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Hypertension artérielle et maladie coronaire : nouveau concept ? Hypertension and coronary artery disease: New concept? G. Lefèvre a,b , E. Puymirat a,∗,b a
Département de cardiologie, Assistance Publique–Hôpitaux de Paris (AP–HP), hôpital européen Georges-Pompidou, 15–20, rue Leblanc, 75015 Paris, France b Université Paris Descartes, 75006 Paris, France Rec¸u le 15 juin 2016 ; accepté le 6 octobre 2016
Résumé L’hypertension artérielle (HTA) représente encore aujourd’hui le premier facteur de risque évitable de maladies cardiovasculaires dans le monde. Véritable problème de santé publique touchant plus d’un adulte sur trois, l’HTA serait responsable de 9,4 millions de morts chaque année. Les données épidémiologiques montrent que l’HTA est fortement associée à la survenue de maladies cérébrovasculaires et à un degré moindre de maladie coronaire. Au cours des dernières décennies, de nombreux essais cliniques avec des méthodologies très différentes ont mis en évidence les bénéfices d’une réduction contrôlée de la tension artérielle. Les résultats récents de l’essai SPRINT pourraient toutefois remettre en cause les stratégies thérapeutiques actuelles. Cet article est une revue de la littérature du lien existant entre HTA et maladie coronaire. © 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits r´eserv´es. Mots clés : Hypertension artérielle ; Coronaropathie ; Cardiopathie ischémique ; Facteurs de risque cardiovasculaire
Abstract Hypertension is the most important preventable cause of heart disease and stroke worldwide. More than 1 in 5 adults worldwide have raised blood pressure – a condition that causes around half of all deaths from stroke and heart disease. Complications from hypertension account for 9.4 million deaths worldwide every year. During the last decade, the association between blood pressure reduction from above-normal initial values and cardiovascular-risk has been documented in a large number of randomized trials. However, recent results from the SPRINT study could challenge current therapeutic strategies. This article is a literature review about the relationship between hypertension and coronary artery disease. © 2016 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Keywords: Hypertension; Coronary artery disease; Ischemic heart disease; Cardiovascular risk factors
1. Épidémiologie Les maladies cardiovasculaires sont responsables d’environ 17 millions de décès par an dans le monde, soit près d’un tiers de la mortalité totale [1]. Sur ce chiffre, 9,4 millions de décès par an sont directement imputables aux complications de l’hypertension artérielle (HTA) [2]. En France, on estime que 15 à 16 millions de personnes sont hypertendues et que 70 % des
∗
Auteur correspondant. Adresses e-mail :
[email protected],
[email protected] (E. Puymirat).
hypertendus traités sont âgés de plus de 60 ans [3]. Selon l’Étude nationale nutrition santé (ENNS) en 2006 [4] portant sur des sujets de 18 à 74 ans, parmi les hypertendus traités, seuls 51 % avaient une pression artérielle normalisée par le traitement. La normalisation des chiffres tensionnels était plus fréquente chez les femmes (58,5 %) que chez les hommes (42 %). Pour ces derniers, on observait une diminution progressive du contrôle tensionnel avec l’âge, de 47 % entre 45 et 54 ans, à 34 % entre 65 et 74 ans. Dans l’étude de la cohorte 3 C menée chez des patients de 65 ans et plus, 69 % des patients traités n’étaient pas contrôlés. Avant l’âge de 50 ans, c’est essentiellement la pression artérielle diastolique (PAD) qui représente un facteur prédictif
http://dx.doi.org/10.1016/j.ancard.2016.10.011 0003-3928/© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits r´eserv´es.
