Éditorial
J. Neuroradiol., 2006, 33, 283-284 © 2006. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
ET SI DEMAIN ÉTAIT DYNAMIQUE ? J.Y. GAUVRIT Service de Neuroradiologie, Hôpital R. Salengro, Bd Emile Laine, 59037 Lille cedex.
Le développement d’une nouvelle ARM avec injection qui offre une information dynamique et spatiale pour les vaisseaux intracrâniens, a permis de façon très concrète d’améliorer tout récemment l’exploration de la pathologie vasculaire encéphalique ; cette imagerie a modifié les protocoles radiologiques et a diminué la réalisation des examens invasifs. Trois termes différents peuvent être utilisés pour cette technique : ARM dynamique qui prend en compte les informations physiologiques, « ARM time resolved » pour les anglosaxons, si l’on considère avant tout qu’il s’agit d’une évolution technologique de l’ARM avec un temps d’acquisition court, ou l’ARMDSA (digital substraction angiography) si l’on compare cette nouvelle ARM à l’angiographie conventionnelle en raison de la similitude des images obtenues. L’ARM dynamique est basée sur une acquisition successive et une soustraction d’images [3]. Une séquence en écho de gradient volumique avec une imagerie parallèle est acquise et répétée entre 1 et 2 secondes. Elle utilise la technologie des antennes multicanaux permettant d’exploiter les informations de chaque élément de l’antenne et d’appliquer alors les techniques d’imagerie parallèle. Ces séquences aboutissent à une imagerie dont la résolution spatiale est inframillimétrique dans le plan d’acquisition avec une épaisseur de coupes de 5 mm. Le volume d’exploration, d’une largeur comprise entre 8 et 10 cm, est acquis une trentaine de fois pendant le passage de gadolinium dans les vaisseaux, réalisant une étude dynamique de la circulation cérébrale. Trois acquisitions successives en raison d’un voxel non isotropique sont effectuées dans les plans axial, sagittal et coronal et nécessitent une injection de 10 ml de gadolinium successivement pour chaque plan de coupes. Cette quantité faible de contraste est possible grâce à l’imagerie parallèle. Les premières images non rehaussées par le produit de contraste vont servir de « masque » : la sommation des coupes non injectées puis leur soustraction aux images injectées va isoler les vaisseaux opacifiés et augmenter leur contraste. En raison de cette soustraction, l’opacification vasculaire de la dernière acquisition est optimale. Pour la visualisation des images, une inversion de contraste est réalisée afin d’opacifier les vaisseaux en noir et d’obtenir des images similaires à celles de l’angiographie conventionnelle (ARM-DSA). Ils existent déjà des applications concrètes et des indications de substitution de l’angiographie. Les malformations artérioveineuses (MAV) et les fistules durales en sont les deux principales applications. L’ARM fournit d’une part une imagerie anatomique globale de la MAV et d’autre part une information dynamique avec une opacification séquentielle des Tirés à part : J.Y. GAUVRIT, à l’adresse ci-dessus. e-mail :
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artères, du nidus puis des veines. Par rapport à l’angiographie conventionnelle, l’ARM dynamique comporte des avantages : 1) elle visualise l’ensemble du réseau vasculaire cérébral alimentant la MAV en une seule injection contrairement à l’angiographie cérébrale où chaque cathétérisme sélectif et chaque injection apporte des informations sur une partie seulement des vaisseaux intracrâniens ; 2) les images sont fournies dans les trois plans de l’espace dont le plan axial qui n’est pas réalisable en angiographie conventionnelle ; 3) cette séquence apprécie la vitesse du flux au sein de la MAV grâce à l’analyse de la précocité d’apparition du drainage veineux. Cette dernière information est fondamentale après radiochirurgie car le ralentissement précoce du flux est l’un des meilleurs critères d’efficacité du traitement. Pour le suivi des patients après ce traitement, l’ARM