en famille des pertes de substance peut être proposé. 5.2.1. Pertes de substances de moins du quart de la langue, de la moitié de la langue mobile ou de la base de langue Comme nous l’avons vu, la mobilité des tissus linguaux restants doit être la priorité de la reconstruction. Les travaux de McConnel et al. [15,48,52–56] ont montré que ce type de patient ne bénéficie pas d’une reconstruction et notamment par lambeau libre. La cicatrisation dirigée ou l’utilisation de greffes cutanées ou lambeaux de langue locaux permettent d’avoir les meilleurs résultats fonctionnels. 5.2.2. Pertes de substances de moins du quart de la langue emportant le plancher latéral ou antérieur L’exérèse associée du plancher buccal peut être responsable d’une brise si le bord cruenté de la langue est suturé à la perte de substance latérale ou antérieure. Le sillon pelvilingual doit absolument être recréé et un apport de sensibilité est préférable. Le lambeau chinois resensibilisé semble adapté à ces pertes de substances. 5.2.3. Pertes de substances de plus de la moitié de la langue mobile Les mêmes risques mais accrus sont rencontrés dans ces pertes de substances. De plus le volume de langue mobile résiduelle ne suffit plus à l’alimentation et à une élocution acceptable. Le lambeau chinois avec une palette bifoliée (Fig. 5) décrit par Urken et Biller [98] est indiqué. Il sera si possible resensibilisé. 5.2.4. Pertes de substances de toute la langue mobile Sensibilité et mobilité sont les deux points principaux de cette reconstruction. Le volume bien qu’important n’est pas
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Fig. 5. Lambeau antébrachial bifolié selon Urken et al. [98].
essentiel et surtout ne doit pas compromettre la mobilité restante provenant de la base de langue. La mobilité est assurée en recréant le sillon pelvilingual. La sensibilité est redonnée par une anastomose nerveuse entre nerf lingual et nerf du lambeau utilisé pour la reconstruction. Le lambeau chinois est encore le lambeau de choix pour cette reconstruction. 5.2.5. Pertes de substances plus de la moitié de la base de langue La restauration du volume domine cette perte de substance. Celui-ci doit être stable dans le temps. Un lambeau chinois avec une composante faciale pure repliée sur ellemême permet d’apporter suffisamment de volume. Un lambeau musculocutané avec suspension laryngée et anasto-
mose motrice est plus indiqué lorsque la perte de substance est plus importante et a emporté dans sa totalité la moitié des muscles de la base de langue et les muscles sous-hyoïdiens. 5.2.6. Pertes de substances de toute la base de langue Le volume et la motricité sont les éléments dominants pour reconstruire la base de langue. Le volume est apporté par un lambeau musculocutané ou graissocutané comme le lambeau de grand droit (Fig. 6). Il doit être stable dans le temps. La motricité doit comporter deux composantes : • la suspension laryngée qui se fait entre l’os hyoïde et l’arche mandibulaire antérieure par une bandelette aponévrotique prélevée avec le lambeau ;
Fig. 6. Lambeau de grand droit de l’abdomen pour la reconstruction des glossectomies totales. Suspension laryngée par l’aponévrose du grand droit. Volume par le pannicule abdominal et contraction par anastomose du nerf moteur du grand droit sur le XII (d’après Lyos et al. [99] et Yamamoto et al.).
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• la réanastomose nerveuse motrice entre le nerf grand hypoglosse et le nerf du lambeau. Un lambeau musculocutané contenant un nerf moteur et à forte constitution adipeuse est indiqué pour cette reconstruction. Le lambeau de grand droit semble indiqué dans cette reconstruction. 5.2.7. Pertes de substances subtotale et glossectomie totale Les reconstructions de glossectomie totale reposent sur les mêmes principes que ceux de la base de langue. Une composante sensitive serait appréciable. Cette reconstruction doit donc essayer d’associer : • un volume stable dans le temps ; • une motricité avec suspension laryngée et anastomose nerveuse motrice et enfin ; • une sensibilité avec anastomose nerveuse. L’un des seuls lambeaux permettant de disposer à la fois de peau, de graisse, de muscle, d’une aponévrose, d’un nerf moteur et d’un nerf sensitif est le lambeau de grand droit [50,107]. Cette technique mériterait donc d’être développée. La reconstruction a encore de grands progrès à effectuer, surtout dans le cas des glossectomies totales avant de pouvoir permettre au patient de récupérer une fonction acceptable. Cependant ce domaine de la reconstruction n’a de raison d’être qu’à travers les indications de chirurgies d’exérèse. À l’heure actuelle, de nouveaux protocoles de radiothérapie et de chimioradiothérapie semblent prometteurs. L’évaluation des résultats carcinologiques entre chirurgie en première intention et radiothérapie est indispensable pour justifier une chirurgie d’exérèse élargie. Si la chirurgie prouvait sa supériorité sur la radiothérapie, l’amélioration des techniques de reconstruction de la langue serait nécessaire. Les avantages des lambeaux libres sur les lambeaux locorégionaux pédiculés comportent plusieurs aspects. Tout d’abord, une plus grande plasticité des lambeaux libres qui assurent une plus grande mobilité. Ensuite, la possibilité de resensibilisation de la palette cutanée des lambeaux libres. Enfin, une plus grande motricité des lambeaux libres qui permettent une suspension laryngée de qualité sans chute gravitationnelle et possibilité de réinnervation motrice. Cependant, aucun lambeau n’arrive à réunir toutes les qualités requises pour la reconstruction de la langue : sensibilité, mobilité, lubrification, goût, volume et motricité.
• l’allotransplantation. Des greffes de larynx et de langues ont été tentées mais cette voie est limitée par les problèmes de rejet et de don d’organe ; • le bio-engineering qui est limité pour l’instant par la législation sur les cellules souches, la culture de tissus embryonnaires et le clonage. Cependant des avancées notables ont été présentées. Récemment, une équipe allemande a reconstruit une mandibule néoformée à partir d’un muscle autologue.
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6. Conclusion La chirurgie reconstructrice a fait de grands progrès ces 20 dernières années et ceux-ci ont profité au domaine de l’oncologie cervicofaciale. L’introduction et le développement des lambeaux ont été des éléments déterminants. Cependant, il semble que nous arrivions aux limites des possibilités offertes par la reconstruction par tissus autologues. Nombres d’auteurs se sont engagés vers de nouvelles voies que l’on peut regrouper en deux axes :
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