En attendant la loi

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Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com En attendant la loi§ Waiting for the new law W. Dab E´ditorial Chaire d’hygie`ne et se´curite´, Cn...

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En attendant la loi§ Waiting for the new law W. Dab

E´ditorial

Chaire d’hygie`ne et se´curite´, Cnam, 292, rue Saint-Martin, 75003 Paris, France

A

pre`s l’e´chec des ne´gociations entre les partenaires sociaux et la censure de la partie sante´ au travail de la loi sur les retraites, la loi sur la me´decine du travail a finalement e´te´ promulgue´e. Apre`s des anne´es d’atermoiements et alors que les de´crets d’application doivent maintenant eˆtre pre´pare´s, on perc¸oit sur le terrain que cette situation ge´ne`re un attentisme. Si on peut comprendre que la loi a un roˆle d’impulsion et que plusieurs proble`mes en suspens la rendent souhaitable, comme l’impossibilite´ pour les entreprises d’eˆtre en conformite´ en matie`re de visite me´dicale, la gouvernance des services de sante´ au travail ou encore les questions de financement, le fait de suspendre tout de´veloppement, voire toute initiative, a` la promulgation d’une loi est intrinse`quement dangereux, car il alimente le scepticisme de ceux qui doutent de l’utilite´ re´elle de l’intervention sanitaire en milieu de travail ou qui conside`rent qu’en pe´riode de crise e´conomique cette de´pense « improductive » est pe´nalisante. Ce n’est pas un ancien directeur ge´ne´ral de la sante´ qui va minimiser le roˆle de la loi ou nier que la sante´ au travail ait besoin d’une feuille de route le´gitime´e par la repre´sentation nationale. Mais faut-il le magnifier pour autant ? Dans un pays ou` on accorde plus d’attention a` la re´daction des textes qu’a` leur application, ce qu’a malheureusement de´montre´ le dossier de l’amiante, il faut preˆter l’oreille aux propos de M. Turpin, ancien directeur ge´ne´ral de l’Ineris, quand il dit de la me´decine du travail qu’elle est « une espe`ce prote´ge´e quasi unique en Europe qui pre´fe`re essayer de trouver son avenir dans le cadre administratif e´troit, mais se´curisant ou` elle s’est de´veloppe´e » [1]. C’est au contraire en multipliant les initiatives sur le terrain qu’on montrera que le service rendu par les services charge´s de la pre´vention des risques professionnels est plus que jamais ne´cessaire. Ce qui est paradoxal dans cette situation, c’est que sur les fonctionnalite´s a` offrir aux entreprises et aux salarie´s, il y a sinon un consensus, du moins un large accord, ce que j’ai pu constater lors des auditions mene´es pour la re´daction du rapport sur la formation des managers et des inge´nieurs en sante´ au travail [2].

Un accord sur l’essentiel D’abord, fait notable, la fausse querelle entre sante´ publique et sante´ au travail est en train de s’estomper. Il devient une e´vidence qu’en sante´ au travail, il y a un pied de services a` offrir aux personnes au niveau individuel et un ensemble de services

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NDLR : texte rec¸u de´but juin 2011 avant la promulgation de la loi le 24 juillet 2011. e-mail : [email protected].

1775-8785X/$ - see front matter ß 2011 Publie´ par Elsevier Masson SAS. 10.1016/j.admp.2011.07.002 Archives des Maladies Professionnelles et de l’Environnement 2011;72:307-309

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Archives des Maladies Professionnelles et de l’Environnement 2011;72:307-309

qui doivent eˆtre pense´s au niveau populationnel. Ce dernier pilier rele`ve me´thodologiquement de l’approche de sante´ publique, ce qui ne pre´juge en rien de la nature de la tutelle ni du rattachement institutionnel de ces missions. Ensuite, sur les e´volutions a` apporter a` la me´decine du travail 65 ans apre`s son instauration, je ne constate aucun de´saccord fondamental. Chacun souhaite plus de proactivite´, un re´e´quilibrage entre la pre´vention et la re´paration et moins d’obligations de moyens et plus d’obligations de re´sultats. Enfin, il y a un retournement historique a` accompagner : ce n’est plus a` la sante´ de contribuer a` la production de richesses, a` la force de travail, c’est au monde e´conomique de produire du bien-eˆtre. Apre`s des anne´es ou` la seule dimension quantitative du travail a e´te´ privile´gie´e, sa dimension qualitative est ressentie comme un besoin profond. Certains y voient meˆme un avantage compe´titif par rapport aux pays a` bas couˆts salariaux avec lesquels la bataille des prix de revient est perdue, mais certainement pas celle de la qualite´.

