Dbait : un concept innovant pour inhiber la réparation de l’ADN et contribuer aux traitements des cancers

Dbait : un concept innovant pour inhiber la réparation de l’ADN et contribuer aux traitements des cancers

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Pour citer cet article : Biau J, et al. Dbait : un concept innovant pour inhiber la réparation de l'ADN et contribuer aux traitements des cancers. Bull Cancer (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.bulcan.2016.01.007 Bull Cancer 2016; //: ///

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Dbait : un concept innovant pour inhiber la réparation de l'ADN et contribuer aux traitements des cancers Julian Biau 1,2,3,4,5,6, Flavien Devun 1,7, Pierre Verrelle 1,5,6, Marie Dutreix 1,2,3,4

Reçu le 5 novembre 2015 Accepté le 12 janvier 2016 Disponible sur internet le :

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Centre de recherche, institut Curie, 91400 Orsay, France Centre national de la recherche scientifique, UMR3347, Orsay, France Institut national de la santé et de la recherche médicale, U1021, Orsay, France Université Paris Sud, Orsay, France Clermont université, université d'Auvergne, EA7283 CREaT, 63011 Clermont-Ferrand, France 6. Centre Jean-Perrin, département de radiothérapie, 58, rue Montalembert, 63011 Clermont-Ferrand, France 7. DNA Therapeutics, 91000 Evry, France

Correspondance : Julian Biau, centre Jean-Perrin, département de radiothérapie, 58, rue Montalembert, 63011 Clermont-Ferrand, France. [email protected]

Mots clés Inhibition réparation ADN Dbait DT01

Résumé De nombreuses thérapies anticancéreuses ont pour mécanisme d'action l'induction de dommages à l'ADN. Dans cette revue, nous allons dans un premier temps décrire ces différents types de dommages, ainsi que leurs voies de réparation. Ensuite, nous exposerons le mécanisme d'action et les applications potentielles d'une classe innovante d'inhibiteur de la réparation de l'ADN, le Dbait (et de sa forme clinique DT01). Les molécules Dbait/DT01 sont de courts fragments d'ADN double brin mimant une cassure de l'ADN. Ces molécules agissent comme des leurres vis-à-vis des enzymes de signalisation des dommages à l'ADN notamment PARP et DNA-PK qui sont hyperactivés. Cette hyperactivation créée une hypersignalisation non spécifique au site du dommage qui empêche la détection des dommages réels induits par les traitements et inhibe le recrutement des protéines de la réparation sur ces dommages. Des études précliniques ont démontré la capacité de Dbait/DT01 à augmenter l'efficacité (i) de la chimiothérapie dans des modèles de cancer colorectal ou de carcinome hépatocellulaire (ii) de la radiofréquence ablative dans des modèles de métastases hépatiques (iii) de la radiothérapie dans des modèles de xénogreffes radio-résistantes. Une étude de phase 1-2a incluant 23 patients a été conduite afin d'évaluer la tolérance et l'efficacité de la combinaison de DT01 à la radiothérapie pour le traitement des métastases cutanées de mélanome. Aucune toxicité dose-limitante n'a été observée. Une réponse objective a été notée dans 59 % des lésions, avec 30 % de réponses complètes. Ces premiers résultats cliniques prometteurs ouvrent de nombreuses possibilités au futur développement de Dbait/DT01.

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tome xx > n8x > xx 2016 http://dx.doi.org/10.1016/j.bulcan.2016.01.007 © 2016 Société Française du Cancer. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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Pour citer cet article : Biau J, et al. Dbait : un concept innovant pour inhiber la réparation de l'ADN et contribuer aux traitements des cancers. Bull Cancer (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.bulcan.2016.01.007

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J. Biau, F. Devun, P. Verrelle, M. Dutreix

Keywords DNA repair inhibition Dbait DT01

Summary Dbait: An innovative concept to inhibit DNA repair and treat cancer The ability of cancer cells to recognize damage and initiate DNA repair is an important mechanism for therapeutic resistance. The use of inhibitors of DNA damage repair or signaling pathways appears to provide a unique opportunity for targeting genetic differences between tumor and normal cells. In this review, we firstly describe the main DNA lesions induced by the different treatments and the pathways involved in their repair. Then we review the mechanism of action and applications of an innovative DNA repair inhibitor: Dbait (and its clinical form DT01). Dbait/ DT01 consists of 32 bp deoxyribonucleotides forming an intramolecular DNA double helix that mimics DNA lesions. They act as a bait for DNA damage signaling enzymes, the polyadenyl-ribose polymerase (PARP), and the DNA-dependent kinase (DNA-PK), inducing a "false'' DNA damage signal and ultimately inhibiting recruitment at the damage site of many proteins involved in double-strand break and single-strand break repair pathways. Preclinical studies have demonstrated the capacity of Dbait/DT01 to improve the efficiency of (i) chemotherapy in colorectal cancer or hepatocellular carcinoma models, (ii) radiofrequency ablative in colorectal cancer liver metastases models, and (iii) radiotherapy in xenografted mice with head & neck squamous cell carcinoma, glioblastoma and melanoma. Following this good preclinical results, we performed a first-in-human phase 1-2a study evaluating the safety and efficacy of the combination of DT01 with radiotherapy for the treatment of skin metastases of melanoma. Twenty-three patients were included. No dose-limiting toxicity was observed. An objective response was observed in 59 % lesions, including 30 % complete responses. This first promising clinical efficacy provides future potential interesting clinical development of Dbait/DT01 with various anticancer treatments.