dynamique occupe désormais une place importante dans la programmation des examens de contrôle [4]. Par ailleurs, la séquence d’ARM dynamique peut être programmée au cours du même protocole IRM (séquence en pondération T1, T2 ou FLAIR, T1 après injection) sans augmenter significativement le temps d’examen. Ce protocole s’intègre parfaitement dans le cadre de la réduction des doses d’irradiation [1], qui sont à rapporter aux nombreuses angiographies conventionnelles réalisées actuellement. Lorsqu’il existe un hématome intracérébral de topographie lobaire, ce qui constitue un mode de révélation classique de la MAV, le diagnostic peut être difficile en IRM avec les séquences conventionnelles, en raison de l’hypersignal spontané en pondération T1 des hématomes [5]. Les séquences d’ARM dynamique grâce à la soustraction d’image, qui élimine l’hypersignal en pondération T1 du sang, visualise plus facilement les anomalies vasculaires [2]. D’autre part, une thrombose veineuse qui est une des autres étiologies fréquentes d’hématome lobaire peut être évaluée par cette séquence qui opacifie à des temps tardifs, les sinus veineux. L’ARM dynamique dans le cas de fistule durale artérioveineuse ne montre pas la zone précise du shunt mais aide au diagnostic en visualisant une opacification veineuse précoce témoignant de la présence d’une fistule [7]. De même, la visualisation d’une fistule carotidocaverneuse est possible en ARM dynamique. Les limites concernent actuellement la résolution spatiale qui est encore limitée et ne permet pas une étude radioanatomique aussi précise que l’angiographie conventionnelle. La résolution temporelle, de l’ordre de la seconde, reste également inférieure à celle obtenue en angiographie et peut méconnaître par exemple un retour veineux très précoce. Il existe d’ores et déjà des voies de développement de cette technique par trois moyens : à 1,5 teslas, par l’association de deux types d’ARM rapide, à 3 teslas, par l’acquisition d’une séquence volumique
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isotropique, et enfin par l’utilisation des nouveaux produits de contraste à forte capacité d’opacification à 1,5 T ou 3 T. Il est possible d’améliorer l’ARM dynamique à 1,5 T en combinant plusieurs techniques d’imagerie rapide associant des séquences avec des temps d’acquisition raccourci comme le TRICKS (time-resolved imaging of contrast kinetics) ou le TREAT (timeresolved echo-shared angiographic technique) avec des méthodes permettant de réduire le temps d’acquisition comme l’imagerie parallèle. L’élément TRICKS ou TREAT apporte une augmentation supplémentaire de la résolution temporelle par un rafraîchissement variable du plan de Fourier, d’une phase temporelle à l’autre. L’inconvénient de ces séquences est que l’excellente résolution temporelle s’effectue au détriment de la résolution spatiale. En revanche, associée à une imagerie parallèle, qui elle va contribuer à augmenter la résolution spatiale, l’acquisition devient optimale avec un pixel de 0,58 × 0,58 mm2 et une résolution temporelle de l’ordre de 0,9 seconde. L’utilisation de haut champ offre plusieurs possibilités d’amélioration de l’ARM dynamique. En passant de 1,5 à 3 T, il existe un doublement du rapport signal/bruit qui va permettre, en consentant une certaine de perte de celui-ci, d’améliorer la résolution spatiale. Les acquisitions des images à 3 T allongent également le T1 des tissus. Cela se traduit par un signal plus intense des produits de contraste utilisés en ARM et l’offre ainsi l’avantage potentiel de diminuer les doses de contraste injectées ; en théorie, il est possible de diminuer les doses de 70 à 60 % par rapport aux ARM acquises à 1,5 T. Il existe aussi une véritable synergie entre le haut champ et l’imagerie parallèle. Cette dernière diminue le temps d’acquisition, augmente la résolution spatiale, et la hauteur d’exploration de l’ARM, réduit les artefacts de mouvements et les effets du cœfficient d’absorption