Annales Françaises d’Anesthésie et de Réanimation 24 (2005) 833–834 http://france.elsevier.com/direct/ANNFAR/
Lettres à la rédaction Intérêt du bloc iliofascial préhospitalier en cas de rupture du tendon quadricipital Iliofascial block in prehospital for a quadriceps tendon rupture Mots clés : Bloc iliofascial ; Rupture tendon quadricipital ; Préhospitalier ; Anesthésie locorégionale Keywords: Iliofascial block; Quadriceps tendon rupture; Prehospital; Regional anaesthesia
L’anesthésie locorégionale par bloc iliofascial permet avec succès, une anesthésie du nerf fémoral et du nerf cutané latéral. Cette technique est donc recommandée en urgence pour l’analgésie des fractures de diaphyse fémorale et des plaies du genou [1]. Une femme âgée de 37 ans, était prise en charge par le Smur pour suspicion de fracture fémorale. Dans ses antécédents, on notait une lésion posttraumatique méniscale et ligamentaire du genou gauche compliquée de douleurs chroniques invalidantes et un syndrome dépressif. Son traitement comprenait du sulfate de morphine (120 mg/j), du paracétamol, du dextropropoxyphène, de l’amitriptyline et du bromazépam. Elle avait aussi reçu de nombreuses infiltrations de cortisone et des cures d’anti-inflammatoires stéroïdiens. La patiente avait fait une chute dans l’escalier avec réception brutale, suivie d’une forte douleur à la cuisse gauche avec impotence fonctionnelle totale. À l’arrivée du Smur, la patiente était consciente, sans détresse vitale, agitée, anxieuse et très algique. Le score de douleur mesuré sur une échelle visuelle analogique (EVA) était de 100/100. La douleur siégeait à la face antérieure de la cuisse, qui ne présentait aucune plaie ni déformation visible, et empêchait toute palpation, mobilisation ou flexion active. Il n’y avait pas de déficit sensitif. L’analgésie était débutée immédiatement par morphine titrée en intraveineux jusqu’à une dose totale de 8 mg associée à 1 g de paracétamol IV, de l’hydroxyzine 100 mg et du protoxyde d’azote inhalé. La patiente s’était dite soulagée en quinze minutes, le score à l’EVA était alors de 40/100 mais la palpation de la cuisse réveillait une douleur exquise empêchant toute mobilisation du membre. Un bloc iliofascial du membre inférieur gauche par 20 ml de lidocaïne 1 % était alors pratiqué, selon les recommandations en vigueur, suspectant une fracture fémorale gauche [1]. La patiente était totalement soulagée en dix minutes avec un score d’EVA mesuré à 10/100. Cela a permis son transport dans de bonnes conditions jusqu’aux urgences chirurgicales, après immobi-
lisation de sa cuisse dans une attelle. La radiographie du fémur ne montrait aucune fracture, mais l’examen de la patiente bien analgésiée mettait en évidence une rupture complète du tendon quadricipital. Cette lésion avait été favorisée par son traumatisme ancien du genou gauche, le tendon quadricipital ayant été fragilisé par les infiltrations de cortisone et la prise de stéroïdes. La patiente a bénéficié d’un traitement chirurgical. Cette observation montre que la technique d’anesthésie locorégionale par bloc iliofascial, s’est révélée très efficace pour l’analgésie d’une patiente, souffrant d’une rupture du tendon quadricipital. Elle suggère l’intérêt de cette technique dans le diagnostic de rupture du tendon quadricipital suite à un traumatisme fermé de la cuisse.
Références [1]
Sfar. Sfmu, Samu de France. Conférence d’experts 2002. Texte court. Pratique des anesthésies locales et locorégionales par des médecins non spécialisés en anesthésie-réanimation, dans le cadre des urgences. Ann Fr Anesth Réanim 2004;23 :167-76. http://www.sfar.org/s/ article.php3?id_article=203.