Pour citer cet article : Lefèvre G, Puymirat E. Hypertension artérielle et maladie coronaire : nouveau concept ? Ann Cardiol Angeiol (Paris) (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.ancard.2016.10.011
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majeur de risque d’évènement coronaire, alors qu’après 60 ans le risque est davantage corrélé au chiffre de pression artérielle systolique (PAS). Chez les patients âgés de plus de 60 ans, chaque augmentation de la PAS de 20 mmHg (ou de 10 mmHg de PAD) double le risque d’évènement coronaire fatal. Enfin, le risque d’évènement coronaire fatal augmente significativement avec l’âge (16 fois plus élevé chez les patients de 80 à 89 ans que chez les patients de 40 à 49 ans, et ce, quel que soit la PAS) [5]. Au cours des dernières décennies, de nombreux essais thérapeutiques ont permis de démontrer une réduction majeure de la morbimortalité grâce à un contrôle de la pression artérielle par les traitements antihypertenseurs [6–8]. Ainsi, une baisse de 10 mmHg de PAS (ou 5 mmHg de PAD) est associée à une réduction de 50 à 60 % du risque de décès par accident vasculaire cérébral (AVC), et une réduction de 40 à 50 % du risque de décès résultant d’une maladie coronaire ou d’une autre cause d’origine vasculaire chez les hommes d’âge moyen. La réduction du risque est toutefois un peu moindre chez les patients plus âgés [9]. Enfin, chez les patients hypertendus, les fumeurs développent une HTA sévère cinq fois plus souvent que les non-fumeurs et ont un risque de mortalité plus élevé, ce qui souligne bien l’interaction des facteurs de risque cardiovasculaire [10]. 2. Mécanismes D’un point de vu physiopathologique, il existe une multitude de mécanismes (innés et acquis) qui contribuent à l’élévation de la pression artérielle entraînant une atteinte des organes-cible. Il n’existe cependant pas de mécanisme spécifique responsable du développement des coronaropathies. Les principaux mécanismes décrits sont : [11] • une activation du système nerveux sympathique et du système rénine-angiotensine ; • un défaut de libération ou d’activation des agents vasodilatateurs (NO, prostacycline. . .) et des variations de concentrations du peptide natriurétique ; • une augmentation de l’expression des facteurs de croissance et des cytokines pro-inflammatoires au sein des artères ; • des contraintes hémodynamiques ; • des anomalies de conductance et de résistance des artères, notamment par le biais de la dysfonction endothéliale [12]. 3. Prévention En prévention primaire des évènements cardiovasculaires liés à l’HTA, plusieurs méta-analyses ont montré que la baisse de la pression artérielle était plus importante que la classe de traitement utilisée [13]. Les associations thérapeutiques sont fortement recommandées afin d’atteindre et de maintenir un contrôle effectif de la pression artérielle au long cours. En prévention secondaire, chez les patients coronariens, plusieurs classes thérapeutiques ont démontré leur efficacité sur la réduction du risque cardiovasculaire.
3.1. Diurétiques thiazidiques Dans l’étude ALLHAT [14], les diurétiques thiazidiques (chlorthalidone) diminuaient significativement plus la PAS à 5 ans en comparaison aux inhibiteurs des enzymes de conversion (IEC ; lisinopril ; −0,8 mmHg ; p = 0,03) et aux inhibiteurs calciques (amlodipine ; −2 mmHg ; p < 0,01). Ils diminuaient également le nombre d’AVC par rapport au lisinopril (6,3 % vs 5,6 % ; RR = 1,15 ; 95 % CI, 1,02–1,30) et le nombre d’insuffisance cardiaque par rapport à l’amlodipine (10,2 % vs 7,7 % ; RR, 1,38 ; 95 % CI, 1,25–1,52). De par leur rapport coût/efficacité, ils sont recommandés en première intention dans la prise en charge de l’HTA. Chez les coronariens, cette classe est plutôt utilisée en pratique en complément des bêtabloquants, IEC et inhibiteurs calciques. 