C
O N T R I B U T I O N S
O R I G I N A L E S
© 2004, Masson, Paris
Presse Med 2004; 33: 90-4
Article
Enquête sur les mesures d’asepsie prises par les médecins généralistes
1 - Généraliste, Nantes (44), 2 - Généraliste, Sainte-Luce (44) Correspondance: Jean-Yves Chambonet, 8, place Mangin, 44200 Nantes Reçu le 18 juin 2003 Accepté le 15 septembre 2003
Jean-Yves Chambonet1, 2 Patrice Cluis
Summary
Résumé
Survey on the measures of asepsis taken by general practitioners
État de la question De nombreux textes législatifs et administratifs réglementent l’asepsie et la prophylaxie dans les établissements de santé. Le Code de déontologie donne des lignes directrices pour l‘ensemble des médecins. Objectif Identifier les mesures mises en place pour prévenir la transmission des infections au cabinet du médecin généraliste et les comparer aux données de la littérature. Méthode Une enquête par questionnaire a été effectuée par voie postale auprès d’un échantillon représentatif de 119 médecins généralistes de Loire-Atlantique. Résultats Le taux de réponses était de 69 %. La plupart des médecins déclaraient posséder un poste d’eau dans le cabinet, 43 % déclaraient ne pas se laver systématiquement les mains entre 2 patients au cabinet et 78 % lors des visites à domicile, 23 % utilisaient un savon simple, 49 % une solution hydro-alcoolique, et 62 % s’essuyaient les mains avec une serviette en tissus. Les gestes sanglants étaient effectués avec des gants par plus de 80 % des répondeurs et les procédures complètes de décontamination du matériel étaient effectuées par 6 % d’entre eux, mais plus de 80 % utilisaient du matériel à usage unique. Si 45 % pensaient avoir modifié leur pratique, 23 % restaient méfiants à l’égard d’éventuelles recommandations en la matière et 47 % n’émettaient pas d’avis. Discussion Cette méthode d’enquête recueille des données déclaratives et reste limitée sur le plan informatif. Une analyse fine de l’activité journalière des répondeurs serait utile pour une approche des critères de performances compte tenu du fait que certaines consultations ne comportent pas d’examen clinique, même partiel. Les investissements nécessaires à l’acquisition de matériels compatibles avec les normes applicables aux établissements de santé peuvent apparaître démesurés pour l’activité courante. La généralisation de l’emploi de matériel à usage unique constitue un progrès notable en matière de prévention. La comparaison avec des études similaires antérieures montre une évolution positive; une démarche d’amélioration de la qualité semble être en cours. Néanmoins, des travaux comportant une méthodologie rigoureuse apparaissent nécessaires pour établir d’éventuelles recommandations pour la pratique en médecine générale. La mise en forme de référentiels exige une grande rigueur dans leur élaboration; la participation des praticiens à leur rédaction et leur mise en place devrait entraîner des gratifications substantielles.
Current state of the question Many legislative and administrative texts rule asepsis and prophylaxis in health care centres. The deontological code provides the guidelines for medical corps. Objective To identify the measures set-up to prevent the transmission of infections in general practitioners' consulting rooms and to compare them with the data in the literature. Method A postal survey using a questionnaire was sent to a representative sample of 119 general practitioners in the LoireAtlantique area in France. Results The response rate was of 69 %. The majority of physicians declared that had a washbasin in the consulting room, 43 % declared that they did not systematically wash their hands betweens 2 patients in their consulting rooms and 78 % during home visits, 23 % used an ordinary soap, 49 % a hydro-alcoholic solution, and 62 % wiped their hands with a cotton towel. Blood interventions were performed with gloves by more than 80 % of the participants, complete decontamination procedures of the material were performed by 6 %, but more than 80 % used single use material. Although 45 % believed they had changed their habits, 23 % remained wary of any eventual recommendations and 43 % made no comments. Discussion This survey method collects declarative data and remains limited with regard to information. In-depth analysis of the daily activity of the participants would be useful for an approach of performance criteria, in view of the fact that some consultations do not include any, or even partial, clinical examination. The investments required for the purchase of the material compatible with the specifications applicable to health care centres may appear excessive for their current activity. The generalisation of the use of single use material represents a great progress in the field of prevention. Comparison with similar earlier studies shows the good progress made and the improvement in quality. Nevertheless, studies using a strict methodology are necessary to establish guidelines to be applied in general medical practice. The drawing-up of Referentials requires great rigour and the participation of the practitioners in their development and organisation would lead to substantial benefits. J.-Y. Chambonet, P. Cluis Presse Med 2004; 33: 90-4 © 2004, Masson, Paris