Introduction

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De très nombreuses thérapies anticancéreuses ont pour mécanisme d'action l'induction de dommages à l'ADN [1]. L'induction de ces dommages peut perturber des phénomènes normaux comme la réplication, la transcription et/ou la recombinaison et aboutir alors à la mort cellulaire [2]. Un des facteurs de résistance des cellules cancéreuses aux traitements est leur capacité à reconnaître puis réparer les lésions induites à l'ADN [3]. Ainsi, les agents pharmacologiques inhibant les systèmes de réparation de l'ADN peuvent potentiellement majorer les effets cytotoxiques de ces thérapies dans les cellules cancéreuses [1,4]. De plus, l'action sur les activités de réparation de l'ADN offre l'opportunité de cibler des différences comportementales entre cellules tumorales et normales [1]. En effet, les cellules tumorales se divisent plus fréquemment et cela même en présence d'ADN endommagé du fait d'une dérégulation fréquente des checkpoints du cycle cellulaire. Elles présentent souvent un déficit de certaines voies de réparation ce qui augmente la dépendance aux voies restantes [5]. Enfin, les cellules tumorales se développent souvent en conditions de stress ce qui augmente la création de dommages endogènes de l'ADN [6]. Après avoir rappelé la nature des dommages induits par différents agents anticancéreux sur l'ADN et leur système de réparation, nous exposerons les résultats récents portant sur un concept innovant d'inhibition de la réparation de l'ADN par

des petits ADN interférents appelés Dbait (pour DNA strand break bait) qui désorganisent l'ensemble de la machinerie de réparation des cassures de l'ADN [7–16].

Dommages à l'ADN De nombreux et différents types de dommages à l'ADN peuvent être induits par les traitements anticancéreux [1]. Par exemple, 10 000 altérations diverses de bases (perte, oxydation. . .), 1000 cassures simple brin (CSB) et 40 cassures double brin (CDB) sont générées par l'irradiation d'une cellule à la dose de 1 Gy [17,18]. Bien que moins nombreuses, ce sont les CDB de l'ADN qui sont les plus toxiques pour les cellules [19]. En présence d'une CDB, plusieurs conséquences sont possibles :  si la CDB est réparée rapidement, la cellule poursuit son cycle et se divise ;  si la cassure n'est pas réparée rapidement, la cellule arrêtera son cycle de division jusqu'à la fin de la réparation ;  si la CDB n'est pas réparable, elle conduira à la mort cellulaire. Cette réparation peut être fidèle et permettre la survie cellulaire sans conséquence génétique. Mais elle peut aussi être fautive, menant soit à l'apparition de mutations et d'aberrations chromosomiques de façon pérenne [20,21] soit à la mort cellulaire si ces altérations génétiques résiduelles ne sont pas viables. Les CDB peuvent être induites directement ou indirectement. Les radiations ionisantes ou des agents radiomimétiques comme la bléomycine peuvent induire directement des CDB

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Réparation des dommages Selon le type de dommage à l'ADN, il existe différentes voies de réparation. Globalement, la première étape consiste en la reconnaissance du dommage par les protéines détectrices (sensors). Cela va permettre le recrutement de protéines médiatrices (mediators) et transductrices (transducers) permettant la signalisation du dommage et l'activation de protéines effectrices (effectors) [3]. La réparation des CSB se fait par une partie de la voie de réparation par excision de bases (BER) appelée la voie de réparation des CSB (SSBR) (figure 1A) [27]. BER prend en charge les bases endommagées. Les CSB sont reconnues par la polyADP-ribose polymérase (PARP). La fixation de PARP sur la CSB entraîne son activation et la poly-ADP-ribosylation (PARylation) de différentes protéines nucléaires, y compris PARP elle-même. Ces modifications protéiques vont conduire à leur tour au recrutement sur la CSB de différentes protéines comme XRCC1 ou les glycosylases puis de diverses protéines impliquées dans le