3.2. Bêtabloquants Dans l’HTA, les bêtabloquants ne sont pas recommandés en première ligne de traitement en raison de leur réduction modérée des évènements cardiovasculaires (RR 0,88, 95 %CI 0,79–0,97) et de l’absence d’effets sur la mortalité totale en comparaison au placebo (RR 0,99, 95 %CI 0,88–1,11) [15]. Les résultats de la Cochrane parus en 2012 sur l’analyse des données de 13 essais randomisés de 1981 à 2005 semblent confirmer l’infériorité des bêtabloquants sur la prévention de la morbi-mortalité lorsqu’ils sont administrés en première ligne de traitement chez les patients hypertendus en comparaison aux autres classes thérapeutiques (diurétiques, inhibiteurs calciques et inhibiteurs du système rénine-angiotensine) [15]. Ils restent toutefois le traitement standard des patients avec antécédent d’infarctus du myocarde (IDM) notamment en raison de leur effet anti-arythmique (pendant les 3 ans suivant un syndrome coronarien aigu [SCA]/IDM en cas de fraction d’éjection ventriculaire gauche [FEVG] préservée [13]), chez les patients présentant de l’angor stable, ou ayant une dysfonction VG (dans le cadre de la prise en charge de l’insuffisance cardiaque). Les bêtabloquants ayant prouvé leur efficacité dans l’insuffisance cardiaque sont le carvédilol, le métoprolol, le bisoprolol et le nébivolol [16]. 3.3. Inhibiteurs de l’enzyme de conversion Les IEC ont prouvé leur efficacité dans la prévention des évènements cardiovasculaires comme l’insuffisance cardiaque [17,18] et l’insuffisance rénale chronique [19] chez des patients présentant une dysfonction VG. Associés aux diurétiques thiazidiques, ils diminuent de fac¸on significative l’incidence des AVC [20]. Deux grandes études HOPE et EUROPA publiées en 2000 et 2003 ont démontré l’efficacité des IEC sur la réduction de 22 et 20 % respectivement sur un critère de jugement composite associant IDM et décès d’origine cardiovasculaire chez des patients sans dysfonction VG, à haut risque cardiovasculaire pour l’étude HOPE, ou avec une maladie coronaire stable pour l’étude Europa. [8,21]. La baisse de la PAS dans les deux études a été relativement faible (de l’ordre de 3 à 5 mmHg) laissant
Pour citer cet article : Lefèvre G, Puymirat E. Hypertension artérielle et maladie coronaire : nouveau concept ? Ann Cardiol Angeiol (Paris) (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.ancard.2016.10.011
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évoquer un mécanisme de protection cardiovasculaire des IEC indépendant de la pression artérielle.
3
4. Objectifs tensionnels 4.1. Recommandations ACC/AHA 2015 et ESC 2013
3.4. Antagonistes des récepteurs à l’angiotensine Les antagonistes des récepteurs à l’angiotensine (ARA2) ont également démontré qu’ils réduisaient l’incidence des IDM, la progression de l’insuffisance rénale chronique chez les diabétiques de type 2 et les AVC. Ils sont recommandés en deuxième intention en cas d’intolérance aux IEC [22]. En se basant sur l’étude Valiant [23] qui a comparé le valsartan au captopril, la Haute Autorité de santé (HAS) recommande l’utilisation du valsartan en deuxième intention, en cas d’intolérance aux IEC, en postinfarctus, chez des patients cliniquement stables présentant une dysfonction systolique ventriculaire gauche. L’étude ONTARGET [24] a comparé l’effet du telmisartan au ramipril chez des patients à haut risque cardiovasculaire. Il n’a pas été démontré de différence entre les deux traitements sur le critère de jugement composite associant décès d’origine cardiovasculaire, IDM, AVC et hospitalisation pour insuffisance cardiaque. En revanche, l’association des deux traitements a été marquée par une augmentation des effets indésirables (hypotension, insuffisance rénale, syncope) sans bénéfice sur le critère de jugement principal. 3.5. Anti-aldostérones Les anti-aldostérones (spironolactone, éplérénone) diminuent la pression artérielle en mono- ou bithérapie et ont un effet protecteur connu chez les patients insuffisants cardiaques sévères (étude Rales [25]) et chez les patients avec dysfonction VG postinfarctus du myocarde (étude Ephesus [26]). En pratique, ils sont surtout utilisés en complément des traitements précédents en cas de dysfonction VG.