90 - La Presse Médicale
31 janvier 2004 • tome 33 • n°2
Jean-Yves Chambonet, Patrice Cluis
E
n matière de santé, le principe de précaution devient de plus en plus prégnant. De nombreux textes législatifs et administratifs encadrent les règles d’asepsie et de prophylaxie au sein des établissements de santé; dans le cadre de l’exercice de la médecine générale, les choses sont beaucoup plus floues. 1 L’article 49 du Code de déontologie stipule que: « le médecin appelé à donner des soins à une famille ou à une collectivité doit tout mettre en œuvre pour obtenir des règles d’hygiène et de prophylaxie… ». Pour sa part, l’article 71 stipule que: « le médecin… doit notamment veiller à la stérilisation et à la décontamination des dispositifs médicaux qu’il utilise selon les procédures réglementaires ». Le Code de santé publique (annexe I article R.665-47 livre V bis) interdit la réutilisation des dispositifs à usage unique ou mis sur le marché à l’état stérile. Les autres textes concernent les procédures de stérilisation 2-4 du matériel au sein des établissements de santé . Une importante littérature existe sur le risque infectieux nosocomial; elle concerne presque exclusivement les établissements de santé. En 1999, il avait été recensé 72 5 publications concernant les infections nosocomiales en pratique ambulatoire. La transmission par contact percutané ou muqueux occupait 3/4 des travaux contre 1/4 pour la contamination aéroportée. Pour tenter d’identifier les pratiques prophylactiques concernant la transmission manuportée en médecine générale, nous avons effectué un recueil de données déclaratives auprès d’un échantillon représentatif de médecins généralistes du département de Loire-Atlantique, puis nous avons comparé ces données avec des données existantes.
Méthode Un échantillon au 1/10 comprenant 119 médecins généralistes du département a été tiré au sort par canton. Un questionnaire d’enquête leur a été adressé par voie postale avec une enveloppe timbrée pour le retour.Ce questionnaire comprenait un bloc de renseignements sociodémographiques, un bloc concernant la prévention de la transmission des germes manuportés, un bloc concernant la stérilisation au cabinet et l’utilisation de matériel jetable,ainsi que des items sur l’opinion personnelle des répondeurs. Les données ont été analysées à l’aide du logiciel Excel.
n’ont pas indiqué le nombre d’actes qu’ils effectuaient annuellement, mais 80 % des répondeurs effectuaient entre 4000 et 8000 actes par an. Quatre-vingt-onze pour cent des médecins déclaraient avoir un poste d’eau dans leur salle d’examen.
EN CONSULTATION AU CABINET Dix pour cent déclaraient se laver les mains avant et après chaque patient, 10 % uniquement avant, 36 % uniquement après,12 % pour un patient sur deux,31 % pour un patient sur trois ou plus, et 1 % ne répondait pas. Ce lavage était effectué avec un savon simple (23 %),une solution hydro-alcoolique (28 %) ou une solution antiseptique (28 %) pour certains gestes, ou avec les 2 (21 %). Que les médecins possèdent un point d’eau dans le cabinet ou pas, la proportion de lavage des mains avec une solution hydro-alcoolique était similaire. L’essuyage des mains était effectué avec une serviette en tissu par 62 % des médecins, et 38 % utilisaient des serviettes en papier.
EN VISITE AU DOMICILE DES PATIENTS Vingt-deux pour cent déclaraient se laver les mains à chaque visite, 18 % une visite sur deux, 29 % une visite sur trois, 25 % plus d’une visite sur trois, et 6 % jamais. Pour ceux qui se lavaient les mains, 68 % utilisaient un poste d’eau,28 % une solution hydro-alcoolique avec ou sans lavage à un poste d’eau et 7 % ne répondaient pas à cet item.
UTILISATION DE GANTS Quatre-vingt-trois pour cent déclaraient utiliser des gants pour les pansements sanglants et 85 % pour les sutures, dont 38 % des gants stériles. La pose de stérilet était un geste effectué par 44 % des médecins et 68 % d’entre eux utilisaient des gants pour cet acte. Pour les infiltrations articulaires,52 % déclaraient utiliser des gants, 31 % n’en utilisaient pas et 17 % ne répondaient pas ou n’en pratiquaient pas.
