Cytopathologie des glandes salivaires : le système de Milan 2018

Cytopathologie des glandes salivaires : le système de Milan 2018

Annales de pathologie (2020) 40, 46—58 Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com MISE AU POINT Cytopathologie des glandes saliva...

1MB Sizes 0 Downloads 83 Views

Annales de pathologie (2020) 40, 46—58

Disponible en ligne sur

ScienceDirect www.sciencedirect.com

MISE AU POINT

Cytopathologie des glandes salivaires : le système de Milan 2018 Salivary gland cytopathology: Milan system 2018 Claude Bigorgne a,∗, Philippe Vielh b, Monique Courtade-Saidi c , sous l’égide de la Société franc ¸aise de cytologie clinique a

Centre de pathologie et d’imagerie, 14, avenue René-Coty, 75014 Paris, France Medipath, hôpital Américain, 63, boulevard Victor-Hugo, 92200 Neuilly-sur-Seine, France c Département d’anatomie et de cytologie pathologiques, institut universitaire du cancer Toulouse oncopôle, 1, avenue Irène Joliot-Curie, 31059 Toulouse cedex, France b

ecembre 2019 Rec ¸u le 13 octobre 2019 ; accepté pour publication le 2 d´ Disponible sur Internet le 6 janvier 2020

MOTS CLÉS Terminologie ; Système de Milan ; Glandes salivaires ; Cytopathologie ; Cytoponction à l’aiguille fine

KEYWORDS Terminology; Milan System; Salivary glands;



Résumé La cytologie des glandes salivaires est l’un des domaines les plus difficiles en cytopathologie en raison de la grande variété de tumeurs bénignes et malignes que l’on peut rencontrer, mais également de leur hétérogénéité. Pourtant la cytoponction à l’aiguille fine représente avec l’imagerie par résonance magnétique un examen de première intention afin de guider un éventuel geste chirurgical et son étendue. Un diagnostic précis de tumeur ne peut pas toujours être porté sur la cytologie. Aussi, comme pour les cytologies cervico-utérine, thyroïdienne ou urinaire, un panel d’experts s’est réuni pour élaborer une classification cytologique des lésions des glandes salivaires, chaque catégorie diagnostique étant associée à un risque de malignité et à des recommandations de prise en charge. Le système de Milan pour rapporter la cytopathologie des glandes salivaires a été publié en 2018 en langue anglaise. La Société franc ¸aise de cytologie clinique (SFCC) propose ici une version franc ¸aise résumée officielle de cette terminologie. © 2019 Elsevier Masson SAS. Tous droits r´ eserv´ es.

Summary The salivary glands cytology is one of the most challenging area in cytopathology because of the wide diversity of benign and malignant tumors also because of their heterogeneity. However, fine needle aspiration cytology, with magnetic resonance imaging, represents a first-line examination to guide a possible surgical procedure and its extent. An accurate diagnosis of a specific tumor is sometimes difficult to assess in cytology. Also, as for gynecological,

Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (C. Bigorgne).

https://doi.org/10.1016/j.annpat.2019.12.001 0242-6498/© 2019 Elsevier Masson SAS. Tous droits r´ eserv´ es.

Cytopathologie des glandes salivaires : le système de Milan 2018

Cytopathology; Fine needle aspiration

thyroid or urinary cytologies, a panel of experts met to develop a cytological classification of salivary gland lesions associated with a risk of malignancy and management proposals. The Milan System for Reporting Salivary Gland Cytopathology was published in 2018. The French Society of Clinical Cytology (SFCC) offers here an official summarized French version oh this terminology and recommends its use. © 2019 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Introduction La cytoponction à l’aiguille fine est largement reconnue comme un test diagnostique de première intention pour la prise en charge des lésions des glandes salivaires. Elle permet de différencier des lésions non néoplasiques ou néoplasiques, elle fait le plus souvent le diagnostic des tumeurs bénignes et peut également différencier les tumeurs malignes de bas grade de celles de haut grade [1]. Les néoplasmes sont le plus souvent pris en charge chirurgicalement alors que les lésions non néoplasiques ne sont pas opérées. L’étendue de l’exérèse chirurgicale pour les tumeurs malignes diffère selon leur grade, avec la possibilité ou non de préserver le nerf facial. On sait que le risque de malignité varie selon la topographie de la lésion : il est de plus en plus élevé selon qu’il s’agit de la parotide (20—25 %), de la glande sous-maxillaire (40—50 %) ou des glandes sublinguales ou salivaires accessoires (50—81 %). La performance de la cytologie des glandes salivaires dépend de différents facteurs : l’expérience du préleveur, la qualité de la préparation cytologique, l’expérience du cytopathologiste et un facteur histologique qu’est l’hétérogénéité de la lésion avec notamment la présence d’une composante kystique. Dans la plupart des séries de la littérature, la sensibilité est très bonne (86 à 100 %) ainsi que la spécificité (90 à 100 %) [2]. Cependant, la performance est plus faible quand il s’agit de déterminer de fac ¸on précise le type de tumeur. Les difficultés liées à la complexité des tumeurs des glandes salivaires sont compliquées par l’absence de standardisation des réponses cytologiques. Afin de pallier à ce manque, une nouvelle terminologie, dénommée « Système de Milan pour Rapporter la Cytopathologie des Glandes Salivaires », a été proposée par un panel d’experts internationaux [3]. Elle comporte six catégories diagnostiques, reportées dans le Tableau 1, que nous allons détailler dans le cadre de cet article. Elle a pour but d’établir une stratification du risque de malignité pour chaque catégorie diagnostique et énonce des propositions de prise en charge clinique (Tableau 2). Sous l’égide de la SFCC nous proposons la traduction officielle franc ¸aise pour la terminologie de la cytologie des glandes salivaires et apportons, pour chaque catégorie lésionnelle, l’essentiel des critères cytologiques et des prises en charge recommandées.

Le système de Milan : catégories lésionnelles Il • • •

47

comporte six catégories : non diagnostique ; non néoplasique ; atypies de signification indéterminée ;

• néoplasme ◦ bénin ; ◦ néoplasme salivaire à potentiel de malignité incertain ; • suspect de malignité ; • malin. La catégorie lésionnelle doit figurer en toutes lettres dans la conclusion de tout compte rendu de cytopathologie des glandes salivaires. La catégorie « néoplasme » est elle-même divisée en deux sous-catégories qui doivent être précisées également. Le choix de certains termes a été guidé par le souhait d’une traduction au plus proche de la version anglaise ; par exemple, le terme de néoplasme étant un strict synonyme de tumeur en langue franc ¸aise, il a été retenu pour la traduction franc ¸aise.

Catégorie non diagnostique Définition Le matériel est insuffisant sur le plan qualitatif ou quantitatif pour établir un diagnostic.

Critères cytologiques Les critères cytologiques sont : • cellularité insuffisante (moins de 60 cellules d’intérêt) ; • mauvaise qualité technique des lames (artéfacts de séchage, présence de sang, mauvaise coloration) ; • présence de cellules non néoplasiques normales uniquement alors qu’une masse a été mise en évidence sur l’imagerie ; • contenu kystique non mucineux sans élément épithélial.

Sont à exclure de cette catégorie Les éléments suivants sont à exclure de cette catégorie : • les étalements avec atypies cellulaires, à classer en atypies de signification indéterminée ; • les contenus kystiques mucineux sans contingent épithélial, qui pourraient correspondre à un carcinome muco-épidermoïde kystique ; • les échantillons avec présence de nombreuses cellules inflammatoires, mais en l’absence de cellule épithéliale, peuvent être considérés comme diagnostiques et classés en « non néoplasiques » ; • la présence d’un matériel matriciel abondant évoquant un néoplasme, même en l’absence de cellule tumorale, ne doit pas être classé en non diagnostique. La réponse cytologique doit préciser dans le compte rendu, d’une part, la raison pour laquelle on classe en non diagnostique et, d’autre part, s’il s’agit d’un prélèvement de type kystique exclusif.

