Étude des infections à VIH nouvellement découvertes entre 2000 et 2007 dans le Nord et l’Est de la France

Étude des infections à VIH nouvellement découvertes entre 2000 et 2007 dans le Nord et l’Est de la France

Médecine et maladies infectieuses 40 (2010) 517–523 Article original Étude des infections à VIH nouvellement découvertes entre 2000 et 2007 dans le ...

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Médecine et maladies infectieuses 40 (2010) 517–523

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Étude des infections à VIH nouvellement découvertes entre 2000 et 2007 dans le Nord et l’Est de la France Study of new HIV infection between 2000 and 2007 in the north and east of France S. Henard a,∗ , L. Letranchant a , A. Borel b , F. Ajana c , D. Rey d , L. Hustache-Mathieu e , P. Chavanet f , T. May a , C. Rabaud a a

COREVIH Lorraine Champagne Ardennes, hôpitaux de Brabois, allée du Morvan, 54500 Vandœuvre-lès-Nancy, France b COREVIH Picardie, 80000 Amiens, France c COREVIH Nord, 59200 Tourcoing, France d COREVIH Alsace, 67000 Strasbourg, France e COREVIH Franche-Comté, 25000 Besan¸ con, France f COREVIH Bourgogne, 31000 Dijon, France Rec¸u le 10 septembre 2009 ; accepté le 12 f´evrier 2010 Disponible sur Internet le 8 avril 2010

Résumé L’infection à VIH est une maladie à déclaration obligatoire depuis 2003 et les données épidémiologiques ainsi recueillies ne sont pas exhaustives et ne concernent pas la mise sous traitement antirétroviral. Objectif et méthode. – L’objectif de cette étude observationnelle rétrospective déclarative était d’étudier l’évolution épidémiologique des nouvelles séropositivités diagnostiquées entre le 1er javvier 2000 et le 31 décembre 2007 dans les centres hospitaliers volontaires du Nord et l’Est de la France, la comparer aux données régionales et nationales, de compléter les données de la déclaration obligatoire notamment en ce qui concerne le traitement antirétroviral. Résultats. – Au total, 3030 questionnaires ont été exploités. Entre 2000 et 2007, les principales tendances sont comparables à celles observées au niveau national : diminution du nombre de femmes, de personnes d’origine étrangère et de la proportion de patients découverts avec un retard au diagnostic, augmentation du nombre de patients diagnostiqués au stade de primo-infection et taux de CD4 plus élevés à la mise sous traitement antirétroviral. Cependant, des spécificités locales apparaissent : proportion plus importante de patients contaminés par voie homo/bisexuelle, proportion de patients co-infectés par les virus des hépatites moins importantes qu’au niveau national. Les prises en charge thérapeutiques respectent les recommandations des experts, avec cependant un « effet centre » marqué concernant les habitudes de prescription. Discussion. – Une telle étude épidémiologique locale, même si elle confirme les principales tendances observées aux niveaux national et régional, devra permettre de les affiner, et proposer des mesures de prévention et de dépistage plus spécifiquement adaptées aux réalités locales. © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Déclaration obligatoire ; Infection à VIH ; Sida

Abstract In France, since 2003, all new HIV infection must be reported. Data collected with the declaration system is not exhaustive and only concerns epidemiological data. Objective. – The authors’ aim was to study the epidemiologic evolution of new HIV cases between January 1, 2000 and December 31, 2007 in North and East of France, to compare them with national and local data, to complete them, and to identify local specificities.



Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (S. Henard).

0399-077X/$ – see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.medmal.2010.02.004

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Method. – A retrospective observational study was made, with a standardized questionnaire completed by any volunteer HIV care center in the North and the East of France. Results. – Three thousand and thirty questionnaires were analyzed. The main trends over these eight years were similar to those observed in the rest of France: a decreasing number of women and patients of foreign origin, a decreasing number of patients with a late diagnosis, an increasing number of primary infections, and a higher CD4 count on initiation of antiretroviral treatment. However, local specificities appeared, such as: increasing proportion of men having sex with men and a less important proportion of co-infected patients with hepatitis B and/or C than on the national level. The therapeutic regimen is adequate according to expert recommendations, with, however, a marked “center effect” concerning prescription habits. Discussion. – Such a local epidemiological study, even if it confirms observed trends in the rest of France, allows detailing them and suggesting prevention measures more specifically adapted to local settings. © 2010 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Keywords: Mandatory notification; AIDS; HIV infection

