Douleurs et migraine

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Douleurs Évaluation - Diagnostic - Traitement (2009) 10, S45—S47 RÉTROSPECTIVE DE LA PRISE EN CHARGE DE LA DOULEUR DEPUIS DIX ANS Douleurs et migrai...

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Douleurs Évaluation - Diagnostic - Traitement (2009) 10, S45—S47

RÉTROSPECTIVE DE LA PRISE EN CHARGE DE LA DOULEUR DEPUIS DIX ANS

Douleurs et migraine Pain and migraine Dominique Valade Centre d’urgence des céphalées, hôpital Lariboisière, 2, rue Ambroise-Paré 75010 Paris, France Disponible sur Internet le 31 janvier 2009

MOTS CLÉS Méta-analyse ; Triptans ; Efficacité ; Tolérance

KEYWORDS Meta-analysis; Triptans; Efficacy; Tolerance

Résumé Les auteurs ont demandé aux compagnies pharmaceutiques les résultats de leurs études dans le but de réaliser une synthèse de ces différents résultats pour pouvoir analyser et comparer ces derniers sur le plan de l’efficacité et des effets secondaires. © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Summary We asked the pharmaceutical firms about their study results in order to present a synthesis of these different results with the goal of analyzing and comparing them in terms of efficacy and adverse effects. © 2008 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Article fondateur Les références de l’article en question : Ferrari MD, Roon KI, Lipton RB, Goadsby PJ. Oral triptans (serotonin 5-HT [1B/1D] agonists) in acute migraine treatment : a meta-analysis of 53 trials. Lancet 2001 Nov 17 ; 358 (9294) : 1668—75. Les triptans, agonistes 5HT1B/1D sont des traitements efficaces de la crise migraineuse. Bientôt, sept triptans différents seront disponibles en clinique à 13 dosages différents, rendant nécessaire la publication des lignes directrices basées sur l’évidence. Les essais cliniques sur les triptans ont des méthodologies différentes, ce qui facilite

Adresse e-mail : [email protected]. 1624-5687/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.douler.2008.11.007

S46 le processus de méta-analyse. Nous souhaitions fournir une base fondée sur la littérature pour l’utilisation des triptans dans la pratique clinique et revoir les particularités méthodologiques propres aux essais sur les triptans. Nous avons demandé aux compagnies pharmaceutiques et aux investigateurs principaux des essais indépendants des compagnies de nous fournir les données brutes des tous les essais randomisés contrôlés double insu portant sur les triptans dans le traitement de la migraine. Les données ont été comparées et recroisées avec les données publiées. Nous avons calculé des estimations interétudes pour les paramètres importants d’efficacité et de tolérabilité et nous avons comparé ces résultats à ceux présentés dans les essais publiés « face/face » avec comparaison directe de deux produits. Soixante-seize essais étaient éligibles, 53 rencontrant les critères d’inclusion ont été retenus (12 non encore publiés), totalisant 24 089 patients. Les résultats moyens (pour un intervalle de confiance de 95 %) pour le sumatriptan 100 mg, le premier triptan oral prescrit, étaient de 59 % (57—60) pour la réponse partielle (douleur passée de « modérée ou sévère » à « léger ou à aucune douleur ») ; 29 % (27—30) pour le soulagement total à deux heures (amélioration complète) ; 20 % (18—21) pour le soulagement persistant (aucune douleur à deux heures et absence de récidive ou de prise médicamenteuse de deux à 24 heures postdose) et 67 % (63—70) pour la reproductibilité des résultats (réponse pour au moins deux sur trois des crises traitées). Les proportions de patients avec au moins un effet secondaire (en soustrayant le pourcentage obtenu chez le groupe placebo) étaient de 13 % (8—18), 6 % (3—9) pour un effet secondaire du système nerveux central et 1,9 % (1,0—2,7) pour un effet thoracique. Par comparaison avec les données pour le sumatriptan, le rizatriptan 10 mg montre une meilleure efficacité et reproductibilité et une tolérabilité similaire. L’eletriptan 80 mg montre une meilleure efficacité, une reproductibilité similaire mais une moins bonne tolérabilité. L’almotriptan 12,5 mg montre une efficacité similaire à deux heures mais un plus haut taux de soulagement persistant, une meilleure reproductibilité et tolérabilité. Le sumatriptan 25 mg, le naratriptan 2,5 mg et l’eletriptan 20 mg montrent une efficacité inférieure mais une meilleure tolérabilité. Le zolmitriptan 2,5 et 5 mg, l’eletriptan 40 mg et le rizatriptan 5 mg montrent des résultats très similaires. Les résultats des essais comparant les triptans entre eux de fac ¸on prospective montrent les mêmes résultats. Nous n’avons pas rec ¸u d’information sur le frovatriptan, mais les données disponibles suggèrent une efficacité inférieure. Les principaux éléments méthodologiques à considérer sont le choix de l’objectif primaire, la reproductibilité sur de multiples crises, la manière d’évaluer la récidive de crise, l’utilisation de proportions avec soustraction des taux placebo dans la comparaison interétudes et la différence entre tolérabilité et innocuité. De plus, certaines particularités méthodologiques sont propres à certaines études, par exemple la sélection des patients et l’encapsulation. Aux doses commercialisées, tous les triptans oraux sont efficaces et bien tolérés. Les différences entre eux sont en général relativement faibles, mais peuvent être cliniquement significatives pour un patient donné. Le rizatriptan 10 mg, l’eletriptan 80 mg et l’almotriptan 12,5 mg montrent les meilleurs résultats au niveau d’un succès thérapeutique soutenu. Le sumatriptan est utilisé en clinique depuis longtemps