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comblement de la CSB (PCNA, FEN, polymérase b) puis la ligation (ligase III). La réparation des CDB de l'ADN se fait par deux voies principales : la recombinaison homologue (HR, figure 1B) et la suture non homologue (nonhomologous end joining [NHEJ], figure 1C) [28]. Dans les cellules mammifères, NHEJ est la voie dominante de réparation des CDB (figure 1C). Ce mécanisme intervient dans toutes les phases du cycle cellulaire mais de façon prédominante en G0 et G1. Comme son nom l'indique, NHEJ ne nécessite pas de séquence d'ADN homologue pour joindre les extrémités d'ADN d'une CDB. Il peut être associé à une perte de matériel génétique durant le façonnage des brins ou à de larges réarrangements lors de ligations inappropriées et s'avère donc potentiellement infidèle. La 1re étape est la reconnaissance des CDB par l'hétérodimère Ku70/Ku80, permettant le recrutement de la sous-unité catalytique DNA-PKcs formant ainsi le complexe protéique DNA-PK. Ce complexe DNA-PK ainsi formé sur le site de la CDB entraîne l'activation de son activité kinase. La kinase DNA-PK phosphoryle de nombreuses protéines dont H2AX, Artemis, XRCC4, ligase IV, XLF (XRCC4-like factor) qui sont recrutées sur le site de la CDB et participent directement à sa réparation. Ces protéines vont assurer dans un premier temps le façonnage des extrémités de la CDB puis leur ligation. Il existe une voie alternative du NHEJ (appelée backup-NHEJ ou alternative-NHEJ ou microhomology-mediated NHEJ) qui est détectée quand le NHEJ est défectif et implique les protéines comme PARP, XRCC1, WRN ou le complexe MRN (Mre11-Rad50-Nbs1)/BRCA1 [29]. HR intervient principalement en phase S tardive ou G2 (figure 1B) [28] car elle utilise le double brin d'ADN homologue non endommagé (le plus souvent de la chromatide sœur) comme matrice pour la réparation. Il constitue donc une voie de réparation le plus souvent fidèle quoique pouvant conduire à la perte d'hétérozygotie lors d'événements entre chromosomes homologues. HR nécessite la présence de BRCA1 activée pour réparer. Une CDB est reconnue par le complexe MRN (Mre11-Rad50-Nbs1) qui participe à la dégradation des extrémités afin de générer une région simple brin d'ADN. Ces extrémités sont ensuite protégées par fixation de protéines de réplication A (RPA) avant la fixation à leur tour de protéines de la famille RAD (en particulier RAD51) entraînant leur polymérisation sur l'extrémité simple brin. Ces protéines RAD vont rechercher une séquence homologue sur l'ADN double brin matriciel (préférentiellement celui de la chromatide sœur), puis l'envahir, aboutissant à la synthèse des brins endommagés de façon complémentaire aux brins intacts (jonctions de Holliday). Enfin, il y a dissociation ou coupure de ces jonctions et ligation des brins.

Inhibition de la réparation de l'ADN et mécanisme d'action de Dbait Depuis ces dernières années, de nombreux laboratoires académiques ou sociétés pharmaceutiques ont développé des

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potentiellement létales pour les cellules [1]. Ces CDB peuvent aussi être générées indirectement, au moment de la réplication, en conséquence d'un dommage initial non réparé avant la réplication. Par exemple, quand une fourche de réplication rencontre une CSB sur le brin matrice d'ADN, elle se bloque et entraîne la conversion de cette CSB en CDB [1,22]. Un autre type de dommages à l'ADN qui interfère avec les fourches de réplication consiste en des modifications chimiques additives (adduits) de bases de l'ADN. Ces adduits peuvent être induits par des agents qui se lient de manière covalente à l'ADN soit directement soit après avoir été métabolisés par l'organisme. De tels agents incluent les agents alkylants comme les moutardes azotées, les nitroso-urées ou les composés à base de platine [1]. Les inhibiteurs de la synthèse de l'ADN peuvent aussi indirectement induire des CDB dans la mesure où ils empêchent la progression des fourches de réplication [23]. C'est le cas par exemple de l'hydroxy-urée, un inhibiteur de ribonucléotide réductase. Cette inhibition entraîne une déplétion en deoxyribonucleoside 50 -triphosphate (dNTP) qui est essentiel à la synthèse de l'ADN [24]. Un autre moyen pour dépléter les cellules en dNTP est le recours aux antimétabolites comme le 5-fluorouracile ou les thiopurines. Ils peuvent inhiber la biosynthèse et le métabolisme des nucléotides et même être incorporés directement dans l'ADN. Un autre mécanisme important qui interfère avec la réplication normale et/ou la transcription est celui employé par les inhibiteurs de topoisomérases. Les topoisomérases génèrent des CSB et CDB transitoires pour enlever des torsions de l'ADN. Les inhibiteurs de topoisomérase I [comme les dérivés de la camptothécine] ou II [comme l'étoposide ou les anthracyclines] empêchent la religation de ces cassures transitoires, les rendant ainsi permanentes [25,26].

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Dbait : un concept innovant pour inhiber la réparation de l'ADN et contribuer aux traitements des cancers

Pour citer cet article : Biau J, et al. Dbait : un concept innovant pour inhiber la réparation de l'ADN et contribuer aux traitements des cancers. Bull Cancer (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.bulcan.2016.01.007

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J. Biau, F. Devun, P. Verrelle, M. Dutreix