Les recommandations actuelles des sociétés savantes américaines et européennes (ACC/AHA 2015 et ESC 2013) sont résumées dans les Tableaux 1 et 2. 4.2. Notion de « courbe en J » Un objectif tensionnel plus strict chez les patients à haut risque cardiovasculaire n’est pas conforté par plusieurs grands essais cliniques (INVEST [29], VALUE [27] et ONTARGET [24]) semblant même montrer un effet délétère dans certaines situations. [30] Le concept « the lower the better » tend à être abandonné au profit d’une courbe de la morbimortalité dite « en J ». Contrairement à la prévention des AVC, pour la maladie coronaire, il semble exister un seuil tensionnel au-dessous duquel apparaît un sur risque cardiovasculaire, possiblement corrélé à une hypoperfusion coronaire liée à une PAD trop basse (Fig. 1). Néanmoins une récente étude (SPRINT [31]) publiée dans le NEJM en novembre 2015 semble aller à l’encontre d’un concept de courbe en J. Cet essai randomisé visait à comparer les bénéfices et les risques d’un contrôle plus strict de la PAS (objectif < 120 mmHg) avec ceux d’un abaissement moindre (< 140 mmHg) et conforme aux recommandations en vigueur. La population était composée de 9,361 patients recrutés entre 2010 et 2013 avec un âge moyen de 67,9 ± 9,4 ans et un risque accru d’évènements cardiovasculaires (maladie cardiovasculaire, insuffisance rénale chronique, score de Framingham > 15 % et/ou âge > 75 ans). Les patients diabétiques Tableau 1 Recommandations des sociétés savantes américaines (ACC/AHA) de 2015. Recommandations ACC/AHA 2015
Niveau de recommandation
Un objectif de PA ≤ 140/90 mmHg est recommandé en prévention secondaire chez les patients coronariens hypertendus Un objectif de PA ≤ 130/80 mmHg pourrait être recommandé chez certains patients coronariens avec antécédents d’IDM, d’AVC ou d’AIT, ou chez les patients avec artériopathie documentée (sténose carotidienne, AOMI, anévrysme de l’aorte abdominale) Chez les patients coronariens hypertendus avec une ischémie myocardique documentée, il est délétère de baisser la PAD ≤ 60 mmHg et notamment chez les diabétiques et les patients âgés de plus de 60 ans. Cette précaution s’applique d’autant plus chez les patients âgés qui présentent souvent une PAS haute, avec une différentielle de PA élevée, chez qui un objectif de PAS risque d’être atteint au détriment de la PAD
IIa B
3.6. Inhibiteurs calciques Au même titre que les bêtabloquants, les inhibiteurs calciques bradycardisant (vérapamil, diltiazem) sont utilisés en première intention dans le traitement de l’angor stable, en l’absence de dysfonction VG. Ils ne sont pas recommandés en prévention secondaire en raison d’un manque de bénéfice sur la prévention de l’insuffisance cardiaque en comparaison aux IEC et aux ARA2 [14,27]. 3.7. Inhibiteurs de la rénine Compte tenu des données d’efficacité sur la seule pression artérielle et des résultats observés de l’étude de morbimortalité (étude Altitude [28]) arrêtée prématurément en raison d’un excès d’événements cardiovasculaires (notamment d’AVC) et d’événements indésirables (notamment les hyperkaliémies), dans le groupe aliskirène par rapport au placebo, l’utilisation de l’aliskirène est déconseillée en association avec un IEC ou ARA2.
