J Radiol 2008;89:968-83 © 2008. Éditions Françaises de Radiologie. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
formation médicale continue
le point sur…
Imagerie des tumeurs de l’oropharynx et de la cavité orale : IRM, TDM, TEP-scan C Ala Eddine (1, 2), JD Piekarski (1) et M Benamor (2)
Abstract
Résumé
Tumors of the oropharynx and oral cavity: MR, CT, PET-CT imaging J Radiol 2008;89:968-83
L’imagerie préthérapeutique joue un rôle central dans la prise en charge des tumeurs de l’oropharynx et de la cavité orale. Ce bilan repose actuellement sur l’IRM éventuellement complétée par la TDM et le TEP-scan. Les examens doivent être réalisés de façon simple et reproductible, mettant en évidence les points clés de la décision thérapeutique.
Pretherapeutic imaging plays a central role in the management of tumors of the oropharynx and oral cavity. MR and, to a lesser extent, CT and F-18 FDG PET-CT are the imaging modalities of choice for pretherapeutic work-up of these lesions. Imaging protocols should be simple and reproducible, and should provide the key elements for treatment planning. Key words: Oropharynx, neoplasms. Oral cavity, neoplasms. Pretherapeutic imaging. MRI. CT. PET/CT.
Mots-clés : Oropharynx, tumeur. Cavité buccale, tumeur. IRM. TDM. TEP-scan.
es tumeurs malignes de l’oropharynx et de la cavité orale sont des lésions fréquentes en France représentant 50 % des cancers des voies aéro-digestives supérieures (VADS). Ceux-ci sont eux-mêmes fréquents, avec près de 18 000 cas par an, soit l’incidence la plus élevée au monde après la Hongrie. Elles se rencontrent principalement chez l’homme (80 %), chez qui le nombre de nouveaux cas par an se situe au 4e rang après les cancers de prostate (40 000 cas/an), du colorectum (36 000 cas/an) et du poumon (28 000 cas/an) (1-2). En pratique, il faut retenir que les tumeurs des VADS représentent la 3e cause de décès par cancer en France avec 11 500 décès par an (poumon : 24 500 ; intestin : 16 500 ; sein : 11 000 et prostate : 9 400). En l’absence de dépistage précoce et d’une prévention primaire efficace, seul un traitement optimal permet d’améliorer la survie. Les tumeurs de l’oropharynx et de la cavité orale mettent en jeu le pronostic vital, fonctionnel et esthétique du patient. L’imagerie doit aider les cliniciens à choisir la thérapeutique la mieux adaptée. Histologiquement, il s’agit principalement de carcinomes épidermoïdes (95 %) favorisés par l’intoxication alcoolo-tabagique, mais d’autres lésions peuvent se rencontrer : carcinome des glandes salivaires accessoires, lymphome en raison de la richesse en tissu lymphoïde de la région et mélanomes. Le pronostic dépend du stade T au moment du diagnostic et surtout de l’extension ganglionnaire N initiale qui prédit le risque métastatique (3-4). D’autres facteurs biologiques (p53, etc.) et histologiques (angiogenèse, etc.) sont importants, expliquant la chimio-sensibilité ou la chimio-résistance de certaines lésions mais ils sont encore mal appréciés par l’imagerie standard. Les carcinomes épidermoïdes sont actuellement le plus souvent traités par chimio-radiothérapie pour une meilleure conservation
fonctionnelle et esthétique, la chirurgie étant réservée aux lésions envahissant l’os (contre-indication à la radiothérapie) ou résistante à la chimiothérapie. Au total, la survie à 5 ans tous stades confondus est de 35 % en moyenne. Le décès survient en raison de récidives loco-régionales, de complications locales, de métastases, d’une seconde localisation (15 à 20 % dont un tiers synchrones), ou d’une pathologie intercurrente. Les tumeurs de la cavité orale ont en général un meilleur pronostic que les tumeurs de l’oropharynx, car facilement accessibles à l’examen clinique. Elles sont dépistées plus précocement, avec un taux de survie à 5 ans de plus de 60 % pour les stades T1-T2. Les carcinomes épidermoïdes de l’oropharynx et de la cavité orale sont rarement métastatiques au moment du diagnostic. Cependant, la plupart des équipes s’accordent pour compléter le bilan par une TDM thoracique si la lésion est de stade T4 et/ou N2b et plus. Ce bilan thoracique sera systématique, quel que soit le stade, en cas de carcinome adénoïde kystique des glandes salivaires accessoires (5). Le bilan d’extension initial loco-régional doit être le plus précis possible pour permettre un choix thérapeutique adapté. L’imagerie préthérapeutique joue un rôle central. Elle repose essentiellement sur l’IRM (meilleure différenciation tissulaire que la TDM), éventuellement complétée par la TDM et dans de rares cas par le TEP-scan (6-10). Dans son compte rendu, le radiologue doit mettre en valeur les points clés de la décision thérapeutique (11). Dans cet exposé, nous aborderons les points indispensables à la réalisation et à l’interprétation d’un examen en coupes IRM et TDM de cette région :
L
• rappel des protocoles d’examen en IRM, les plus simples et reproductibles possibles ; • rappels anatomiques indispensables à l’interprétation de l’imagerie en coupes ;
(1) Fondation A de Rothschild, Service du Pr Piekarski, 25 rue Manin, 75940 Paris cedex 19, France. (2) Institut Curie, Paris, France. Correspondance : C Ala Eddine (1) E-mail :
[email protected]
• description des extensions tumorales et des possibilités thérapeutiques en fonction du site tumoral initial, afin de définir les points clés du compte rendu.
