Définition et psychopathologie de la dermite chronique des mains

Définition et psychopathologie de la dermite chronique des mains

Annales de dermatologie et de vénéréologie (2014) 141, S106-S110 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com DéÀnition et psychopathologie de la ...

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Annales de dermatologie et de vénéréologie (2014) 141, S106-S110

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

DéÀnition et psychopathologie de la dermite chronique des mains DeÀnition and psychopathology of chronic hand dermatitis

M. Lahfa Service de dermatologie, pôle spécialités médicales, hôpital Larrey, 24, chemin de Pouvourville, TSA 30030, 31059 Toulouse cedex 9, France

MOTS CLÉS Psychopathologie ; Eczéma chronique des mains ; Dermite chronique des mains ; Qualité de vie ; Perception ; Troubles cognitifs ; Troubles obsessionnels ; Lavage des mains ; Prurit

Résumé La psychopathologie des patients souffrant de dermite chronique des mains (DCM) est aussi complexe que ses formes cliniques où les facteurs sont multiples et très souvent intriqués. Elle associe des facteurs psychophysiologiques, psychopathologiques, des troubles du comportement pouvant être la cause ou la conséquence de la DCM mais aussi de l’impact négatif sur la qualité de vie et les gestes quotidiens les plus simples. La DCM altère la qualité de vie de chaque patient qui en souffre, quelle que soit la sévérité de la dermatose. La femme est plus affectée par la DCM que l’homme. L’âge avancé, le sexe masculin, un terrain atopique et l’existence d’une sensibilisation de contact sont des facteurs de risque indépendants de sévérité. La dépression pouvant toucher jusqu’à 10 % des patients implique une attention plus importante de la part des dermatologues et des médecins généralistes qui sont souvent en première ligne. Les autorités de santé ainsi que tous les acteurs de santé doivent être conscients des interactions qui existent entre les troubles cognitifs secondaires ou inhérents à la DCM et les efforts à déployer en termes de moyens de prévention. Ainsi, la présence de comorbidités psychiatriques est plus fréquente chez les patients souffrant de dermatoses chroniques. Aujourd’hui on considère que l’environnement affectif, construit par la relation enfant-mère doit être optimal, faute de quoi la stabilité psychique de l’image du corps peut être compromise, l’estime de soi diminuée, les affects moins bien gérés et l’expression somatique de contenu émotionnel peut s’exprimer. Récemment, une étude surprenante a montré que la plupart des patients souffrant de dermatoses professionnelles réfractaires n’étaient pas en mesure de reconnaître le symptôme annonciateur de la poussée, ni l’implication ou le rôle des facteurs psychologiques dans la formation et le maintien de la dermatose ; en fait, ils rejetaient une responsabilité personnelle dans la survenue des poussées. Pour pouvoir répondre à ce problème de santé publique, les autorités de santé, les soigneurs et soignants doivent être conscients de l’impact cognitif de la DCM chez ces patients et

Correspondance. e-mail : [email protected] (M. Lahfa). © 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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des interactions qui existent entre ces troubles cognitifs et les efforts et/ou moyens de prévention actuels. Le rôle du lavage obsessionnel-compulsif dans le cadre d’un trouble anxieux ou des troubles de la personnalité est très probablement un facteur aggravant ou entretenant systématiquement sous-estimé dans la physiopathologie de la DCM ainsi que dans la prise en charge thérapeutique. © 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

KEYWORDS Psychopathology; Chronic hand eczema; Chronic hand dermatitis; Quality of life; Perception; Cognitive troubles; Obsessive troubles; Hand washing; Pruritus

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Summary Psychopathology in patients with DCM is as complex as its clinical forms where the factors are numerous and often intricate. It combines psychophysiological, psychopathological factors, behavioral disorders which can be the cause or the consequence of DCM but also the negative impact on quality of life and the simplest daily activities. DCM affects the quality of life of every patient, regardless of the severity. Women are more affected by the DCM that man older age, male sex, atopy and the existence of a contact sensitization are independent risk factors of severity. Depression may affect up to 10 % of patients, should involve greater attention from dermatologists and general practitioners. Health authorities and all health actors should be aware of interactions between secondary cognitive troubles or inherent to DCM and efforts required in terms of preventive measures. Thus, the presence of psychiatric comorbidity is more common in patients with chronic dermatoses. Today it is considered that the emotional environment, built by the mother – child relationship must be optimal, otherwise the mental stability of body image may be compromised. Diminished self-esteem, affects less well managed and somatic expression of emotional content. Recently, a surprising study showed that most patients with refractory occupational dermatitis were not able to recognize the warning sign of Áare or the role of psychological factors in the formation and maintenance of the dermatose. In fact, they rejected their personal responsibility in the occurrence of the new Áare. To address this public health problem, health authorities, trainers and caregivers should be aware of the cognitive impact of DCM in these patients and interactions with current means of prevention. The role of obsessive-compulsive washing as part of an anxiety disorder or personality disorder is most likely a contributing or maintaining factor systematically underestimated in the pathogenesis of DCM and in the therapeutic management. © 2014 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

