C. R. Acad. Sci. Paris, t. 324, S&ie I, p. 61-66, 1997 CZom&rie alg~brique/Algebraic Geometry
Cohomologie enti&re de certaines vari&Ss toriques complexes lisses de dimension trois Nicolas
POUYANNE
,
Departement
de Mathbmatiques,
Universit6
45, avenue des Etats-Unis, 78035 Versailles E-mail:
[email protected]
R&urn&
de Versailles - Saint-Quentin, CEDEX
France.
On montre que les groupes de cohomologie entibre d’une variCtC torique lisse de dimension trois sont libres (et on calcule leurs rangs), sous l’hypothhse que son &entail a une section spherique homkomorphe au disque fermt. Cela s’applique au cadre de la correspondance de McKay en dimension trois, et &pond partiellement au probltme de la torsion de la cohomologie entiere dans une conjecture de Reid [3].
Integral
Abstract.
cohomology
of some smooth complex
toric S-folds
It is shown that the integral cohomology groups of a smooth complex 3-dimensional to& variety arejke (and we compute their dimensions), under the assumption that the spherical section of its fan is homeomorphic to a closed disk. As a consequence, this gives a partial positive answer to the torsion problem in a conjecture of Reid [3] about McKay correspondence in dimension 3.
Abridged English Version 1. Main
theorem
Whenever intersection
C is a fan in a 3-dimensional lattice, the spherical section of C is defined of the support of C with the unit sphere S2 of N @z R (centered at zero).
as the
THEOREM 1. - Let X be a smooth complex toric S-dimensional variety. Zf the spherical section of its fan C is homeomorphic to a disk D2, then: (i) the group H’J(X, Z) isfreefor all q E N; if q is 1, 3 or 2 5, this group is trivial. (ii) Let A be the number of edges in the l-skeleton of C, and I the number of edges of the l-skeleton of C which belong to the interior of the support of C. Then,
rkH’(X,
Z) = 1;
rkH2(X,Z)
=A-3
and
rkH4(X, Z) = I.
The triviality of H’ is well known ([2]: the ~1 is trivial); the main fact is the freeness of these groups. Note p&e&e
par Bernard MALGRANGE.
0764~4442/97/03240061
0 Acadhie
des Sciences/Elsevier,
Paris
61
N. Pouyanne
The proof, not presented in this Abridged English Version but complete in the main text, is based on elementary toric geometry and the Mayer-Vietoris long exact sequence. The assumption on the spherical section of the fan allows an induction on the number of 3dimensional cones of the fan. 2. Three-dimensional
McKay correspondence
for ahelian groups
Let G be a finite subgroup of SL(3, C). The 2-dimensional McKay correspondence [5] looks for a generalization in dimension 3, under the form of the following conjecture of Miles Reid. CONJECTURE. - 1) There exists a crepant resolution X + C3/G; 2) for every crepant resolution X --f C3/G, there exists a basis of H*(X, Z) consisting of algebraic cycles in one-to-one correspondence with the irreducible complex representations of G.
Part 1) has been solved by a number of people, and is an elementary fact for abelian groups. Part 2) has ‘found a positive answer for rational cohomology [3], without anything about torsion of integral cohomology. Theorem 2, an immediate corollary of Theorem 1, precises the situation in the case of abelian groups. Note that if G is abelian, the quotient-singularity C3/G is isomorphic to a (simplicial) toric variety. THEOREM 2. - Let G be an abelianJinite subgroup of SL(3, C). F or every crepant equivariant (i.e. toric) desingularization XC of C3/G, the integral cohomology groups of XC are zero, except (maybe) the following ones:
H”(Xc, Z) = Z;
H2(Xc,
Z) E ZA(C)-3;
H4(Xc, Z) % ZI@),
where A and I are the numbers of theorem 1. One should note that the numbers A(C) and I(C) do not depend on the choice of the toric crepant
resolution XC; they only depend on the group G. It is an elementary fact (with the help of toric geometry) that the number A(C) + I(C) - 2 equals the order of G. 3. Remark on the assumption on the spherical section The topological condition on the spherical section of the fan guaranties that the even cohomology groups vanish. One can easily build examples of smooth complex toric 3-dimensional varieties with non-trivial H3 or H5.
