De la vitesse de sédimentation au profil inflammatoire

De la vitesse de sédimentation au profil inflammatoire

Rev Mdd Interne (1994) 15,727-733 © Elsevier, Paris 727 Mise au point D e la v i t e s s e de s 6 d i m e n t a t i o n au profil i n f l a m m a t...

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Rev Mdd Interne (1994) 15,727-733 © Elsevier, Paris

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Mise au point

D e la v i t e s s e de s 6 d i m e n t a t i o n au profil i n f l a m m a t o i r e JJ Dubost l, M Soubrier 1, MN Meunier 2, B Sauvezie 1 I Unitd d'immunologie clinique, service de rhumatologie (Pr JL Bussibre), 2 laboratoire de biochimie (Pr C Gentou), h6pital Gabriel-Montpied, 63003 Clermont-Ferrand, France

(Regu le 13 avril 1994; accept6 le 23 juillet 1994)

R6sum~ - Le ddpistage d'un syndrome inflammatoire repose sur la mesure de la vitesse de s6dimentation (VS). Cependant elle n'est pas toujours corr616e h l'inflammation, et d'autres causes peuvent l'augmenter (andmie, hypergammaglobulindmie...) ou emp~cher son augmentation (polyglobulie, cryoglobuline, h6moglobinopathie...). Dans les cas litigieux, pour affirmer ou infirmer un syndrome inflammatoire, il faut doser les prot6ines de la rdaction inflammatoire (PRI) (CRP, fibrinog~ne, haptoglobine, orosomucofde...). Elles se diffdrencient par l'amplitude et la cin6tique des variations. Les PRI ne sont pas sp6cifiques des r6actions inflammatoires : le fibrinog6ne est abaiss6 dans les CIVD, l'haptoglobine dans les h6molyses, l'orosomucoide est augment6 dans l'insuffisance r6nale et la trmasferrine dans les carences martiales. Leur taux est aussi influenc6 par une insuffisance hdpatique, une fuite urinaire ou digestive. La valeur h u n temps donn6 est donc la r6sultante de variation parfois inverse. Dans les situations complexes les m6canismes de variation sont mieux appr6ci6s par des profils prot6iques. Ils consistent ~ doser simultandment plusieurs PRI en exprimant les rdsultats en valeur normalis6e. En pratique la VS reste l'examen de premiere intention pour le d6pistage du syndrome inflammatoire. Parmi des PRI la CRP a une place privil6gi6e car c'est un examen sensible dont les variations sont ind6pendantes de la VS et tr~s synchrones des processus inflammatoires. Les profils inflammatoires sont riches en information mais modifient rarement l'enqu~te diagnostique ou la thdrapeutique. Ils sont rdserv6s ~ certaines situations difficiles. vitesse de s6dimentation / prot~ine de la r6action inflammatoire / syndrome inflammatoire

Summary - From erythrocyte sedimentation rate to profiiles of acute phase proteins. The main biological sign of inflammation is an increase in erythrocyte sedimentation rate (ESR). However it can be falsely normal (polyglobulia, cryoglobulinemia, hemoglobinopathy) or spuriously high in the absence of inflammation (anemia, hypergammagIobulinemia). In cases of doubt, the acute phase reactants (APR) should be measured: C reactive protein (CRP), fibrinogen, haptoglobin, a t acid glycoprotein. They have different kinetics of variation and various degrees of increase (some - the so called "negative" proteins - actually decrease). Several pitfalls can be avoided if it is remembered that the APR themselves can be modified by causes other than inflammation: low fibrinogen in intravascular coagulation, very low haptoglobin in hemolysis, raised orosomueoide in renal insufficiency and elevated transferrin in iron deficiency. Furthermore liver insufficiency or leakage through the kidney or gut lesions can lower them. In some patients, the observed levels of APR are thus the result of opposite trends. In complex cases, these pathological mechanisms are more apparent on profiles which express the concomitant blood levels of several APR in a normalized or comparative manner. In medical practice, ESR serves first and foremost to detect an inflammatory syndrome. CRP is prominent among the APR because its changes show a great sensitivity, are independant of those of ESR and have a time course fitting closely that of the inflammatory processes. Profiles yield detailed information but rarely provide major evidence in the quest of a diagnosis or the choice of a treatment. Because of their cost they are to be used only in difficult cases. blood sedimentation / acute phase proteins / inflammation