1. Introduction L’épidémie de VIH est en constante et rapide évolution. Sa surveillance nécessite de collecter et d’analyser des données très fréquemment mises à jour afin d’en analyser la dynamique et permettre d’évaluer et d’orienter les actions de prévention dans les différents groupes de population touchés. Pour ce faire, le système de surveillance en France a reposé initialement sur la déclaration obligatoire des cas avérés de sida, instaurée en 1986. Mais depuis 1996 et l’utilisation des puissantes associations d’antirétroviraux, la surveillance du sida ne reflète plus l’évolution des contaminations. C’est pourquoi la déclaration de l’infection par le VIH, quel qu’en soit le stade, a été rendue obligatoire par deux décrets datés du 6 mai 1999 [1,2] et réellement appliqués à partir de mars 2003 [3]. Mais les données épidémiologiques ainsi recueillies ne sont pas exhaustives (70 % des nouvelles séropositivités sont déclarées en 2007 [4]) et ne concernent pas certains domaines tels que la mise sous traitement antirétroviral ou l’observance. L’objectif de ce travail est d’étudier l’évolution épidémiologique des nouvelles séropositivités diagnostiquées entre le 1er janvier 2000 et le 31 décembre 2007 dans les centres hospitaliers dépendant des six Coordination régionale de lutte contre l’infection à VIH (COREVIH) du Nord et de l’Est de la France. Les données recueillies seront comparées aux données nationales et régionales de la déclaration obligatoire (institut national de veille sanitaire InVS), disponibles depuis seulement 2003, et les complèteront notamment en termes de traitement antirétroviral. La connaissance des tendances récentes locales permettra d’adapter les actions de santé publique et les politiques de prévention aux populations locales à risque. Par ailleurs, des habitudes de prise en charge locale seront peut-être mises en évidence et comparées entre elles et avec les référentiels actuels, afin d’analyser et d’optimiser la prise en charge des patients. 2. Patients et méthodes La population étudiée correspondait à tous les patients chez lesquels une séropositivité pour le VIH a été diagnostiquée entre le 1er janvier 2000 et le 31 décembre 2007 dans les centres hospitaliers ayant accepté de participer à l’étude et dépendant d’une des six COREVIH du Nord et de l’Est

de la France (Alsace, Bourgogne, Franche-Comté, LorraineChampagne-Ardenne, Nord et Picardie). Cette étude observationnelle rétrospective reposait sur la collecte de deux questionnaires standardisés, complétés et anonymisés dans chaque centre hospitalier sollicité. Le premier questionnaire, envoyé tous les ans entre 2001 et 2008 au cours du mois de mars, concernait les patients chez lesquels une infection par le VIH avait été découverte durant l’année précédente. Les données recueillies concernaient le patient (sexe, âge, lieu de résidence, origine ethnique (pays d’origine), l’activité professionnel, la grossesse), et l’infection VIH (date de découverte, mode de découverte, mode de contamination, taux de lymphocytes CD4+, charge virale et catégorie de la classification Center for Diseases Control (CDC) 93 au moment de la découverte de l’infection VIH, retard au diagnostic (taux de CD4 inférieur à 350 par millimètre cube au diagnostic selon la définition utilisée lors de l’enquête Retard [5]), diagnostic fait au stade de la primo-infection, existence d’une co-infection par les virus de l’hépatite B (définie par un antigène HBs positif) et /ou C (définie par une sérologie VHC positive), nature du traitement antirétroviral instauré le cas échéant et mise sous traitement précoce, définie par un traitement débuté dans les trois mois suivant le diagnostic, compte tenu du délai entre la fin de l’année et le remplissage des questionnaires au cours du mois de mars). Le second questionnaire a été envoyé en mars 2007, en même temps que le premier questionnaire, dans les centres hospitaliers participant à l’étude depuis 2000. Il avait vocation à colliger les données de suivi à un, deux. . . six ans des patients inclus dans cette cohorte durant les années précédentes : évolution du taux de CD4 et de la charge virale, instauration de traitement avec la date, le taux de CD4, la charge virale. Un item concernant l’observance figurait dans ce second questionnaire. Il était complété par le personnel médical ou paramédical prenant en charge le patient, et comprenait trois modalités : patients hautement observants (plus de 95 % des médicaments étaient effectivement pris), patients modérément observants (entre 80 et 95 % des médicaments étaient effectivement pris) et patients non observants (moins de 80 % du traitement était effectivement pris). Les questionnaires ont été centralisés au niveau de la COREVIH Lorraine-Champagne-Ardenne et saisis avec le logiciel Epidata 3.1. L’analyse statistique, réalisée avec le logiciel S.A.S