1. tinon&
du thCori?me principal
Si C est un &entail d’un reseau N de dimension 3, on appelle section sphtrique de C l’intersection du support de C avec la sphere unite S2 de N 8~ R centree a l’origine. TH~ORBME 1. - Soit X une varie’te’torique complexe lisse de dimension trois. Si la section sphe’rique de l’kentail C de X est homeomorphe au disque D2, alors : (i) les groupes de cohomologie entibre de X sont libres, et nuls en dimensions 1, 3 et 2 5; (ii) si A designe le nombre d’aretes du 1-squelette de C et I le nombre d’are^tes du 1-squelette de C interieures au support de C, alors
rgH’(X,
Z) = 1;
rgH2(X,Z)
=A-3
et
rgH4(X, Z) = I.
L’information principale de ce theoreme reside en la liberte de ces groupes. La trivialite du H1 est bien connue : ces variCtt5s sont simplement connexes [2]. 62
Cohomologie entibe de certaines variCt& toriques complexes lisses de dimension trois
La preuve du theoreme 1, presentee au paragraphe 4, s’appuye sur le lemme topologique du paragraphe 3. Elle n’utilise que la geometric torique tlementaire et la longue suite exacte de Mayer-Vietoris. 2. Correspondance
pour les gruupes abdliens
de McKay en dimension his
Soit G un sous-groupe fini de SL(3, C). Cherchant a gCnCraliser la correspondance de McKay en dimension deux [5], Miles Reid a Cmis la conjecture suivante, sous sa for-me la, plus imprecise : 1) il existe une desingularisation crepante (i.e. qui ne modifie pas la classe canonique) X ---f C3/G ; 2) pour toute desingularisation cmpante X + C3/G, il existe une correspondance bi-univoque entre les representations irreductibles de G et une base de la cohomologie entibre H*(X, Z) forrke de cycles algebriques. Le 1) a tte resolu au cas par cas par plusieurs auteurs (ho, Bertin et Markushevich, Roan) a partir de la classification des sous-groupes finis de SL(3, C). Yukari Ito et Miles Reid ont repondu par l’affirmative au 2) pour la cohomologie rationnelle H*(X, Q) sans element sur la torsion de la cohomologie entiere [3]. Le theoreme 1 permet de preciser la situation dans le cas des groupes abeliens comme suit. 2.1. Dhingularisations
cre’pantes des vari&% toriques simpliciales
Soient N un reseau de dimension trois, et A4 = Homz(N, Z) son reseau dual, conformement aux notations standard de la geometric torique ([4] ou [2]). Par c&e d’un reseau R, on entend cone du R-espace vectoriel R 8~ R. Soit CTun cone simplicial de A!. La variete torique affine X, = Spec C[o n M] est Q-factorielle; soit T son indice. Soit m le vecteur primitif (‘) de A!f valant T sur les vecteurs primitifs des aretes du cone dual Er de 0 [7]. La variete X, est lisse si, et seulement si 6 (ou n) est rkgulier, c’est-a-dire si, et seulement si les vecteurs primitifs des aretes de ir forment une base de N (dans ces conditions, X, est isomorphe a l’espace affine A&). Soit C un &entail qui soit une subdivision reguliere de Er, c’est-a-dire delinissant une desingularisation T : XC + X, de X,. On note ~1, . . . . up les vecteurs primitifs du 1-squelette de C privt des a&es de ti, et VI, . . . . VP les diviseurs tquivariants associes. Les classes canoniques sont alors reliees par la relation [l] :
rKxz = r*(rKx,)
+ &(vj,m)
- r)Vj.
j=l
En particulier, rr est crepante si, et seulement si (vj, m) = T pour tout j. 2.2. Torsion et correspondance
de McKay en dimension trois
Soit G un sous-groupe abelien fini de SL(3, C). 11est alors bien connu que C3/G est isomorphe a une variete torique simpliciale X,, = Spec C[U II M] d’indice un ([4] ou [6]). Le cone dual 5 d’une telle variete admet 0 pour sommet, et s’appuye sur un triangle TO B sommets entiers contenu daus un plan de N d’kquation m = 1, oti m est un vecteur primitif de M. D’aprh 2.1, une subdivision de 5 dtfinit une dtsingularisation crkpante de X, si, et seulement si elle provient d’une subdivision de T, constitute de triangles ClCmentaires (2). Soit C l’tventail d’une telle subdivision. On note N(G) le nombre de points entiers de TO et I(G) le nombre de points entiers intkrieurs ZIT,; la notation est justifite par le fait que ces nombres ne dependent pas du choix de la representation torique X, de C3/G (c& [3] pour une interpretation de ces nombres en termes du groupe G). 63
N. Pouyanne
T&O&ME 2. - Soit G un sowgroupe abklien3ni de SL(3, C). Quelle que soit la dksingularisation crkpante kquivariante XC de C3/G, les groupes de cohomologie entitre de XC sont nuls ci l’exception (kventuelle) des suivants : H’(Xc, Z) 2 z;
H2(Xc, z) g ZN(G)-3;
H4(Xc, z) g ZIcG).