’eczéma chronique des mains (ECM) constitue un motif fréquent de consultation en dermatologie, en raison de la fréquence de cette dermatose, mais aussi parce qu’elle peut grandement entraver les activités quotidiennes et la qualité de vie des patients ; c’est dire le fort retentissement psychoaffectif et socioprofessionnel que cette situation peut engendrer. C’est la dermatose des mains la plus fréquente avec une tendance à la récidive et à la chronicité. La prévention repose sur l’identiÀcation et l’éviction des facteurs favorisant les poussées, associées à la mise en place de mesures de protection des mains (émollients, port de gant). Les dermocorticoïdes, en particulier ceux de la classe 4 (activité très forte) et la photothérapie localisée (puvathérapie localisée et photothérapie UVB) constituent l’arsenal thérapeutique de choix dans la prise en charge de l’ECM. D’autres alternatives thérapeutiques existent mais n’ont pas l’AMM. L’alitrétinoïne est un nouveau traitement efÀcace ayant l’AMM actuellement dans l’ECM sévère résistant aux dermocorticoïdes puissants. Tout d’abord un point sur la sémantique. Si l’on se réfère à la déÀnition du terme eczéma, l’ECM désigne un ensemble de symptômes spéciÀques à l’eczéma avec ses différentes

variantes bien connues, mais il se limite à cette seule déÀnition qui est donc assez restrictive. Si on compare cette situation à ce qui s’est passé avec la dermatite atopique, anciennement appelée eczéma constitutionnel ou eczéma atopique, on s’aperçoit qu’on est dans la même problématique ; le nom d’eczéma désigne un symptôme parmi un ensemble d’autres symptômes, et n’est donc pas représentatif de la maladie dans son ensemble ou de ses différentes formes cliniques. Ces formes cliniques, ainsi que les différentes dermatoses pouvant se manifester par une atteinte chronique des mains, sont souvent de mécanisme mal déÀni, mal compris, avec des formes de chevauchement, et sont souvent mal étiquetées confortant le fait que le terme eczéma n’est pas toujours le plus approprié. La meilleure appellation de l’eczéma chronique des mains serait la dermite chronique des mains (DCM), terme utilisé plus volontiers par les anglo-saxons. Diepgen et al. déÀnissent la DCM comme la persistance de troubles exclusivement localisés aux mains pendant plus de trois mois ou par la présence de plus de deux récidives annuelles malgré un traitement dermatologique adéquat chez un patient observant [1]. Comme le soulignent Bruno

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Halioua et le groupe d’expert de l’ECM [2], cette déÀnition est cependant discutable car le tableau clinique ne peut se limiter à des critères exclusivement chronologiques. Il semble plus pertinent de déÀnir l’ECM comme un syndrome anatomoclinique qui n’est pas dû à une cause exclusivement allergique ou orthoergique mais qui au contraire a souvent une origine multifactorielle [3] (Fig. 1). Par multifactoriel, on entend des causes et des facteurs multiples, variés, souvent mal ou non identiÀés, impliqués dans le développement des lésions, le déclenchement ou l’entretien des poussées [4]. Leur nombre, leur intensité et leur concomitance varient d’un individu à un autre et d’une poussée à une autre. Cette complexité et l’intrication des facteurs déclenchant ou entretenant la situation expliquent la diversité des tableaux cliniques observés chez un patient donné ou au sein d’un groupe de patients. Un point clé qui semble être le primum movens de la grande majorité de ces dermites chroniques des mains est l’altération de la barrière cutanée qu’elle soit endogène (terrain atopique) ou exogène (lavages répétés, milieu humide, produits détergents ou autres chimiques, huiles de coupe ou lubriÀantes, etc.), l’allergie proprement dite n’arrivant souvent qu’après cette altération de la barrière cutanée ou bien entendu chez les personnes prédisposées génétiquement [4,5].