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Tableau 1 Caractéristiques des nouveaux patients diagnostiqués séropositifs pour le VIH entre 2000 et 2007 dans le Nord et l’Est de la France. Features of new HIV positive patients between 2000 and 2007 in the North and East of France. n

Fig. 1. Nombre et évolution des nouvelles séropositivités diagnostiquées entre 2000 et 2007 dans les six COREVIH du Nord et de l’Est de la France. Number and evolution of new HIV cases between 2000 and 2007 in the 6 HIV reference centers (COREVIH) in the North and East of France.

version 9.1 [6], a consisté en une analyse descriptive de la population, puis en une analyse bivariée avec le test du Khi2 pour la comparaison des variables qualitatives et les test de Student et d’Anova pour les variables quantitatives, et enfin des régressions logistiques en analyse multivariée avec introduction dans le modèle des variables explicatives dont le seuil de significativité p en analyse bivariée était inférieur à 0,2. 3. Résultats Au total, 3030 fiches, correspondant à autant de patients, ont été collectées et analysées sur la durée de l’étude dans les six COREVIH du Nord et de l’Est de la France (Fig. 1). Le nombre d’établissements sollicités s’élève à 35 et ceux ayant participé à l’étude est de 30 (3 pour la COREVIH Alsace, quatre pour la COREVIH Bourgogne, eux pour la COREVIH Franche-Comté, 11 pour la COREVIH Lorraine Champagne Ardenne, un pour la COREVIH Nord et neuf pour la COREVIH Picardie), avec en majorité des centres hospitaliers universitaires (CHU) et des centres hospitaliers de plus de 300 lits. Le nombre de fiches colligées a augmenté entre 2000 (n = 263) et 2004 (n = 451), puis a diminué à partir de 2005. Les caractéristiques de notre population sont détaillées dans le Tableau 1. Concernant l’origine ethnique, on note des disparités importantes selon les COREVIH avec une proportion statistiquement (p < 0,01) plus importante de patients originaires d’Afrique dans les COREVIH Picardie (42 %) et Alsace (33 %) par rapport aux quatre autres COREVIH. Les proportions d’hommes d’origine caucasienne et africaine sont restées stables avec des taux respectivement proches de 80 % et 15 %. En revanche, la proportion de femmes d’origine africaine a lentement progressé jusqu’en 2004, passant de 54,4 % à 62,3 % pour diminuer à partir de 2005 puis se stabiliser en 2007 autour de 45 %. Les patients d’origine africaine étaient plus souvent de sexe féminin, plus jeunes et plus souvent contaminés par voie hétérosexuelle. Leur séropositivité était découverte plus fréquemment au cours d’un bilan hospitalier et avec un retard au diagnostic. Au moment du diagnostic sur les huit années étudiées, les sujets d’origine africaine avaient un taux moyen de CD4 (324/mm3 ) statistiquement plus faible (p < 0,01) que les patients d’origine caucasienne (422/mm3 ).