48

C. Bigorgne et al.

Tableau 1 Le système de Milan pour rapporter la cytopathologie des glandes salivaires : catégories diagnostiques, définitions et notes explicatives. Catégorie

Définition

Notes explicatives

Non diagnostique

Matériel insuffisamment cellulaire pour établir un diagnostic

Non néoplasique

Entités bénignes telles que sialadénite chronique, ganglions réactionnels, granulomes et infections

Catégorie à utiliser après un examen minutieux de tout le matériel Exceptions pour le matériel avec matrice et les kystes à contenu mucineux Le risque de malignité doit être faible si les critères d’inclusion stricts sont appliqués

Atypies de signification indéterminée (AUS)

Moins de 10 % des résultats cytologiques d’une même équipe Incluant : atypies modérées, atypies dont la nature dystrophique ou tumorale n’est pas définie

Néoplasmes Néoplasmes bénins

Néoplasmes salivaires à potentiel de malignité incertain (SUMP)

Suspect de malignité

Malin

Réservé aux néoplasmes bénins diagnostiqués sur des critères cytologiques précis Réservé aux ponctions en faveur d’un néoplasme ; cependant le diagnostic d’une entité précise ne peut être établi

Catégorie réservée aux cas avec des aspects fortement évocateurs, mais non formels de malignité

Pour des échantillons de diagnostic malin certain

Pas de signe cytologique évident en faveur d’une lésion tumorale Modifications inflammatoires, réactionnelles et métaplasiques Étalements de ganglions réactionnels (une confirmation par cytométrie en flux est recommandée en fonction de la clinique) Aspects non formels pour un néoplasme ; un processus néoplasique ne peut être exclu après examen de l’ensemble du matériel Une majorité de ces ponctions correspondra à des atypies réactionnelles ou à des néoplasmes mal échantillonnés Cette catégorie inclut les cas classiques d’adénome pléomorphe, de tumeur de Warthin, de lipome. . . Cette catégorie doit être utilisée pour les cas où un diagnostic de malignité ne peut pas être exclu Une majorité de cas correspondra à des néoplasmes bénins, des néoplasmes avec atypies et des carcinomes de bas grade Il faut préciser le type de tumeur suspecté ou proposer un diagnostic différentiel Une majorité correspondra à des carcinomes de haut grade au contrôle histopathologique Il convient d’essayer de préciser le grade et le type histologique précis de la tumeur D’autres tumeurs malignes comme des lymphomes, des métastases et des sarcomes sont également inclues dans cette catégorie et doivent être spécifiées

Tableau 2 Le Système de Milan pour rapporter la cytopathologie des glandes salivaires : risque de malignité et recommandations pour la prise en charge clinique. Catégorie diagnostique

Risque de malignité

Conduite à tenir

Non diagnostique

25 % (0—67 %)

Non néoplasique Atypies de signification indéterminée Néoplasmes Bénin Néoplasme salivaire à potentiel de malignité incertain Suspect de malignité Malin

10 % (0—20 %) 20 % (10—35 %)

Corrélation clinico-radiologique/répéter la cytoponction Suivi clinique et corrélation à l’imagerie Répéter la cytoponction ou chirurgie

<5 % (0—13 %) 35 % (0—100 %)

Chirurgie ou suivi clinique Chirurgie

60 % (0—100 %) 90 % (57—100 %)

Chirurgie Chirurgie

Cytopathologie des glandes salivaires : le système de Milan 2018

Catégorie non néoplasique Définition Il s’agit de prélèvements qui montrent des modifications bénignes non néoplasiques. Il faut s’assurer de la corrélation avec la clinique et l’imagerie.

Sont inclus dans cette catégorie Les sialolithiases En général on retrouve une présentation clinique évocatrice avec signes inflammatoires, douleur et augmentation de volume de la glande. Elles surviennent essentiellement au niveau de la glande sous-maxillaire (80 %). L’imagerie est en général très performante pour le diagnostic, car elle permet la mise en évidence du calcul et de la dilatation du canal en amont. Les critères cytologiques sont : • une hypocellularité ; • si elles sont présentes, les cellules acineuses sont très rares ; • des amas de cellules canalaires bénignes ou parfois en métaplasie malpighienne, des cellules ciliées ou mucineuses (pouvant parfois poser le problème d’un carcinome muco-épidermoïde, à classer alors en atypies de signification indéterminée) ; • un fond inflammatoire parfois mucoïde ; • des calcifications (50 % des ponctions).

Les sialadénites aiguës Elles sont plus fréquentes au niveau de la parotide que de la sous-maxillaire, mais elles sont rarement ponctionnées, car la clinique est évocatrice et conduit à un traitement antibiotique. Cytologiquement, elles se traduisent par la présence de nombreux polynucléaires neutrophiles associés parfois à des amas bactériens, des histiocytes et des débris nécrotiques.

Les sialadénites chroniques Elles surviennent au niveau de la glande sous-maxillaire, chez l’adulte d’âge moyen et sont souvent secondaires à une sialolithiase chronique, à une irradiation, à un traumatisme ou à des désordres auto-immuns. Les critères cytologiques sont : • une hypocellularité ; • la présence de groupes de cellules canalaires, basaloïdes ou métaplasiques ; • si elles sont présentes, les cellules acineuses sont très rares ; • une inflammation chronique (lymphocytes, plasmocytes) ; • des fragments de stroma fibreux. Des pièges sont à éviter : • ne pas confondre les cellules canalaires avec les cellules basaloïdes observées dans les néoplasmes à cellules basaloïdes. Dans ce cas elles sont plus nombreuses et prennent un aspect tridimensionnel ; • une proportion de sialadénites chroniques et de kystes inflammatoires peuvent présenter des cristaux d’amylase (non réfringents, de forme rectangulaire, en épingle ou arrondis). D’autres types de cristaux (tyrosine, oxalate) peuvent être présents sur étalements cytologiques et sont en général associés à des néoplasmes bénins (adénome pléomorphe, mais parfois aussi à des tumeurs malignes).

49

Les sialadénites granulomateuses Les patients se présentent en général avec une masse de croissance lente. Les critères cytologiques sont : • une hypocellularité ; • des groupes de cellules histiocytaires épithélioïdes ; • une inflammation aiguë et chronique (lymphocytes, plasmocytes, polynucléaires) ; • ± des cellules géantes et des débris nécrotiques.

Les ganglions réactionnels péri- ou intra-parotidiens Il s’agit d’une cause assez fréquente d’aspect de masse au niveau d’une glande salivaire. À l’examen cytologique les prélèvements sont alors cellulaires et constitués d’une population lymphocytaire polymorphe, à prédominance de petits lymphocytes, B et T, associée à des macrophages à corps tingibles et des agrégats lympho-histiocytaires. Au besoin une étude immunocytochimique ou en cytométrie de flux peut confirmer le caractère réactionnel. Il convient d’éliminer par principe un lymphome, une métastase.