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Quelle imagerie ? L’IRM est l’examen de choix pour le bilan préthérapeutique des tumeurs a priori accessibles à un traitement curatif. Sa grande différenciation tissulaire et sa sensibilité permettent de bien isoler, au sein d’une anatomie complexe, des lésions souvent mal vascularisées (carcinomes épidermoïdes) donc peu rehaussées en TDM avec injection de produit de contraste iodé. La TDM garde son indication pour l’étude des corticales osseuses et/ou lorsqu’une plastie mandibulaire est envisagée (12-13). Par ailleurs, elle peut servir d’examen de référence pour le suivi des patients en traitement palliatif. Le PET-scan 18 FDG est de plus en plus utilisé dans les Services spécialisés. Son intérêt dans cette pathologie sera discuté en fonction des données de la littérature et de l’expérience du Service d’Imagerie de l’Institut Curie (14-17). Ce bilan d’imagerie reste encore anatomique, visant à mettre en évidence les extensions tumorales et n’expliquant pas pourquoi à stade T et N égal, les réponses thérapeutiques peuvent être très différentes. De nouvelles techniques d’imagerie sont en développement, permettant une approche plus fonctionnelle, permettant d’adapter une chimiothérapie ciblée : TDM et IRM de perfusion, IRM de diffusion, PET-scan avec nouveaux traceurs, spectroIRM. Ces nouvelles méthodes d’imagerie ne seront pas abordées dans ce cours, car non utilisées actuellement en pratique courante.
1. Protocoles en IRM L’examen est fait avec une antenne tête associée à une antenne cervicale afin de couvrir les aires ganglionnaires de la base du crâne à la base du cou. Les séquences d’acquisition rapide en pondération spin écho T1 et T2 permettent actuellement l’acquisition de séquences durant en moyenne 3 minutes pendant lesquelles le patient doit rester parfaitement immobile. En général, 4 à 6 séquences sont nécessaires pour effectuer le bilan d’extension tumorale et ganglionnaire, soit un temps d’examen n’excédant pas 20 minutes. Il faut respecter les contre-indications habituelles de l’IRM et réserver cet examen aux patients pouvant maintenir le décubitus dorsal pendant au moins 20 minutes. La respiration doit être calme, la mandibule peut être maintenue par une sangle pour s’assurer de son immobilité et le patient peut déglutir normalement sans mobiliser la langue. Le plan de référence est le plan axial parallèle au palais osseux, complété par des séquences dans le plan coronal ou sagittal en fonction de la localisation tumorale initiale. L’épaisseur de coupe varie en fonction du volume tumoral à explorer entre 3 et 4 mm (fig. 1).
