Cancer/Radiothérapie 14 (2010) 571–575
Mise au point
De la mutualisation des comités de retour d’expérience (Crex) à l’audit des pratiques cliniques From Crex mutualisation to clinical audit F. Debouck a,∗ , H.-B. Petit b , É. Lartigau c,d a
Département sécurité opérationnelle, Air France Consulting, Roissy pôle, le Dôme, BP 11201, 3, rue de La-Haye, 95703 Roissy-CDG cedex, France AFM42, 21, allée de la Montjoie, 78240 Chambourcy, France c Centre Oscar-Lambret, département universitaire de radiothérapie, 37, rue Frédéric-Combemale, 59000 Lille, France d Université Lille Nord-de-France, 37, rue Frédéric-Combemale, 59000 Lille, France b
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a r t i c l e
Historique de l’article : ˆ 2010 Disponible sur Internet le 21 aout Mots clés : Radiothérapie Sécurité Événements précurseurs Retour d’expériences Mutualisation Analyse systémique Méthode Orion©
r é s u m é En 2004, sur proposition de la Mission nationale d’expertise et d’audits hospitaliers (MeaH), trois centres de lutte contre le cancer volontaires (Angers, Lille et Villejuif) ont mis en place un premier chantier sécurité en radiothérapie. Leurs travaux ont permis d’identifier la nécessité de poursuivre l’élaboration d’un référentiel avec l’objectif d’un « juste écrit », de prendre en compte le facteur humain comme une des quatre familles de facteurs contributifs à un « écart système » et surtout de construire collectivement, au niveau d’un département de radiothérapie, le comité de retour d’expérience (Crex). La formalisation d’un Crex est incontournable dans tout système de gestion de la sécurité (system management mode [SMM] ou manuel de gestion de la sécurité [MGS]). Le Crex permet à l’ensemble des acteurs d’un département d’écouter les événements du mois (incidents et précurseurs), de sélectionner l’événement qui fera l’objet de la prochaine analyse systémique (Orion© ) et surtout de choisir l’action corrective la plus appropriée pour s’assurer de sa bonne mise en œuvre. Cette démarche a été validée par les professionnels, étendue aux centres de radiothérapie puis reconnue par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) comme s’inscrivant dans la démarche de qualité/sécurité. Le comité de retour d’expérience, outil de management interne de la sécurité, doit cependant être partagé pour être profitable à tous et non réservé à un cercle local d’initiés. La mutualisation des comité de retour d’expérience – souhaitée et évoquée dès sa création – est aujourd’hui devenue réalité. Plusieurs initiatives ont déjà permis d’en mesurer l’intérêt collectif, d’autres étapes restent à faire et permettront un réel partage collectif de l’expérience. Sur cette base, la définition des pratiques de qualité/sécurité en radiothérapie doit nous permettre de mettre en œuvre à l’échelle 2012 des audits de pratiques cliniques (APC) menés par et pour les professionnels. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
a b s t r a c t Keywords: Radiotherapy Security Precursors events Experience feedback Mutualisation Systemic analysis Orion© method
In mid-2004, following a Mission nationale d’expertise et d’audits hospitaliers (MeaH) proposal, three voluntary cancer centres started setting up a safety procedure in radiotherapy. Their work made it possible to single out the need to continue elaborating a repository, aiming at a “minimal written reference”, to take into account the human factor as one of the four families of factors contributing to a systemic deviation and to build collectively, in radiotherapy departments, the experience feedback committee (comité de retour d’expérience [Crex]). Formalizing a comité de retour d’expérience is unavoidable in any safetymanagement system (SMM or MGS). The comité de retour d’expérience enables every active member of a department to listen to any of the events of the month (incidents and precursors), to select the event which will be under scrutiny for the next systemic analysis (Orion© method) and above all to choose the most appropriate correcting action and ensure its proper implementation. That approach has been approved and then acknowledged by the Autorité de sûreté nucléaire (ASN) before being extended to
∗ Auteur correspondant. 131, rue de Vaugirard, 75015 Paris, France. Adresse e-mail :
[email protected] (F. Debouck). 1278-3218/$ – see front matter © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.canrad.2010.07.018
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the other radiotherapy departments. The use of the comité de retour d’expérience, which is a safety management tool, should not be limited to a local circle of insiders, but shared to benefit everybody. Putting comité de retour d’expérience together – a move that was hoped for and brought up as soon as the tool was created – is now being implemented. Several initiatives have already permitted to assess its collective interest; other steps have yet to be taken to enable a true collective sharing of experience. On this basis, the definition of quality/safety practices in radiotherapy will allow the professionals to implement clinical audits in 2012. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
1. Introduction La radiothérapie constitue un « système » rendu complexe par les relations qui relient chacun des acteurs : • • • •
aux autres acteurs, dont le patient ; à l’organisation et aux procédures associées ; aux techniques (accélérateurs, logiciels, dispositifs, locaux.) ; à l’environnement.