Psychopathologie de la DCM La psychopathologie est l’étude raisonnée des troubles mentaux ou psychologiques et des troubles comportementaux ; cependant son champ d’étude s’étend aussi à la psychologie du pathologique, soit l’analyse psychologique du fait pathologique, comprenant la souffrance, exprimable ou inexprimable lors d’un deuil ou une maladie d’ordre organique, mais aussi les comportements déviants et anormaux. La recherche bibliographique sur la psychopathologie de la DCM ou ECM est extrêmement pauvre. Les deux dermatoses les mieux étudiées dans ce domaine sont le psoriasis et la dermatite atopique qui peuvent toucher les mains de façon chronique et qui peuvent se manifester sous la forme d’une

Atopie

Allergie de contact 30 % de facteur contact associé Irritations Mécaniques Caustiques/ chimiques

ECM Anomalies constitutionnelles de la fonction barrière cutanée (Altérations génétiques de la filagrine)

Occlusion, humidité macération froid Facteur intrinsèques-endogènes Facteur extrinsèques-exogènes Intrication variable dans le temps de ces facteurs déclenchants ou aggravants chez un même individu expliquant la résistance au traitement et le caractère chronique de l’ECM

Figure 1. Origine multifactorielle de l’eczéma chronique des mains (ECM).

atteinte isolée ou non des mains ; la DCM atopique est l’une des plus connues. Il faut dire que cette question est très complexe et relève de mécanismes variés, surtout dans le domaine de la psycho dermatologie. Ainsi, la psycho dermatologie est divisée en 3 catégories en fonction des relations existant entre les pathologies cutanées et les troubles mentaux [6] : • désordres psychophysiologiques causées par différentes dermatoses à l’origine de différents états émotionnels comme le stress, mais jamais associés directement à des troubles mentaux (psoriasis, eczéma) ; • troubles psychiatriques primitifs responsables de dermatoses auto-provoquées ou auto-inÁigées (trichotillomanie) ; • troubles psychiatriques secondaires entraînés par des dermatoses afÀchantes ou altérant plus ou moins sévèrement l’image de soi (ichthyose, acné conglobata, vitiligo), et pouvant aboutir à des états d’anxiété, peur, dépression voire des idées suicidaires. Pour compléter cette classiÀcation, on doit rajouter les troubles comportementaux ou mentaux secondaires à une dermatose ou à l’altération de la qualité de vie qui en découle, surtout quand il s’agit de dermatoses chroniques comme la DCM. Il peut s’agir notamment de comportements d’évitement (ne pas donner la main facilement ou éviter de serrer la main, s’empêcher de faire certaines taches quotidiennes ou développer certains gestes améliorant ou aggravant la dermatose en fonction des individus et de leur perception de leur maladie) [7]. Des études investiguant ce champ paraissent nécessaires, et l’évaluation de cet impact devrait faire partie de toute consultation dermatologique. La question qui vient ensuite est : est-ce que le stress à lui seul peut déclencher une poussée inÁammatoire de DCM ? Ou est-ce que le stress est la conséquence de la poussée inÁammatoire ? De manière générale, est-ce que l’anxiété a une inÁuence sur les dermatoses ? Et sur la DCM en particulier ? Vargas Laguna et al. [8] ont étudié 152 patients 132 souffrant de 5 groupes de dermatoses, urticaire chronique, urticaire aiguë, dermatite atopique, psoriasis et autres dermatoses réputées non liées au stress comme les kératoses actiniques, les naevus, carcinomes, etc. et 20 patients témoins. Les résultats montraient la présence de comorbidités psychiatriques plus fréquentes chez les patients souffrant de dermatoses chroniques et des niveaux d’anxiété de base et après stimulation plus hauts, essentiellement chez les psoriasiques et les atopiques. Koblenzer [9] approche l’impact émotionnel des dermatoses chroniques et invalidantes par le versant psychanalytique et développe certains des principaux facteurs précoces qui inÁuencent le développement psychologique, lequel permet de déterminer l’impact émotionnel que ces maladies peuvent avoir sur la vie des patients. Si l’environnement affectif, construit par la relation enfant-mère (ou éducateur), n’est pas optimal, la stabilité psychique de l’image du corps peut être compromise, l’estime de soi diminuée, les affects moins bien gérées et l’expression somatique de contenu émotionnel peut s’ensuivre. Chacun de ces facteurs est important en dermatologie, de même que la nature de la maladie et la capacité des familles et de la société à s’adapter. Y a-t-il un lien entre le stress et l’immunité à l’origine de l’inÁammation ?