PROCÉDURES DE DÉCONTAMINATION DU MATÉRIEL
Six pour cent des médecins déclaraient pratiquer une procédure complète.
Résultats
STÉRILISATION DU MATÉRIEL
Quatre-vingt-trois médecins ont renvoyé une réponse (69,7 %), dont 78 % étaient des hommes. L’âge moyen était de 47,7 ans. Soixante pour cent exerçaient en groupe et 48 % en milieu urbain. Un tiers des médecins
La stérilisation du matériel était effectuée selon des procédés différents (plusieurs réponses possibles):Poupinel 69 %,autoclave 18 %,solution désinfectante 25 %,eau de Javel 10 %, alcool à 90° 10 %, flamme 5 %, aldéhyde formique 9 %, ébullition 1 %.
31 janvier 2004 • tome 33 • n°2
La Presse Médicale - 91
C
O N T R I B U T I O N S
O R I G I N A L E S
Article
Enquête sur les mesures d’asepsie prises par les médecins généralistes
UTILISATION DE MATÉRIEL À USAGE UNIQUE Elle se répartissait ainsi: seringues 100 %, abaisse-langue 95 %, kits de suture 77 %, spéculum auriculaires 67 %, spéculum vaginaux 50 %, anuscopes 50 %. Mais pour ce matériel à usage unique, 81 % des médecins déclaraient réutiliser les spéculum auriculaires,10 % les spéculum vaginaux et 10 % les abaisse-langue.
NETTOYAGE DU STÉTHOSCOPE Il était effectué une fois par jour (27 %), une fois par semaine (19 %), quelques fois par an (48 %), ou jamais (6 %).
EN TERMES DE PRATIQUE Quarante-cinq pour cent des médecins pensaient avoir modifié leur pratique pour la prévention d’infections nosocomiales, 37 % pensaient ne pas avoir changé quoi que ce soit et 18 % ne se prononçaient pas.
PERTINENCE DE LA MISE EN PLACE DE RECOMMANDATIONS POUR LA RÉDUCTION DU RISQUE INFECTIEUX AU CABINET MÉDICAL
Elles étaient jugées nécessaires par 26 %, irréalisables (9 %),non adéquates en raison du faible risque (6 %),non adéquates par absence de preuves (6 %), non adéquates par manque d’information (4 %), et 47 % n’ont pas répondu ou sont sans opinion.
Discussion L’échantillon était représentatif des médecins généralistes de Loire-Atlantique et le taux de réponses satisfaisant. Le questionnaire aurait nécessité de contenir plus d’items – par exemple, le tensiomètre ne figurait pas parmi les instruments courants –, d’être plus précis sur certains points et de laisser plus de place pour l’expression des répondeurs. Mais un questionnaire court permet un meilleur taux de réponses. Des travaux complémentaires permettant de préciser secondairement les points posant problème seront à envisager. La fréquence du lavage des mains n’apparaît pas différente entre les médecins possédant un point d’eau dans le cabinet et ceux n’en ayant pas ; aussi, le fait que 43 % des répondeurs ne se lavent pas les mains systématiquement entre deux patients interpelle. Une proportion non négligeable de consultations (43,6 %) ne nécessite pas d’examen complet, ni de déshabillage du patient, et 13 % des consultations ne néces6 sitent aucune procédure clinique . En terme de lavage des mains, le questionnaire ne permettait pas d’identifier avec précision le mode de lavage en fonction des gestes effectués. Ceci renvoie bien évidemment au concept d’assurance qualité et 92 - La Presse Médicale
des procédures d’évaluation de la pratique. L’essuyage des mains était réalisé à l’aide de serviettes en tissu par 62 % des répondeurs, alors qu’en milieu 7-11 montrent un hospitalier de nombreuses études risque de contamination non négligeable. L’amortissement des investissements et le surcoût d’environ 350 € par an sont à mettre en balance avec, d’une part les automatismes acquis de longue date, et d’autre part la stagnation des revenus des médecins. La fréquence du lavage des mains lors des visites à domicile apparaît faible. Pour l’Observatoire de la 12 médecine générale , 11,5 % des visites à domicile concerneraient une situation comportant une infection bactérienne ou virale potentiellement contagieuse. Des investigations plus précises seraient nécessaires pour identifier s’il existe chez les médecins un éventuel lavage ou une désinfection sélectifs compte tenu des affections dont souffrent les patients. En visite à domicile, l’usage de solutions hydro-alcooliques apparaît faible par rapport au lavage classique, alors que les études en établissements de soins ont 13 montré leur plus grande commodité . Pour les actes comportant un contact sanglant, la majorité des médecins utilisaient des gants à usage unique. Par contre, pour la pose de stérilet, pratiquée par moins de la moitié des médecins de l’échantillon, seuls 2/3 des répondeurs déclaraient mettre des gants. Une remarque similaire peut être formulée pour les infiltrations articulaires bien qu’il n’existe aucune preuve d’augmentation du risque d’infection nosocomiale en fonction des différentes 14 procédures lors de ces gestes techniques . En matière de décontamination du matériel à usage