Sexe Masculin Féminin Âge 18 à 29 ans 30 à 39 ans 40 à 49 ans 50 à 59 ans 60 ans et plus Origine ethnique Caucasienne Africaine Autre Mode de contamination Hétérosexuel Homo/bisexuel Usage de substances intraveineuses Transfusion/hémophilie Autre Stade CDC 93 A B C Nombre de CD4 au diagnostic < 200/ mm3 200 à 500 / mm3 > 500 / mm3 Primo-infection Co-infection VIH-VHB Co-infection VIH-VHC

Pourcentage

2027 1003

66,9 33,1

982 1036 614 304 94

32,4 34,2 20,3

2023 812 192

66,8 26,8 6,4

1591 1113 63 44 216

52,6 36,7 2,1 1,5 7,1

2391 236 397

79,1 7,8 13,1

1005 1194 831

33,2 39,4 27,4

303 125 139

11,5 4,3 4,7

10 3,1

Concernant l’évolution des modes de contamination, la proportion de patients contaminés par voie homo/bisexuelle a tout d’abord baissé entre 2000 (40,3 %) et 2003 (31,2 %), puis a augmenté pour atteindre 48,2 % en 2007. La proportion de patients contaminés par UDIV est restée faible (entre 3,3 % en 2003 et 1 % en 2006). La population des hommes contaminés par voie homo/bisexuelle était statistiquement différente du reste de notre échantillon en ce qui concerne l’âge (plus jeune), l’origine ethnique (plus souvent d’origine caucasienne), le mode de découverte (plus souvent diagnostiqués par le médecin traitant et moins souvent au cours d’un bilan hospitalier) et le retard au diagnostic (moins fréquent : 43,5 % contre 59,4 %). Concernant le virus, le sérotype 1 était présent en très large majorité (98,6 % des patients). Le sérotype 2 était retrouvé chez 31 patients (soit 1,0 %). Dix patients étaient co-infectés par les deux sérotypes (soit 0,3 %). La moyenne du taux de CD4 au diagnostic a augmenté depuis 2003 (passant de 347/mm3 en 2003 à 428/mm3 en 2007), et la médiane de la charge virale a diminué (69 000 copies/ml en 2000 et 41 000 copies/ml en 2007). La proportion de patients atteints d’une pathologie classant sida (stade C de la classification CDC 1993) a baissé, passant de 24,7 % en 2000 à 10,8 % en 2007. La plus fréquente est restée la pneumo-

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Tableau 2 Caractéristiques des nouveaux patients diagnostiqués séropositifs pour le VIH au stade de primo-infection et comparaison avec le reste de notre population. Features of new HIV positive patients at primary infection stage and comparison to the local population.

Sexe Masculin Féminin Moyenne d’âge (ans) CD 4 au diagnostic CV au diagnostic Mode de contamination Homo/bisexuel Hétérosexuel Toxicomanie IV Origine ethnique Caucasiens Africains Autres Activité professionnelle En activité Chômage

Primo-infectés en %

Autres en %

83,8 16,2 36,1 ± 10,2 501 ± 249 1100000

65,2 34,8 37,2 ± 11,3 381 ± 415 165000

61,1 35,9 0,3

34,4 53,4 2,3

91,4 5,9 2,6

63,9 28,8 7,3

p p < 0,01

p = 0,12 p < 0,01 p < 0,01 p < 0,01

p < 0,01

p < 0,01 76,7 6,9

Tableau 3 Les facteurs prédictifs d’un retard au diagnostic chez les nouveaux séropositifs pour le VIH entre 2000 et 2007 (analyse multivariée). Predictive factors for a delayed diagnosis in new HIV positive patients between 2000 and 2007 (multivariate analysis).