IIb B
IIa C
AIT : accident ischémique transitoire ; AOMI : artériopathie oblitérante des membres inférieurs ; AVC : accident vasculaire cérébral ; IDM : infarctus du myocarde ; PAD : pression artérielle diastolique ; PAS : pression artérielle systolique.
Pour citer cet article : Lefèvre G, Puymirat E. Hypertension artérielle et maladie coronaire : nouveau concept ? Ann Cardiol Angeiol (Paris) (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.ancard.2016.10.011
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Fig. 1. Incidence des infarctus du myocarde et des accidents vasculaires cérébraux en fonction de la pression artérielle diastolique, d’après l’étude INVEST [29]. Tableau 2 Recommandations de la société européennes de cardiologie (ESC) de 2013. Recommandations ESC 2013
Niveau de recommandation
Chez les sujets âgés ≤ 80 ans avec une PAS ≥ 160 mmHg, il est recommandé de réduire la PAS entre 140 et 150 mmHg Chez les sujets âgés ≥ 80 ans avec une PAS ≥ 160 mmHg, il est recommandé de réduire la PAS entre 140 et 150 mmHg à condition qu’ils soient en bonne condition physique et mentale Chez certains sujets âgés < 80 ans en bon état général, un objectif de PAS < 140 mmHg peut être envisagé. Chez les patients les plus fragiles, la PAS cible doit être adaptée à la tolérance individuelle Un objectif de PAS ≤ 140 mmHg doit être envisagé chez les patients coronariens, ou avec insuffisance rénale chronique, ou avec antécédent d’AVC/AIT Un objectif de PAS ≤ 140 mmHg est recommandé chez les patients diabétiques Une PAD cible ≤ 90 mmHg est toujours recommandée, sauf chez les diabétiques, chez lesquels la valeur recommandée est ≤ 85 mmHg. Il doit cependant être vérifié qu’une PAD entre 80 et 85 mmHg est sauve et bien tolérée
IA
IIb C
IIa B
IA IA
AIT : accident ischémique transitoire ; AVC : accident vasculaire cérébral ; PAD : pression artérielle diastolique ; PAS : pression artérielle systolique.
ou avec un antécédent d’AVC ou d’infarctus ont été exclus de l’étude. Les résultats de cette étude montrent qu’un objectif de PAS < 120 mmHg chez ces patients est associé à une diminution significative du critère de jugement composite (IDM, SCA, AVC, insuffisance cardiaque, décès de cause cardiovasculaire) de 25 % (HR 0,75 ; IC 95 % 0,64–0,89 ; p < 0,001) et du risque de mortalité toutes causes confondues de 27 % (HR 0,73 ; IC 95 % 0,60–0,90 ; p = 0,003) en comparaison à l’objectif standard de PAS < 140 mmHg. En prenant en compte l’augmentation significative des effets indésirables (hypotension, chutes, insuffisance rénale aiguë) dans le groupe traitement intensif, et l’absence de
représentativité de la population étudiée (diabétiques et antécédents d’AVC exclus) l’étude SPRINT pourrait remettre en cause les objectifs de PAS des recommandations européennes et américaines. Ces résultats sont toutefois à nuancer avec ceux de l’étude HOPE 3, qui n’a pas mis en évidence de bénéfice à un traitement antihypertenseur (16 mg de candésartan et 12,5 mg d’hydrochlorothiazide) sur la survenue d’évènements cardiovasculaires majeurs chez des patients normotendus à risque intermédiaire [32]. 5. Prise en charge de l’HTA chez les patients présentant un angor stable Le traitement des patients hypertendus avec un angor stable devrait comprendre (classe I, A) : • un bêtabloquant pour les patients avec antécédent d’IDM ; • un IEC (ou un ARA2) pour les patients avec antécédent d’IDM, avec FEVG altérée, diabétiques ou insuffisants rénaux ; • un diurétique thiazidique. En cas de contre-indication ou des effets indésirables à l’utilisation des bêtabloquants, un inhibiteur calcique nondihydropyridine (diltiazem ou vérapamil) peut être utilisé, sauf en cas de FEVG altérée (classe IIa, B). L’objectif recommandé de PA chez le patient coronarien avec angor stable est < 140/90 mmHg. Cet objectif peut être diminué à < 130/80 mmHg s’il existe un antécédent d’AVC/AIT ou une maladie vasculaire documentée (atteinte des artères périphériques, carotidiennes, ou anévrysme de l’aorte abdominale ; classe IIb, B). 