multiple, peu de répondeurs déclaraient souscrire aux 15,16 . Mais il faut rappeler que, protocoles existants dans notre enquête, plus de la moitié des médecins disaient utiliser, en général, du matériel à usage unique, donc ne pouvaient répondre à cet item. La stérilisation actuellement recommandée pour la lutte contre les agents transmissibles non convention17 nels impose la chaleur humide à 134 °C pendant plus de 18 minutes. Pour un médecin généraliste, cette règle vise surtout les matériels de suture, les bistouris et les pinces à biopsies. L’investissement dans un autoclave est relativement lourd pour une 6 moyenne d’actes relativement faible: environ 2,1 % en pratique allopathique. Dans notre travail, 6 % des médecins déclaraient effectuer complètement la procédure de décontamination, mais aucun d’entre eux ne possédait d’autoclave. En pratique, les prélèvements sanguins et les injec6 tions occupent 9,1 % de l’activité . Dans notre échantillon, tous les médecins utilisaient du matériel jetable. 31 janvier 2004 • tome 33 • n°2
Jean-Yves Chambonet, Patrice Cluis
Pour les sutures, 77 % utilisaient du matériel jetable. Cette proportion importante était peut-être liée au fait que la nouvelle cotation des actes assurait une plus juste rémunération de cette intervention. Quatre-vingt pour cent des répondeurs réutilisaient les spéculums auriculaires. Plusieurs études concernant la contamination de ces instruments montraient la pré18,19 .Dans la presence de germes dans 84 à 93 % des cas mière de ces études,84 % des médecins déclaraient réutiliser les spéculums;dans la seconde,78 % les réutilisaient 18,19 . Pour les examens de la sans les nettoyer du tout bouche, 10 % des répondeurs réutilisaient les abaisselangue.Il n’a pas été trouvé d’étude permettant d’identifier des infections par ce type de procédure. Les spéculums vaginaux étaient réutilisés par 10 % des répon20 deurs.Une étude néo-zélandaise montrait que 25 % des médecins réutilisaient les spéculums vaginaux à usage unique et qu’ils n’effectuaient pas de décontamination correcte, mais aucune donnée concernant les infections nosocomiales liées à ce type de pratique n’est retrouvée. Si, en milieu hospitalier, il a été montré que le stétho21,22 , il n’était pas scope pouvait être vecteur de germes mentionné d’infections liées à ce “vecteur”. Il n’existe pas de recommandations pour les éventuelles procé23,24 , aussi une dures de nettoyage ou de prophylaxie prudence sera de mise pour cet item compte tenu des promotions commerciales en la matière. Cinquante pour cent des répondeurs déclaraient avoir modifié leur pratique en termes d’hygiène et de prophylaxie des affections manuportées. Néanmoins, certains pouvaient déjà avoir adopté de longue date des procédures parfaitement adaptées et donc ne pas répondre positivement à cet item. Parmi les répondeurs à la question du bien-fondé de recommandations pour la réduction du risque infectieux en médecine générale, la moitié les considérait comme nécessaires, mais l’autre moitié apparaissait plutôt réticente. Les arguments des médecins réticents s’articulaient autour de la faisabilité de réalisation des procédures consommatrices de temps. En effet, une désinfection systématique des mains avec une solution hydroalcoolique augmenterait la durée du travail quotidien d’une demi-heure à une heure. Les autres arguments étaient moins prosaïques et concernaient les preuves scientifiques sur lesquelles s’appuyer pour établir des règles ainsi que celles montrant l’utilité des procédures. Enfin, il est important de souligner que 47 % des médecins ne répondaient pas à cet item. 25 Des enquêtes similaires ont déjà été réalisées ,nous pouvons en juxtaposer les données (tableau 1). L’apparition récente, sur le marché, des kits de matériels de suture jetables ne permet pas de comparaison statis-
31 janvier 2004 • tome 33 • n°2
tique avec les études CE QUI ÉTAIT CONNU plus anciennes. • Le taux des infections nosocomiales en pratique Compte tenu des difambulatoire apparaît faible. férents modes de • Les contacts directs (instruments, injections, recueils, se dégage mains des soignants) constitueraient les trois-quart ainsi une tendance à des transmissions. une utilisation plus fréquente des serviettes jetables ainsi CE QU’APPORTE L’ARTICLE que des gants pour les • La moitié des médecins interrogés déclaraient sutures et la pose de une modification de leur pratique vis-à-vis du stérilets, et l’emploi risque. des spéculum vagi• Un quart des médecins interrogés souhaitaient naux jetables. 