D. Valade et offre trois formulations différentes. Tous les triptans sont contre-indiqués chez les patients avec une maladie cardiovasculaire.

Commentaires sur l’évolution des traitements La mise sur le marché des triptans a été le point marquant dans le domaine de la migraine dans les années 1980—1990. Depuis la méta-analyse des études cliniques portant sur les cinq types de triptans disponibles en 2002, de nouvelles pistes ont été explorées. Le frovatriptan, un des deux derniers triptans à être mis en marché. Il a une longue demi-vie et a généré des études dans la prévention de la migraine menstruelle, souvent associée avec un haut taux de récurrence. Le frovatriptan peut être utilisé deux fois par jour en période périmenstruelle en prévention migraineuse de courte durée, avec un niveau d’évidence de grade B. Son efficacité pour le traitement de la crise reste moindre que celle d’autres triptans (comparable au naratriptan) mais son profil de tolérabilité est favorable. Le rizatriptan qui avait l’AMM depuis 1998 mais non le prix a été mis sur le marché en juin 2008. Il présente deux avantages majeurs : une rapidité d’action (le seul ayant un gain thérapeutique à 30 mn statistiquement significatif) et une constance d’effet ayant été prouvée sur 17 crises successives tout en n’ayant pas plus de récurrences que les autres triptans. Sur le plan des contre-indications, la combinaison avec les inhibiteurs spécifiques de recapture de la sérotonine (ISRS) a été le sujet d’une controverse. En théorie, l’effet de ces deux classes sur la sérotonine pourrait augmenter les risques de syndrome sérotoninergique, cependant, le nombre de cas rapportés chez les patients prenant un triptan et un ISRS reste minime, surtout compte tenu du grand nombre de patients utilisant les deux classes. La plupart des experts ne considèrent pas l’usage d’un ISRS comme une contre-indication absolue à la prise de triptan, mais plutôt une précaution d’emploi. Le moment de la prise médicamenteuse a été l’objet de quelques études. Une prise précoce alors que la douleur est légère ou modérée a été montrée plus efficace pour le contrôle de la crise qu’une prise tardive (étude act when mild). Il a été montré que si on enseigne à un patient à se traiter plus tôt, l’efficacité du traitement peut être supérieure surtout si en plus le traitement est pris alors que la douleur est encore faible. Ainsi bien qu’une étude ait suggéré que la présence d’allodynie soit un prédicteur de non-réponse au traitement, une étude subséquente de puissance supérieure a montré que l’intensité de la douleur au moment de la prise était un meilleur prédicteur. De plus, l’évaluation de la douleur est plus facile pour le patient que l’évaluation de l’allodynie. La combinaison d’un triptan avec un anti-inflammatoire a suscité l’intérêt. Les modes d’actions de ces deux classes thérapeutiques étant différents, il a été proposé que la combinaison de deux agents soit plus efficace qu’un seul des deux. La combinaison la plus étudiée est celle du naproxen avec le sumatriptan. Des études de phase III ont montré un