La sialadénite lymphoépithéliale Il s’agit d‘une lésion auto-immune bénigne souvent liée au syndrome de Sjögren, caractérisée par un infiltrat lymphocytaire avec atrophie parenchymateuse et des foyers d’hyperplasie canalaire. On l’observe préférentiellement chez la femme, dans 90 % des cas au niveau de la parotide et l’atteinte est souvent bilatérale. À l’examen cytologique, les prélèvements sont classiquement cellulaires et montrent la présence d’amas de cellules canalaires cohésives, souvent en métaplasie malpighienne, et de petits lymphocytes mêlés aux cellules épithéliales. Le fond renferme également des cellules dendritiques et des macrophages à corps tingibles. On peut observer des atypies au niveau des cellules canalaires, mais ces dernières sont d’aspect réactionnel. On n’observe pas de nécrose, d’hyperchromatisme ou de mitoses comme dans une métastase de carcinome. Une attention particulière doit être portée au contingent lymphocytaire compte tenu du risque de développement d’un lymphome primitif extraganglionnaire dans les syndromes de Sjögren. Un diagnostic différentiel est représenté par les kystes lympho-épithéliaux (incluant ceux associés au VIH). Ils contiennent un matériel protéique avec des débris cellulaires, de la kératine, des cellules malpighiennes, des lymphocytes et des agrégats lympho-histiocytaires. Chez le sujet âgé, cela peut poser le problème du diagnostic différentiel avec la métastase d’un carcinome épidermoïde.

Entités parfois classées comme non néoplasiques La sialadénose Il s’agit d’une hypertrophie des glandes salivaires, plus fréquente au niveau de la parotide. Une pathologie systémique y est souvent associée. Sur étalements cytologiques, on observe un matériel cellulaire fait de cellules acineuses hyperplasiques, d’architecture acineuse conservée, avec ± de tissu fibroadipeux.

50 En général le diagnostic est évoqué cliniquement. Une corrélation radioclinique est nécessaire puisqu’il faut se méfier d’une erreur de ciblage, recueillant des cellules acineuses normales au pourtour de la masse d’intérêt. L’autre diagnostic différentiel est celui d’un carcinome à cellules acineuses. Dans la sialadénose l’architecture acineuse est bien conservée avec présence de cellules canalaires, ce qui n’est pas le cas dans le carcinome à cellules acineuses.

L’oncocytose Elle est principalement rencontrée chez le sujet âgé. Il s’agit d’une hyperplasie avec différents degrés de métaplasie oncocytaire des cellules acineuses et canalaires. La distinction avec un oncocytome est souvent impossible. À ce titre, la majorité des cas d’oncocytose seront classés dans la catégorie « Néoplasme : néoplasme salivaire à potentiel de malignité incertain ». Le diagnostic différentiel est représenté par l’oncocytome et la métaplasie oncocytaire que l’on peut observer dans plusieurs néoplasmes salivaires comme l’adénome pléomorphe ou le carcinome muco-épidermoïde. L’identification de structures acineuses ou canalaires normales est un élément clé pour le diagnostic.

C. Bigorgne et al. • les cellules fusiformes pouvant correspondre à des atypies réactionnelles ou bien à un schwannome, une tumeur fibreuse solitaire ou un myoépithéliome ; • les contenus kystiques mucoïdes ne permettant pas d’exclure un carcinome muco-épidermoïde ; • les contenus kystiques avec des cellules épithéliales ne permettant pas d’écarter un néoplasme ; • une métaplasie malpighienne atypique ne permettant pas d’écarter la métastase kystique d’un carcinome épidermoïde. Lorsque la composante lymphoïde est prédominante le diagnostic différentiel peut se poser entre une sialadénite chronique ou lymphoépithéliale, les kystes lymphoépithéliaux ou les ganglions réactionnels, ces hypothèses diagnostiques étant classées en non néoplasiques. Cependant, si des atypies sont présentes au niveau des lymphocytes ou bien si la clonalité fait un doute, on peut les classer en atypies de signification indéterminée. En effet des lymphomes de la zone marginale peuvent prendre cet aspect et être difficiles à diagnostiquer sur la cytologie en l’absence d’immunophénotypage par cytométrie en flux.

Catégorie : néoplasmes Catégorie : atypies de signification indéterminée Définition Cette catégorie (« Atypia of Undetermined Significance » : AUS) correspond à une lésion dont on ne peut pas dire si elle est néoplasique ou non. Les atypies présentes ne permettent pas de la classer en « non diagnostique ». Les cas classés dans cette catégorie ne doivent pas représenter plus de 10 % des cytologies salivaires.

Critères cytologiques Les critères cytologiques sont : • atypies réactionnelles ne permettant pas d’affirmer un néoplasme ; • métaplasie malpighienne, oncocytaire ou autre, ne permettant pas d’affirmer un néoplasme ; • aspect cytologique suggérant un néoplasme, mais cellularité insuffisante pour pouvoir l’affirmer ; • artéfacts de préparation empêchant de faire la distinction entre un processus non néoplasique et un processus néoplasique ; • lésion kystique mucineuse avec une composante épithéliale absente ou très limitée ; • ganglions intraparenchymateux ou lésions lymphoïdes dont l’aspect ne permet pas d’affirmer un lymphome.

Sont à inclure dans cette catégorie Les situations suivantes sont à inclure dans cette catégorie : • les cas avec présence de cellules basaloïdes qui peuvent poser le problème de diagnostic différentiel entre une sialadénite chronique et un néoplasme à cellules basales ; • les remaniements métaplasiques ne permettant pas d’écarter un carcinome muco-épidermoïde, un adénome pléomorphe ou une tumeur de Warthin ;

Les néoplasmes des glandes salivaires représentent environ 6 % des néoplasmes de la tête et du cou. Plus de 80 % des néoplasmes des glandes salivaires siégeant au niveau de la glande parotide sont bénins. L’adénome pléomorphe et la tumeur de Warthin sont les deux tumeurs bénignes les plus fréquentes, l’adénome pléomorphe représentant à lui seul environ 50 % de tous les néoplasmes salivaires. La cytoponction permet de diagnostiquer ces deux tumeurs avec une grande spécificité, supérieure à 98 %. Par contre, elle peut être moins efficace pour proposer un diagnostic spécifique de certains autres néoplasmes d’origine épithéliale des glandes salivaires. Les raisons de cette limitation diagnostique sont la très grande diversité des tumeurs salivaires, d’une part, et les nombreuses ressemblances morphologiques entre elles, d’autre part.

Définition Le diagnostic cytologique d’une tumeur des glandes salivaires non clairement maligne peut être rangé en deux sous-catégories diagnostiques distinctes : • néoplasmes bénins ; • néoplasmes salivaires à potentiel de malignité incertain (« Salivary gland neoplasm Uncertain Malignant Potential » ou SUMP).

Néoplasmes bénins Ce diagnostic est fait seulement si le prélèvement cytologique montre des caractéristiques cytomorphologiques typiques d’une tumeur bénigne spécifique de la glande salivaire. Ces néoplasmes bénins peuvent être d’origine épithéliale (adénome pléomorphe, tumeur de Warthin, oncocytome) ou mésenchymateuse (lipome, schwannome, lymphangiome, hémangiome). Le risque de malignité associé est de moins de 5 %. La conduite à tenir proposée est soit une exérèse chirurgicale conservatrice, soit une surveillance clinique et radiologique selon le diagnostic.

Cytopathologie des glandes salivaires : le système de Milan 2018

51

Figure 1. Adénome pléomorphe : substance mésenchymateuse intensément acidophile et cellules myoépithéliales étroitement intriquées (étalement, May Grünwald Giemsa). Pleomorphic adenoma: intense acidophilic fibrillary matrix and myoepithelial cells (smear, May Grünwald Giemsa).

Figure 2. Tumeur de Warthin : fond kystique parsemé de petits lymphocytes et de massifs de cellules oncocytaires (étalement, May Grünwald Giemsa). Warthin tumor: tripartite appearance with cystic background, lymphocytes and sheets of oncocytes (smear, May Grünwald Giemsa).