26 avoir des recommandations pour la pratique en P. Jocou rappelle matière de prévention des affections nosocoque « la qualité coûte miales. cher, mais il existe quelque chose de plus coûteux que la qualité: son absence. » Notre travail concerne l’identification de la qualité spécifiée en terme de sécurité en médecine générale à partir de données déclaratives des professionnels. Cela constitue une étape incontournable en vue d’une éventuelle amélioration. Elle peut aider à avoir une meilleure connaissance des propres performances et donc améliorer la qualité des soins au travers d’initiatives personnelles au sein du cabinet médical. Néanmoins, il est souhaitable de rester très prudent quant aux résultats dans la mesure où les indicateurs de qualité sont des éléments mesurables d’une performance de la pratique 27 médicale pour laquelle existent des preuves non réfutables en l’état actuel de la science et acceptés comme tels par les professionnels. Ce qui fait dire à AG. Mulley: « Les conférences de consensus et autres méthodes d’élaboration des recommandations de pratique clinique ne peuvent réduire l’incertitude là où il n’existe pas de 28 preuves scientifiques. » . La comparaison a été faite de preuves valides pour les établissements de soins, ce Tableau 1
Comparaison des données de différentes enquêtes Équipement
Enquête 1991
Notre enquête
Point d’eau
91 %
91 %
Essuie-mains tissu
73 %
62 %
Gants pour suture
47 %
85 %
Gants pour stérilet
58 %
68 %
Seringues jetables
100 %
100 %
Abaisse-langue jetables
93 %
95 %
Spéculum vaginaux jetables
12 %
50 %
La Presse Médicale - 93
C
O N T R I B U T I O N S
O R I G I N A L E S
Article
Enquête sur les mesures d’asepsie prises par les médecins généralistes
qui incite à la prudence à l’égard d’éventuels référen29,30 31 , F. Steudler précisant : « Il paraît illusoire tiels d’évaluer comme s’il y avait toujours un critère de référence unique, en faisant abstraction du contexte organisationnel et de la diversité des missions de l’institution. ». Enfin, il peut être rappelé que pour l’Anaes (Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé), « les efforts d’amélioration de la qualité des professionnels ont un coût qu’ils sont seuls à supporter, sans bénéfices directs tangibles, sans savoir s’ils sont supportables par les professionnels, ni sans savoir quel en est le retentis32 sement positif ou négatif sur la qualité des soins. » .
Conclusion Il apparaît donc important que le temps consacré aux procédures d’identification et d’amélioration de la qualité soit générateur d’une source de gratification pour les
praticiens. La culture de l’évaluation concerne les professionnels, les patients, mais aussi les gestionnaires du risque.L’incitation et la gratification apparaissent comme des moteurs plus puissants que la coercition et la mise à l’amende. Ceci est démontré de longue date en pédagogie et pourrait s’ancrer dans l’esprit des gestionnaires du risque. Pour l’heure,il ne semble pas exister de travaux de médecine générale qui montrent de manière scientifique la nécessité du lavage et de la désinfection des mains, avant et après chaque consultation. Chaque médecin peut penser de manière empirique à utiliser des gants pour la réalisation d’actes invasifs, à utiliser plus systématiquement du matériel à usage unique et à effectuer des désinfections plus fréquentes des mains en pratique quotidienne. Reste à savoir s’il faut que les médecins généralistes se décontaminent les mains après avoir serré celles de leurs patients ainsi que celles des membres de leur entourage? ■
Références 1
Décret 96-100 portant sur le Code de déontologie médicale. Journal Officiel de la République Française, 209, 8 septembre 1995. 2 Lucas-Baloup I. Infections nosocomiales: 40 questions sur les responsabilités encourues. Ed. Scrof, Paris, 1997. 3 Circulaire DGS/VS2-DH/EM1/EQ1 97-672 du 20 octobre 1997 relative à la stérilisation des dispositifs médicaux dans les établissements de santé. 4 Circulaire DGS/VS2-DH/EM1/EO1 98-226 du 23 mars 1998 relative à la stérilisation des dispositifs médicaux dans les établissements de santé. 5 Troillet N. Prévention des infections nosocomiales au cabinet médical. Med Hyg 2001; 2369: 2286-91. 6 Gallais JL. Actes et fonctions du médecin généraliste dans leur dimension médicale et sociale. SFMG, Paris, 1994; 45: 10. 7 Anonyme. Prévenir les affections liées aux soins ambulatoires. Prescrire 2000; sup 212: 889-95. 8 Garner JS, Favero MS. Guide line for handwashing and hospital environmental control. CDC Infection Control 1986; 7: 3231-43. 9 Steinmann J, Nehrkorn R, Meyer A et al. Two in vivo protocols for testing virucidal efficacy of handwashing and hand disinfection. Zentral Hyg Umweltmed 1995; 196: 425-36. 10 Ducel G. Le séchage des mains. La méthode choisie at-elle une influence sur le résultat? Techniques Hospitalières 1998; 630: 39-44. 11 Ansari F. Comparison of cloth, paper and warm air drying in eliminating viruses and bacteria from washed hand. Mayo Clin Proc 1991; 19: 243-9.