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Hashizume H. et al. [10] suggèrent le rôle de l’anxiété dans l’accélération de l’expression de la réponse TH2, dans une étude portant sur 85 patients atopiques et 58 patients témoins sans aucun antécédent allergique. Les patients atopiques sont plus anxieux que les témoins, avec une corrélation clinicobiologique positive, notamment une augmentation des IgE lors d’une augmentation du stress chez les patients comparés aux atopiques n’ayant pas subi ce stress supplémentaire. On connaît peu le fardeau socio-économique de la DCM sévère chez les patients réfractaires au traitement par dermocorticoïdes puissants [11]. Chez 104 patients (moyenne d’âge 44,5 ans, 39,4 % d’hommes), les coûts moyens globaux étaient 418,3 €/patient et par mois avec une perte de productivité chez 43,7 %, une hospitalisation pour 16,1 % ; de plus 10,3 % des sujets avaient reporté un voyage à cause de la gêne occasionnée. Les scores de qualité de vie liée à la santé étaient, en moyenne de 0,50 (EQ-5D) et 11,3 (DLQI). L’EQ-5D et DLQI étaient signiÀcativement corrélés. En conclusion, altération du bien-être et perte de productivité sont les conséquences les plus importantes chez ces patients. Un traitement approprié est nécessaire pour améliorer la santé et la productivité, ce qui contribuerait à réduire les coûts pour la société. Les maladies de peau au travail sont les maladies professionnelles les plus fréquentes dans la plupart des pays industrialisés et constituent un fardeau social, économique et personnel lourd. Cependant, à ce jour, aucune étude n’a évalué la perception de leur maladie des patients souffrant de dermatoses professionnelles réfractaires. Pour cela, Bathe et al. [12] ont administré des entretiens semi- structurés et dirigés chez 50 patients. Les résultats sont surprenants, car la plupart des patients n’étaient pas en mesure de reconnaître le symptôme prémonitoire ou annonciateur de la poussée (la peau sèche), ni l’implication ou le rôle des facteurs psychologiques dans la formation et le maintien de la dermatose. Les patients rejetaient une responsabilité personnelle dans la survenue des poussées. Avant d’être prêts à agir sur les mesures de protection cutanée, les organismes externes (employeurs, organismes d’assurance) doivent surmonter une série d’obstacles perçus par ces patients. En effet, les expériences antérieures négatives quant à la protection de la peau menaient souvent à la conclusion que ces mesures en général ne sont pas efÀcaces. Pour pouvoir répondre à ce problème de santé publique, les autorités de santé, les soigneurs et soignants doivent être conscients de l’impact cognitif de la DCM et des interactions qui existent entre ces troubles cognitifs et les efforts et/ou moyens de prévention actuels. Ainsi de nombreux détails de la perception du patient sont souvent négligés, et devraient être pris en compte. De ce fait ces interventions, même bien préparées, n’atteindront pas la population visée. Un aspect intéressant et fréquemment trouvé lors d’une consultation d’un patient souffrant d’une DCM, est le lavage fréquent des mains. C’est une cause très probablement sous-estimée et à tous points de vue. Le rôle du lavage obsessionnel-compulsif dans le cadre d’un trouble anxieux ou des troubles de la personnalité ne peut pas être considéré comme sufÀsant, si l’on en croit Shab et al. [13] : une possible relation pathogénique entre la dermite des mains et des troubles psychogènes est discutée sur 3 cas