Adénome pléomorphe

• cellules myoépithéliales au cytoplasme clair : penser au carcinome épithélial-myoépithélial, aux tumeurs sébacées, au carcinome myoépithélial, ainsi qu’à des processus métastatiques (carcinome à cellules claires du rein) ; • cellules myoépithéliales de morphologie fusiforme et présentant une organisation palissadique : évoquer en diagnostic différentiel un schwannome, un hémangiome ou une fasciite nodulaire, mais les sarcomes typiques et les carcinomes à cellules fusiformes sont exclus en l’absence d’un pléomorphisme nucléaire significatif et de mitoses ;

L’adénome pléomorphe (AP) est une tumeur biphasique associant en proportion variable des cellules épithéliales canalaires, des cellules myoépithéliales et une matrice mésenchymateuse (ou stroma) (Fig. 1). Les critères cytologiques sont : • un stroma chondromyxoïde, d’aspect fibrillaire, de coloration intensément acidophile bien appréciée au May Grünwald Giemsa (MGG) ou plus grise et translucide au Papanicolaou ; cette matrice est typiquement étroitement intriquée aux cellules tumorales ; • des cellules myoépithéliales de forme variable, correspondant souvent au type cellulaire prédominant sur étalements cytologiques ; • des cellules épithéliales canalaires, à noyaux réguliers, s’organisant en petits groupes rappelant les structures canalaires. L’adénome pléomorphe est une des nombreuses tumeurs salivaires produisant un stroma, groupe qui inclut également le carcinome adénoïde kystique, les néoplasmes à cellules basales et le carcinome épithélial-myoépithélial. Les prélèvements cytologiques présentant les caractéristiques classiques d’adénome pléomorphe peuvent être diagnostiqués en « néoplasme : bénin ». La nature biphasique de l’adénome pléomorphe crée un large spectre d’aspects cytologiques et il en résulte de nombreuses similitudes avec d’autres tumeurs des glandes salivaires. Quand les critères classiques de l’adénome pléomorphe ne sont pas présents ou bien que des atypies sont notées, il convient alors de classer ce prélèvement cytologique en SUMP. Les principaux diagnostics différentiels sont représentés par : • le carcinome adénoïde kystique compte tenu de son pronostic différent. C’est le cas en particulier pour les adénomes pléomorphes à prédominance cellulaire et/ou présentant une matrice en globes hyalins ; • le carcinome muco-épidermoïde si la matrice est d’aspect mucoïde ; • le carcinome myoépithélial si de nombreuses atypies cellulaires sont présentes. Lorsque les cellules myoépithéliales prédominent, leur cellularité et leur morphologie vont déterminer le diagnostic différentiel :

Se souvenir que des cellules myoépithéliales atypiques ¸on occasionnelle dans peuvent être rencontrées de fac l’adénome pléomorphe, mais la présence de nombreuses cellules atypiques (pléomorphisme nucléaire, nucléoles proéminents, mitoses) et/ou de nécrose sont des signes en faveur de la malignité.

Tumeur de Warthin La tumeur de Warthin est la seconde tumeur la plus fréquente de la parotide. Elle apparaît classiquement chez le sujet âgé de plus de 60 ans et les patients décrivent souvent un tabagisme significatif (Fig. 2). Le diagnostic cytologique repose sur trois éléments caractéristiques : un fond kystique parfois sale, la présence de petits lymphocytes et d’amas de cellules oncocytaires. La tumeur de Warthin se développe presque exclusivement dans la glande parotide et l’aspect associant les trois éléments décrits est un élément diagnostique essentiel. La distinction est parfois difficile à faire avec des ganglions lymphoïdes intraparotidiens, une sialadénite lymphoépithéliale, un oncocytome et un kyste lymphoépithélial.

Oncocytome Environ 90 % des oncocytomes se développent au niveau des glandes salivaires principales, mais ils ne représentent que seulement 1 % des tumeurs de la glande parotide. Les critères cytologiques sont : • placards irréguliers d’oncocytes, grandes cellules aux cytoplasmes abondants basophiles parfois granuleux aux limites nettes, et aux noyaux globuleux arrondis avec nucléole proéminent ;

52 • fond des étalements propre et souvent hématique ; • pas de pléomorphisme nucléaire ni de figure de mitose. Le diagnostic différentiel de l’oncocytome inclut la tumeur de Warthin, l’oncocytose diffuse et le carcinome à cellules acineuses. Les étalements d’oncocytome et d’oncocytose sont identiques ; seule leur présentation clinique permet de les différencier : masse bien circonscrite pour le premier alors que l’oncocytose est plus souvent multifocale, moins bien définie. La tumeur de Warthin se différencie quant à elle par un fond kystique sale et une population lymphoïde bigarrée. Le carcinome à cellules acineuses montre des cellules polygonales avec un cytoplasme finement vacuolaire, qui expriment DOG1 et SOX10.

Remarque des auteurs Le panel d’experts qui a élaboré le système de Milan a fait le choix de classer l’oncocytome dans la catégorie « néoplasme : sous-catégorie bénin », s’appuyant sur l’argument de fréquence de l’oncocytome par rapport au carcinome oncocytaire, lui-même extrêmement rare dans les glandes salivaires. Il convient toutefois de garder à l’esprit que le diagnostic de malignité des tumeurs à cellules oncocytaires repose sur des critères de comportement tumoral (invasion vasculaire et/ou capsulaire), critères non évaluables sur étalements cytologiques.

Lipome Tumeur rare des glandes salivaires (0,5 %), en majorité dans la glande parotide. Le diagnostic cytologique repose sur la présence de massifs faits de cellules adipocytaires caractérisées par de larges cytoplasmes clairs très abondants et par des noyaux petits et hyperchromatiques ; le fond peut contenir des gouttelettes optiquement vides de nature lipidique ; absence de cellules acineuses.

Schwannome Les étalements cytologiques sont faiblement à modérément cellulaires montrant des massifs cohésifs, parfois d’aspect palissadique, faits de cellules fusiformes aux cytoplasmes pâles et mal définis et aux noyaux petits, sombres, allongés ou fusiformes, associés à un fond myxoïde. La procédure de cytoponction d’un schwannome est souvent associée à des douleurs de type radiculaire. Les principaux diagnostics différentiels sont l’adénome pléomorphe à cellules fusiformes et le myo-épithéliome. Les sarcomes sont extrêmement rares dans les glandes salivaires. La possibilité d’un sarcome doit être considérée quand les étalements sont très cellulaires et montrent des atypies cytonucléaires marquées.

Lymphangiome Très rare, survenant surtout chez l’enfant et majoritairement au niveau de la glande parotide. Les étalements cytologiques sont très peu cellulaires avec un fond kystique clair, quelques hématies et petits lymphocytes dispersés, souvent classés en « catégorie non diagnostique ». Les cellules endothéliales ne sont généralement pas observées sur les étalements.

Hémangiome L’hémangiome est la tumeur bénigne mésenchymateuse la plus fréquente des glandes salivaires, majoritairement

C. Bigorgne et al. développée dans la glande parotide. De plus, la plupart des hémangiomes apparaissent durant la première décade de la vie, et plus particulièrement durant la première année. Les étalements sont très nettement hématiques comportant quelques groupes de cellules fusiformes ou polygonales de type endothélial qui peuvent former des structures cordonales allongées. À rechercher attentivement, car peuvent être rares.

