Contrôle qualité en tomosynthèse : état des lieux

Contrôle qualité en tomosynthèse : état des lieux

Imagerie de la Femme (2016) 26, 181—183 Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com TOMOSYNTHÈSE MAMMAIRE Contrôle qualité en tomo...

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Imagerie de la Femme (2016) 26, 181—183

Disponible en ligne sur

ScienceDirect www.sciencedirect.com

TOMOSYNTHÈSE MAMMAIRE

Contrôle qualité en tomosynthèse : état des lieux Breast tomosynthesis: Current state of quality control Patrice Heid a,∗, Alain Noel b,c, Ruben E. Van Engen d a

Arcades, 16, boulevard des Aciéries, CS 90006, 13395 Marseille cedex 10, France INPL, CRAN UMR 7039, université de Lorraine, CNRS, 54500 Vandœuvre-Lès-Nancy, France c CNRS, 4, rue de Certain-Champ, 54230 Chavigny, France d Dutch Reference Centre for Screening (LRCB), Radboud University Nijmegen Medical Centre, PO Box 6873, 6503 Nimègue, GJ, Pays-Bas b

Disponible sur Internet le 10 octobre 2016

Introduction Le contrôle qualité en mammographie numérique est réalisé en routine dans le cadre de la mammographie bidimensionnelle. Les systèmes de tomosynthèse sont, à l’heure actuelle, tous en mesure de réaliser des examens bi- et tridimensionnels, et sont donc tous seulement contrôlés pour la partie bidimensionnelle. Les systèmes de tomosynthèse ont donc une base commune avec les mammographes numériques plein champ : le détecteur, le tube et le générateur. Néanmoins, le protocole de contrôle qualité appliqué pour la mammographie bidimensionnelle n’est pas utilisable en l’état et doit être complété pour les systèmes de tomosynthèse. L’European Reference Organization for Quality Assured Breast Screening and Diagnostic Services (EUREF) travaille depuis plusieurs années sur la rédaction d’un protocole de contrôle qualité en tomosynthèse. Ce dernier a été publié sur Internet en avril 2015 (www.euref.org). Le principal écueil rencontré lors du développement de ce protocole de contrôle qualité pour la tomosynthèse est la multitude de choix techniques retenue par les constructeurs. Cela a imposé de nombreuses adaptations des tests de contrôle. En termes de qualité image, la reconstruction génère plus ou moins d’artefacts. Les questions essentielles qui se sont posées lors de la rédaction du protocole et des premiers tests sont : les problèmes sont-ils directement liés aux choix techniques du constructeur (angle, algorithme de reconstruction, nombre d’incidences, . . .) ou les tests ne sont-ils pas adaptés à la tomosynthèse ? Les artefacts générés ont-ils un impact sur la détection des cancers ? Et si oui, est-il quantifiable ? Dans ce cas, où se situe la limite acceptable ?



Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (P. Heid).

http://dx.doi.org/10.1016/j.femme.2016.09.002 1776-9817/© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits r´ eserv´ es.

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État des lieux Pour rappel, aux États-Unis une autorisation délivrée par la Food and Drug Administration (FDA) est obligatoire pour pouvoir utiliser un système quel qu’il soit, même dans le cadre du diagnostic. À ce jour, seuls trois constructeurs d’appareil de tomosynthèse ont obtenu cet agrément de la FDA (General Electric, Hologic et Siemens). En outre, un contrôle qualité est demandé à chaque constructeur, une formation est obligatoire et un suivi des centres de radiologie est opéré dans le cadre du Mammography Quality Standards Act (MQSA). En Europe, des pays comme les Pays-Bas ou le RoyaumeUni n’autorisent pas la commercialisation et l’utilisation d’un système dans le cadre du dépistage des cancers du sein sans un « typetest » (certification d’un appareil par la réalisation d’un contrôle de performances et d’une évaluation clinique) et sans un contrôle qualité semestriel. En France, les systèmes de tomosynthèse ont été rapidement commercialisés et sont utilisés quotidiennement hors dépistage organisé, et ce, sans formation formalisée, sans contrôle qualité réglementaire ou sans validation clinique officielle.

P. Heid et al. Des logiciels de reconstruction d’images bidimensionnelles à partir des acquisitions de tomosynthèse non encore validés, comme la « vue synthétique 2D », sont même utilisés par certains centres de radiologie en routine clinique.