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personnels illustrant bien cette relation. L’assistant d’un médecin de 22 ans, un inÀrmier en soins intensifs de 50 ans, et un technicien de surface de 54 ans rapportent dans leur vécu de la maladie, des sentiments de dégoût, de peur de la contamination et une fréquence élevée de lavage des mains. Ces cas doivent encourager les dermatologues à tenir compte des aspects psychologiques ou psychopathologiques de la DCM, comme les troubles obsessionnel-compulsifs, à déÀnir et tenter de surmonter ces inhibitions et à tenir compte de ces aspects dans le projet thérapeutique établi avec le patient. L’impact de la qualité de vie de DCM paraît évident, et c’est une des raisons paradoxales pour laquelle on n’a que peu d’études sur le sujet. Un total de 416 patients atteints d’eczéma des mains de 10 cliniques européennes pratiquant des tests cutanés, ont participé à une évaluation par DLQI de l’impact de la DCM [14]. La sévérité de la DCM était évaluée par le Hand Eczema Severity Index (HECSI) ainsi que la fréquence des éruptions et des congés de maladie en raison de la DCM. À la surprise générale, aucune différence signiÀcative n’a été trouvée entre les hommes et les femmes en ce qui concerne la qualité de vie (valeurs médianes du DLQI et 25/75 percentiles pour les hommes et les femmes étant de 7,0 (3-14) et de 8,0 (3-13), respectivement), bien que les hommes aient été plus gravement touchés que les femmes (p < 0,025). Une corrélation positive et signiÀcative a été trouvée entre la sévérité de l’ECM et l’âge (p < 0,001), alors qu’il n’y avait pas de corrélation entre la qualité de vie et l’âge. La qualité de vie était plus altérée lorsque les congés de maladie devenaient plus fréquents (p < 0,001). Une corrélation entre la qualité de vie et la sévérité de l’eczéma de la main était observée (p < 0,001). Aucune différence en termes de qualité de vie n’a été constatée entre les sousgroupes de diagnostic. La qualité de vie est donc fortement altérée chez les patients atteints de DCM et est corrélée à la sévérité de la maladie. Par contre, aucune différence n’est observée selon le sexe, en dépit d’une sévérité plus importante de la DCM chez les hommes, ce qui implique que le seuil d’altération de la qualité de vie est plus bas chez les femmes. Cvetkovski et al. [15] ont tenté d’évaluer la qualité de vie et la dépression chez les patients souffrant de dermatoses des mains professionnelles. Les objectifs étaient de déterminer les facteurs de risque de qualité de vie altérée, la fréquence et la sévérité de la dépression et les changements dans la qualité de vie et la dépression après 12 mois de suivi. Un constat danois est qu’en dépit des tentatives gouvernementales pour réduire l’exposition aux allergènes professionnels nuisibles des travailleurs, le nombre de nouveaux cas est resté pratiquement inchangé depuis le milieu des années 1990. 758 patients, comprenant tous les nouveaux cas reconnus par l’OfÀce national danois des accidents du travail ont été enregistrés entre octobre 2001 et novembre 2002. Tous les patients ont reçu un questionnaire pour déterminer la de la qualité de vie et les symptômes dépressifs. Un questionnaire de suivi similaire était administré 1 an plus tard. Le taux de réponse était de 82 % au départ et 91 % au suivi. Le DLQI total moyen était de 5,5 pour tous les patients et de 7,8 pour les cas sévères de DCM. Ces cas sévères et le statut socio-économique bas étaient indépendamment associés à une qualité de vie

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altérée. La prévalence de la dépression modérée à sévère était de 9 %. Seuls des changements mineurs dans la qualité de vie et des symptômes dépressifs ont été trouvés après 12 mois de suivi. La sensibilisation de contact a été identiÀée comme un facteur associé à un mauvais pronostic chez les patients atteints de DCM. Pour évaluer les facteurs inÁuençant la sévérité, la qualité de vie et les arrêts maladie liés à la DCM, une étude multicentrique européenne a inclus 416 patients [16], dont 63 % avaient une sensibilisation de contact à un ou plusieurs allergènes, avec plus de femmes (66 %) que d’hommes (51 %) qui étaient sensibilisés. Aucune association n’a été trouvée entre la sensibilisation à des allergènes spéciÀques, la sévérité de la maladie, la qualité de vie ou les sous-groupes de diagnostic. L’âge avancé, le sexe masculin, la dermatite atopique (DA) et l’existence d’une sensibilisation de contact sont des facteurs de risque indépendants de la sévérité. Par ailleurs, la sévérité de l’eczéma des mains augmente avec le nombre de sensibilisations de contact détectées (p = 0,023). L’âge avancé et l’histoire personnelle de DA sont des facteurs de risque indépendants de qualité de vie altérée. La DA ainsi que la dermite de contact allergique sous diagnostiquées étaient associées à une augmentation des arrêts maladie. Un message d’importance, les sous-groupes de diagnostic n’étaient pas liés à des allergènes spéciÀques. En déÀnitive, la psychopathologie des patients souffrant de DCM est aussi complexe que ses formes cliniques où les facteurs sont multiples et très souvent intriqués. La DCM altère la qualité de vie, quelle que soit la sévérité de la dermatose.

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Liens d’intérêts Orateur, investigateur et consultant pour Novartis, Astellas, Galderma, PÀzer, Janssen-Cilag, Abbvie, MSD, GSK, Amgen, Leo Pharma.

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