Figure 1 Représentation schématique des voies de réparation des cassures simple et double brin et mécanisme d'action de Dbait La réparation des cassures simple brin (CSB) se fait par la voie de réparation des CSB (SSBR) (A). Les CSB sont reconnues par la poly-ADP-ribose polymérase (PARP). La fixation de PARP sur la CSB entraîne son activation et la poly-ADP-ribosylation (PARylation) de différentes protéines nucléaires, y compris PARP elle-même. Ces modifications protéiques vont conduire à leur tour au recrutement sur la CSB de différentes protéines comme XRCC1 ou de glycosylases puis de diverses protéines impliquées dans le comblement de la CSB (PCNA, FEN, polymérase b) puis la ligation (ligase III). Après la formation d'une cassure double brin (CDB), il y a phosphorylation de l'histone H2AX au site du dommage formant les foci g-H2AX localisées (

; immunofluorescence

rose). La formation des foci g-H2AX entraîne le recrutement de nombreuses protéines y compris la protéine 53BP1 (foci 53BP1 ; immunofluorescence verte). La première voie de réparation des CDB est la recombinaison homologue (HR) (B). La CDB est reconnue par le complexe MRN. Interviennent ensuite d'autres protéines telles que RAD51 et RAD52, aboutissant à la restauration de l'information génétique par recombinaison avec le brin d'ADN complémentaire. Il s'agit d'un mode réparation fidèle mais mis en jeu qu'en phase S et G2. Une autre voie de réparation des CDB, majeure chez les mammifères, est la recombinaison non homologue (NHEJ) (C). La CDB est reconnue par l'hétérodimère Ku80-Ku70 qui à son tour recrute et active la sous-unité catalytique de la protéine kinase ADN dépendante DNA-PKcs (

). Cela permet le recrutement de XRCC4, DNA ligase IV, XLF et Artemis, aboutissant à la réparation de la CDB.

(D) Mécanisme d'action de Dbait. Dans les cellules traitées par Dbait, la signalisation des dommages de l'ADN induits par les thérapies anticancéreuses est perturbée aboutissant à une inhibition globale. D'un côté, Dbait agit en fixant le complexe DNA-PK et désorganise son activité en rendant sa kinase hyperactive (

). Cette hyperactivation induit une

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phosphorylation de H2AX tout le long des chromosomes (g-H2AX pan nucléaire), empêchant alors la formation de foci g-H2AX localisées et donc la détection et la réparation des dommages induits (foci 53BP1), inhibant ainsi les voies NHEJ et HR de réparation des CDB. D'un autre côté, Dbait est capable de fixer PARP et de l'activer, entraînant des phénomènes de PARylation de diverses protéines incluant PARP elle-même et formant des polymères de poly-ADP-riboses qui s'agrègent sur les molécules Dbait. Ces polymères sont alors capables de recruter XRCC1 ou PCNA qui ne pourront alors l'être sur le site des CSB, empêchant ainsi la réparation du dommage en inhibant la voie SSBR par piégeage de ses principaux acteurs.

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Pour citer cet article : Biau J, et al. Dbait : un concept innovant pour inhiber la réparation de l'ADN et contribuer aux traitements des cancers. Bull Cancer (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.bulcan.2016.01.007

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du dommage. La quantification du nombre de foci g-H2AX est couramment utilisée pour estimer le nombre de CDB [35]. Pour inhiber la réparation des CDB, Dbait agit en fixant le complexe DNA-PK et désorganise son activité en rendant sa kinase hyperactive [8]. L'hyperactivation par Dbait de la kinase DNA-PK induit une phosphorylation de H2AX tout le long des chromosomes, empêchant alors la formation des foci g-H2AX et donc la détection et la réparation des dommages induits. Dbait est également capable d'inhiber la réparation des CSB [12] par fixation sur PARP. PARP est alors activée ce qui entraîne la formation des polymères de poly-ADP-riboses sur diverses protéines incluant PARP elle-même et la modification de la structure de la chromatine. Ces polymères sont alors capables de recruter XRCC1 ou PCNA qui ne pourront alors l'être sur le site des CSB, empêchant ainsi la réparation du dommage en inhibant la voie SSBR par piégeage de ses principaux acteurs. L'une des propriétés remarquables de Dbait est son absence de toxicité sur les cellules non tumorales. En effet, le signal de dommage créé par les Dbait n'affecte pas les kinases ATM et ATR qui contrôlent l'arrêt du cycle cellulaire et la mort apoptotique en présence de dommages [7–16]. De ce fait, les cellules primaires traitées par Dbait arrêtent leur division en présence de dommages non réparés et reprennent celle-ci une fois les Dbait disparus et la réparation effectuée. En revanche, les cellules tumorales ont perdu leur capacité à s'arrêter lors de la transition G1/S notamment par la fréquente mutation du gène p53. En inhibant la réparation de l'ADN, Dbait maintient un taux de cassures non réparées élevé tout au long du cycle. Les cellules cancéreuses peuvent cependant encore bloquer temporairement leur cycle en G2, ce qui ne sera pas suffisant à cause de la grande quantité de dommages non réparés encore présents. De plus, des résultats préliminaires montrent que Dbait induit une réduction de l'arrêt en G2 induit par l'irradiation dans les cellules cancéreuses. Les cellules tumorales traitées par Dbait poursuivent leur division en présence de cassures d'ADN et meurent de catastrophe mitotique.

