90 suffisantes afin de permettre à lui seul de faire le diagnostic, face à une suspicion d’EP. C’est pourquoi les stratégies diagnostiques validées, associant plusieurs examens, doivent être utilisées. À l’heure actuelle, l’angioscanner multibarettes est l’examen pivot de ces stratégies diagnostiques grâce à son accessibilité, son moindre coût et sa meilleure sensibilité par rapport au scanner mono-barette. Reste-t-il une place pour la scintigraphie pulmonaire ? La disponibilité de la scintigraphie est limitée : peu de services, pas de scintigraphie la nuit ou le week-end. Cependant, cet examen peut garder des indications particulières dans le diagnostic de l’EP. En effet, la scintigraphie a une valeur prédictive négative (VPN) élevée. Elle est en particulier intéressante chez un patient ayant une faible probabilité clinique, une radiographie de thorax normale, en l’absence d’antécédents cardiorespiratoires. Elle ne délivre qu’une faible irradiation, par rapport à un angioscanner ; cela est particulièrement important pour les femmes jeunes au niveau mammaire, et pendant la grossesse. Elle garde un intérêt chez les patients présentant une insuffisance rénale, les rares cas d’intolérance aux produits iodés. Chez les patients âgés, qui présentent souvent une insuffisance rénale modérée, la scintigraphie est moins invasive que l’angioscanner ; il a été montré qu’elle garde une rentabilité diagnostique intéressante dans cette population, avec un taux rapporté de 30 % de scintigraphie de haute probabilité chez un groupe de patients de plus de 80 ans. En conclusion, le diagnostic de l’EP aiguë reste difficile et nécessite un éventail d’examens au sein duquel la scintigraphie pulmonaire doit garder une place, et reste indispensable. Des nouvelles techniques, comme les tomo-scintigraphies essayent d’améliorer sa spécificité et sa valeur prédictive positive, mais doivent être validées de fac ¸on rigoureuse. Rappelons que la scintigraphie pulmonaire est au premier plan et indispensable pour rechercher une cause post-embolique dans le bilan de l’hypertension pulmonaire. De plus, sa faible irradiation permet de la répéter pour le suivi après une EP, mais ces indications sont à évaluer. http://dx.doi.org/10.1016/j.jmv.2012.12.142
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Quel traitement pour l’embolie pulmonaire en 2013 ? Principales formes cliniques, durée et modalités des traitements, basés sur quelles recommandations G. Meyer Hôpital européen Georges-Pompidou, Assistance publique—Hôpitaux de Paris, université Paris Descartes, Sorbonne Paris Cité, Paris, France Mots clés : Embolie pulmonaire ; Traitement La gravité de l’embolie pulmonaire est liée à ses conséquences hémodynamiques et au terrain sur lequel elle survient. Des outils cliniques sont disponibles pour sélectionner des embolies à très faible risque, les biomarqueurs et l’échocardiographie permettent de sélectionner des embolies pulmonaires de gravité intermédiaire ; enfin, l’existence d’un état de choc définit les formes graves dont la mortalité excède 15 à 20 %. Le traitement initial associe une héparine de bas poids moléculaire ou le fondaparinux rapidement relayé par un antagoniste de la vitamine K. Les inhibiteurs directs du facteur Xa et du facteur IIa ne sont pas moins efficaces et le rivaroxaban semble mieux toléré que les molécules classiques. Ces résultats ont été obtenus sur des populations nombreuses mais sélectionnées, il semble utile de vérifier l’efficacité et l’innocuité de ces nouvelles molécules dans des populations plus âgées que celles étudiées dans les essais initiaux.