54,7 9,6

cystose, suivie par la tuberculose, la candidose œsophagienne et le syndrome cachectique dû au VIH. La proportion de patients découverts au stade de primoinfection était de 11,5 % avec une progression entre 2001 (5 %) et 2007 (13,7 %). La comparaison des caractéristiques des patients diagnostiqués au stade de primo-infection avec le reste de la population figure dans le Tableau 2. La proportion de patients découverts au stade de primo-infection et contaminés par voie homo/bisexuelle n’a cessé d’augmenter depuis 2000, passant de 6,6 % à 21,5 % en 2007. Concernant l’instauration d’un traitement dans les trois mois suivant le diagnostic chez les patients découverts au stade de primo-infection, la proportion a diminué, passant de 88,9 % en 2000 à 16 % en 2007, alors que le taux de CD4 au diagnostic est resté le même (450/mm3 en moyenne). La proportion de patients découverts séropositifs pour le VIH avec un retard au diagnostic était en moyenne de 53,6 % entre 2000 et 2007, avec une progression de 2000 (52,5 %) à 2003 (68,8 %) puis une diminution depuis pour atteindre 43 % en 2007. Lors de leur diagnostic de séropositivité, 65,7 % de ces patients étaient au stade A de la classification CDC 1993 (pour 93,8 % chez les patients sans retard au diagnostic), et 23,6 % au stade C (pour 0,9 % des patients sans retard au diagnostic). Ces patients étaient statistiquement plus âgés que ceux découverts sans retard au diagnostic (38,2 ans contre 35,2 ans), plus souvent d’origine africaine (39,7 % contre 27,9 %) et plus souvent contaminés par rapports hétérosexuels (57,9 % contre 49,4 %). Les facteurs prédictifs d’un retard au diagnostic déterminés par analyse multivariée (Tableau 3) sont l’âge, la zone géographique dépendant d’une des COREVIH (Nord, Bourgogne et Lorraine-Champagne-Ardenne), la contamination par voie hétérosexuelle, l’origine africaine, le fait que la découverte de la séropositivité ait eu lieu au cours d’un bilan hospitalier. Les femmes qui découvrent leur séropositivité au cours d’une grossesse ont moins souvent de retard au diagnostic que les autres femmes incluses dans cette étude.

Âge 18 à 30 ans 30 à 40 ans 40 à 50 ans 50 à 60 ans COREVIH Alsace Bourgogne Franche Comté Lorraine Champagne Ardennes Nord Picardie Mode de contamination Homo/bisexuel Hétérosexuel Toxicomanie IV Origine Caucasienne Africaine Mode de découverte Médecin traitant CDAG Point d’appel clinique à l’hôpital Grossesse Non Oui

OR

IC 95 %

p

1 1,7 3,1 2,2

1,3–2,2 2,1–4,4 1,0–4,5

p < 0,01 p < 0,01 p < 0,01

1 1,4 0,7 1,2 2,8 0,9

1,0–1,9 0,5–1,1 0,9–1,6 2,2–3,6 0,7–1,2

p = 0,02 ns p = 0,05 p < 0,01 ns

1 1,6 1,4

1,4–1,9 0,8–2,4

p < 0,01 ns

1 1,8

1,4–2,3

p < 0,01

1 0,5 1,3

0,3–0,7 1,0–1,8

p < 0,01 p < 0,01

1 0,5

0,3–0,8

p = 0,01

Le taux de co-infections VIH-virus de l’hépatite B (VHB) était de 4,32 % et de 4,72 % pour les co-infections VIH-virus de l’hépatite C (VHC). Ces proportions ont diminué entre 2000 et 2007, tant pour les co-infections VIH-VHB (passant de 6,1 % à 1,8 %) que pour les co-infections VIH-VHC (passant de 4,9 % à 2,6 %). Au cours de notre étude ont été diagnostiqués 14 cas de co-infections VIH-VHB-VHC. Les co-infectés VIH-VHB étaient statistiquement plus jeunes et plus souvent d’origine étrangère que dans notre population totale. Quant aux patients co-infectés VIH-VHC, ils avaient plus souvent été contaminés par UDIV, mais il n’y avait pas de différence significative concernant leur âge, leur origine ou leur sexe avec le reste de notre population. Concernant la mise sous traitement antirétroviral (ARV), 963 patients (soit 31,8 %) ont été traités dans les trois mois suivant le diagnostic. Les facteurs prédictifs d’une mise sous traitement dans les trois mois dans notre étude étaient la zone géographique dépendant d’une des COREVIH, un taux de CD4 bas, une charge virale élevée, la présence d’une infection opportuniste et la grossesse. Par ailleurs, nous observons que le taux de patient mis rapidement sous traitement (dans les trois mois suivant le diagnostic) baisse entre 2000 et 2005, puis remonte les années suivantes, et que cela reste vrai après ajustement sur le taux de lymphocytes CD4+ au diagnostic, la charge virale au diagnostic, la découverte de la séropositivité au cours d’une grossesse, la présence d’une infection opportuniste au moment du diagnostic, l’origine ethnique, l’âge, le mode de