Néoplasmes salivaires à potentiel de malignité incertain (SUMP) Cette sous-catégorie diagnostique est réservée aux prélèvements cytologiques pour lesquels le diagnostic de néoplasme est certain, mais dont on ne peut pas préciser le type histologique exact et pour lesquels une tumeur maligne ne peut pas être exclue. La majorité de ces cas inclut les tumeurs bénignes hypercellulaires et les trois groupes suivants : les néoplasmes à cellules basaloïdes, les néoplasmes à cellules oncocytaires/oncocytoïdes et les néoplasmes à cellules claires. La plupart des tumeurs malignes de cette catégorie diagnostique sont des carcinomes de bas grade. Le risque de malignité associé est de l’ordre de 35 %.

Néoplasmes à cellules basaloïdes Cette entité est à réserver aux néoplasmes à cellules de petite taille et au cytoplasme étroit qui leur confèrent une morphologie immature de type basaloïde. Le diagnostic différentiel des néoplasmes salivaires à cellules basaloïdes est l’une des situations diagnostiques les plus fréquentes et les plus difficiles en cytologie des glandes salivaires (Tableau 3). Il peut être aidé par une appréciation rigoureuse du stroma ainsi que par l’utilisation des techniques complémentaires telles que l’immunocytochimie et/ou les tests moléculaires. Il est pratiquement impossible en cytologie d’effectuer le diagnostic différentiel entre adénome et adénocarcinome à cellules basales ou entre un myoépithéliome et un carcinome myoépithélial, car seule l’évaluation histologique de l’invasion vasculaire et périnerveuse permet de distinguer de fac ¸on formelle les tumeurs bénignes des tumeurs malignes.

Néoplasmes à cellules oncocytaires ou oncocytoïdes Les tumeurs montrant des caractéristiques oncocytaires ou oncocytoïdes sont fréquentes dans les glandes salivaires. Cette dénomination doit être réservée à : • des étalements très cellulaires ; • faits de cellules présentant des caractères oncocytaires ou oncocytoïdes qui ne peuvent pas être interprétées différemment ; • et qui ne présentent pas d’atypies dites « de haut grade » telles des atypies nucléaires marquées, des mitoses, de la nécrose. Les cellules oncocytaires sont la caractéristique la plus importante de la tumeur de Warthin et de l’oncocytome, mais elles peuvent également être observées dans plusieurs autres tumeurs des glandes salivaires telles l’adénome pléomorphe, le myoépithéliome et le carcinome mucoépidermoïde. De plus, des cellules ressemblant à des oncocytes, nommées « cellules oncocytoïdes », sont

Cytopathologie des glandes salivaires : le système de Milan 2018 Tableau 3

53

Situations morphologiques et diagnostics différentiels des cas classés en « SUMP à cellules basaloïdes ».

Caractéristiques morphologiquesa

Diagnostics différentielsb

1. Néoplasme à cellules basaloïdes avec stroma fibrillaire

Adénome pléomorphe hypercellulaire Carcinome épithélial-myoépithélial Adénome/adénocarcinome à cellules basales Adénome/adénocarcinome à cellules basales Carcinome adénoïde kystique Carcinome épithélial-myoépithélial Adénocarcinome polymorphec Carcinome adénoïde kystique Adénocarcinome polymorphe Adénome pléomorphe hypercellulaire Adénome canaliculaire Myoépithéliome Carcinome myoépithélial Carcinome adénoïde kystique

2. Néoplasme à cellules basaloïdes avec stroma hyalin

3. Néoplasme à cellules basaloïdes avec stroma mixte/autre 4. Néoplasme à cellules basaloïdes avec stroma peu abondant ou absent

a b c

Très dépendantes de la qualité de la préparation cytologique. Proposés tel un guide —– peuvent ou non apparaître dans la conclusion du compte rendu. Habituellement rencontré dans les glandes salivaires accessoires.

présentes dans les carcinomes à cellules acineuses ou les métastases de carcinomes à cellules claires du rein. Il faut être prudent s’il existe un fond mucoïde (possibilité de carcinome muco-épidermoïde de forme oncocytaire).

Néoplasmes à cellules claires Les néoplasmes des glandes salivaires à cellules claires sont rares. Les critères cytologiques sont : • étalements très cellulaires ; • les cellules tumorales présentent des caractéristiques à type de cellules claires : cytoplasme clair, spumeux, granuleux ou vacuolaire ; aspect ne correspondant pas à celui, caractéristique, des vrais oncocytes ; • grade nucléaire faible à modéré. Dans cette catégorie, les études ancillaires se révèlent très utiles afin d’orienter le diagnostic.

Recommandations de prise en charge clinique Les cas classés en « néoplasme : bénin » devraient bénéficier d’un examen IRM ou TDM afin d’évaluer l’extension de la lésion avant l’exérèse chirurgicale complète avec préservation du nerf facial. Un sous-groupe de patients non candidat à la chirurgie ou inaccessible à celle-ci bénéficiera d’un suivi clinique et/ou par imagerie. Les recommandations pour les cas classés en SUMP sont similaires. L’examen extemporané per-opératoire peut être utile pour tenter de mieux définir le type histologique de la tumeur et l’état des marges, et afin de déterminer si une dissection du cou plus large est indiquée.

Critères cytologiques Les critères cytologiques observés ne sont pas suffisants en quantité et/ou en qualité pour affirmer de fac ¸on formelle la malignité. Le risque de malignité associé approche les 60 %. Lorsque la cytologie suggère un diagnostic suspect de malignité, elle devrait préciser : • suspect d’une tumeur maligne primitive salivaire ; une proportion significative de ces cas dits suspects correspond à un échantillon sub-optimal d’une tumeur maligne de haut grade ; • suspect d’un processus métastatique ; • suspect de lymphome ; l’immunophénotypage, habituellement évalué par la cytométrie en flux, est l’examen clé pour faire le diagnostic de la plupart des lymphomes en cytologie. Cette catégorie pourrait bénéficier de la disponibilité croissante de marqueurs immunohistochimiques et moléculaires des tumeurs des glandes salivaires qui devraient permettre un diagnostic spécifique plus précis.

Recommandations de prise en charge clinique Le diagnostic cytologique de « suspect de malignité » n’est pas équivalent à « malin », même s’il est évocateur d’une lésion maligne et comporte un risque de malignité élevé. Il n’est pas suffisant à lui seul pour autoriser une chirurgie radicale, une chimiothérapie ou une radiothérapie.

Catégorie maligne Catégorie suspecte de malignité Les catégories AUS, SUMP et suspecte représentent les catégories diagnostiques dites indéterminées dans le système de Milan. Elles sont utilisées afin de stratifier le risque de malignité et d’informer le clinicien qui prend en charge le patient que la masse ciblée ne peut pas être classée dans une catégorie diagnostique bénigne ou maligne formelle.

La plupart des tumeurs malignes primitives des glandes salivaires présentent des caractéristiques cytologiques suffisantes qui permettent de les classer de fac ¸on formelle en catégorie maligne. Lorsque cela est possible, il convient de tenter de définir le grade de la tumeur et de proposer un type tumoral spécifique. La Terminologie de Milan intègre dans son approche diagnostique les données immunocytochimiques et

54 Tableau 4

C. Bigorgne et al. Profils immunocytochimiques des tumeurs salivaires les plus fréquentes.

Tumeur de Warthin/oncocytome Carcinome à cellules acineuses Carcinome sécrétoire Carcinome muco-épidermoïde Carcinome canalaire salivaire Myoépithéliome/carcinome myoépithélial Carcinome épithélial-myoépithélial

p63

p40

pS100

MGB

SOX10

DOG1

GATA3

RA

+ — — + — + +

— — — + — + +

— — + — — + +

— — + — ±

— + + ± — — —

— + — ± — — —

— — + — +

— — — — +

MGB : mammaglobine ; DOG1 : discovered on GIST1 ; GATA3 : GATA binding protein 3 ; RA : récepteur aux androgènes.