1.1. L’exploration tumorale Elle nécessite des séquences en pondération T2 et T1 avant injection, puis des séquences en pondération T1 après injection et saturation du signal de la graisse dans au moins 2 plans perpendiculaires (fig. 2). Avant injection, il ne faut pas annuler le signal de la graisse en pondération T1, car les espaces graisseux permettent de mieux délimiter anatomiquement les différents espaces de cette région, et la médullaire osseuse est étudiée au mieux. En pondération T2, certaines équipes utilisent la saturation de graisse ce qui permet de faire ressortir le contraste entre la tumeur en hypersignal J Radiol 2008;89
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et les structures saines en hyposignal ; d’autres préfèrent ne pas saturer la graisse pour une meilleure appréciation de l’anatomie et des extensions intramusculaires. Après injection, l’annulation du signal de la graisse permet d’améliorer la détection du signal tumoral dans les espaces graisseux. Par rapport au signal musculaire normal, la tumeur apparaît en isosignal T avant injection, discret hypersignal T2, et se rehausse intensément après injection en raison de la diffusion du produit de contraste, alors qu’elle peut être peu rehaussée en TDM car les carcinomes épidermoïdes sont fréquemment mal vascularisés.
1.2. L’exploration ganglionnaire Elle est facilitée par les séquences en pondération T2, écho de spin, axiales et/ou coronales, avec ou sans saturation de graisse, en coupes de 5 mm descendant jusqu’à la base du cou. L’IRM utilise les mêmes critères sémiologiques que la TDM (taille et morphologie du ganglion) et sa rentabilité est identique (18).
2. Problèmes du matériel dentaire Le matériel dentaire inamovible est responsable d’artefacts pouvant dégrader l’image sur plusieurs plans de coupe tant en TDM qu’en IRM. • En TDM, l’acquisition spiralée ne permet pas l’inclinaison du tube. Il faut donc positionner d’emblée le patient de façon à ce que le plan axial d’acquisition intéresse le moins de coupes artefactées possibles. Une acquisition complémentaire séquentielle oblique peut être utile pour explorer les zones d’ombre, mais elle reste limitée en raison des possibilités restreintes d’inclinaison du tube. • En IRM les séquences d’écho de spin habituellement utilisées sont moins sensibles aux artefacts de susceptibilité magnétique que les séquences d’écho de gradient. Cependant, elles peuvent être dégradées par des zones vides de signal ou de distorsion du signal. Les séquences T1 sont moins dégradées que les séquences T2. Il faudra utiliser le meilleur plan de coupe et éviter la saturation de la graisse qui peut être inhomogène. Ces inconvénients ne doivent cependant pas conduire à l’ablation systématique du matériel dentaire avant l’imagerie, notamment si la tumeur est susceptible d’envahir la mandibule, car tout soin dentaire entraîne des modifications de signal de la mandibule. Il s’agit de remaniements inflammatoires de l’os spongieux persistant plusieurs mois après le soin, difficilement différenciables d’une extension tumorale en imagerie.
Les tumeurs de l’oropharynx L’oropharynx est une région complexe comprenant la région tonsillaire, la base de langue, le voile et la paroi pharyngée postérieure (PPP) entre le cavum et les replis ary-épiglottiques (19) (fig. 3). Les tumeurs les plus fréquentes sont les SCC (squamous cell carcinoma), mais les carcinomes adénoïdes kystiques des glandes salivaires accessoires du voile sont possibles, de même que les lymphomes des structures lymphoïdes des amygdales tonsillaires et linguales. La classification TNM (tableau I) ne s’applique qu’aux SCC et aux carcinomes des glandes salivaires.
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a b
Fig. 1 : a b
Exploration IRM de l’oropharynx et de la cavité orale. Volume d’exploration tumorale. Plan parallèle au palais osseux. Volume d’exploration ganglionnaire.
a b c
Fig. 2 : a b c
Séquences d’exploration tumorale indispensables en IRM. Séquence spin-écho T1 sans injection et sans saturation de graisse. Séquence turbo-spin-écho T2 avec saturation de la graisse (fat-sat facultatif). Séquence spin-écho T1 avec injection et saturation de la graisse.
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Tableau I Classification TNM des tumeurs de l’oropharynx. Stade T1
Tumeur < ou égale à 2 cm de plus grand diamètre
Stade T2
Tumeur de 2 à 4 cm de plus grand diamètre
Stade T3
Tumeur de plus de 4 cm de grand diamètre
Stade T4a
Tumeur envahissant le larynx, les muscles extrinsèques de la langue, le muscle ptérygoïdien médial, le palais dur ou la mandibule
Stade T4b
Tumeur envahissant le muscle ptérygoïdien latéral, l’apophyse ptérygoïde, le nasopharynx, la base du crâne, ou englobant la carotide
1. La région tonsillaire
Fig. 3 :
Coupe anatomique sagittale médiane, l’isthme du gosier sépare la cavité orale et l’oropharynx. L’oropharynx comprend 4 régions : la loge amygdalienne, la paroi pharyngée postérieure entre le plan du palais et celui de l’os hyoïde, la base de langue, le voile. La cavité orale comprend : la langue mobile, le plancher buccal, la commissure intermaxillaire (CIM), la région jugale, les régions gingivales et vestibulaires, le palais dur.