La radiothérapie oncologique moderne doit s’organiser autour de principes de qualité/sécurité des pratiques et de service médical rendu au patient. Ce dernier point, bien que complexe, semble naturellement plus accessible aux praticiens. L’état de l’art se définit à travers les lectures scientifiques (evidence-based medecine), les échanges (réseaux, congrès) et se formalise au quotidien dans le cadre de la réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP). Il s’agit dans l’état actuel des connaissances et surtout des moyens, de délivrer le meilleur traitement possible, défini collectivement et appliqué individuellement. La notion de qualité/sécurité est plus difficile à appréhender et surtout à partager [6,1,2,7,5,8]. Elle va conditionner totalement le traitement mais sera en partie évaluée par des acteurs positionnés en dehors du champ médical quotidien (autorités réglementaires). Il en résulte des tensions et des incompréhensions alors que la place de ces acteurs est parfaitement justifiée (Direction générale de l’offre des soins [DGOS], Agences régionales de santé [ARS], Autorité de sûreté nucléaire [ASN]), Institut de veille sanitaire (INVs), Institut national du cancer ([Inca], etc.). L’aide d’acteurs ayant l’expérience de la mise en œuvre de pratiques de qualité/sécurité s’est révélée indispensable au succès des démarches entreprises [9–11,4,3]. L’avenir de notre spécialité (et de toutes les spécialités médicales) va donc passer par un équilibre à trouver entre le champ du médical et le champ du réglementaire. Au cœur du dispositif, se trouve le champ de la qualité/sécurité qu’il va falloir partager le plus rapidement possible afin d’avancer collectivement. Une fois ce chantier avancé (mutualisation des comité de retour d’expérience), la définition d’une pratique collective pourra se faire et son évaluation sera le lieu des audits de pratiques cliniques (APC) réalisés par et pour les professionnels.
gement de la sécurité dont le comité de retour d’expérience (Crex) reste une des composantes majeures. Dans toute activité de radiothérapie, les techniques mises en œuvre se modifient, les pratiques et le personnel changent, les exigences réglementaires évoluent et les attentes des patients sont différentes. Le système génère alors naturellement de nombreux écarts, les barrières existantes et la compétence des uns et des autres arrêtent naturellement la propagation de l’événement vers l’accident. La démarche collective qui consiste à être sensible à un écart et à son signalement est une source de progrès considérable. Ne rien dire, ne rien entendre et ne rien voir – pourtant illustration de la sagesse indienne – n’est pas ici de mise, c’est à partir de nos écarts que nous construisons nos marges et gagnons en expérience. Lors du comité de retour d’expérience, l’écoute partagée des événements de la période écoulée est riche d’enseignement, entendre ce qui a été fait, ce qui a été évité, ce qui aurait pu être fait est le début de l’apprentissage collectif. Chercher alors à comprendre pourquoi l’écart a pu se produire est riche d’enseignements. Pourquoi le « système » a-t-il généré cet écart ? Pourquoi les barrières n’ont pas fonctionné ? Ou encore pourquoi un bon professionnel et acteur compétent a-t-il pu faire une erreur ? Fort du retour de l’analyse systémique (Orion© ), le département de radiothérapie peut alors proposer et mettre en œuvre une action corrective pertinente. C’est la consolidation de l’organisation et de ses barrières qui rend le système robuste et tolérant à l’erreur. L’erreur humaine – contrepartie de notre performance – restera toujours un maillon faible et les bonnes pratiques sécurités (BPS) sont là pour y remédier : check-list, autocontrôle, contrôle croisé. . . Le comité de retour d’expérience n’est pas un cercle réservé à quelques initiés. Le comité de retour d’expérience est un réel outil de management au service du groupe : faire savoir les événements qui ont été déclarés et écoutés, faire partage des analyses et présenter le pourquoi des actions correctives. Chacun est actif au sein de la démarche d’apprentissage que ce soit à travers l’identification
2. Mutualisation des comités de retour d’expérience « Aucune perte de chance » est la définition du traitement pour le patient et le moteur de l’activité. Même si aucun bon professionnel ne fait volontairement mal son travail, de nombreux événements porteurs de risque – ou précurseurs – émaillent encore le quotidien de chacun des centres. Les travaux d’Heinrich puis de Bird ont permis de déterminer qu’à l’origine d’un accident majeur, on dénombre 600 précurseurs (pyramide de Bird) et si l’assurance du « zéro accident » n’est pas réaliste, c’est bien en travaillant à réduire la base de la pyramide que l’on retarde l’occurrence de l’événement redouté (Fig. 1). Un établissement sûr n’est pas un établissement qui n’a pas d’accident, mais c’est celui qui a mis en œuvre un système de mana-
Fig. 1. Pyramide de Bird.