Tableau 5

Principales translocations chromosomiques ou mutations retrouvées dans les tumeurs des glandes salivaires.

Adénome pléomorphe

Carcinome muco-épidermoïde Carcinome adénoïde kystique Carcinome sécrétoire Carcinome myoépithélial, variante à cellules claires Adénocarcinome cribriforme des glandes salivaires accessoires Adénocarcinome polymorphe de bas grade

moléculaires. Pour simplifier la présentation, nous avons fait le choix de présenter les profils des tumeurs bénignes et malignes les plus fréquentes dans les Tableaux 4 et 5.

Translocation chromosomique

Gène de fusion

t (3 ; 8)(p21 ; q12) t (5 ; 8)(p13 ; q12) t (3 ; 12)(p14.2 ; q14.5) ins (9 ; 12)(p23 ; q12-15) t (11 ; 19)(q21 ; p13) t (11 ; 15)(q21 ; q26) t (6 ; 9)(q22-23 ; p23-24) t (12 ; 15)(p13 ; q25) t (12 ; 22)(q13 ; q12) t (1 ; 14)(p36.11 ; q12) t (X ; 14)(p11.4 ; q12) Mutation PKRD1 E701D

PLAG1 HMGA2 CRCT1-MAML2 CRCT3-MAML2 MYB-NFIB ETV6 EWSR1-ATF ARID1A-PRKD1 DDX3X-PRKD1 Inconnu

la présence de grains de zymogène intracytoplasmiques PAS positifs est une aide au diagnostic.

Carcinome sécrétoire Carcinomes de bas grade Carcinome à cellules acineuses Il représente 10 à 15 % de toutes les tumeurs malignes des glandes salivaires et est la seconde tumeur maligne la plus fréquente après le carcinome muco-épidermoïde. Chez les enfants, il constitue environ le tiers des carcinomes salivaires. Les critères cytologiques sont : • étalements cellulaires faits de cellules très monomorphes, peu cohésives, dispersées ou en placards ; • cellules polygonales avec un rapport nucléocytoplasmique faible ; • cytoplasmes abondants finement vacuolaires volontiers basophiles et contenant de grains sécrétoires PAS positifs (Zymogène) ; • noyaux ronds, uniformes ; • pléomorphisme nucléaire faible, mitoses et nécrose absentes ; • fond propre ou très finement kystique ; nombreux noyaux nus ; • présence parfois de petits lymphocytes. Le carcinome à cellules acineuses est une tumeur souvent faussement rassurante sur le plan cytologique et les cellules tumorales peuvent parfois être confondues avec des éléments glandulaires non néoplasiques ou avec une sialadénose. Quant à la possible confusion avec d’autres types de carcinomes salivaires de bas grade, la démonstration de

Le carcinome sécrétoire, précédemment nommé « carcinome salivaire analogue des carcinomes sécrétoires mammaires (MASC) », est une tumeur salivaire de bas grade, classée en tant qu’entité distincte dans la classification OMS 2017 des tumeurs de la tête et du cou [4]. Les critères cytologiques sont : • étalements cellulaires ; • cellules tumorales isolées ou organisées en structures solides, tubuleuses et/ou microkystiques ; • cellules cubiques ou polygonales avec un faible rapport nucléo-cytoplasmique ; • cytoplasmes abondants, vacuolaires, absence de grains de zymogène ; • noyaux uniformément ronds, aux contours réguliers, à chromatine fine ; • atypies nucléaires peu marquées, mitoses et nécrose rares, voire absentes ; • présence d’un matériel mucoprotéïque. Le diagnostic différentiel cytologique du carcinome sécrétoire le plus fréquent est le carcinome à cellules acineuses ; le carcinome sécrétoire devrait être suspecté sur étalements lorsqu’il est observé une prolifération ressemblant à un carcinome à cellules acineuses, mais qui ne présente pas de grains de zymogène. Le diagnostic différentiel inclut également les autres tumeurs salivaires avec mucines tel le carcinome muco-épidermoïde de bas grade ou celles caractérisées par des cellules au large cytoplasme éosinophile comme la tumeur de Warthin et l’oncocytome.

Cytopathologie des glandes salivaires : le système de Milan 2018 L’existence d’une translocation spécifique complète utilement la morphologie.

Carcinome épithélial-myoépithélial Le carcinome épithélial-myoépithélial est une tumeur maligne de faible grade, biphasique, avec une couche interne de cellules canalaires cubiques et une couche externe de cellules myoépithéliales au cytoplasme clair qui prédominent nettement selon un ratio habituellement de 2/1—3/1. Les critères cytologiques sont : • étalements richement cellulaires ; • présence d’un matériel stromal acellulaire, parfois laminé ; • population prédominante de cellules myoépithéliales aux larges cytoplasmes clairs et aux noyaux peu atypiques ; • population minoritaire de cellules canalaires au cytoplasme étroit, parfois difficiles à identifier ; • présence fréquente de noyaux nus sur le fond. De nombreuses entités sont à évoquer en diagnostic différentiel : le myoépithéliome, le carcinome myoépithélial, l’adénome pléomorphe hypercellulaire, le carcinome adénoïde kystique ainsi que la métastase d’un carcinome à cellules claires du rein. Il est important d’identifier la double composante cellulaire et de rechercher la présence de boules d’un matériel stromal acellulaire, acidophile à la coloration de MGG et bleu-vert au Papanicolaou.

Carcinomes de haut grade Carcinome canalaire salivaire Il représente dans plus de 50 % des cas la transformation maligne d’un adénome pléomorphe préexistant (carcinome ex adénome pléomorphe). Les critères cytologiques sont : • étalements très cellulaires ; • organisation en amas de cellules à l’évidence malignes sur le plan cytologique ; • cellules de taille moyenne à grande, polygonales, avec limites cytoplasmiques nettes et cytoplasmes éosinophiles abondants ; • noyaux pléomorphes, de grande taille, hyperchromatiques avec anisocaryose et nucléole proéminent ; • mitoses et nécrose fréquentes ; • nombreux noyaux nus. Les diagnostics différentiels cytologiques principaux incluent le carcinome muco-épidermoïde de haut grade, le carcinome oncocytaire, les processus métastatiques des carcinomes du sein, de la prostate ou des poumons. L’adénocarcinome de haut grade SAI est également un diagnostic différentiel, mais c’est un diagnostic d’exclusion qui ne devrait être fait qu’une fois les autres hypothèses diagnostiques considérées et éliminées.

Carcinome avec transformation de haut grade « Dédifférenciation » ou le terme plus communément accepté de « transformation de haut grade », est défini comme la transformation d’une tumeur bien différenciée en une tumeur maligne de haut grade qui perd les caractéristiques histologiques spécifiques de la tumeur originelle. Ce phénomène est décrit dans le carcinome à cellules acineuses, le carcinome adénoïde kystique, le carcinome

55

épithélial-myoépithélial, l’adénocarcinome polymorphe, le carcinome myoépithélial et le carcinome sécrétoire. Les carcinomes primitifs des glandes salivaires avec transformation de haut grade présentent une évolution clinique particulièrement agressive. Dans certains cas, seule la composante de haut grade est présente sur les étalements cytologiques et la classification proposée alors est limitée à « carcinome de haut grade ». Quoiqu’il en soit, une masse tumorale correctement prélevée peut montrer des caractéristiques de la tumeur primitive et de la composante de haut grade.

