Epreuve de pointages auditivo-manuels chez des aveugles: Resultats preliminaires

Epreuve de pointages auditivo-manuels chez des aveugles: Resultats preliminaires

Neuropsychologia. 1976, Vol. 14, pp. 251 to 255. Pergamon Press. Printed in England. NOTE EPREUVE DE POINTAGES AUDITIVO-MANUELS CHEZ DES AVEUGLES :...

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Neuropsychologia.

1976, Vol. 14, pp. 251 to 255. Pergamon Press. Printed in England.

NOTE EPREUVE

DE POINTAGES AUDITIVO-MANUELS CHEZ DES AVEUGLES : RESULTATS PRELIMINAIRES F.

MARTINEZ

et N.

FIORI-SAVARY

I.N.P.4 C.N.R.S. Psychophysiologie Generale, 31, chemin Joseph Aiguier, 13274 Marseille, Cedex 02, France (Received 23 June 1973) Abstract-The spatial localization of a click is to be indicated by a pointing movement of the hand on a table. The task is performed by 17 blind boys. A standardized position of the head, the right ear facing the source of sound, is observed, whatever the pointing hand is. Errors in localization depend upon the spatial zones from which the click comes. Results are discussed in relation to the hypothesis that the subject has to compare two distinct estimates: first the relative positions of his head and of his trunk, then the relative positions of his hand and of his head.

INTRODUCTION DANS diverses etudes du “sens des obstacles” [l-3], l’importance des don&es auditives a souvent et6 Btudiee chez l’aveugle en dt!placement. L’etude de la prkhension dans un espace sonore a, semble-t-il, beaucoup moins preoccupe les observateurs. 11est en effet tour zi fait inhabituel pour un aveugle de montrer avec son doigt d’oh vient un son; d’autre part, un enfant aveugle a qui l’on propose un objet sonore, tend bien la main pour l’obtenir mais dans une attitude “d’attente” et non avec un geste orient6 “d’atteinte”, car dans un contexte Cducatif de surprotection oti il a I’habitude d’etre servi, ce geste serait inutile. II semble que la capture utilitaire (couverts, outils de travail) profite plus d’apprentissages moteurs favorists par des habitudes d’ordre standardise, que de la mise en place de liaisons sensori-matrices permettant un codage spatial du champ de prehension. 11 apparait cependant interessant d’etudier l’evolution de la structuration de l’espace sonore de l’aveugle a travers des conduites matrices non seulement globales mais aussi de capture. Pour aborder cette etude, dans un travail precedent [4] nous demandions a de jeunes aveugles des pointages manuels de cibles sonores placees dans un champ libre, sans rep&es. Les difficult& observees alors pouvaient se regrouper en deux grands types : (1) La source sonore, par ses caracteristiques memes ne donne d’informations spatiales precises que dans une dimension. On sait en effet que, m&me les mouvements de la t&e “ne facilitent pas le rep&rage de la distance d’un son au corps” [5] sauf apres entrainement et reajustement par rapport a un son a une distance&talon 161.De m&me, rien dans l’organisation du systeme auditif ne permet, quand la t&e se trouve dans une position normale, de determiner la hauteur d’une cible dans le plan vertical. (2) D’autre part, certains sujets qui reperaient correctement la direction du son et placaient leur t@te d’une maniere standardisee pour chaque position de la cible effectuaient de mauvais pointages a cause de la meconnaissance qu’ils avaient de la position de leur main lancee en boucle ouverte dans un espace sans rep&es. Cette difficult& Btait detour&e par certains adultes qui balayaient l’espace avec leur bras et n’atteignaient la cible qu’apres avoir provoque avec leur main un effect d’tcran entre cible et oreille. Dans le but d’obtenir des pointages cohtrents, dans une situation standardide permettant une comparaison ulterieure avec d’autres situations, nous proposons ici une nouvelle Cpreuve, simplifiee compte tenu des observations precedentes. D’une part, nous annulons les problemes lies aux rep&ages dans deux dimensions de l’espace (distance au corps et hauteur dans le plan vertical) et ne demandons qu’une estimation de la direction dans le plan horizontal; d’autre part, nous proposons un feed-back tactile au sujet qui effectue son pointage sur une table. 251

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METHODES Les sujets Seuls des aveugles complets (ayant au plus la perception lumineuse) participent it l’epreuve. On definit comme aveugles de naissance AN les sujets dont la c&cite est apparue avant l’age d’un an. Les autres sont les aveugles tardifs AT Tableau 1. Effectif des sujets AN Moinsdellans Plus de 11 ans