Séances communes avec les sociétés Le traitement fibrinolytique semble devoir être réservé aux formes graves et les filtres caves aux échecs ou contre-indications du traitement anticoagulant. Quand un cancer est associé à l’embolie pulmonaire, la prolongation du traitement par héparine de bas poids moléculaire, sans relais oral, est associée à une réduction du risque de récidive thromboembolique. La durée optimale du traitement est encore mal définie, elle semble être de trois mois en cas d’embolie provoquée par un facteur de risque majeur et transitoire. Les embolies survenues spontanément ou après un facteur déclenchant mineur semblent devoir être traitées trois ou six mois, le rapport entre le risque hémorragique en cas de poursuite du traitement et le risque de récidive à l’arrêt de celuici, doit alors être évalué. Le niveau de preuve des recommandations sur la durée du traitement et principalement sur l’évaluation du risque hémorragique d’un traitement prolongé est toutefois limité. Des scores ont été développés pour évaluer le risque de récidive à l’arrêt du traitement ; ils sont actuellement en cours de validation. http://dx.doi.org/10.1016/j.jmv.2012.12.143 SCS 28
Embolie pulmonaire : particularités de la prise en charge aux urgences P.-M. Roy a,∗ , A. Penaloza b L’Unam université, université Angers, département de médecine d’urgence, service des urgences adultes, CHU d’Angers, Angers, France b Université catholique de Louvain, service des urgences, cliniques universitaires Saint Luc, Bruxelles, Belgique
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Mots clés : Embolie pulmonaire ; Urgences correspondant. L’embolie pulmonaire (EP) expose à deux risques principaux aux urgences, méconnaître le diagnostic et exposer des patients à des investigations voire des traitements inutiles. Suspicion d’EP.— Investiguer une EP devant toute dyspnée ou douleur thoracique inexpliquée est une notion subjective. La règle PERC a été validée aux États-Unis mais pas en Europe. Elle pourrait être utile en cas de faible suspicion clinique empirique. Probabilité clinique.— Étape initiale indispensable, elle va définir la stratégie d’investigation et la mise en route ou non d’un traitement d’attente. Il n’y a pas d’argument scientifique pour privilégier un score de probabilité par rapport à un autre ou par rapport au jugement implicite du clinicien. D-dimères.— Les techniques réalisables au lit du patient semblent intéressantes aux urgences, mais leurs performances sont limitées ne permettant d’exclure une EP de fac ¸on fiable que lorsque la probabilité clinique est faible. L’adaptation du seuil à l’âge après 50 ans (âge ×10) permettrait d’augmenter l’utilité des D-dimères quantitatifs sans en limiter la fiabilité (étude prospective en cours). Échographie veineuse.— Réalisable par l’urgentiste au lit du patient, elle permet de confirmer le diagnostic lors de la mise en évidence d’une veine proximale non compressible (poplitée ou supra). Négatif, il n’a aucune valeur d’exclusion. Angioscanner thoracique.— C’est le test de référence, mais sa réalisation en situation d’urgence peut être non optimale avec un risque d’erreur en particulier en cas de discordance entre son résultat et la probabilité clinique. Analyse de gravité.— Elle est en premier clinique s’appuyant sur la recherche d’une hypotension et le calcul du score PESI ou PESI simplifié. Traitement initial et orientation.— Les EP avec signe de chocs justifient l’initiation en urgence d’un traitement fibrinolytique, voire en cas de contre-indication, d’une désobstruction mécanique ou chirurgicale. À l’opposé, les patients à faible risque de complications peuvent être traités en ambulatoire, sous réserve d’une parfaite organisation de la poursuite de la prise en charge.
∗ Auteur
Séances communes avec les sociétés Situations complexes.— Elles doivent faire appel à des démarches personnalisées avec l’aide d’un spécialiste référent et/ou d’outils d’aide informatisée à la décision. http://dx.doi.org/10.1016/j.jmv.2012.12.144 SCS 29
Traitement ambulatoire de l’embolie pulmonaire M. Righini Service d’angiologie et d’hémostase, Genève, Suisse Mots clés : Embolie pulmonaire ; Traitement ambulatoire L’embolie pulmonaire est une pathologie fréquente et potentiellement létale. La mortalité globale actuelle est de moins de 5 % chez les patients correctement traités. En Europe, la plupart des patients avec une embolie pulmonaire confirmée sont hospitalisés, du moins pour la prise en charge initiale. Pourtant, certains patients pourraient être traités sur un mode ambulatoire, en particulier après une sélection attentive. Par ailleurs, certaines recommandations internationales suggèrent déjà que le traitement ambulatoire est possible [par exemple « early discharge » des recommandations du Chest 2012], mais ces recommandations sont encore relativement peu suivies, probablement parce que peu de données sont disponibles quant à la sécurité de la prise en charge ambulatoire. En réalité, une dizaine d’études prospectives non randomisées avec des petits collectifs montrent que le traitement ambulatoire semble sûr pour les patients. De plus, une étude randomisée, l’étude Outpatient Treatment for Pulmonary Embolism (OTPE) ayant comparé le traitement hospitalier au traitement ambulatoire a confirmé la sécurité du traitement ambulatoire chez ces patients en termes de complications thromboemboliques veineuses ou hémorragiques, qui étaient superposables dans les deux bras de l’étude. Une revue systématique et une méta-analyse présentée