L a p r 6 s e n c e ou l ' a b s e n c e d ' u n s y n d r o m e i n f l a m m a t o i -

gnostiques. C ' e s t aussi u n p a r a m ~ r e d 6 t e r m i n a n t p o u r

re est u n 616ment essentiel du r a i s o n n e m e n t m 6 d i c a l

apprdcier l'6volutivit6 et l'efficacit6 d u traitement des

qui suffit s o u v e n t h faire b a s c u l e r les h y p o t h e s e s dia-

m a l a d i e s i n f l a m m a t o i r e s c o m m e la m a l a d i e de Horton.

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JJ Dubost et al

La vitesse de s6dimentation et ses limites On estime habituellement le syndrome inflammatoire par la mesure de la vitesse de s6dimentation (VS) car c'est un examen simple et peu cofiteux (B8). I1 est sensible car perturbs par de nombreux facteurs. Mais cause de cela son interpretation est source de difficultEs.

Problbme de ddfi'nition d'une VS normale Selon les auteurs, la VS par la m6thode de Westergreen est considdrEe comme augment6e quand elle est supErieure ~ 10, 20, 30 ou 40 mm ~ la premitre heure [1-5]. I1 faut tenir compte de l'fige (la VS augmente avec l'~ge [6]) et du sexe (la VS est plus 6levEe chez la femme). Certains auteurs utilisent des formules empiriques, la plus c6t~bre est celle de Miller [7] qui ddfinit la limite supdrieure d e la normale comme l'~ge divis6 par 2 chez l ' h o m m e et l'~ge plus 10 divis6 par 2 chez la femme. Quatreving-dix huit pour cent des 27 912 adultes testds sont en-dessous de cette lirnite mais la moyenne de la VS de la population est bien inf6rieure. D'autres auteurs [3] pr6fbrent se rdfErer ~ la moyenne d'une population plus deux 6carts types.

La VS n'est pas toujours corrdlde au syndrome inflammatoire La VS explore la capacitE des globules rouges 5 former des rouleaux qui sddimentent plus rite que les cellules isolEes. Cette capacit6 depend surtout de la concentration plasmatique en macromolEcules asym6triques (surtout le fibrinog6ne) qui neutralisent les charges n6gatives d'autorEpulsion prdsentes ~ la surface des hdmaties. Si on fixe la contribution h cette agrEgation du fibrinog~ne ~ 10, celle des b~taglobulines est de 5, des alpha de 2, des gamma de 2 et de l'albumine de 1 [4]. La sddimentation est aussi fonction de la concentration, de la forme, de la taille et de la charge des hEmaties. On comprend que des causes qui tiennent au plasma, aux globules rouges ou ~t des conditions techniques puissent augmenter la VS en l'absence de tout syndrome inflammatoire [1, 4] (tableau I). L'andmie ou l'hypergammaglobulin6mie monoclonale ou polyclonale sont des causes bien connues. D'autres le sont moins ou sont controversEes comme le diab~te [8] ou l'obEsitE [9, 10] laquelle, chez quelques pa-

tients, pourraient augmenter la VS jusqu'~ 50 mm la premibre heure, mais cette cause n'est ~ retenir qu'avec beaucoup de rdticence. L'insuffisance r6nale peut augmenter la VS au-del~t de 90 mm h la premi~re heure par ElEvation du fibrinog~ne ou d'autres facteurs non identifies [11]. En revanche, la VS ne semble pas ~tre influencde significativement par l'heure du prEl~vement ou la prise d'aliments [4, 12]. A l'inverse une VS normale n'Elimine pas un syndrome inflammatoire. Des causes qui tiennent au plasma, aux globules rouges ou ~ des conditions techniques peuvent emp~cher l'augmentation de la VS [1, 4] (tableau II). C'est le cas d'une polyglobulie ou d'une cryoglobulindmie. D'autres causes sont moins connues comme les hdmqglobinopathies [13] ou controversEes comme l'insuffisance cardiaque congestive [14] ou un traitement antiinflammatoire [1, 4]. Dans les cas litigieux pour affirmer ou infirmer un syndrome inflammatoire il faut doser les protEines de la rdaction inflammatoire (PRI).