Carcinome neuroendocrine à petites cellules En accord avec la classification OMS 2017 des tumeurs de la tête et du cou [4], le carcinome neuroendocrine à petites cellules est un sous-type de carcinome peu différencié. Il est rare et morphologiquement similaire à celui plus habituellement retrouvé dans le poumon et au niveau de la peau (carcinome à cellules de Merkel). Son diagnostic différentiel est donc celui de la métastase d’un carcinome à petites cellules, d’origine cutanée ou pulmonaire ou autre.

Carcinomes de grade intermédiaire ou multiple Carcinome muco-épidermoïde Le carcinome muco-épidermoïde (CME) est la tumeur maligne primitive des glandes salivaires la plus fréquente chez l’adulte comme chez l’enfant et survient le plus souvent dans la glande parotide. Il présente trois grades histologiques : faible grade, grade intermédiaire et haut grade. Les caractéristiques permettant ce « grading » peuvent être difficiles à apprécier sur prélèvement cytologique, notamment l’invasion périnerveuse et l’invasion lymphovasculaire. Le carcinome muco-épidermoïde est le plus souvent gradé en bas grade et haut grade sur prélèvement cytologique, en utilisant l’évaluation des proportions de la composante cellulaire tumorale et de la composante kystique mucineuse ainsi que la présence ou non de caractéristiques cytologiques de haut grade (nécrose, mitoses et pléomorphisme nucléaire). Les critères cytologiques sont : • étalements de cellularité variable en fonction du grade de la tumeur ; • mélange de cellules mucineuses, intermédiaires et épidermoïdes qui varient en proportion en fonction du grade histologique : les tumeurs de bas grade contiennent plus de cellules mucineuses et les tumeurs de haut grade présentent une prédominance de cellules épidermoïdes ; • atypies nucléaires variables, de modérées (bas grade) à marquées (haut grade) ; • présence variable de cellules oncocytaires, cellules claires, cellules cylindriques ; • fond kystique avec mucines extracellulaires abondantes dans les tumeurs de faible grade et de grade intermédiaire ; • présence de petits lymphocytes (20 % des cas) ; • la kératinisation n’est pas la caractéristique la plus fréquente du carcinome muco-épidermoïde. Les caractéristiques cytologiques du carcinome mucoépidermoïde sont dépendantes de son grade histologique. Le carcinome muco-épidermoïde de bas grade présente habituellement un fond kystique mucineux très abondant, des débris cellulaires, et de rares cellules épidermoïdes. Il

56 est une des causes les plus fréquentes des faux négatifs en cytologie salivaire, avec comme diagnostics le plus souvent proposés mucocèle ou kyste. Si seul un matériel de type kystique est prélevé, le prélèvement sera alors classé en atypies de signification indéterminée, dès lors que ce fond kystique est de type mucineux. Environ 20 % des carcinomes mucoépidermoïdes présentent un infiltrat à petits lymphocytes abondant, qui s’il est associé à des cellules oncocytoïdes et à un fond kystique peut être interprété à tort comme une tumeur de Warthin. Le carcinome muco-épidermoïde de haut grade montre des étalements très cellulaires avec une prédominance de cellules épidermoïdes très nettement atypiques. La présence de cellules intermédiaires et/ou mucineuses, même rares, est une des clés de son diagnostic. Le diagnostic différentiel le plus fréquent est le carcinome épidermoïde, primitif ou le plus souvent secondaire (métastases ganglionnaires intra- ou péri-glandulaires d’un carcinome primitif cutané de la tête et du cou).

Carcinome adénoïde kystique C’est une tumeur maligne salivaire primitive représentant < 10 % de toutes les tumeurs salivaires de l’adulte avec un pic d’incidence entre 30 et 50 ans. Elle se présente habituellement comme une masse ferme de croissance lente caractérisée par une tendance à l’invasion nerveuse responsable de douleurs radiculaires. Le carcinome adénoïde kystique est une tumeur maligne basaloïde présentant trois types histologiques différents : tubuleux, cribriforme ou solide. Les étalements de carcinome adénoïde kystique sont caractérisés par : • une cellularité variable ; • des groupes cohésifs de cellules tumorales arrangées en petits massifs, rosettes, cylindres ou en tubules ; • les cellules tumorales dites de type basaloïde sont petites, arrondies, uniformes, avec un rapport nucléocytoplasmique élevé, des noyaux hyperchromatiques et des cytoplasmes étroits, voire non visibles ; • mitoses et nécrose sont peu fréquentes en l’absence d’une transformation de haut grade ; • présence d’un stroma (ou matrice) caractéristique, homogène acellulaire, intensément acidophile au MGG, vert pâle au Papanicolaou, dit en globes hyalins dans le type cribriforme. Ce stroma est très peu abondant, voire absent dans la variante solide, ce qui complique le diagnostic. Le carcinome adénoïde kystique de type cribriforme est la forme la plus fréquente et la plus facilement reconnaissable sur étalements cytologiques : les cellules basaloïdes s’organisent alors en petits massifs ou en rosettes autour des globes hyalins. Les diagnostics différentiels sont nombreux, incluant des entités bénignes (adénome pléomorphe, adénome à cellules basales) et malignes (adénocarcinome polymorphe, adénocarcinome à cellules basales, carcinome épithélial-myoépithélial, certains carcinomes à petites cellules rondes). La discussion diagnostique entre carcinome adénoïde kystique et adénocarcinome polymorphe est l’apanage des tumeurs des glandes salivaires accessoires de siège palatin. Devant un néoplasme à cellules basaloïdes prédominantes, la caractéristique cytologique la plus importante pour identifier sur étalements cytologiques un carcinome

C. Bigorgne et al. adénoïde kystique est la présence de la matrice caractéristique. Il convient de rappeler qu’en cas de persistance d’un doute diagnostique entre plusieurs entités, la lésion sera alors classée en SUMP, sous-catégorie : néoplasme à cellules basaloïdes ».

Carcinome myoépithélial Le carcinome myoépithélial est rare, moins de 1 % des tous les carcinomes salivaires, survenant de novo ou sur adénome pléomorphe (carcinome ex adénome pléomorphe). Il est par définition composé de cellules à différenciation myoépithéliale et représente la contrepartie maligne du myoépithéliome. Les diagnostics différentiels principaux sont donc le myoépithéliome ainsi que l’adénome pléomorphe à cellules myoépithéliales prédominantes. Lorsque le diagnostic différentiel est difficile, les aspects devraient être classés en SUMP.

Carcinome ex adénome pléomorphe Il représente environ 12 % des tumeurs malignes des glandes salivaires, principalement dans la glande parotide et est le plus souvent de haut grade, de type carcinome canalaire salivaire ou adénocarcinome de haut grade SAI pour les formes les plus fréquemment observées.

Hémopathies lymphoïdes malignes Les lymphomes malins non hodgkiniens représentent 1,7 à 6 % des néoplasmes salivaires. La plupart des lymphomes primitifs des glandes salivaires sont de phénotype B, le lymphome de la zone marginale en étant la forme la plus fréquente, souvent associée à un syndrome de Gougerot Sjögren et se développant à partir du tissu lymphoïde associé aux muqueuses (lymphome du type MALT). Ses caractéristiques sur étalements cytologiques sont une grande richesse cellulaire faite d’éléments lymphoïdes polymorphes à prédominance de cellules de taille petite à moyenne, de cellules monocytoïdes, d’immunoblastes et de plasmocytes. Le diagnostic repose sur le phénotype des cellules défini par les techniques d’immunocytochimie et de cytométrie complémentaires. La deuxième forme la plus fréquente de lymphome salivaire est le lymphome diffus à grandes cellules B pour lequel les étalements cytologiques sont faits de grandes cellules lymphoïdes atypiques (taille > 2 fois celle du petit lymphocyte) et dont les caractéristiques phénotypiques sont également très typiques et indispensables pour porter un diagnostic formel. Le diagnostic différentiel des lésions lymphoprolifératives inclut tout aussi bien des lésions réactionnelles que des lésions néoplasiques des glandes salivaires s’accompagnant d’une réaction lymphoïde preéminente.