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des écarts, de la recherche des facteurs contributifs ou influents et surtout porteur de la bonne mise en œuvre de l’action corrective. Gagner en compétence à partir de la compréhension de nos propres erreurs est un chemin que chacun peut parcourir, mais bénéficier de l’erreur de l’autre permet de significatives avancées : personne n’a fait la douloureuse expérience d’être écrasé par un camion. 3. Comment faire bénéficier la communauté de nos propres erreurs ? Chacun – tout corps de métier – devrait déclarer des écarts observés quotidiennement ; il n’y a pas de position au sein d’une organisation sans événement à percevoir. La dynamique installée, la richesse de l’enseignement peut et doit être partagée : il n’y a pas de « copyright » en termes de sécurité. 4. Quoi partager ? La connaissance des événements est une première source de réflexion à partager au sein du service, au sein éventuellement de l’établissement mais aussi entre pairs du même métier. Faire parler la base de donnée événements (regrouper, dégager des tendances, suivre les évolutions, en construire une typologie (taxonomie) est une démarche passionnante qui peut être entreprise par les acteurs eux-mêmes, assistés par un responsable qualité-sécurité. Le résultat de ces études peut alors servir à nourrir un regard collectif : établissement, intercentres, sociétés savantes, constructeurs de matériel. . . [2,7,5,10,11]. Le résultat des analyses est une deuxième source qui peut être partagée : certains facteurs contributifs pourront faire l’objet d’explications et de justifications d’organisations plus efficaces. L’action corrective, sous réserve d’en présenter toujours le contexte, peut aussi servir le collectif et représente la troisième source de partage. 5. Partager : comment s’y prendre ? L’approche doit d’abord être comprise par tous : la même signification derrière chaque mot, des outils identiques ou similaires et l’envie de progresser ensemble. Nul n’a l’assurance de la meilleure organisation. Les organisations professionnelles : sociétés savantes, fédération d’établissements, autorités, constructeurs, clubs d’utilisateur. . . peuvent être le moteur de ces démarches de mutualisation car des démarches existent, de nouvelles initiatives ont émergé, d’autres restent à imaginer et à construire. Nos erreurs doivent servir l’activité, nous ne devons jamais nous trouver face à un accident en levant le doigt : « je savais que cela devait arriver mais je n’ai pas alerté » et la communication au sein même du département doit être réfléchie et entretenue. C’est là sans doute l’élément clef de pérennisation du système. L’énergie doit être consacrée à la mise en œuvre de l’action corrective. Le changement pour être accepté passe par la compréhension du pourquoi. La sécurité doit avoir un sens et la formalisation du « ce que l’on ne veut pas voir arriver » est la toute première pierre de l’édifice, il s’agit : • de la non délivrance de la bonne dose au bon endroit au bon moment (y compris respect de la fréquence de fractionnement) ; • de délais anormalement long entre la décision et la première séance ; • d’un suivi post-traitement défaillant. Le pouvoir détenu par celui qui sait n’a pas droit de cité dans le monde de la santé car la sécurité pour le patient est un enjeu collectif et le partage des retours d’expérience est indispensable à tous.