94 - La Presse Médicale
12 Morel F. Annuaire statistique 94/95 de l’Observatoire de la médecine générale. Issy SFMG 1998; 52: 87 pp. 13 Pittet D. Effectivness of a hospital-wide programme to improve compliance with hand hygiene. Lancet 2000; 9238: 1307-12. 14 Sicot C. Faut-il mettre des gants pour faire des infiltrations articulaires? Concours Med 1998; 120: 3021-22. 15 Branger B. Réduire le risque infectieux au cabinet médical. Fédération FMC Bretagne CLIN-Ouest 1999. 16 Taylor DM. Inactivation of unconventional agents of scrapie, BSE and Creuzfeld-Jacob diseases. J Hosp Infect 1991; 18: 141-64. 17 Circulaire DGS/5C DHOS/E2 du 14 mars 2001 relative aux précautions à observer lors de soins en vue de réduire les risques de transmission d’agents transmissibles non conventionnels. 18 Besnier F. Évaluation des procédures d’hygiène des spéculum auriculaires. Med Mal Infect 1997; 305: 1571-3. 19 Overend A. Does earwax lose its pathogens or your auriscope overnigth? BMJ 1992 305: 1571-3. 20 Boyd L, Humble MW. Disinfection of metal and plastic pelvic specula in general practice. New Zeland Med 1987; 100: 171-7. 21 Brook I. The stethoscope as a potential source of transmission bacteria. Infect Control Hosp Epidemiol 1997; 9: 608. 22 Smith M, Mathewson JJ. Contamined stethoscopes revisited. Arch Intern Med 1996; 156: 82-4. 23 Comité technique national des infections nosocomiales. Guide des bonnes pratiques de
24
25 26
27 28
29
30
31
32
désinfection des dispositifs médicaux. Ministère de l’emploi et de la Solidarité 1998. Lavage des mains et port des gants. In: Guide de prévention des infections. Santé Canada Ottawa 1998 : 1-8. Broclain D. L’hygiène au cabinet médical. Le Généraliste 1992; 1326: 8-10. Jocou P. Les enjeux économiques. In: Au cœur du changement. Une autre démarche de management: la qualité totale. Dunod, Paris, 1992: 43-71. Lawrence M. Indicators of quality in health care. Eur J Gen Pract 1997; 3: 103-8. Mulley AG. Avantages et limites des recommandations de pratique clinique dans la prise de décision médicale. Gestions Hospitalières 1997; 369: 646-50. Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé. Mise en place d’un processus d’amélioration de la qualité dans un établissement de santé. Principes méthodologiques. Anaes, Paris, 1996. Marguerez G, Mounic V, Terra JL. et al. Mise en place d’un programme d’amélioration de la qualité. Expérience sur 26 établissements et principes méthodologiques. Concours Med 1997; 119: 1944-6. Steudler F. Aspects sociologiques de l’évaluation en matière de santé. In: Matillon Y., Durieux P. L’évaluation médicale. Du concept à la pratique. Flammarion Paris 1994: 81-7. Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé. Le coût de la qualité et de la non qualité à l’hôpital. Anaes, Paris, 1998.
31 janvier 2004 • tome 33 • n°2