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AT : 6

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Le matt+ieI d’exphimentation Des tops de 100 msec chacun sont transmis sur une frequence de 480 Hz a une cadence de 2 par set, par un haut-parleur de 5 cm de dia en suspension entre des ressorts. Cette cible sonore peut prendre n’importe quelle position sur un rail en arc de cercle de 70 cm de rayon, a 18 cm au-dessus de la table devant laquelle le sujet est assis. Cette table en Plexiglass de 140 x 70 cm est Cquipee, en plus de l’arc de cercle porteur de cible, d’un interrupteur, place devant le sujet, au centre de construction de l’arc de cercle. De ce centre partent des rayons espaces les uns des autres de 5” definissant des zones, unit& de decompte des erreurs de pointages. Ces zones sont tactilement discernables puisque altemativement lisses (Plexiglass) ou rugeuses (en tissu COllQ L’f?preuve Pour chaque position de la cible le sujet doit, avec une settle main, (1) declencher le son avec l’interrupteur, (2) montrer sur la table de quelle direction vient le son, sans chercher a atteindre la cible, (3) arr&er le son en revenant a l’interrupteur. 11ne recoit jamais d’information sur l’exactitude de ses reponses. Une stknce comprend deux series de 15 pointages chacune, effectu&s par la main preferentielle au tours de la premiere serie, par l’autre main pour la seconde serie. Les 15 positions successives de la cible tiennent compte de la lateralite et des differents degres d’eloignement possibles par rapport ii l’axe median sagittal du corps. Variables dipendantes Les erreurs de pointage sont not&es en nombre de rayons d’ckart par rapport au rayon porteur de cible (erreurs vers la gauche en cotation negative; erreurs vers la droite en cotation positive). Une cam&a de magnetoscope placee face au sujet permet d’enregistrer la trajectoire de la main, a l’aller et au retour. Facteurs expkrimentaux Main utilide. Zone dans laquelle est la cible (5 zones appelks couvrant 25 degres).

ABCDE ont Bte delimitees de gauche a droite, chacune

RESULTATS (1) Mise en position de la t&e Au cows de l’epreuve pr&dente, on notait un alignement des oreilles avec la cible sonore, l’oreille droite se trouvant la plus proche de cette cible. On note ici cette meme tendance, quelle que soit la main utilisee pour pointer, chez tous les aveugles, sauf 3 aveugles tardifs r¢s (moins de 2 ans ae c&cite) qui centrent leur t&e par rapport ti la cible sonore. Les plus jeunes enfants (4 de moins de 11 ans) mettent leur t&te en position en tours de pointage, tandis que les autres font de petites oscillations jusqu’a la mise en avant de I’oreille droite, avant de lancer le bras. (2) Le pointage (a) Znfuence de la main. Chez 12 sujets sur 17, les differences entre main droite et main gauche ne sent pas significatives (test du median). Chez les 5 autres sujets, on note une ditXrence signiticative a P < 0.01. Cette distinction en deux groupes n’est associable ni a l’lge des sujets ni a la prkcocite de leur c&cite. Pour les sujets ayant des resultats “differents” des deux mains, et a fortiori pour les 12 autres, les observations qui suivent sont identiques pour les deux mains.

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(b) Possibilifes de corrections. On note que, une fois quelesujet a tendu son bras, il effectue des corrections, c’est a dire des changements de rayons avec la main qui a atterri sur la table. La deja bonne precision du premier lancer du bras ne permet pas de trouver de difference significative entre les valeurs des errcurs du premier lancer et du pointage final. Cependant le nombre de corrections effectukes donne des informations: (1) les enfants de moins de 11 ans effectuent significativement plus de corrections que ceux de plus de 12 ans (~2 sign. a P < 0301); (2) Pour tous les ages, on note plus de corrections au tours des 5 premiers pointages dune serie qu’au tours des 10 suivants (~2 sign. a P < 0.01). La Fig. 1 montre la moyenne des erreurs des sujets dans chacune des zones de 25” (ABCDE) dtterminees de gauche B droite. Deux analyses de tendance ont et& effectu6e.s sur les resultats obtenus, respectivement par la main gauche et par la main droite pour chaque sujet.

FIG. 1. Moyenne des erreurs observees chez 17 aveugles dans chacune des zones (ABCDE) determinkes de gauche a droite sur la table tous les 25’. Erreurs vers la droite: cotation positive. Erreursvers la gauche:cotation negative. L’erreur 1Wrepresente 5” d&cart par rapport a la cible. I1 apparalt que settle la tendance linbire est significative (a P < 0.05 pour la main gauche et zi P -C 0.01 pour la main droite). Ce rksultat con&me l’effet observe sur la figure: erreurs vers la droite pour la zone de gauche A; erreurs vers la gauche pour la zone de droite E. Les erreurs des zones B C D se situent approximativement sur la droite reliant les points d’erreurs en A et en E et ne sont pas significativement differentes du 0 (f non sign.). Les valeurs de A et E sont done symetriques, c’est a dire non signiticativement differentes en valeur absolue. Etudiant une tache de localisation sonore, FISHER [‘;rlremarque en note que les sujets aveugles toument la t&e de man&e a placer une oreille (sans specifier laquelle) vers la cible. 11attribue cette mise en position au fait qu’elle maximalise l’effet de difference de temps d’arrivee du son sur les deux oreilles et favorise ainsi la determination de la direction. On peut aussi dire qu’elle rend plus perceptibles les differences d’intensite du son arrivant a l’oreille la plus proche de la source. Le choix de l’oreille droite, quelle que soit la main qui pointe, peut s’expliquer de diverses facons: Dans le contexte des travaux sur l’identification de sons du langage opposes a des signaux non verbaux en eCoute dichotique [8-lo] il semblait qu’on put attendre l’avancke de l’oreille gauche plutot que la droite pour une epreuve ne faisant pas intervenir le langage. Dans cette hypoth&se, on pourrait se demander si (le manque de curiosite exploratoire des jeunes enfants aveugles entrainant un enseignement de la manipulation) la bidextdrite induite pour la preparation a la lecture du Braille, ne serait pas a l’origine dune lateralisation hemispherique differente de celle des jeunes sujets voyants. Cependant. le caractere tardif de l’enseignement de la lecture ou meme des manipulations lines chez les aveugles semble &carter cette hypothese. La “notion de complexite” dvoquee par GODFREY[ll] selon laquelle une tkhe complexe entrainerait un traltement des don&s auditives par l’hdmisphbre dominant presente un certain inttrct: en effet, les