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Les « bonnes pratiques » forment un ensemble de comportements qui font consensus et qui sont considérées comme universelles. Ces bonnes pratiques peuvent répondre aux obligations légales, ou les dépasser et elles ne sont généralement pas opposables. L’activité de radiothérapie est en mouvement, de nombreuses techniques nouvelles se mettent en place chaque année et le travail est communautaire : congrès, parutions, colloques, users group, task force, groupe de travail. . . Tout comme la base Rosis de données européennes d’événements indésirables en radiothérapie, le partage des retours d’expérience se structure. 6. Plusieurs initiatives récentes méritent d’être soulignées 6.1. L’informel La déclaration des événements porteurs de risque au niveau d’une unité de soins contribue à la transparence et les discussions informelles peuvent s’en trouver renforcées. Les débats sont d’autant plus riches, dès lors que les événements font l’objet d’analyses structurées et factuelles. 6.2. Comité de retour d’expérience ou revue de morbidité et de mortalité (RMM) (Réunion de concertation pluridisciplinaire de résultat [RCP]) L’animation du comité de retour d’expérience et la communication qui en est faite sont également un support au partage au sein de l’équipe. Et la communication des comptes rendus du comité de retour d’expérience au sein de l’établissement peut inciter certaines autres initiatives intraétablissement. 6.3. Déclarations à l’Autorité de sûreté nucléaire Chaque trimestre, l’Autorité de sûreté nucléaires publie le bilan trimestriel des événements en radiothérapie déclarés classés au niveau 1 de l’échelle de l’Autorité de sûreté nucléaires – Société franc¸aise de radiothérapie oncologique (SFRO). L’écoute de ce retour est un plus indéniable. 6.4. Chantiers Mission nationale d’expertise et d’audits hospitaliers – Agence nationale d’appui à la performance (Anap) – Institut national du cancer (Inca) Les différents chantiers sécurité initialement imaginés par la Mission nationale d’expertise et d’audits hospitaliers ont fait l’objet de larges publications : bulletin d’information, BPO, comités techniques nationaux (CTN), etc. 6.5. « Le comité de retour d’expérience des centres », périodique semestriel de la Fédération nationale des centres de luttes contre le cancer (FNCLCC)
Le comité de retour d’expérience des centres « La démarche comité de retour d’expérience permet la mise en œuvre d’actions correctives à partir de l’analyse d’événements précurseurs. C’est une démarche prospective d’amélioration de la sécurité de la prise en charge du patient, démarche s’intégrant dans le cadre global de l’amélioration continue de la qualité en radiothérapie. Les comités de retour d’expérience étant mis en place dans les 20 centres depuis fin 2008, il nous a paru indispensable d’en partager les aspects positifs car :
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• une mutualisation intercentres est un facteur essentiel de pérennisation de la démarche ; • cette mutualisation doit permettre la diffusion de l’information sur les événements précurseurs identifiés et ainsi d’informer l’ensemble des acteurs de la communauté des centres. Nous avons le plaisir de vous adresser le premier numéro du comité de retour d’expérience des centres, périodique semestriel, qui relatera trois événements précurseurs survenus dans des centres régionaux de lutte contre le cancer (CRLCC), les analyses qui en ont été faites et les actions correctives mises en place pour y remédier. Ce pictogramme permet d’identifier les éléments (procédures, documents, check-lists. . .) élaborés par le centre qui a relevé le précurseur et qui nous paraissent partageables et/ou utilisables par d’autres. Vous avez la possibilité de vous procurer de ces éléments en vous adressant au référent comité de retour d’expérience, dont les coordonnées figurent en tête de l’événement concerné, ou à la cellule qualité de la fédération. En dernière page, figurent une synthèse et une rubrique intitulée « Le mot du Directeur général de l’Autorité de sûreté nucléaire » qui permettent un rappel de bonnes pratiques et/ou d’éléments réglementaires. Le cas échéant, vous y trouverez également une rubrique « actualités », veille réglementaire et/ou médiatique sur la thématique. Nous espérons que les deux publications annuelles deviendront rapidement un rendez-vous attendu par la communauté de la radiothérapie des 20 centres. Le comité de retour d’expérience des centres est un outil à votre disposition. Il doit certainement évoluer et donc n’hésitez pas à nous contacter pour tout commentaire ou suggestion. Bonne lecture à tous.