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Tableau 4 Facteurs prédictifs d’une mise sous traitement de première ligne comportant un IP versus un traitement de première ligne ne comprenant pas d’IP (analyse multivariée). Predictive factors for a secondary first-line treatment including a PI versus a first-line treatment not including a PI (multivariate analysis). OR

Fig. 2. Évolution de la nature des traitements antirétroviraux de première ligne prescrits entre 2000 et 2007 dans les 6 COREVIH du Nord et de l’Est de la France. Evolution of the nature of first line ART prescribed between 2000 and 2007 in the 6 COREVIH in the North and East of France.

découverte et la présence d’une co-infection par les virus des hépatites. Le traitement était une trithérapie composée d’au moins un inhibiteur nucléosidique de la reverse transcriptase (NUC) dans 92,3 % des cas, d’au moins un inhibiteur non nucléosidique de la reverse transcriptase (NNUC) dans 23,5 % des cas et d’au moins un inhibiteur de la protéase (IP) dans 57,3 % des cas. La nature du traitement instauré en première ligne a évolué entre 2000 et 2007 (Fig. 2) : l’association IP+NUC est passée de 40 % à 80 % des traitements, alors que la proportion des associations de trois NUC et de deux NUC+1 NNUC a diminué. Par ailleurs, il apparaît qu’un même patient bénéficie d’une prise en charge différente selon le lieu de cette prise en charge (en d’autres termes, selon que cette prise en charge a lieu dans le territoire couvert par telle ou telle COREVIH) comme le montre la Fig. 3. Une analyse multivariée a été réalisée afin de mettre en évidence les facteurs prédictifs d’une mise sous traitement de première ligne comportant un IP entre 2000 et 2007. Les résultats résumés dans le Tableau 4 montrent que la décision d’instaurer un traitement avec IP dépendait de la présence ou non d’une infection opportuniste, du diagnostic fait au stade de primo-infection par rapport au diagnostic fait ultérieurement, de la découverte de la séropositivité au cours d’une grossesse, des années et de la COREVIH : toutes choses égales par ailleurs les patients pris en charge dans les établissements

COREVIH Alsace Bourgogne Franche Comté Lorraine Champagne Ardennes Nord Picardie Infection opportuniste Non Oui Primo-infection Non Oui Grossesse Non Oui Année 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007

IC 95 %

p

1 2,0 6,7 3,2 4,5 1,4

1,0–4,1 2,2–19,9 1,8–5,5 1,2–17,0 0,7–2,9

p = 0,047 p < 0,01 p < 0,01 p = 0,02 ns

1 2,0

1,1–3,5

p = 0,01

1 14,6

3,7–57,5

p < 0,01

1 3,0

1,6–5,5

p < 0,01

1 0,6 1,7 2,1 3,3 6,9 9,9 10,1

0,2–1,8 0,6–4,8 0,7–5,7 1,2–8,7 2,5–19,3 3,3–30,0 3,1–33,4

ns ns ns p = 0,01 p < 0,01 p < 0,01 p < 0,01

dépendants des COREVIH Franche-Comté, Nord, Bourgogne et Lorraine-Champagne-Ardennes étaient plus souvent traités par une association comprenant un IP que les patients suivis dans les établissements dépendants de la COREVIH Alsace. Concernant l’observance, les patients se répartissaient ainsi : hautement observants : 24,6 % (n = 199), modérément observants : 73,6 % (n = 596) et non observants : 1,8 % (n = 14). En analyse multivariée, les facteurs statistiquement prédictifs d’une bonne observance étaient le sexe féminin, l’âge supérieur à 30 ans, l’origine caucasienne, un traitement comportant un IP et l’activité professionnelle. Le taux de CD4 au diagnostic n’était pas un facteur statistiquement significatif (Tableau 5). 4. Discussion

Fig. 3. Nature des traitements antirétroviraux de première ligne prescrits en 2007 dans le Nord et de l’Est de la France, en fonction du COREVIH. Nature of first line ART prescribed between 2000 and 2007 in the North and East of France according to the COREVIH.