Douleurs et migraine bénéfice significatif sur le soulagement à 30 minutes, une heure, deux heures et sur l’absence de récidive à 24 heures. De nouvelles classes médicamenteuses ont fait l’objet d’études de phase II et III. L’utilisation des stéroïdes dans le traitement des crises migraineuses réfractaires. Bien qu’un bénéfice soit suggéré par les données publiées, l’utilisation de fortes doses de stéroïdes, entre autres la dexaméthasone, de fac ¸on potentiellement répétée, ne doit pas être prise à la légère. La migraine est une maladie avec des crises récurrentes, parfois fréquentes. Les effets secondaires au long terme des stéroïdes doivent être considérés avant de recommander leur utilisation. La CGRP joue un rôle dans la pathophysiologie de la crise migraineuse et contribue au processus inflammatoire. L’olcagepant : BIBN-4096BS (médication antagoniste de la CGRP), le premier à être étudié, a montré une efficacité par voie intraveineuse mais sa biodisponibilité orale est faible. Le MK-0974 a fait l’objet d’une étude sur le dosage de phase IIB. Les doses 300, 400 et 600 mg se sont révélées supérieures au placebo et comparables au rizatriptan 10 mg pour le soulagement à deux heures, avec un profil d’effets secondaires très favorable (comparable au placebo). Une étude de phase III a été présentée sous forme d’abstract, comparant le telcagepant (MK-0974) au zolmitriptan. Une dose de 300 mg était équivalente au zolmitriptan 5 mg. Des études sont en cours portant sur la sécurité du MK-0974, sa combinaison avec des triptans ou des anti-inflammatoires et son utilisation chez les patients avec maladie vasculaire stable. Les anti-CGRP n’ont pas d’effet vasoconstricteur, ce qui les rend attrayants pour les patients ayant des contre-indications aux triptans en raison d’une pathologie vasculaire. Les triptans sont des antagonistes des récepteurs sérotoninergiques 5HT1B/D. Les récepteurs 5HT1F et 5HT7 font l’objet d’études actuellement en phase IIA.

Fiche chronologique Elle démontre de : • 1997 à 2001 : l’arrivée des triptans : sortie de Zolmi, Ele, Suma, Almo et Naratriptan ; • 2002 à 2004 : classification et recommandations : ◦ 2002 : meta-analyse de Ferrari, ◦ 2003 : première recommandations franc ¸aises pour la maladie migraineuse,

S47 ◦ 2004 : réactualisation de la classification internationale des céphalées ; • 2005 à 2007 : essai et utilisation des neuromodulateurs en traitement de fond (topiramate, prégabaline, duloxétine. . .) ; • 2008 à 2010 : propositions d’avenir : ◦ la sortie en France du frovatriptan et du Rizatriptan, ◦ le premier congres européen unissant Migraine Trust et European Headache Federation, ◦ les phases II et III du traitement de crise par les antagonistes du CGRP, ◦ la phase II du traitement de crise par les 5HT1F, ◦ la phase II du traitement de fond par les anti-NMDA.

Pour en savoir plus [1] Agosti RM. 5HT1F- and 5HT7-receptor agonists for the treatment of migraines. CNS Neurol Disord Drug Targets 2007;6:235—7. [2] Brandes JL, Kudrow D, Stark SR, O’Carroll CP, Adelman JU, O’Donnell FJ, et al. Sumatriptan-naproxen for acute treatment of migraine: a randomized trial. JAMA 2007;297:1443—54. [3] Donaldson D, Sundermann R, Jackson R, Bastani A. Intravenous dexamethasone vs placebo as adjunctive therapy to reduce threcurrence rate of acute migraine headaches: a multicenter, double-blinded, placebo-controlled randomized clinical trial. Am J Emerg Med 2008;26:124—30. [4] Doods H, Arndt K, Rudolf K, Just S. CGRP antagonists: unravelling the role of CGRP in migraine. Trends Pharmacol Sci 2007;28:580—7. [5] Durham PL. Inhibition of calcitonin gene-related peptide function: a promising strategy for treating migraine. Headache 2008;48:1269—75. [6] Geraud G, Spierings EL, Keywood C. Tolerability and safety of frovatriptan with short- and long-term use for treatment of migraine and in comparison with sumatriptan. Headache 2002;42(Suppl 2):S93—99. [7] Ho TW, Mannix LK, Fan X, Assaid C, Furtek C, Jones CJ, et al. Randomized controlled trial of an oral CGRP receptor antagonist, MK-0974, in acute treatment of migraine. Neurology 2008;70:1304—12. [8] Shepheard S, Edvinsson L, Cumberbatch M, Williamson D, Mason G, Webb J, et al. Possible antimigraine mechanisms of action of the 5HT1F receptor agonist LY334370. Cephalalgia 1999;19:851—8. [9] Troconiz IF, Wolters JM, Tillmann C, Schaefer HG, Roth W. Modelling the anti-migraine effects of BIBN 4096 BS: a new calcitonin gene-related peptide receptor antagonist. Clin Pharmacokinet 2006;45:715—28.