Preuve. - Ce thCo&me est un corollaire direct du th6orcme 1. Remarque. - La formule de Pick donne N(G) + I(G) - 2 = 2.Aire(T,), ce qui confirme que la caract&istique d’Euler de Xc Cgale le nombre de triangles tlCmentaires de la subdivision, c’est-h-dire l’ordre de G.
3. Triangulations du disque fen& Un triangle sphe’rique (de la sph&re S2) est l’intersection d’une sph&e et d’un c8ne simplicial dont le sommet est au centre de la sph&re. Un polygone sphe’rique est une r6union finie connexe de triangles sph&iques (d’une m8me sphhre). LEMME1. - Soit P un polygone sphe’rique homkomorphe au disque fermk D, triangule’ par une famille jinie T d’au moins deux triangles sphe’riques. Alors, il existe t E T tel que l’adhe’rence de P \ t soit encore homkomorphe b D. Preuve. - Au moyen d’un hom6omorphisme, on identifie P B D ; la triangulation de P se transporte ainsi en une triangulation de D. Par point, on entend sommet de la triangulation (de D ou de P). (i) Premier cas : aucune a&e de la triangulation n’est une corde du bord S1 de D. Soit t E 7 dont une a&e soit sur S1. Le troisikme sommet de t est il l’intirieur de D, ce qui impose que D \ t soit homComorphe & D (fig. 1). (ii) Deuxibme cas : au moins une a&e de la triangulation est une corde de S’. 11 n’y a qu’un nombre fini de telles cordes. Soit a une a&e qui soit une corde de S1, et qui tende un arc c de S1 contenant le minimum de points de la triangulation (l’autre arc tendu par a en contient le maximum). Cela signifie que la seule ar&e qui soit une corde entre deux points de c est a. Par deux points passe au plus une a&e ; done c contient au moins un point distinct des extr&nit& de a. Ou bien c contient un seul tel point : il est alors de valence deux (la valence d’un point est le nombre d’ar&es qui en partent). Si t est le triangle de 7 dont les sommets sont les extr&nit6s de a et ce demier point, D \ t est encore homt5omorphe 5 D (fig. 2). Ou bien c contient au moins deux points distincts des extr&nitt% de a. Soit t un triangle de 7 dont une a&e est formke de deux tels points. Par minimalit de a, le troisibme point de t est int&ieur 2 D. Done D \ t est encore homComorphe B D (fig. 3).
6 Fig. 1.
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t ‘6 f3 a
Fig. 2.
Fig. 3.
C
Cohomologie enti&re de certaines varibtbs toriques complexes lisses de dimension trois
4. Preuve du thCorGme 1 On note Cc3) l’ensemble des cones de dimension 3 de C. L’hypothbse entraine que les cones de Cc31 sont simpliciaux, qu’ils definissent des cartes de X isomorphes a C3, et que leur reunion forme le support de C. On pro&de par r&urrence sur le cardinal y de Cc3). Si 7 = 1, la varitte X est isomorphe a l’espace affine C3 ; d’autre part, A = 3 et I = 0. D’oh le resultat. Si y 2 2, le lemme du 3 applique ?I la section spherique de C (qui est un polygone spherique que l’on notera P) foumit un cone cr de C t3) tel que l’tventail C’ forme des faces des c6nes de Cc31\ (0) ait encore une section spherique homeomorphe au disque. On notera A’ et I’ les nombres A et I de C’. On note enfin X’ la variCte torique que delinit C’, et X, l’espace affine de dimension trois defini par U. La cohomologie entiere de X’ est connue par hypothbse de r&rrrence. Soit t le triangle spherique P II B. Au moins une arete de t est necessairement au bord de P. Deux cas peuvent alors se produire : ou bien un des sommets de t est de valence deux dans la triangulation de P dtfinie par C, ou bien tous ses sommets ont une valence supkrieure ou Cgale a trois. (i) Premier cas : t a un sommet de valence deux fig. 4). L’intersection X, rl X’ est un espace afiine complexe de dimension trois prive d’un plan de coordonnkes ; elle se retracte par deformation sur le cercle S1. On rappelle comment s’tcrit la longue suite exacte de Mayer-Vietoris en cohomologie : . .. + H’J(X,Z) + HQ(X’,
Z) $ Hq(X6, Z) + Hq(X’ n X,, Z) --t Hq+l(X, Z)+ ...