Cette étude est la seule à notre connaissance à s’intéresser à l’évolution des nouvelles séropositivités pour le VIH dans une inter-région franc¸aise, aussi bien en termes de données démographiques que de traitements. Elle ne prétend pas être exhaustive car elle est basée sur le volontariat. Cependant, une approche de l’exhaustivité a été réalisée en se basant sur les données du bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) [4] et de l’INSEE pour l’année 2007 : elle a été estimée à 55 % (de 85 % pour la COREVIH Alsace à 32 % pour la COREVIH Franche-Comté). Nos résultats sont comparables aux données nationales parues fin 2008 [4] concernant la répartition et l’évolution du

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Tableau 5 Facteurs prédictifs d’une bonne observance au traitement antirétroviral (analyse multivariée). Predictive factors for a good observance of ARVT (multivariate analysis).

Sexe Féminin Masculin Âge 18 à 30 ans 30 à 40 ans 40 à 50 ans Origine Caucasienne Africaine Traitement NUC NNUC + NUC IP + NUC Activité professionnelle En activité Chômage

OR

IC 95 %

p

1 0,45

0,24–0,84

p = 0,0126

1 1,60 2,10

0,96–2,68 1,22–3,95

p = 0,0712 p = 0,0204

1 0,59

0,35–0,98

p = 0,0453

1 2,01 2,29

0,88–4,60 1,02–5,12

p = 0,0976 p = 0,0425

1 0,41

0,17–0,98

p = 0,0467

nombre de nouveaux cas, de l’âge, du sexe, de l’origine ethnique, de la découverte de séropositivité durant la grossesse, du stade de la maladie au moment du diagnostic, des infections opportunistes. Ils sont également comparables aux données régionales [7] pour l’évolution du nombre de nouveaux cas, de l’âge, du sexe, de l’origine ethnique et de la plus forte proportion de patients contaminés par voie homo/bisexuelle qu’au niveau national. La récente augmentation des contaminations par voie homo/bisexuelle est attribuée à un relâchement de la protection lors des rapports sexuels, comme le confirment la dernière enquête Presse Gay de 2004 [8] et la recrudescence des cas d’infections sexuellement transmissibles (IST) [9,10]. Cela permet de proposer dans nos régions un renforcement des actions de prévention mieux ciblées sur cette population plus à risque. Le taux de co-infections VIH-VHB et VIH-VHC est beaucoup plus faible dans notre échantillon qu’au niveau national [11] : deux fois moins pour le VHB et trois fois moins pour le VHC allant de pair avec une proportion de contamination par usage de drogues intraveineuses plus faible également. Notre étude s’est également intéressée au retard au diagnostic et a pu mettre en évidence des facteurs prédictifs de découverte de séropositivité à un stade tardif (moins de 350 CD4/mm3 ), qui étaient les mêmes que ceux retrouvés au cours de l’enquête « Retard » [5] : une moyenne d’âge plus élevée, le mode de contamination hétérosexuel et l’origine africaine notamment. Il conviendrait donc de faire évoluer les stratégies de prévention et dépistage (comme l’a proposé le Conseil national du sida en novembre 2006 [12]) en renforc¸ant la politique de dépistage en fonction de la prévalence du VIH dans les différentes régions franc¸aises (rôle des COREVIH) et dans les groupes de population plus exposée, notamment chez les personnes d’origine étrangère qui ont moins accès au système de santé. Dans ce contexte, la place des tests de dépistage rapides a d’ailleurs été précisée par la Haute Autorité de santé (HAS) en octobre 2008