Applications de Dbait En combinaison avec la chimiothérapie En 2012, une première étude préclinique a montré l'efficacité potentielle de Dbait en combinaison à la chimiothérapie in vitro puis in vivo dans des modèles de souris génétiquement modifiées développant des cancers de type colorectal [14]. Le cancer colorectal est un des cancers les plus fréquents dans les pays développés et une cause importante de décès par cancer [36]. La chimiothérapie (souvent à base de 5-Fluroro-uracile [5-FU] et d'autres agents comme l'irinotécan) prend une part importante dans le traitement de ce cancer que ce soit en néoadjuvant avec la radiothérapie dans le cancer du rectum localement avancé, en adjuvant de la chirurgie pour éviter les récidives ou pour traiter la maladie métastatique [37]. Dans cette étude préclinique, Dbait s'est montré capable in vitro d'inhiber la réparation des

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molécules pour moduler la réparation de l'ADN en ciblant les principales protéines impliquées dans les différentes voies de réparation [21,30] (figure 1D). Actuellement, les inhibiteurs de la réparation les plus avancés sur le plan clinique sont les inhibiteurs de PARP [31,32]. Les inhibiteurs de PARP nécessitent une déficience cellulaire constitutive de la voie HR pour être efficaces (létalité synthétique) [5,31]. L'ensemble des stratégies ciblant l'inhibition de protéines spécifiques de la réparation peuvent se heurter à des problèmes de spécificité d'action et d'émergence de résistances thérapeutiques par l'apparition secondaire de mutations sur la cible ou l'activation d'une autre voie de réparation (by-pass). C'est notamment le cas des inhibiteurs de PARP dont l'activité est fortement limitée par la possible émergence de résistance due à la réversion des mutations BRCA responsables du défaut de la voie HR [33,34]. Afin d'élargir la population pouvant bénéficier des inhibiteurs de réparation et éviter l'émergence de telles résistances, nous avons développé une nouvelle famille de molécules appelées Dbait qui inhibent non pas une cible spécifique mais la fonction globale de réparation, concept novateur en cancérologie. Les molécules Dbait sont des courts fragments d'ADN double brin de 32 paires de bases, stabilisés chimiquement, initialement développés par l'institut Curie (équipe « réparation, recombinaison et cancer », Dr Dutreix) et le Muséum d'histoire naturelle (Pr Sun), et maintenant par la société DNA Therapeutics (Evry, France) [7–16]. L'aspect innovant de Dbait est son mode d'action qui lui permet d'agir sur l'étape initiale de la réparation : la signalisation du dommage (figure 1D). En effet, les molécules Dbait miment une CDB reconnue par les enzymes de signalisation DNA-PK [7,8] et PARP [12] qui sont alors activées (figure 1D). Cette activation se produit au site de localisation des Dbait dans le cytoplasme ou dans le noyau hors de la chromatine créant ainsi un signal de dommage qui perdure plusieurs heures dans toute la cellule. La signalisation des vrais dommages sur les chromosomes (par l'intense phosphorylation des histones H2AX dans la région du dommage) est alors perdue dans ce bruit de fond (phosphorylation de H2AX tout le long des chromosomes) et le recrutement des enzymes de la réparation sur le site du dommage ne peut se produire (figure 1D). Un traitement lésant l'ADN, délivré après administration de Dbait, conduit ainsi à des cassures de l'ADN non réparables par détournement et/ou épuisement de l'activité de réparation dans les cellules durant la période de traitement. Comme Dbait inhibe la formation des foci de réparation qui contiennent plusieurs centaines de protéines nécessaires aux différentes voies de réparation des CDB (NHEJ et HR) et des CSB, il agit comme un inhibiteur global de la réparation de l'ADN (figure 1D). Suite à un traitement endommageant l'ADN, le recrutement de protéines de signalisation et de réparation des dommages constitue un événement primitif révélé par l'activation d'ATM et de DNA-PK et en conséquence la phosphorylation d'une batterie de protéines cibles incluant l'histone H2AX (g-H2AX) formant des foci au site

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Dbait : un concept innovant pour inhiber la réparation de l'ADN et contribuer aux traitements des cancers

Pour citer cet article : Biau J, et al. Dbait : un concept innovant pour inhiber la réparation de l'ADN et contribuer aux traitements des cancers. Bull Cancer (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.bulcan.2016.01.007