Les prot6ines de la r6action inflammatoire [12, 15-18] Ce sont les protdines dont la concentration plasmatique varie d'au moins 25% dans les 5 ~ 7 jours qui suivent le ddbut d'une inflammation. On les classe selon la cin6tique et l'amplitude des variations [17] (tableau III). La C-r6active protEine (CRP) s'61bve trbs rite d~s la sixi~me heure. Sa concentration est multipliEe par 300 ou plus et sa demi-vie est brOve, infErieure ~ 24 heures. Elle est doric tr~s synchrone des processus inflammatoires. C'est le cas aussi de la SAA (sErum amylo~'de A) mais son dosage est moins courant. D'autres protdines ont une concentration qui est multipliEe par 2 ~t 4 avec un pic entre le deuxibme et le cinquibme jour. C'est le cas du fibrinog6ne, qui contribue directement et fortement ~ l'acc616ration de la VS dont les dissociations sont alors attribuables des anomalies globulaires, c'est aussi le cas de l'haptoglobine, de l'orosomucoi'de (alpha 1 glycoprot6ine acide) ou de l'alpha 1 antitrypsine (alpha 1 prot6ase inhibiteur). D'autres comme la cEruloplasmine et la fraction C3 du complement augmentent d'environ 50% et de fa~on retard6e entre le cinquibme et le dixibme jour. Enfin certaines protdines comme l'albumine, la prEalbumine, la transferrine, la fibronectine et l'apoprotEine A1 ont une concentration qui diminue lors de l'inflammation. Ce sont les protdines <
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De la VS au profil inflammatoire

T a b l e a u I. Causes d'augmentation de la VS en dehors de l'in-

Tableau II. Causes pouvant emp~cher une augmentation de la

flammation.

VS.

Grossesse Hypergammaglobutin6mie Monoclonale Polyclonale Hypercholestdroldmie Diab6te Obdsit6 Insuffisance r6nale Hdparine Estroprogestatifs Perfusion macromoldcules

Andmie Macrocytosc Tempdrature ambiante excessive Tube inclin6 Erreur de prdl~vement (exces ou manque de citrate) Pr61bvement h6molys6

Polyglobulie Drdpanocytose Microcytose Anisocytose Acanthocytose Sphdrocytose Ddlai de lecture Tube trop court Basse temp6rature de la pibce

Hypofibrindmie Hypohaptoglobin6mie Cryoglobulindmie Hyperviscosit6 Exc6s de sels biliaires Leucocytose extreme Insuffisance cardiaque Cachexie Trichinose CorticoYde Ddpakine

T a b l e a u IlL Protdine de la rdaction inflammatoire.

PR1

PM

Concentration

1/2 vie (j)

Evolution Iors inflammation

C-rdactive protdine S6rum amylo~'de A

118 000 12 000

1 10 mg/l 1-10 mg/l

<1 <1

x505300 x50~1000

Alpha-l-antichymotrypsine Orosomuco~de Alpha-l-antitrypsine Haptoglobine Fibrinog~ne

68 000 44 000 54 000 85 ~. 170 000 340 000

0,2-0,5 g/l 0,4-0,8 g/1 2-3,5 g/1 0,5 1,5 g/l 2-4 g/1

2 2-3 4 4 4-6

C6ruloplasmine Fraction C3 compldment

135 000 180 000

0,2-0,5 g/1 0,8-1,4 g/1

3-5 1

Albumine Transferrine

65 000 85 000

35-40 g/1 2-3,5 g/l

15-20 8

x2h4

x f,5

$ $

Les dosages ndph61omdtriques sont c6tds B40. La facturation est limitde "aB40 x 2. Le fibrinog~ne en chronomdtrie est c6t6 B20.

D'autres causes que l'inflammation peuvent faire varier la concentration plasmatique de ces protdines en plus ou en moins ce qui complique l'interprdtation (tableau IV). Le fibrinogene est abaiss6 dans les coagulations intravasculaires dissdmindes ou apr~s un traitement cortico]'de. L'haptoglobine est diminu6e dans les h6molyses. L'orosomucoYde augmente dans l'insuffisance rdnale et est abaiss6 par des m6dicaments basiques (p6nicilline, 6rythromycine, betabloquants, furosdmide, cim6tidine) ou dans certains cancers. L a fraction C3 du compldment est augmentde dans les cholestases, mais peut 6tre consomln6 par des complexes immuns. La transferrine est augmentde dans les carences martiales et abaiss6e dans les surcharges en fer. Toutes ces protdines d'origin e h6-1 patique sont abaissdes dans l'insuffisance h6patique. Les estrogenes (grossesse, m6dicaments, hyperthyro~'die) stimulent la synthese de la plupart d' entre