6. Prise en charge de l’HTA dans un contexte de syndrome coronarien aigu En cas de contre-indication à l’utilisation de bêtabloquants au cours du SCA, on préfèrera l’utilisation des bêtabloquants
Pour citer cet article : Lefèvre G, Puymirat E. Hypertension artérielle et maladie coronaire : nouveau concept ? Ann Cardiol Angeiol (Paris) (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.ancard.2016.10.011
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1 sélectifs, de courte durée d’action, sans activité sympathomimétique (métoprolol ou bisoprolol). L’introduction des bêtabloquants doit être administrée par voie orale préférentiellement dans les 24 h suivant le début du SCA (classe I, A). Pour les patients avec HTA sévère (avec ± souffrance ischémique), une administration des bêtabloquants par voie intraveineuse peut être envisagée (classe IIa, B). Pour les patients hémodynamiquement instables ou présentant des signes d’insuffisance cardiaque, l’initiation des bêtabloquants doit être retardée jusqu’à stabilisation du patient (classe I, A). Les dérivés nitrés doivent être utilisés pour diminuer la PA au cours d’un SCA mais également à visée anti-angineuse (classe I, C). L’utilisation des dérivés nitrés doit être évitée en cas de suspicion d’infarctus du VD ou en cas d’instabilité hémodynamique. Les voies sublinguales et intraveineuses sont à préférer pour la prise en charge initiale des SCA. On préfèrera l’utilisation des diurétiques de l’anse aux diurétiques thiazidiques dans le traitement des SCA avec insuffisance cardiaque (NYHA classe III ou IV) ou chez les patients avec insuffisance rénale chronique (DFG < 30 mL/min). La cible de PA dans le SCA sans instabilité hémodynamique est < 140/90 mmHg. La PA doit être abaissée progressivement en évitant une diminution de la PAD < 60 mmHg en raison du risque d’hypoperfusion coronaire associée (Classe IIa, C). 7. Conclusion Insuffisamment dépistée, traitée et contrôlée, l’HTA représente un véritable problème de santé publique. Par son impact sur la mortalité cardiovasculaire, la baisse de la pression artérielle aux objectifs fixés par les recommandations actuelles doit être l’objectif de tout médecin. Les résultats de l’étude SPRINT pourraient constituer une première étape vers une nouvelle définition plus stricte des objectifs tensionnels pour les patients à haut risque cardiovasculaire, sous réserve d’une thérapeutique adaptée à l’individu et d’un suivi étroit pour minimiser le risque de survenue d’effets indésirables, principalement chez le sujet âgé. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Références [1] Causes of death [base de données en ligne]. Genève: Organisation mondiale de la Santé; 2008 http://www.who.int/healthinfo/global burden disease/cod 2008 sources methods.pdf. [2] Lim SS, et al. A comparative risk assessment of burden of disease and injury attributable to 67 risk factors and risk factor clusters in 21 regions, 1990-2010: a systematic analysis for the Global Burden of Disease Study 2010. Lancet 2012;380:2224–60. [3] CFLHTA. Estimation du nombre des sujets traités pour une hypertension, un diabète ou une hyperlipidémie en France : étude FLAHS; 2002. [4] Institut de veille sanitaire. Étude nationale nutrition santé. ENNS; 2006.
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