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lésions chimio-induites [par le 5-FU et/ou l'irinotécan] de l'ADN indépendamment du statut KRAS. Ces résultats ont été confirmés in vivo sur des souris génétiquement modifiées par une mutation APC (ayant ou non une mutation additionnelle KRAS) qui développent spontanément des tumeurs intestinales. Sans qu'aucune toxicité supplémentaire ne soit détectée, ces souris traitées par la combinaison Dbait et chimiothérapie (5-FU + irinotécan) avaient des tumeurs de taille significativement plus faibles et survivaient plus longtemps que les souris traitées par chimiothérapie seule [14]. Par la suite, l'activité potentielle de la forme clinique de Dbait (appelée ici Dbait/DT01) a été testée dans la carcinose péritonéale [15]. La carcinose péritonéale est une évolution locorégionale des cancers colorectaux, des ovaires ou de l'estomac notamment, de mauvais pronostics [38]. La chimiothérapie par voie générale a une efficacité limitée du fait de l'émergence de résistances dans les cancers avancés et de la faible biodisponibilité dans la cavité abdominale. Une autre approche consiste à une chirurgie de cytoréduction potentiellement couplée à un traitement par chimio-hyperthermie intrapéritonéale (CHIP) [39]. Dans cette étude préclinique, un fragment de carcinose péritonéale issue d'une patiente a été traité ex vivo juste après la chirurgie par nébulisation de Dbait dans une atmosphère d'hypercapnie. L'activité de Dbait étant fortement détectée dans les cellules cancéreuses (révélée par l'hyper-phosphorylation de l'histone H2AX) cette approche pourrait être envisagée pour augmenter l'efficacité de la chimiothérapie. Les molécules Dbait/DT01 s'accumulent préférentiellement dans le foie après une administration systémique. Leur utilisation dans le traitement des cancers localisés dans le foie tels que la métastase hépatique du cancer du côlon et le carcinome hépatocellulaire (CHC) a donc été évaluée sur des modèles murins orthotopiques. Dans ces expériences, la molécule a été administrée par voie systémique 5 jours consécutifs la semaine où la chimiothérapie a été donnée. La chimiothérapie utilisée était le 5-FU et l'oxaliplatine dans la métastase hépatique du cancer du côlon et la doxorubicine dans le CHC. L'association de Dbait/DT01 aux chimiothérapies a permis de réduire significativement la taille des tumeurs se développant dans le foie et de réduire la métastase péritonéale associée en comparaison à la chimiothérapie seule et au contrôle (article en cours de publication). De plus, l'analyse histologique a révélé une plus grande composante nécrotique et une plus faible activité proliférative dans les xénogreffes traitées par la combinaison. Enfin, nous avons testé l'efficacité de Dbait/DT01 en combinaison à la doxorubicine dans le cadre de la chimio-embolisation transartérielle (TACE) sur des lapins VX2 portant un carcinome greffé dans le foie [article en cours de publication] [40]. Les tumeurs ont été suivies par échographie hépatique puis par analyse histologique après sacrifice des animaux 30 jours après le traitement. En échographie, les tumeurs traitées par la combinaison Dbait/DT01 + TACE avaient une diminution 2 fois plus

importante par rapport à un traitement par TACE seule, efficacité confirmée par l'analyse histologique qui a montré une augmentation du taux de nécrose chez les tumeurs doublement traitées. De plus le rebond angiogénique qui suit l'embolisation et est souvent la cause de l'échec de la thérapie est fortement inhibé dans les tumeurs traitées par Dbait/DT01.

En combinaison avec la radiofréquence ablative La radiofréquence ablative (RFA) est une des alternatives à la chirurgie la plus utilisée pour traiter les métastases hépatiques de cancer du côlon [41]. La RFA consiste à délivrer un courant alternatif de haute fréquence à l'aide d'une sonde placée de façon percutanée ou chirurgicale dans la tumeur. L'hyperthermie créée par le courant s'étend dans le tissu avec cependant une décroissance rapide. Les cellules tumorales du centre meurent du fait des températures élevées. À la périphérie, les températures peuvent être trop faibles pour induire la mort cellulaire, pouvant entraîner des récidives locales, notamment pour les tumeurs plus volumineuses [42] bien que ces températures inhibent partiellement le HR par l'altération ou la dégradation des enzymes de cette voie [43]. La survie des cellules tumorales en bordure de la région traitée serait potentiellement due au HR non endommagé ou à l'utilisation d'une possible voie alternative comme le NHEJ. Ainsi, dans une étude préclinique, nous avons testé la combinaison de la RFA à Dbait/DT01 pour bloquer l'ensemble des voies de réparation de l'ADN et ainsi augmenter son efficacité thérapeutique [9]. Dans un premier temps, nous avons testé in vitro sur 4 lignées de cancer du côlon l'effet d'une hyperthermie à 43 8C et de Dbait. L'efficacité de la combinaison Dbait + 43 8C était 2 à 8 fois plus élevée qu'une hyperthermie simple. Nous avons ensuite testé la combinaison de Dbait à une RFA suboptimale sur des souris sur le flanc avec des cellules de cancer du côlon. L'effet de cette combinaison a été synergique avec une diminution significative de la croissance tumorale des souris xénogreffées et une amélioration de leur survie, confirmé par une étude histologique approfondie [augmentation des zones nécrotiques et baisse importante de la prolifération]. Cette nouvelle approche pourrait être testée en clinique pour augmenter l'efficacité de la RFA dans les métastases hépatiques de cancer du côlon les plus volumineuses ou du carcinome hépatocellulaire.