Pourquoi un contrôle qualité La tomosynthèse n’est pas une « véritable » acquisition tridimensionnelle comme un scanner. Il s’agit de l’acquisition de n images de projection bidimensionnelle, sous n angles différents, puis d’une reconstruction par algorithme d’un volume tridimensionnel avec visualisation de l’image en « plans ». Mais contrairement à un scanner, où l’acquisition est réalisée sur une rotation complète de 360◦ , en tomosynthèse, l’angle total varie de 15◦ à un maximum de 50◦ . Cette technique s’appuie grandement sur des algorithmes informatiques qui vont reconstruire un volume en trois dimensions et permettre une visualisation en coupe. La notion de coupe n’ayant pas tout à fait la même signification en tomosynthèse qu’en scanographie. Du fait de données incomplètes à l’acquisition, cette technique de reconstruction peut générer certains artefacts

Figure 1. Contrôle qualité en mammographie numérique : épaisseur maximale des inclusions détectées sur le CDMAM en fonction de la dose glandulaire moyenne ; a : en deux dimensions ; b : en trois dimensions.

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ou aboutir à un manque d’informations diagnostiques (lié à la limitation de l’angle d’exposition). En outre, la tomosynthèse est, pour l’instant, utilisé en complément d’une vue bidimensionnelle classique, aboutissant à une augmentation de la dose délivrée aux patientes bénéficiant de cette technologie.

Premiers tests Pour réaliser un état des lieux, et pour vérifier l’applicabilité du protocole européen, des tests ont été réalisés en France sur les systèmes de cinq constructeurs présents sur le marché grâce à un financement de l’Institut national du cancer (INCa) et avec le soutien technique du Dutch National Expert and Training Centre for Breast Cancer Screening (LRCB, Nimègue, Pays-Bas). Entre 2014 et 2015, trois séries de tests ont été réalisés sur des systèmes commercialisés et utilisés en routine dans des centres de radiologie. Les tests proposés dans le protocole européen ont été réalisés sur des installations mises à niveau avec les dernières versions des logiciels disponibles par les fabricants. Le protocole a été réalisé dans son intégralité, en conditions réelles, pour en tester son applicabilité, vérifier les valeurs limites définies, et faire un premier état des lieux sur les systèmes installés et utilisés en routine clinique quotidienne dans certains centres de radiologie. Les premiers résultats montrent une différence importante entre les différents systèmes en termes de dose et de qualité image. En outre, sur un même appareil, différents programmes peuvent être utilisés, programmes qui ne sont pas aujourd’hui clairement documentés par les fabricants et qui aboutissent à des résultats techniques très hétérogènes. Rappel Dans le cadre de la mammographie numérique bidimensionnelle, les valeurs limites retenues par le protocole européen sont les valeurs dites « souhaitables ». Dans le cadre de la tomosynthèse, les valeurs limites provisoires retenues par le protocole européen sont les valeurs dites « acceptables », valeurs moins contraignantes.

Premiers résultats Dans les graphiques présentés en Fig. 1, on peut constater les différences de détection pour les systèmes testés pour des doses utilisées en routine par les systèmes, pour le mode bidimensionnel et pour le mode tridimensionnel. Seuls les appareils dont les résultats sont situés dans le quart inférieur gauche des deux graphiques qui suivent sont

Figure 2. Contrôle qualité en mammographie numérique : cumul de la dose glandulaire moyenne délivrée en mammographie bi- et tridimensionnelle selon les appareils.

dans les exigences des critères limites en termes de dose et de qualité image. Les autres sont non conformes. Le cumul de la dose délivrée en mammographie biet tridimensionnelle (lors de la réalisation de procédures combinées, acquisition tridimensionnelle, suivie d’une acquisition bidimensionnelle au cours d’une compression unique pour la même patiente) est donné dans le graphique présenté en Fig. 2 pour chaque appareil (et modes de fonctionnement). On constate de grosses différences entre les différents systèmes contrôlés, voire même des différences importantes sur le même système en fonction du programme sélectionné.

Conclusion Le contrôle qualité tel que défini par l’EUREF est applicable et les valeurs limites sont réalistes. Des différences importantes existent entre les systèmes commercialisés actuellement, nécessitant lors de la mise en place d’un contrôle qualité futur, des calibrations significatives en dose (quelquefois beaucoup trop élevées) pour certains appareils. Les algorithmes de traitement permettant la reconstruction des images en trois dimensions à partir des projections bidimensionnelles peuvent générer des artefacts et il faudra évaluer leur impact sur la qualité image et la détection des cancers. Certains appareils utilisent plusieurs modes de fonctionnement non documentés par les fabricants, qui peuvent travailler avec des doses beaucoup trop élevées, ou des doses beaucoup trop faibles impactant fortement la qualité image. Il faudra intégrer (aussi bien pour la mammographie numérique que pour la tomosynthèse) un test permettant de vérifier le traitement d’image. Ce point est fondamental, le contrôle qualité se contente aujourd’hui de contrôler les images non traitées. Un objet test est en cours de développement.

Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.