Feuillets de Radiologie, 2005, 45, n° 6, 461-462 © Masson, Paris 2005
Exercice pratique
Quel est votre diagnostic ? Douleurs inguinales chez un adolescent L. CHARRADA-BEN FARHAT (1), W. SAÏD (1), S. OUESLATI (1), L. DRIDI (1), J. BELLAKHAL (1), L. REZGUI-MARHOUL (1), S. BRIKI (2), A. MEHERZI (2), L. HENDAOUI (1)
OBSERVATION Jeune adolescent âgé de 15 ans sans antécédent pathologique notable se plaignant de douleurs inguinales bilatérales depuis 4 mois motivant la consultation. L’interrogatoire a révélé la notion d’ectopie testiculaire traitée dans le jeune âge. Il n’y avait pas de notion de traumatisme ou d’infection. L’examen physique était sans particularité. Il n’existait pas de syndrome inflammatoire biologique. Le patient nous a été adressé pour exploration. Une échographie scrotale en haute résolution couplée à un Doppler testiculaire ont été réalisés (fig. 1A et 1B). Décrivez les anomalies constatées sur les images échographiques. Quel(s) diagnostic(s) proposez-vous ? Réponse page 462
A B
Fig. 1. — Hyperechogénicités régulières millimétriques, bilatérales et diffuses sans cône d’ombre postérieur disséminées dans le parenchyme testiculaire. A : Échographie du testicule droit. B : Échographie du testicule gauche.
(1) Service d’Imagerie Médicale, (2) Service de Pédiatrie, CHU Mongi-Slim, Sidi Daoud, 2046 La MarsaTunis, Tunisie. Correspondance : L. Charrada-Ben Farhat, à l’adresse ci-dessus. E-mail :
[email protected]
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L. CHARRADA-BEN FARHAT ET COLLABORATEURS
Réponse de la page 461 RÉSULTATS Les images échographiques montrent des testicules de taille normale et de contours réguliers. Le parenchyme scrotal est parsemé d’hyperechogénicités intra-testiculaires régulières millimétriques, bilatérales et diffuses sans cône d’ombre postérieurs. Il n’y a pas d’image nodulaire ou d’épanchement intra-vaginale. Il s’agit de microlithiase testiculaire. DISCUSSION Décrite en échographie pour la première fois en 1987 par Doherty [1], la microlithiase testiculaire (MLT) est une définition histologique par la présence de dépôts calciques lamellaires constituées de débris cellulaires, de glycoprotéines et de collagènes dans la lumière des tubes séminifères. Sa prévalence varie de 0,6 à 9 % selon les auteurs [2, 3]. Cette variabilité dépend de la littérature étudiée et des critères utilisés. Son étiopathogénie n’est pas encore élucidée néanmoins l’hypothèse d’un trouble primaire du testicule dû à une déficience des cellules de Sertoli semble la plus probable [4]. Plusieurs pathologies associées ont été rapportée : cryptorchidie, infertilité, macro-orchidisme, syndrome de Klinelfelter, syndrome de Down, microlithiase alvéolaire pulmonaire et tumeur testiculaire. La MLT est asymptomatique. L’examen clinique est normal. Elle se rencontre à tout âge, le plus souvent chez l’adulte jeune, voire l’adolescent. Elle est plus fréquente dans la race noire. L’aspect échographique est pathognomonique dit « en tempête de neige ». Il s’agit de zones punctiformes hyperéchogènes mesurant de 1 à 3 mm, uniformes, sans atténuations postérieures, multiples, voire innombrables et disséminées dans le parenchyme testiculaire. Elles sont habituellement bilatérales et symétriques, de répartition harmonieuse diffuse ou parfois asymétriques comme dans le cas de notre observa-
tion. Une classification en 3 grades est proposée par Mac Eniff [5] selon leur nombre : — nombre de microlithiases entre 1 et 10 (grade 1) ; — nombre de microlithiases entre10 et 20 (grade 2) ; — nombre de microlithiases indénombrable (grade 3). Le diagnostic différentiel est rarement posé avec d’autres macrocalcifications intra-testiculaires car ces dernières se distinguent par leur taille plus grosse, leurs aspects ombres acoustiques et contours irréguliers et leur caractère unique ou peu nombreux [6]. Il peut s’agir de phlébolites, de granulomes calcifiés ou de calcifications intra-tumorales. La fréquence d’association entre microlithiase et tumeur varie entre 6 et 46 % [7]. De nombreuses études ont tenté d’analyser le degré de causalité entre ces deux pathologies. L’hypothèse la plus consensuelle est que les microlithiases surviennent chez des patients ayant un risque plus élevé de développer une tumeur testiculaire sans qu’elles en soient directement l’origine. L’attitude la plus prudente repose sur une surveillance clinique complétée par un examen échographique tout les 12 à 24 mois.
Références 1. Doherty FJ, Mullins TL, Sant GR, Drinkwater MA, Ucci AA Jr. Testicular microlithiasis. A unique sonographic appearance. J Ultrasound Med 1987; 6: 389-92. 2. Bach AM, Hann LE, Hadar O, Shi W, Yoo HH, Giess CS, Sheinfeld J, Thaler H. Testicular microlithiasis: what is its association with testicular cancer? Radiology 2001; 220: 70-5. 3. Cast JE, Nelson WM, Early AS, Biyani S, Cooksey G, Warnock NG et al. Testicular microlithiasis: prevalence and tumor risk in a population referred for scrotal sonography. AJR 2000; 175: 17036. 4. Vegni-Talluri M, Bigliardi E, Vanni MG, Tota G. Testicular microliths: their origin and structure. J Urol 1980; 124: 105-7. 5. Middleton WD, Teefey SA, Santillan CS. Testicular microlithiasis: prospective analysis of prevalence and associated tumor. Radiology 2002; 224: 425-8. 6. Bushby LH, Miller FN, Rosairo S, Clarke JL, Sidhu PS. Scrotal calcification: ultrasound appearances, distribution and aetiology. Br J Radiol 2002; 75: 283-8. 7. Klim B, Winter TC 3rd, Ryu JA. Testicular microlithiasis: clinical significance and review of the literature. European Radiol 2003; 13: 2567-76.