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travaux sur l’animal [12] ont montrd que la localisation sonore, comme la reconnaissance d’une sCquence de sons par exemple, n&cessite la prbence du cortex, contrairement & la simple detection d’une frCquence ou d’une intensitk. La localisation &ant done traitie comme un comportement complexe par l’organisme, on peut expliquer que l’aveugle de naissance (pour qui le rep&age dans l’espace ndcessite peut-&re la mediatisation du langage) soit aide dans sa t&he par l’avande de I’oreille droite. Les aveugles tardifs faisant face g la cible, reconstitueraient les don&es spatiales B partir des associations auditivo-visuelles de leur petite enfance. L’observation de corrections apres le premier lancer du bras semble montrer que la table fournit au sujet un feedback tactile suffisant pour procurer une information sur la position de sa main par rapport & son corps. On note que les corrections ne s’effectuent que lorsque le bras a CtC tendu. D’une part, cette position facilite le rep&age de la position de la main ?t partir de l’estimation de l’angle fait par le bras (au niveau de l’bpaule) avec le tronc, tandis que des angles au niveau du coude ou du poignet rendraient peu efficace cette estimation dans la mesure oti leur contrBle relkveraient sans doute plus de la d&termination de la distance au corps que de la direction dans le champ. D’autre part, et sans doute pour la m&me raison, cette distance est, semble-t-i1 critique pour l’aveugle: les observations d’aveugles op&s recouvrant la vue montrent [13] que “pour tous les sujets, les objets ou les obstacles sont situ& “opCrationnellement” ir distance de bras tendu”. Les erreurs se font par dkfaut lorsque les sujets doivent atteindre un objet situ6 au-de18 de cette distance, ou par exces lorsque l’objet est situ6 en-de&. Le bras tendu dtterminerait une distance de “prbhension” en-deC% de laquelle on aurait un espace de manipulation et au-de18 un espace inaccessible dans lequel toutes les relations sent l’effet d’une construction conceptuelle. On note d’autre part, le besoin qu’Cprouvent les plus jeunes aveugles & avancer le buste pour pointer. En effet, le comportement exploratoire nature1 de l’aveugle guide par un son est la locomotion, done la participation du corps dans son entier. L’aisance des ddplacements, associee aux erreurs systematiques de pointages et B la mise en position de la tCte et du buste (plans medians non dans le prolongement l’un de l’autre) met l’accent sur I’int&Zt que presenterait une etude des pointages dans des conditions de contriYe des rapports t&te-tronc-membre mettant en Evidence l’importance relative du tronc et de la t&e dans les prises de rep&es des membres.

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R&um&Dix-sept aveugles effectuent un pointage de cibles sonores en indiquant sur une table de quelle direction vient le son. On note une mise en position de la t&e, oreille droite face & la cible, quelle que soit la main utiliste. Des erreurs systematiques de pointage sont enregistrkes dans les diffdrentes zones de l’espace dans lesquelles se situe le son B atteindre. Les rdsultats sont discutes en fonction de la nCcessit& de mise en correspondance des positions estim&s du tronc, de la t&e et du membre qui pointe.

NOTE Deutschsprachige Lurch Antippen lokalisation

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Zusammer,fassun,-: mit der iIal?dauf einen Tisci: wird die Richtungs-

eines Klickgergusches

angezeigt.

Der Test wurde

'JOB 17 Blinder ausgefiihrt. Es wurde die Kopfhaltung, Zuwendung

die direkte

des rechten Ohrps zur Gertiuschquelle registriert

aul3erdem festgestellt,

fehler hingen "on den rgumlichen

Bereichen

Klickger~usch

warden dahingehend

kam. Die Resultate

daB es notwendig

und

welche Hal?d benutzt wurde. Lokalisationsab, aus dener. das

ist die gescl%itzten Stellungen und Hand in ?Ieziehu-.gzu bringen.

diskutiert,

van Rumpf, Knpf