Quelles initiatives ? Les articles publie´s sous la rubrique E´valuation et gestion des risques industriels montrent d’une certaine manie`re ce qui est attendu des services de sante´ au travail dans ce contexte en matie`re d’e´valuation et de gestion des risques :  de´velopper des outils simples, mais robustes et valide´s pour diagnostiquer les situations a` risque, les hie´rarchiser et les rendre « travaillables » meˆme au niveau des plus petites entreprises ;  accompagner les chefs d’entreprise sur la base d’une relation de confiance ;  associer les employe´s a` la connaissance et a` l’e´valuation des risques qu’ils encourent au travail ;  multiplier les retours et les partages d’expe´rience. Il est notable que de nombreuses expe´riences relate´es dans notre revue sont issues de travaux d’e´tudiants en licence. Le monde acade´mique a aussi sa part a` faire. Il ne suffit pas d’enseigner des me´thodes et des outils, il faut en ve´rifier la faisabilite´ sur le terrain. Savoir communiquer oralement et par e´crit fait partie inte´grante de la formation tout comme comprendre les ressorts de la pluridisciplinarite´. Ces travaux sont encadre´s par des me´decins du travail. En aucun cas, les intervenants en pre´vention n’ont a` eˆtre forme´s pour pallier a` la diminution pre´vue des me´decins. Ils sont la` pour renforcer la pre´sence des services sur le terrain, pour conseiller sur les premie`res de´marches a` faire en vue de l’e´valuation des risques et, secondairement, pour libe´rer du temps me´dical. Il est possible que cette loi soit une « re´forme impossible » [3]. Mais la pre´vention des risques professionnels et la protection de la sante´ au travail, elles, sont possibles et urgentes. Je partage l’avis de Paul Frimat lorsqu’il dit « Pour chacun d’entre nous, me´decins, infirmiers, assistants, intervenant en pre´vention des risques professionnels (IPRP). . . il ne faut pas s’arreˆter. . . Continuons a` avancer vers des programmes de sante´–travail en entreprise. . . Il nous faut renforcer l’approche pluridisciplinaire de l’e´quipe sante´–travail, e´quipe au sein de laquelle le me´decin reste l’animateur. . . et re´pondre ainsi aux besoins en sante´ de chaque salarie´ en ame´liorant les de´marches de pre´vention en entreprise » [4]. Si la loi est ne´cessaire pour fixer un cadre, compter sur elle pour changer les pratiques, cre´er de nouvelles synergies, amplifier les motivations, de´velopper les compe´tences est futile. Comme le disait M. Crozier, il y a plus de 20 ans, « on ne change pas une socie´te´ par de´cret ». C’est en de´montrant concre`tement et rigoureusement l’apport des actions de maıˆtrise des risques professionnels sur le terrain que l’on convaincra les responsables de l’inte´reˆt de les renforcer et de mieux les organiser.

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Re´fe´rences [1] [2]

[3] [4]

Turpin M. Ou` va le bateau des services de sante´ au travail ? Pre´ventique – Se´curite´ 2010;116:25–8. Dab W. Former les managers et les inge´nieurs en sante´ au travail. Rapport pour les ministres charge´s du travail et de l’enseignement supe´rieur 2008. Accessible a` : http:// securite-sanitaire.cnam.fr. Seillan H. Sante´ au travail, la re´forme impossible. Pre´ventique – Se´curite´ 2010;116:15–21. Frimat P. Et maintenant, que fait-on ? Monsieur le ministre, la sante´–travail vous attend !. Arch Mal Prof Environ 2011;72:1–3.

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