Cette introduction au comité de retour d’expérience des centres illustre bien la nécessité de partager les actions correctives et de considérer une dynamique collective : tout le monde enregistre des événements précurseurs. 7. Journée de formation intercomité de retour d’expérience de la Fédération nationale des centres de luttes contre le cancer Lancée à l’initiative du centre Paul-Papin, une première journée annuelle interdépartements a pu avoir lieu à la rentrée 2009 et a permis un travail collectif sur la check-list. L’organisation de cette journée est reprise en 2010 par l’institut Claudius-Regaud de Toulouse et permettra un développement sur l’intérêt de la communication sécurisée. 8. L’attente exprimée par le centre de la Baie d’Avranches À la fin du chantier mené par l’équipe d’Avranches, ceuxci ont émis auprès de tous les autres centres concernés par le chantier le vœu d’une mutualisation des comités de retour d’expérience : • « nous pensons qu’il pourrait être intéressant de mutualiser les comités de retour d’expérience des centres franc¸ais. Regrouper au niveau national les événements principaux (seulement ceux analysés par le comité de retour d’expérience), ainsi que le détail des actions mises en place, permettrait de rapidement mettre en évidence pour tous les centres des débuts de solution, bien entendu à adapter ensuite localement. On pourrait même imaginer associer le nom des centres aux actions mises en place, ce qui permettrait d’améliorer, accélérer la communication entre
les centres intéressés, voire faciliter le travail de groupe sur un problème donné ; • dans cette hypothèse, un calcul rapide donnerait pour 40 centres impliqués, à raison de dix actions par an, 400 actions correctives mises en place dans l’année. Et si seulement 25 % de celles-ci sont distinctes, cela reste tout de même sur cette estimation 100 actions correctives probables par an, ce qui est énorme. Bien sûr, cela ne veut pas dire que 100 actions sont à mettre en place, mais 100 situations ont été étudiées, analysées et des corrections adéquates ont été proposées. À la sortie de ce chantier, à la vue des différents guides que la Mission nationale d’expertise et d’audits hospitaliers a pu éditer, nous avons l’intime conviction que la mutualisation de ces comités de retour d’expérience au niveau national serait une vraie avancée, une vraie solution d’amélioration rapide et efficace pour la gestion du risque en radiothérapie. N’oublions pas que le but est de fournir un service au patient dans des conditions de sécurité optimales, à atteindre le plus rapidement possible ». Les initiatives sont donc nombreuses et se structurent, la session annuelle qualité sécurité de la Société franc¸aise de radiothérapie oncologique en est une des manifestations. D’autres projets se dessinent via la Société franc¸aise de physique médicale (SFPM), l’Association franc¸aise du personnel paramédical d’électroradiologie (AFPPE), les constructeurs, les assureurs ? les comités d’usagers ? Les premiers résultats sont encourageants et le nombre de déclarations d’événements à l’Autorité de sûreté nucléaire progresse même s’il reste très perfectible. L’élément clef est surtout l’apparition d’une politique de transparence des acteurs, entraînant un regard constructif sur les différentes pratiques professionnelles. Bien évidemment, tout n’est pas résolu et des développements restent à venir comme : • finaliser la normalisation des approches et la rédaction des analyses – nécessité de parler de la même chose avec les mêmes mots ; • comprendre, « mutualiser » et utiliser au mieux les bonnes pratiques sécurités à juste proportion : ◦ les procédures d’identitovigilances, (action biométrie en cours), ◦ certaines check-lists, ◦ la normalisation des différents contrôles (contrôle croisé, autocontrôle) : • standardiser la structure du manuel des procédures – les établissements gardent leurs propres modes opératoires ; • formaliser la formation terrain ; • institutionnaliser les comités de retour d’expérience à l’ensemble de l’activité de cancérologie (extension en cours en, chimio ou chirurgie) ; • construire une « Réunion de concertation pluridisplinaire résultats » à partir des réunions de morbi-mortalité ; • internationaliser les échanges. 9. Conclusion Bien que les éléments organisationnels décrits ci-dessus aient des rôles et responsabilités spécifiques en rapport avec la gestion de la sécurité, le caractère universel de la sécurité des soins en radiothérapie exige que les efforts de chacun des centres soient intégrés dans un système de sécurité national cohérent, nécessitant coopération et collaboration à tous niveaux. Cette collaboration doit se faire dans tous les forums professionnels concernés : comme par exemple les sociétés savantes (Société franc¸aise de radiothérapie oncologique, Association franc¸aise du personnel paramédical d’électroradiologie, Société franc¸aise de
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physique médicale, etc.), les réseaux, les acteurs réglementaires (Autorité de sûreté nucléaire, Direction générale de l’offre des soins, Agences régionales de santé, Institut national de cancer, Institut de veille sanitaire, etc.), les constructeurs et les patients. La multiplicité des échanges contribue à rendre robuste les procédures et à renforcer la tolérance du système à l’erreur humaine. Mais l’enjeu va encore s’élargir car la mutualisation des expériences contribue à l’économie de santé, évite la catastrophe qui coûte cher à tous en termes d’image et de réputation, renforce le dialogue dans et en dehors des équipes et identifie précocement les dangers systémiques universels. La première étape du plan d’action semble bien engagée. La seconde étape, consistant à l’évaluation de nos pratiques cliniques de qualité et de sécurité (audits de pratiques cliniques) va pouvoir être mise en œuvre.
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Conflit d’intérêt [9]
Les auteurs n’ont pas déclaré de conflits d’intérêts.
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