elles mais diminuent l'orosomucoYde. La ddnutrition est ~t l'origine d'une baisse de la prdalbumine, de l'albumine et de la transferrine. Les protdines sont diminudes dans les gastroentdropathies par fuites digestives. Darts le syndrome ndphrotique la diminuc, tion affecte surtout les protdines de faible poias m o / 16culaire (albumine, orosomucoi'de) et parallelement il y a une augmentation des syntheses cons6cutives ~t la fuite urinaire massive en albumine. Une concentration basse peut aussi etre la consdquence de ddficits congdnitaux ou de l'absence de certains phdnotypes notamment pour l'haptoglobine ou l'alpha 1 antitrypsine. Avec l'~ge l'albumindmie diminue, les globulines et certaines PRI notamment le fibrinogene augmentent [19]. En pratique les variations de la CRP ou de l'orosomucoide chez le sujet ~g6 sont mineures et ne g6nent pas l'{nterpr6tation.

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Tableau IV. Causes de variation de la concentration des PRI en dehors de l'inflammation, Augmentation

PROFIL "ENTREE" 275%

342'7.

Diminution 250%

Fibrinog~ne Haptoglobine OrosomucoYde lnsuffisance r6nale C3 Transferrine

Cholestase Carence en fer

CIVD CorticoYdes H6molyse M6dicaments basiques Cancer

200%

Surcharge en fer 150%

Insuffisance h6patique (Estrog~ne

Cdruloplasmine Transfenine Alpha 1 antitrypsine Fibrinog~ne C3 CRP

D6nutrition Gastroent6ropathie exsudative Syndrome n6phrotique

Toutes, sauf

D6ficits cong6nitaux

Albumine Transferrine Haptoglobine Toutes OrosomucoYde

I( "~Z

507"

Pr6albumine Albumine Transferrine Albumine Transferrine OrosomucoYde Albumine Orosomucoide Haptoglobine Alpha 1 antitrypsine Toutes

Le taux s6rique d'une prot6ine est donc la r6sultante de tous ces ph6nom~nes. Les profils prot6iques permettent de rnieux les appr6cier.

Profil prot~ique inflammatoire I1 consiste h doser simultan6ment plusieurs prot6ines en exprimant les r6sultats en pourcentage de la valeur normale pour l'~ge et le sexe. Comme le pr6conise Giraudet [20], huit prot6ines sont habituellement dos6es dans l'exploration de l'infiammation. Les i m munoglobulines M, G e t A sont cens6es repr6senter l'immunit6 humorale. Leur augmentation peut &re globale c o m m e dans les pathologies infectieuses, dysimmunitaires ou les malades h6patiques. Elle peut aussi ~tre s61ective, monoclonale ou polyclonale. Ce param6tre sera appr6ci6 par une 61ectrophorbse des

07.

47 A

IgM

val. norm.

1.86 12.7 2.76 1.34 (1.66 1,28 o . u 8 1 4 5 . 2 ! 8 4 0 . 6 6 6.86 0.86 0,69 0.31 0.48 2 . 2 3 37.01 " . }

IgG

IgA

C3

IORO

HPT

TRF

Alb

CRP

conc.

3 . 7 3 : i('1.2 (]1.61 0 . 9 0

1.21 <0.I')5 2.44 4 1 . 2 1 1 1 . 9

unite

g/l

g/l

g/l

g/l

g/l

g/l

g/l

g/i

%

342

104

35

91

275

i'l

82

It'~(l i 198

img/l

Fig 1. Polyarthrite rhumatoYde trait6e par salazopyrine. Andmie mod6r6e avec VS et cr6atinine normale. Le profil montre un syndrome inflammatoire mod6r6 (augmentation CRP et orosomucoYde).L'effondrerrlent de l'haptoglobine est dO g une h6molyse th6rapeutique, la baisse des IgA est 6galement en rapport avec la prise de salazopyrine.