spécifique des tissus (SAR) ainsi que les bruits acoustiques. Il est possible d’obtenir une séquence d’ARM à 3 T avec un pixel isotropique millimétrique en injectant 5 cc de produit de contraste. Un des autres avantages des IRM 3 T lié à l’allongement du T1 est de pouvoir utiliser des techniques en spin labeling aboutissant à des ARM cérébrales dynamiques sans injection. Elles sont très peu utilisées à 1,5 T en raison du très faible signal obtenu et de la faible résolution spatiale. En revanche, elles offrent la possibilité d’obtenir des temps d’acquisition très brefs de l’ordre du centième de seconde. Depuis 15 ans en ARM, les radiologues ont eu le choix entre plusieurs types de produits de contraste, tous injectés par voie intraveineuse. Ces produits de contraste se répartissent dans l’espace extracellulaire et sont ensuite excrétés rapidement. Ils sont tous basés sur les propriétés du Gadolinium. Ils ont un effet à l’origine d’un raccourcissement du T1 et, à des degrés différents, ils augmentent la visualisation
des vaisseaux et des malformations vasculaires en ARM. Cependant étant constitués de petites molécules, ces produits restent seulement un court moment dans la circulation avant d’être filtrés et éliminés de l’organisme ; leur effet en IRM reste limité dans le temps. Récemment une nouvelle classe de produits de contraste à diffusion intravasculaire qui se liguent avec des molécules du sang et restent plus longtemps dans la circulation générale, a été développée [6]. Étant constitués par très petites molécules bien plus petites que celles utilisées dans les produits de contraste extracellulaires, ils se fixent de façon réversible avec l’albumine du plasma pour former une plus large structure. Cela augmente de façon considérable la longévité de ces produits de contraste dans le sang et accroît alors le temps pendant lequel ils sont disponibles pour réaliser une imagerie. Ainsi il existe un important raccourcissement du T1 et à dose équivalente d’agents extracellulaires, ces produits sont plus efficaces. L’ARM dynamique a trouvé sa place dans l’exploration de la pathologie vasculaire encéphalique comme par exemple dans le suivi des MAV traitées par radiochirurgie ; cependant en raison de ses limites actuelles qui concernent la résolution temporelle, elle ne peut se substituer, dans toutes les situations, à l’angiographie. Elle pourrait prendre, à l’avenir, une position encore plus importante dans le champ d’exploration des malformations vasculaires intracrâniennes, en particulier à haut champ où alors l’ARM ne sera plus morphologique ou dynamique mais comme l’angiographie associera de façon indissociable ces deux informations.
RÉFÉRENCES [1] Guide du bon usage des examens d’imagerie médicale. Recommandations pour les professionnels de santé. Transposition de la directive européenne 97/43 Euratom. Société Française de Radiologie, 2005. [2] EVANS AL, COLEY SC, WILKINSON ID, GRIFFITHS PD. Firstline investigation of acute intracerebral hemorrhage using dynamic magnetic resonance angiography. Acta Radiol 2005; 46: 625-630. [3] GAUVRIT JY, OPPENHEIM C, SAVAGE J et al. Applications de l’ARM dynamique dans la pathologie vasculaire du système nerveux central. J Neuroradiol 2005 ; 32 : 20-25. [4] GAUVRIT JY, OPPENHEIM C, NATAF F et al. Three-dimensional dynamic magnetic resonance angiography for the evaluation of radiosurgically treated cerebral arteriovenous malformations. Eur Radiol 2006; 16: 583-591. [5] LECLERC X, KHALIL C, SILVERA S et al. Imagerie des hématomes intra cérébraux non traumatiques. J Neuroradiol 2003 ; 30 : 303-316. [6] STEGER-HARTMANN T, GRAHAM PB, MULLER S, SCHWEINFURTH H. Preclinical safety assessment of Vasovist (Gadofosveset trisodium), a new magnetic resonance imaging contrast agent for angiography. Invest Radiol 2006; 41: 449-459. [7] WETZEL SG, BILECEN D, LYRER P et al. Cerebral dural arteriovenous fistulas: detection by dynamic MR projection angiography. AJR Am J Roentgenol 2000; 174: 1293-1295.