[13], en recommandant leur utilisation chez les populations dont le recours au dispositif actuel est insuffisant. Concernant les traitements, notre étude montre qu’une association comprenant une IP boostée est de plus en plus souvent prescrite au fil des années par rapport aux associations contenant un NNUC ou trois NUC et que l’« observance » telle qu’elle est définie dans notre étude semble meilleure avec une association contenant une IP. L’évolution du taux de patients mis sous ARV dans les trois mois suivant le diagnostic, avec une augmentation depuis 2005, va dans le sens des recommandations les plus récentes (rapport Yéni 2008) qui préconisent de débuter le traitement antirétroviral de plus en plus précocement. Il existe des différences importantes de prescription en fonction des COREVIH, aussi bien en ce qui concerne la nature des traitements que le délai d’instauration de ce traitement, malgré l’existence de recommandations nationales. Des études complémentaires seraient intéressantes, afin de déterminer quels sont les facteurs influenc¸ant les habitudes de prescription dans les différents centres. 5. Conclusion Une telle étude épidémiologique locale, même si elle confirme les principales tendances observées au niveau national et régional, permet de les affiner et de proposer des mesures de prévention et de dépistage plus spécifiquement adaptées aux réalités locales. Nous avons également constaté que les prises en charge thérapeutiques respectent les recommandations des experts, avec cependant un « effet centre » marqué concernant des habitudes de prescription (nature du traitement, délai d’instauration du traitement). L’analyse des facteurs expliquant ces habitudes de prescription pourra peut-être permettre d’évoluer vers des conduites à tenir plus uniformisées, tenant compte plus exclusivement des données relatives au seul patient et supprimant cet effet centre. Une étude est en cours sur ce thème et viendra compléter ce travail. Conflit d’intérêt Les auteurs ne déclarent pas de conflit d’intérêt. Remerciements Cette étude a été réalisée grâce au travail des techniciennes d’étude clinique des six COREVIH, ainsi qu’à Elisabeth Gauthier au COREVIH Lorraine Champagne Ardennes. Références [1] Décret n◦ 99-362 du 6 mai 1999 fixant les modalités de transmission à l’autorité sanitaire de données individuelles concernant les maladies visées à l’article L11 du code de la santé publique et modifiant le code de la santé publique. JO du 13 ma 1999. [2] Décret n◦ 99-363 du 6 mai 1999 fixant la liste des maladies faisant l’objet d’une transmission obligatoire de données individuelles à l’autorité sanitaire et modifiant le Code de la santé publique. JO du 13 mai 1999.

S. Henard et al. / Médecine et maladies infectieuses 40 (2010) 517–523 [3] Lot F, Cazein F, Pillonel J, Pinget R, David D, Leclerc M, et al. Surveillance de l’infection à VIH-sida en France, 2005. BEH 2006;48:371–8. [4] Cazein F, Pillonel J, Le Strat Y, Lot F, Pinget R, David D, et al. Surveillance de l’infection à VIH-sida en France, 2007. BEH 2008;45-46:434–43. [5] Institut de veille sanitaire. Le recours tardif aux soins des personnes séropositives pour le VIH : modalités d’accès et contextes socioculturels. 2006. [6] SAS Institute. SAS/STAT User’s Guide. Version 9.01. Cary, NC: SAS Institute Inc. 1999. [7] http://www.invs.sante.fr/bdd/index.htm. [8] ANRS, INVS. Enquête Presse Gay 2004. décembre 2004. [9] Bouyssou-Michel A, Gallay A, Janier M, Dupin N, Halioua B, Alcaraz I, et al. Surveillance de la syphillis en France, 2000-2006: recrudescence des diagnostics en 2006. BEH 2008;5-6:39–42.

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[10] Gallay A, Clerc M, Kreplak G, Lemarchand N, Scieux C, Nassar N, et al. Un nombre de diagnostics de lymphogranulomatose vénérienne rectale encore élevé en 2006 en France ? BEH 2008;5-6: 37–9. [11] Larsen C, Pialoux G, Salmon D, Antona D, Piroth L, Le Strat Y, et al. Prévalence des co-infections par les virus des hépatites B et C dans la population VIH+, France, juin 2004. BEH 2005;23: 109–12. [12] Conseil national du sida (CNS). Rapport sur l’évolution du dispositif de dépistage de l’infection par le VIH en France. Novembre 2006. [13] HAS. Dépistage de l’infection par le VIH en France. Octobre 2008. www.has-sante.fr.