Tumeurs malignes secondaires Les processus métastatiques constituent 7,5 % de tous les néoplasmes salivaires non lymphoïdes et se présentent le plus souvent sous forme d’une masse solitaire. La glande parotide, et plus particulièrement les ganglions intra- et péri-parotidiens, sont envahis 20 fois plus souvent que la glande submandibulaire. 80 % des processus métastatiques intraparotidiens proviennent de tumeurs de la tête

Cytopathologie des glandes salivaires : le système de Milan 2018 et du cou, tout spécialement des carcinomes cutanés de la face et du cuir chevelu (carcinomes épidermoïdes, mélanomes malins). Ils posent parfois le problème du diagnostic différentiel avec un carcinome muco-épidermoïde ; mais les métastases ne montrent pas de fond mucineux (sauf celle d’un carcinome colloïde métastatique d’origine mammaire. . .).

Les études ancillaires Différentes techniques incluant les colorations spéciales, l’immunocytochimie (ICC), la FISH, la RT-PCR, le NGS, la cytométrie en flux peuvent être appliquées à la cytologie. Les techniques d’ICC sont considérées comme plus faciles à standardiser sur des cytoblocs (matériel fixé au formol), car comparables aux techniques d’IHC. En revanche la FISH est plus performante lorsqu’elle est pratiquée sur des préparations cytologiques par étalement.

Les colorations spéciales Les colorations histochimiques telles que le PAS ou le PAS diastase-résistant peuvent mettre en évidence les granules de zymogène du carcinome à cellules acineuses, le mucus du carcinome muco-épidermoïde et du carcinome sécrétoire. L’Oil-Red’O met en évidence les granules lipidiques des cellules sébacées.

L’immunocytochimie Les néoplasmes basaloïdes Les marqueurs myoépithéliaux (p40, p63, CK5/6, GFAP, pS100, AML ou Calponine) ne sont pas très spécifiques, mais ils peuvent donner une idée de la proportion de cellules myoépithéliales (Tableau 4). D’autres marqueurs sont plus spécifiques tels que MYB, CD117, PLAG1, HMGA2, bêtacaténine et LEF1.

Les néoplasmes oncocytaires Un panel immunocytochimique limité comprenant DOG1, SOX10 et p63 permet de différencier le carcinome adénoïde kystique de la tumeur de Warthin, le carcinome mucoépidermoïde et l’oncocytome. DOG1 et SOX10 sont des marqueurs des cellules acineuses et des canaux intercalaires nettement positifs dans le CAK. SOX10 est aussi un marqueur de cellules myoépithéliales.

Pour différencier une tumeur primitive d’une tumeur secondaire Les carcinomes de haut grade sont facilement identifiés. Cependant, la distinction avec une lésion secondaire peut parfois être problématique. Un panel réduit peut aider au diagnostic. La plupart des patients avec une métastase ont une histoire clinique connue. Le carcinome épidermoïde est le plus fréquent, souvent d’origine cutanée. Le RA, GATA3 et p63 sont utiles pour distinguer le carcinome canalaire salivaire (RA+, GATA3+ et p63−) d’un carcinome épidermoïde non kératinisant.

spécifiques et représentent des marqueurs diagnostiques fiables. L’absence de réarrangement n’exclut cependant pas formellement un type tumoral. Certains marqueurs représentent des facteurs pronostiques et des cibles thérapeutiques [5]. Les principales translocations et fusions sont indiquées dans le Tableau 5. Une translocation du gène PLAG1 et d’autres gènes de fusion, le plus fréquent étant CTNNB1, est retrouvée dans 50 à 60 % des adénomes pléomorphes. Le réarrangement de PLAG1 ou de HMGA2 est présent uniquement dans les adénomes pléomorphes et les carcinomes ex adénomes pléomorphes. La translocation spécifique impliquant les gènes CRCT1 et MAML2 a été rapportée dans environ 60—70 % des carcinomes muco-épidermoïdes, en général de bas grade. La translocation spécifique entre les gènes MYB et NFIB est retrouvée dans 28—86 % des carcinomes adénoïdes kystiques. La translocation spécifique ETV6 et NTRK3 est retrouvée dans 100 % des carcinomes sécrétoires. Ces translocations sont mises en évidence de fac ¸on optimale par la technique de FISH, parfaitement adaptée aux prélèvements cytologiques puisque les cellules restent entières ; elle n’aura de valeur que positive, mais elle permet d’affirmer un diagnostic même sur peu de cellules. La PCR peut également être réalisée à partir de matériel cytologique à condition de disposer d’au moins 50 à 100 cellules pour obtenir des résultats fiables. Elle est performante pour étudier l’expression génique y compris les transcrits de fusion. L’inconvénient est qu’elle ne détecte que les translocations connues et pas les variants qui seront mieux dépistés par FISH.

Cytométrie en flux Elle est particulièrement indiquée pour le phénotypage de populations lymphocytaires à partir de matériel frais, à condition d’avoir suffisamment de cellules. Elle est utile pour différencier une réaction lymphocytaire d’un lymphome [6].

Conclusion Un certain nombre de tumeurs sont facilement diagnostiquées par la cytoponction. L’utilisation de la classification de Milan simplifie la réponse cytologique et permet de ne pas systématiquement identifier le sous-type tumoral. Des zones d’ombre persistent notamment pour des tumeurs dont la malignité n’est pas évidente. Son but est d’uniformiser le langage en cytopathologie des glandes salivaires pour permettre une meilleure compréhension entre pathologistes et cliniciens pour une prise en charge optimale des patients. Son atout majeur est qu’il représente un outil de stratification du risque de malignité des aspects lésionnels observés sur étalements cytologiques.

Translocations et gènes de fusion On retrouve un certain nombre d’altérations génétiques structurales récurrentes dans les tumeurs des glandes salivaires. Lorsqu’elles sont présentes, elles sont hautement

57

Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

58

Références [1] Wei S, Layfield LJ, Li Volsi VA, Montone KT, Baloch ZW. Reporting for fine needle aspiration specimens of salivary gland lesions: a comprehensive review. Diagn Cytopathol 2017;45:820—7. [2] Schmidt RL, Hall BJ, Wilson AR, Layfield LJ. A systematic review and meta-analysis of the diagnostic accuracy of the fine-needle aspiration cytology for parotid gland lesions. Am J Clin Pathol 2011;136:45—59. [3] Faquin WC, Rossi ED. The Milan System for reporting salivary gland cytopathology. New York: Springer; 2018.

C. Bigorgne et al. [4] El-Naggar AK, Chan JKC, Grandis JR, Takata T, Slootweg PJ. WHO classification of head and neck tumours. WHO/IARC classification of tumours, 9, 4th ed. Lyon: World Health Organization/International Agency for Research on Cancer; 2017. [5] Seethala RR, Griffith CC. Molecular pathology: predictive, prognostic and diagnostic markers in salivary gland tumors. Surg Pathol 2016;9:339—52. [6] Stacchini A, Aliberti S, Pacchioni D, Demurtas A, Isolato G, Gazzera C, et al. Flow cytometry significantly improves the diagnostic value of fine needle aspiration cytology of lymphoproliferative lesions of salivary glands. Cytopathology 2014;25:231—40.