à l’ASH 2012 à Atlanta suggèrent par ailleurs que le taux d’évènements chez les patients traités en ambulatoire est faible : récidive d’évènement thromboembolique à trois mois : 1,6 % (95 % IC : 0,7—3,0) ; taux de complications hémorragiques majeures : 1,1 (95 % IC : 0,3—2,4). Cette méta-analyse montre que la sélection des patients pour le traitement ambulatoire était faite de manière différente selon les études (score pronostique de Genève, score selon PESI, évaluation empirique). Dans cet exposé, nous reviendrons sur ces différents scores utiles à la sélection des patients potentiellement traitables en ambulatoire, sans négliger le fait que certains aspects tels que la compréhension du patient, la possibilité d’un suivi médical ambulatoire de bonne qualité et un bon contrôle de l’antalgie sont indispensables à un traitement ambulatoire sûr et bien accepté par le patient. http://dx.doi.org/10.1016/j.jmv.2012.12.145
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Hypertension pulmonaire post-embolique (HTPPE) T. Fourme Service de cardiologie, hôpital de Rambouillet, France Mots clés : Hypertension pulmonaire post-embolique ; Écho-Doppler cardiaque L’HTPPE est une pathologie rare (3—5 % après une embolie pulmonaire) et grave liée à la persistance et à l’organisation fibreuse du caillot au sein du lit vasculaire pulmonaire après une ou plusieurs EP aiguës. Certains facteurs favorisants sont identifiés. Sa physiopathologie comprend une obstruction artérielle pulmonaire associée à un remodelage vasculaire distal dans les zones non obstruées (avec lésions identiques aux hypertensions artérielles pulmonaires idiopatiques), avec pour conséquence une augmentation des résistances vasculaires pulmonaires aboutissant à une insuffisance cardiaque
91 droite. Elle répond à une définition associant des critères hémodynamiques invasifs au repos (pression artérielle pulmonaire moyenne [PAPm] > 25 mmHg, pression capillaire pulmonaire < 15 mmHg) et scintigraphiques (défauts de perfusion persistants après trois mois d’anticoagulation efficace). Elle appartient au groupe 4 des étiologies des hypertensions pulmonaires (HTP) de la classification de Dana Point 2008. La dyspnée d’effort est le principal symptôme, une histoire de maladie thromboembolique veineuse n’est retrouvée que dans 50 % des cas, sachant qu’il existe souvent un temps de latence important par rapport à l’évènement initial (lune de miel) expliqué par la physiopathologie. À l’instar des autres HTP, le diagnostic est souvent tardif avec une majorité de patients stade III de la NYHA. L’écho-Doppler cardiaque de repos a un rôle clef dans le dépistage permettant d’évoquer une élévation des pressions pulmonaires, de la classer, parfois de suggérer l’étiologie post-embolique par l’analyse du couplage ventriculo-artériel et de dégager des critères pronostiques. La confirmation hémodynamique se fait par KT droit réalisé dans les centres de compétences, l’orientation vers la maladie thromboembolique par la scintigraphie pulmonaire VA/Q. Le pronostic spontané est sombre (10 % de survie à cinq ans si PAPm > 50 mmHg). Attribuer une origine post-embolique à une HTP est fondamental car la thrombo-endartériectomie pulmonaire est le seul traitement curatif avec de très bons résultats (mortalité < 5 %) si les patients sont soigneusement sélectionnés (50 % des patients récusés), le traitement médical est décevant et fait souvent appel aux inhibiteurs de l’endothéline. Il est vraisemblable qu’un meilleur suivi après un épisode aigu embolique puisse affiner l’incidence réelle de l’HTPPE et améliorer sa prise en charge. http://dx.doi.org/10.1016/j.jmv.2012.12.146
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Embolie pulmonaire et thrombose veineuse profonde : même maladie oui, mais même malades ? S. Zuily Institut Lorrain du cœur et des vaisseaux, CHU de Nancy, unité de médecine vasculaire, Nancy, France Mots clés : Embolie pulmonaire ; Thrombose veineuse profonde L’incidence annuelle des thromboses veineuses est comprise entre 1 à 3 ‰ sujets et est associée au risque d’embolie pulmonaire (EP) fatale. Les autopsies et les études cliniques ont montré que la majorité des EP étaient secondaires à une thrombose veineuse profonde (TVP) des membres inférieurs. De plus, une EP asymptomatique peut être mise en évidence chez la moitié des patients présentant une TVP. C’est ainsi que la TVP comme l’EP sont considérées comme deux entités d’une même maladie appelée maladie thromboembolique veineuse. Pourtant, de nombreuses études ont montré que même si la TVP et l’EP se rejoignent sur de nombreux points communs, la prévalence de certains facteurs de risque différait chez les patients présentant une TVP en comparaison à ceux traités pour une EP. Un exemple intéressant est le cas de la variation de séquence du gène du facteur V Leiden, le plus fréquent facteur biologique de risque associé à une augmentation du risque thrombotique veineux. Ce dernier a été à maintes reprises associé à un sur-risque de TVP mais pas d’EP. Cet effet paradoxal du facteur V Leiden vis-à-vis de la TVP et de l’EP est appelé « le paradoxe du Facteur V Leiden ». Plusieurs mécanismes ont été incriminés pour expliquer cette différence, comme la structure du thrombus pouvant être plus ou moins sujet à une rupture et donc à un risque embolique. . . Au final, même si la TVP et l’EP font partie de la même maladie, certaines particularités propres peuvent faire supposer qu’elles sont en fait deux entités distinctes. http://dx.doi.org/10.1016/j.jmv.2012.12.147