Puisque sans torsion, H1(X, Z) est nul. Pour q > 3, Hq(X, Z) g Hq(X', Z). Enfin, H2(X, Z) S H2(X', Z) @ Z. 11ne reste plus qu’a constater que A’ + 1 = A et que I’ = I pour obtenir le resultat. (ii) Deuxi6me cas : tous les sommets de t ont une valence supkrieure ou Cgale a trois (fig. 5). L’intersection X0 n X’ est un espace affine complexe de dimension trois prive d’un axe de coordonnees ; elle se retracte par deformation sur la sphere S3. Toujours g&e a la suite de Mayer-Vietoris, on obtient la nullid de H1(X, Z) et de H3(X, Z) ; que HQ(X, Z) G?Hq(X’, Z) pour q = 2 et q 2 5 ; enfin que H4(X, Z) F? H4(X’, Z) $ Z. Comme A’ = A et I’ + 1 = I, le resultat est dtmontre.
t A P
Fig. 4.
5. Remarques sur I’hypothbe
Fig. 5.
u homkomorphe au disque fermk w
5.1. La condition topologique sur la section spherique de l’tventail assure la nullid des groupes de cohomologie impairs. Ce resultat tombe en defaut dans le cas g&r&al. Par exemple, tout &entail regulier dont la section spherique est homeomorphe au papillon de la figure 6 (tous les triangles sont dessints) delinit une vati& torique lisse X dont les groupes de cohomologie entiere sont les suivants : Hq(X, Z) e Zhq, oh hq = 0 pour q = 1 ou q 2 4, h2 = 2, h3 = 1. La caractkistique d’Euler de la vat-i&e est cependant bien Cgale au nombre de c6nes de dimension maximale, a savoir deux. Ces groupes de cohomologie se calculent encore a la Mayer-Vietoris, en decomposant X comme union de deux espaces affines complexes de dimension trois (les ailes du papillon), dont l’intersection
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N. Pouyanne
Fig. 6.
se r&racte par dkformation sur le produit S1 x S1 (c’est le produit d’un tore complexe de dimension deux et d’une droite affine complexe). 5.2. De mk?me, on construit aiskment des varitt6s toriques lisses dont le cinquitme groupe de cohomologie entibre est non trivial. Par exemple, soit C (resp. C’) un &entail rigulier dont la trace sur sa propre section sphkrique soit un polygone sphkrique triangul& homkomorphe ZIcelui de la figure 8 (resp. la figure 7). Soient X (resp. X’) la variCt6 torique lisse de dimension trois dkfinie par C (resp. C’). Alors, X est la rkunion de X’ et d’une sous-variCt6 Y isomorphe B l’espace affine C3. Les groupes de cohomologie en&e de X sont les suivants : H’J(X, Z) g ZhQ, ob hq = 0 pour q = 1, q = 3 ou q 2 6, h 2 = 7, h4 = 2 et h5 = 1. LX calcul, toujours ti la Mayer-Vietoris, utilise le fait suivant : l’intersection de Y et de X’ est un espace affine complexe de dimension trois privC de deux droites complexes s&antes ; elle se rkracte par dkformation sur une somme connexe de S4 et de deux copies de S3. X’
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X Y @
Fig. I.
Fig. 8.
(I) Un vecteur m d’un rCseau M est dit primittj si, et seulement si les seuls nombres rationnels T vhifiant rm E M sont les entiers. (*) Un triangle est l’enveloppe convexe de trois points non align&s. Si R est un rheau de dimension deux, un triangle tlCmentaire de R est un triangle de R 8~ R k sommets entiers (i.e. dans R) dont les seuls points entiers sont les sommets.
Note remise le 4 avril 1996, acceptke aprh rkvision le 30 septembre 1996.
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