A. Burnod * F.X. Duchateau S. Legoff P. Juvin J. Mantz Service d’anesthésie-réanimation-Smur, hôpital Beaujon, 100, boulevard du Général Leclerc, 92210 Clichy, France Adresse e-mail :
[email protected] (A. Burnod). Disponible sur internet le 26 mai 2005 * Auteur correspondant. 0750-7658/$ - see front matter © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.annfar.2005.04.020
Hémorragie digestive massive dans un contexte de pseudoxanthome élastique Pseudoxanthoma elasticum with severe gastrointestinal bleeding Le pseudoxanthome élastique est une maladie génétique rare qui se transmet le plus souvent sur le mode autosomique
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récessif [1]. Elle est secondaire à une mutation sur le gène ABCC6 qui se trouve sur le bras court du chromosome 16. Cette mutation aboutit à la production d’une protéine transmembranaire anormale ce qui se traduit sur le plan histologique par une calcification des fibres élastiques de la peau, des yeux, des vaisseaux et du tube digestif [1]. Cliniquement, les lésions les plus fréquemment retrouvées sont des papules jaunâtres souvent localisées sur le cou ou dans la région axillaire, des stries angioïdes sur le fond d’œil correspondant à une dégénération de la membrane de Bruchs. Les complications cardio-vasculaires prématurées sont également fréquentes à type d’hypertension artérielle, d’angine de poitrine, d’infarctus du myocarde, d’artériopathie des membres inférieurs. Plus rarement, on retrouve des hémorragies digestives potentiellement gravissimes [2,3]. Nous présentons ici le cas d’une hémorragie digestive massive dans le cadre d’un pseudoxanthome élastique. Il s’agissait d’une femme de 51 ans porteuse d’un pseudoxanthome élastique. Le diagnostic a été porté à l’âge de 16 ans. La maladie s’était manifestée, chez elle, essentiellement sous la forme d’hémorragies digestives récidivantes à type de méléna. Une vagotomie tronculaire a déjà été réalisée à l’âge de 30 ans dans le but d’amoindrir la symptomatologie. Un nouvel épisode de méléna a amené la patiente a consulté à la porte des urgences. Il s’y associait une déglobulisation jusqu’à 65 g/l sans retentissement hémodynamique franc. Après transfusion de concentrés globulaires et de plasmas frais congelés, une gastroscopie, réalisée sous anesthésie générale, retrouvait du sang frais et des caillots dans la cavité gastrique, mais aucune lésion ne pouvait expliquer l’hémorragie extériorisée. La patiente était alors mutée en réanimation pour surveillance. Rapidement elle présentait à nouveau des épisodes hémorragiques sous forme d’hématémèses, de méléna et de rectorragies, ce qui motivait la réalisation en urgence d’une tomodensitométrie abdominale avec injection de produit de contraste. Celle-ci révélait deux foyers de saignement actif au niveau de la grande courbure gastrique. Après discussion collégiale entre radiologues, chirurgiens, endoscopistes et anesthésistes-réanimateurs, il était décidé de réaliser dans un premier temps une nouvelle fibroscopie gastrique. Parallèlement, du fait de l’hémorragie digestive persistante, la patiente était transfusée de douze concentrés globulaires, de cinq plasmas frais congelés et d’un concentré plaquettaire. La gastroscopie ne montrait que quelques micro-érosions fundiques et
une zone d’attrition de la muqueuse au niveau de l’angulus ne semblait pas expliquer la symptomatologie actuelle. Dans les douze heures suivantes, on notait une récidive hémorragique associée à une déglobulisation progressive. La seule solution semblait alors la sanction chirurgicale. La patiente était opérée d’une gastrectomie totale avec anastomose oeso-jéjunale sur anse montée enY. L’aspect macroscopique de la pièce opératoire était en accord avec les endoscopies réalisées préalablement. Il existait deux petites érosions « en coup d’ongle » au niveau du fundus gastrique ainsi qu’une ulcération plane très superficielle abrasant simplement la muqueuse sur la face antérieure de l’antre. Les suites postopératoires ont été simples avec l’arrêt total des épisodes hémorragiques. L’hémorragie digestive est une forme d’expression relativement rare du pseudoxanthome élastique. Les examens macroscopiques et endoscopiques peuvent être normaux ou atypiques ce qui rend difficile la conduite à tenir. Cette maladie très rare peut être à l’origine de complications digestives graves et doit donc être connue des anesthésistes-réanimateurs. Références [1] [2]
[3]
Bercovitch L, Terry P. Pseudoxanthoma elasticum 2004. J Acad Dermatol 2004;51:13–4. Spinzi G, Strocchi E, Imperiali G, Sangiovanni A, Terruzzi V, Minoli G. Pseudoxanthoma elasticum: a rare case of gastrointestinal bleeding. Am J Gastroenterol 1996;91:1631–4. Dalle I, Geboes K. Vascular lesions of the gastrointestinal tract. Acta Gastroenterol Belg 2002;65:213–9.
N. Golliet-Mercier B. Allaouchiche * Service d’anesthésie-réanimation, hôpital Edouard-Herriot, 69437 cedex 03, France Adresse e-mail :
[email protected] (B. Allaouchiche). O. Monneuse Service de chirurgie digestive, hôpital Edouard-Herriot, 69437 cedex 03, France Disponible sur internet le 26 mai 2005 * Auteur correspondant. 0750-7658/$ - see front matter © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.annfar.2005.04.021