prot6ines et affirm6 par une immuno61ectrophor~se ou une immunofixation. Les 6tiologies des augmentations polyclonales sont nombreuses. Elles ont 6t6 discut6es dans des articles r6cents [21, 22]. A l'inverse, les immunoglobulines peuvent &re diminu6es de faqon globale comme dans les h6mopathies malignes (le my6lome h cha~ne 16g~re e n e s t un prototype), les traitements immunosuppresseurs ou les ent6rocolopat_hies exsudatives. Le d6ficit peut aussi ~tre s61ectif. La fraction C3 du compl6ment est h la fronti~re des r6actions immunitaires humorales et des rdactions inflammatoires. Elle peut 6tre abaiss6e par consommation (notamment dans le lupus) ou augment6e comme une PRI de cin6tique lente. L'hapto-

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PR(]F I L "ENTREE" 341%

250%

200%

150%

100%

50%

0%

.........................................................................................................................................

%~T?TT:~T ~E?E[-E.-gY(YS~[2;?~I~( iTT?~EFE?~-~-[75.7V|~V;U] ..... "m. o.V.kS,.::;,Lo.s1 t ':''° .I

Fig 2. Syndrome inflammatoire avec an6mie microcytaire. L'augmentation de la transferrine par rapport h l'albumine t6moigne d'une carence martiale.

globine et l'orosomucoYde ont des variations corr& 16es [20]. Une haptoglobine basse 6voque une hdmolyse intravasculaire ou intratissulaire (fig 1). Lors d'une inflammation une haptoglobine moins augment6e que l'orosomuco'fde pourrait avoir la m~me signification ce qui reste h valider. A l'inverse, une orosomucoYde abaissde ou moins angment6e que l'haptoglobine sugg~re une fuite urinaire, la prise de mddicaments basiques, une hyperestrogdnie ou une augmentation de l'activit6 neuraminidase observ6e dans certains cancers. Albumine et transferrine sont abaiss6es de faqon corr616e dans les inflammations prolong6es. Lorsque la transferrine est augment6e par rapport ~ l'albumine il faut 6voquer une carence martiale (fig 2) ou une hyperestrog6nie. On peut aussi int6grer au profil un dosage de la ferritine qui est abaiss6 dans les carences martiales ou augment6

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dans les surcharges martiales (h6mochromatose, transfusion it6rative...) mais aussi dans les 6tats inflammatoires, les cytolyses hdpatiques et les n6oplasies [23]. La CRP est augmentde de fagon synchrone au processus inflammatoire notaInment dans les pathologies bact6riennes. L'augmentation peut manquer notamment dans les infections virales ou lors des pouss6es lupiques [24]. Selon les situations des <> comportant deux ou trois prot6ines comme : CRP, orosomucoYde, haptoglobine peuvent ~tre constitu6s par exemple pour le suivi d'un syndrome inflammatoire. Le profil prot6ique inflammatoire est doric trSs riche en informations. II renseigne sur l'intensit6 et l'anciennet6 du syndrome inflammatoire, l'existence ou l'absence d'une r6action immunitaire humorale, l'association d'une fuite urinaire ou digestive, d'une h6molyse, d'une carence martiale ou d'une insuffisance h6patique. Cependant en aucun cas les profils ne donnent un diagnostic. De plus l'interpr6tation est souvent ddlicate et n6cessite un long apprentissage. Indications des marqueurs de l'inflammation Sch6matiquement plusieurs situations peuvent ~tre individualis6es.

Chez un patient asymptomatique dans un but de ddpistage I1 n'est pas justifi6 de rechercher un syndrome inflammatoire [4, 22] car m~me si on en ddcouvre un, il sera bien souvent impossible d'en pr6ciser la cause. Chez plus de 18 000 patients testds par la VS, seuls trois ont tir6 Un b6ndfice d'un diagnostic plus prdcoce (deux tuberculoses et un cancer colique) [22].