En combinaison avec la radiothérapie La radiothérapie est, avec la chirurgie et la chimiothérapie, une des pierres angulaires de la stratégie thérapeutique des patients atteints de cancer. Ainsi, 60 % des patients auront, à titre curatif ou palliatif, des séances de radiothérapie au cours de la prise en charge de leur cancer. La radiothérapie est utilisée principalement du fait de sa capacité à induire des dommages à l'ADN [2] et de provoquer préférentiellement la mort des cellules proliférantes. Tous les types tumoraux n'ont bien sûr pas la même sensibilité à la radiothérapie. La résistance aux radiations ionisantes peut intervenir qu'ils soient d'origine extrinsèque [type

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Pour citer cet article : Biau J, et al. Dbait : un concept innovant pour inhiber la réparation de l'ADN et contribuer aux traitements des cancers. Bull Cancer (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.bulcan.2016.01.007

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gouv#NCT01469455) en association à la radiothérapie dans le cadre des métastases cutanées de mélanome. Les molécules Dbait/DT01 ont été injectées en intratumoral et péritumoral, 1 jour sur 2 pendant la durée de la radiothérapie délivrant 30 Gy en 10 séances sur 2 semaines. L'objectif principal de cette étude était l'évaluation de la tolérance de Dbait/DT01 avec la radiothérapie. Les objectifs secondaires comportaient une analyse d'efficacité et de pharmacocinétique. Vingt-trois patients ont été inclus avec 85 lésions traitées. Concernant l'objectif principal, aucune toxicité dose-limitante n'a été observée. Il a simplement été relevé quelques réactions locales totalement réversibles de grade 1 ou 2 aux points d'injection. Il y avait également une très bonne tolérance immune des molécules Dbait/DT01. Pour l'efficacité, le taux de réponse objective des lésions traitées par la combinaison Dbait/DT01 et radiothérapie était de 59 % dont 30 % de réponses complètes. Ce taux semble 3 fois supérieur au taux de réponse reporté (9 %) par un traitement analogue de radiothérapie seule dans ce type de maladie [47]. Les études pharmacocinétiques ont montré un passage systémique de Dbait/DT01 avec un pic plasmatique détecté environ une heure après les injections locales et une demi-vie d'élimination d'environ 5 heures. De façon intéressante, nous avons retrouvé une relation significative entre la réponse au traitement et l'exposition plasmatique à Dbait/DT01, suggérant une possible efficacité systémique de Dbait/DT01 dans cet essai clinique. Les résultats de ce premier essai clinique d'administration de Dbait/DT01 chez l'homme sont très encourageants et ouvrent la voie au développement de futurs essais cliniques de DT01 par voie systémique.

Sécurité et tolérance Dbait est un agent anticancéreux d'un nouveau genre, qui appartient à la classe pharmacologique des oligonucléotides. À ce jour, quelques oligonucléotides ont déjà été approuvés par les autorités de santé, et d'autres sont en développement dans diverses pathologies. Les toxicités les plus importantes ont été observées avec des oligonucléotides contenant des liaisons phosporothioate sur toute leur longueur [48,49] afin de les protéger de la dégradation par les nucléases. Les molécules Dbait bénéficient de la résistance relative des ADN double brin et de la protection d'une boucle polycarbonée à une extrémité. Elles ne contiennent que trois phosphorotioates sur chaque brin de l'extrémité libre. Une autre toxicité observée avec les ADN thérapeutiques est l'augmentation de la réponse immune par l'activation des récepteurs TLR9 par les séquences CpG. Afin d'éliminer le risque potentiel d'une réaction auto-immune suite à l'administration répétée de Dbait, ces séquences ne sont pas présentes sur les molécules Dbait. L'absence de réponse immune induite par leur administration a été vérifiée chez des souris immunocompétentes traitées pendant quatre semaines par Dbait. Les études spécifiques de toxicologie de Dbait/ DT01 chez le rat Wistar et le singe cynomolgus n'ont montré