Exploration d'un symptOme comme des arthralgies ou des cdphaldes d'apparition rdcente Dans cette situation on fait une VS et un h6mogramme (B30) pour rechercher une an6mie ou une hyperleucocytose. Si la VS est normale et que l'on suspecte fortement une maladie inflammatoire il faut doser une PRI notamment la CRP. L'absence de syndrome inflammatoire a une valeur diagnostique ddterminante dans la fibromyalgie et son faux air d'affection rhumatismale, dans le syndrome de fatigue chronique source d'explorations biologiques souvent nombreuses et inutiles et constitue un important 616ment

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d'orientation 6tiologique au cours d ' u n e fi~vre [25]. Cependant le syndrome inflammatoire peut manquer dans la plupart des maladies inflammatoires [26]. Si le dosage des PRI montre un syndrome inflammatoire, il faut savoir pourquoi la VS ne s'est pas 61ev6e [26] ce qui peut ~tre important lorsqu'il existe une baisse du fibrinog~ne par une CIVD ou de l'haptoglobine par une h6molyse. I1 faut aussi tenir compte de la latence d ' a p p a r i t i o n des PRI. La CRP s'61~ve trbs vite mais elle n'influence pas la VS, le fibrinog~ne qui est le principal facteur d'augmentation de la VS ne s'dl~ve que quelques jours aprbs le ddbut de l'inflammation.

E x p l o r a t i o n d ' u n e V S dlevde

Le diagnostic est parfois rapide quand il existe une i n f e c t i o n 6 v i d e n t e ou une m a l a d i e i n f l a m m a t o i r e connue. Ailleurs il peut ~tre extr~mement difficile en raison de la longueur de la liste 6tiologique [21, 27]. On fait un h 6 m o g r a m m e et une 61ectrophorbse des prot6ines (B60) non pas pour rechercher une hypera l p h a - 2 - g l o b u l i n d m i e qui n ' a p p o r t e rien [5] m a i s pour mettre en 6vidence une hypergammaglobulin6mie n o t a m m e n t m o n o c l o n a l e . En l ' a b s e n c e d ' d l 6 ments d'orientation les profils prot6iques inflammatoires peuvent ~tre utiles non pas pour faire un diagnostic mais pour caract6riser le mieux possible le syndrome inflammatoire.

depuis longtemps. Dans cette situation la conduite 5 tenir est controversde, certains auteurs conseillent un renforcement th6rapeutique [22] alors que d ' a u t r e s ont continual la diminution en cortico'fde selon les donndes de la CRP sans observer de c o m p l i c a t i o n [in 21, 28].

Conclusion La VS reste l'examen de choix en premiere intention pour d6pister un syndrome inflammatoire car c ' e s t un examen simple, global, fiable, peu cofiteux et sensible dans les pathologies inflammatoires. I1 n ' y a pas d'int6r~t ~ associer le dosage du fibrinog~ne qui est souvent redondant [5], sauf dans les rares cas de syndrom e inflammatoire ~t VS normale. Parmi les PRI, la CRP a une place particulibre car c'est un examen trbs sensible dont les variations sont ind6pendantes de la VS et tr~s synchrones du processus inflammatoire. Les profils prot6iques inflammatoires sont trbs riches en informations mais en fait ils influencent rarement l'enqu~te diagnostique ou la thdrapeutique. Ces examens cofiteux n'ont pas leur place en premibre intention. Ils sont utiles dans le difficile problbme du diag n o s t i c d ' u n e VS 61ev6e en l ' a b s e n c e d'61dments d ' o r i e n t a t i o n ou pour 6valuer une carence martiale lors d ' u n syndrome inflammatoire.

R6f6rences l

Surveillance d'une maladie inflammatoire

2 La VS suffit dans la majorit6 des cas. On peut lui reprocher une latence importante qui peut 8tre g~nante notamment dans les pathologies infectieuses bactdriennes. On peut alors associer le dosage d ' u n e PRI de cin6tique rapide c o m m e la CRP qui se normalise bien avant la VS. L a CRP est plus fiable que la VS pour appr6cier un syndrome inflammatoire chez un patient trait6 par ciclosporine. La CRP est aussi utile pendant la grossesse et chez les sujets fig6s lorsque la VS est ~t 30 ou 35 m m apr~s 1 heure et que l ' o n h6site entre une VS normale pour l'fige ou un v6ritable syndrome inflammatoire. Certains auteurs proposent de doser l'haptoglobine. L'inflammation est sa seule cause d'augmentation. Elle serait plus sensible dans les 6tats inflammatoires chroniques. I1 arrive assez souvent que les PRI soient dissoci6es n o t a m m e n t dans la maladie de Horton, haptoglobine et orosomucoide restent 61ev6s alors que la CRP est normalis6e

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