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de rayonnement, micro-environnement tumoral. . .] ou intrinsèque, liée au type cellulaire lui-même et notamment à ses capacités de réparation des dommages radio-induits [44]. Ainsi, la compréhension des mécanismes biologiques de cette radiorésistance laisse espérer l'émergence de nouvelles cibles thérapeutiques dont la neutralisation associée à un ciblage spatial de haute précision de l'irradiation pourrait en améliorer l'efficacité antitumorale sans en majorer la toxicité [45]. La preuve initiale de concept de l'efficacité de Dbait comme inhibiteur de la réparation de l'ADN a été démontrée en combinaison avec la radiothérapie [7]. Le mécanisme d'action de Dbait comme radiosensibilisant n'est pas un mécanisme spécifique à un type tumoral. Au laboratoire, ces molécules se sont montrées capables d'augmenter la radiosensibilité de lignées cellulaires et de tumeurs xénogreffées dérivées de mélanomes, de tumeurs du larynx, du poumon ou de glioblastomes. La survie des animaux était significativement meilleure lorsque ceux-ci étaient traités par un traitement combiné associant Dbait à la radiothérapie plutôt que radiothérapie seule. Cependant, dans la publication initiale montrant la radio-sensibilisation par Dbait, le Dbait était couplé à un agent de transfection polycations, le polyethylèneimine de 11 kDa (PEI, Polyplus, Illkirch, France). La nouvelle forme de Dbait appelée DT01 (Dbait/DT01 ici), couplée à un cholestérol en 50 , permet la pénétration intracellulaire de la molécule Dbait/DT01 en l'absence de molécule adjuvante et donc ne nécessitant plus d'agent de transfection pour une utilisation clinique potentielle [10]. Dbait/DT01 a donc été testé comme agent radio-sensibilisant dans un modèle préclinique de mélanome, tumeur particulièrement radio-résistante. Les souris xénogreffées sur flanc étaient traitées par un protocole de radiothérapie « palliatif » (30 Gy en 10 séances de 3 Gy sur 2 semaines, protocole utilisé usuellement en pratique clinique) ou « curatif » (60 Gy en 20 séances de 3 Gy sur 4 semaines) en combinaison avec des injections locales de Dbait/DT01. Les souris traitées par la combinaison Dbait/DT01 et radiothérapie avaient une inhibition significative de la croissance tumorale et une survie prolongée par rapport à la radiothérapie seule avec le protocole « palliatif » ou « curatif ». Seuls les animaux ayant reçu le traitement combiné ont montré des réponses complètes. Aucune toxicité supplémentaire n'était détectée dans les groupes traités avec du Dbait/DT01. Pour confirmer l'inhibition de la réparation in vivo, nous avons étudié la formation de micronoyaux dans les tumeurs. Il a été retrouvé une augmentation de deux fois de la fréquence des micronoyaux dans les tumeurs traitées par la combinaison Dbait/DT01 et radiothérapie par rapport à la radiothérapie ou au Dbait/DT01 seuls. Les micronoyaux sont des petits noyaux supplémentaires, situés dans le cytoplasme, qui contiennent des morceaux de chromosome, générés pendant une réparation de l'ADN inhibée [46]. Du fait de l'ensemble des résultats précliniques positifs sans toxicité ajoutée, les molécules Dbait/DT01 ont été testées lors d'un essai clinique de phase I (DRIIM : ClinicalTrial.

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Dbait : un concept innovant pour inhiber la réparation de l'ADN et contribuer aux traitements des cancers

Pour citer cet article : Biau J, et al. Dbait : un concept innovant pour inhiber la réparation de l'ADN et contribuer aux traitements des cancers. Bull Cancer (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.bulcan.2016.01.007

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J. Biau, F. Devun, P. Verrelle, M. Dutreix

qu'une réponse inflammatoire locale faible à modérée au site d'injection de Dbait, de manière dose dépendante et totalement réversible [13]. Dans l'ensemble des études précliniques réalisées à ce jour, il n'a jamais été rapporté de toxicités plus importantes dans les groupes traités avec Dbait et/ou DT01. Ceci a été confirmé dans le premier essai clinique utilisant Dbait/ DT01 chez l'homme. Cette apparente absence de toxicité surajoutée peut s'expliquer entre autres par la dérégulation des checkpoints du cycle cellulaire fréquente dans les cellules tumorales [1]. Cette dérégulation va permettre aux cellules de se diviser malgré la présence de CDB non réparées qui vont s'accumuler et pouvoir induire la mort cellulaire. À l'inverse, les cellules normales avec un contrôle du cycle cellulaire efficace, les CDB non réparées vont provoquer un arrêt du cycle cellulaire qui perdurera jusqu'à leur réparation après la disparition de Dbait (en moins de 24 heures) [10,50]. Concernant la potentielle augmentation du risque de cancer secondaire par les molécules inhibitrices de l'ADN, elle n'est pour l'instant pas démontrée. Ce risque, s'il existe, devrait être relativement limité si les molécules sont administrées sur une période de temps assez courte. En préclinique, il n'a pas été montré de cancers secondaires sur des souris traitées initialement par Dbait et radiothérapie et suivies sur le long terme [résultats non publiés].

Conclusion Dbait/DT01 est une molécule innovante qui agit non pas en ciblant une enzyme particulière mais en perturbant la fonction de réparation de l'ADN dans son ensemble pour augmenter l'efficacité des thérapies anticancéreuses existantes : chimiothérapie, radiofréquence ablative ou radiothérapie. L'ensemble des résultats précliniques obtenus indiquent que ces molécules ont la capacité d'augmenter l'efficacité de nombreux traitements anticancéreux comme des chimiothérapies ou la radiothérapie dans un grand nombre de types tumoraux. Bien que la plupart des modèles aient présenté une sensibilité aux combinaisons avec Dbait/DT01, il existe des différences dans l'étendue des réponses à ce nouveau traitement qui font actuellement l'objet des travaux du laboratoire. Les résultats précliniques sont encourageants tant du point de vue de l'efficacité que de la toxicité. Le premier essai clinique de phase 1/2a a montré une bonne tolérance en combinaison à la radiothérapie, un profil pharmacocinétique intéressant ainsi que des résultats antitumoraux prometteurs ouvrant la voie à d'autres essais cliniques à court terme. Déclaration de liens d'intérêts : Julian Biau, Flavien Devun, Pierre Verrelle et Marie Dutreix déclarent ne pas avoir de liens d'intérêts. Flavien Devun est employé de DNA Therapeutics, la société ayant le brevet de Dbait. Marie Dutreix est co-fondatrice de la société DNA Therapeutics.

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