Elle sera explorée en coupes axiales et coronales. Les séquences en pondération T2 permettent de définir les extensions intramusculaires ; les séquences en pondération T1 sans injection et sans saturation de graisse apprécient les extensions intramédullaires osseuses ; les séquences T1 après injection et saturation de graisse évaluent les extensions profondes. Les tumeurs de la commissure inter-maxillaire (CIM) bien qu’appartenant à la cavité orale seront décrites dans le même chapitre compte tenu de la continuité anatomique des deux régions (fig. 4). La région tonsillaire ou amygdalienne constitue la paroi latérale de l’oropharynx (fig. 5). Les piliers qui la limitent sont visibles en IRM sous la forme de colonne verticale à section axiale triangulai-
a bc
Fig. 4 : a-b
c
Commissure intermaxillaire et ligament ptérygo-mandibulaire. Anatomie clinique de la commissure intermaxillaire (flèche en pointillé), repli tendu en avant du pilier antérieur de l’amygdale (flèche pleine), entre les deux dernières molaires (région rétro-molaire). Repli sous-tendu par le ligament ptérygomandibulaire. Schéma du pharynx. Le muscle constricteur supérieur s’insère en avant sur le ligament ptérygo-mandibulaire tendu entre la lame interne de l’apophyse ptérygoïde et la face interne de l’angle mandibulaire. Ligament donnant insertion vers l’avant au muscle buccinateur. Sur la face interne de l’angle mandibulaire, il s’insère au contact du muscle mylo-hyoïdien. Véritable voie d’extension tumorale.
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Fig. 5 :
Schéma de la région amygdalienne. Les formations lymphoïdes de la région tonsillaire, sous-muqueuses, sont limitées : – en avant, par le pilier antérieur (muscle palato-glosse) qui pénètre dans la langue au niveau de la zone de jonction ; – en arrière, par le pilier postérieur (muscle palato-pharyngien) plus volumineux qui rejoint la paroi latérale du sinus piriforme au niveau de l’hypopharynx.
re, de signal musculaire (hyposignal T1 et T2). Le pilier postérieur nettement plus volumineux que le pilier antérieur est toujours parfaitement visible. Les piliers encadrent l’amygdale, formée par du tissu lymphoïde sous-muqueux de taille variable en hyposignal T1 et hypersignal T2. Sa face profonde est constituée par le plan musculaire du constricteur du pharynx toujours bien identifiable, en dehors duquel se trouve l’hypersignal graisseux T1 de l’espace parapharyngé. Le muscle constricteur supérieur du pharynx s’insère en avant sur le raphé ptérygo-mandibulaire (RPM), ligament tendu verticalement de la lame interne de l’apophyse ptérygoïde à la face interne de l’angle de la mandibule au niveau de la ligne d’insertion postérieure du muscle mylo-hyoïdien (fig. 4). En avant, le RPM sert d’insertion pour le muscle buccinateur. Le RPM apparaît en IRM sous la forme d’une fine bande fibreuse en hyposignal T1 et T2, située immédiatement en avant du muscle ptérygoïdien médial. Il est recouvert par la muqueuse de la CIM qui se poursuit en dehors par le trigone rétromolaire au contact de la branche montante de la mandibule. Il est en contact étroit avec le périoste du ramus mandibulaire. La radio-anatomie des piliers de l’amygdale et du RPM est importante à connaître, car ce sont des voies d’extension tumorale privilégiées (fig. 6). Lorsque les tumeurs sont de petit volume et intra-tonsillaires, elles peuvent être difficiles à mettre en évidence, leur signal T1 et T2 se confondant avec le signal des formations lymphoïdes. Une asymétrie de volume doit attirer l’attention, même si celle-ci existe physiologiquement chez 5 % des patients.
buccinateur au contact du RPM (fig. 8). Des atteintes du ramus mandibulaire sont possibles (fig. 9), parfois simplement limitées à une extension péri-neurale le long du canal dentaire. La lésion pouvant alors s’étendre à distance le long du nerf mandibulaire (V3) jusqu’à la base du crâne. – Dans les formes basses, centrées sur le sillon glosso-tonsillaire, l’imagerie quantifiera l’atteinte de la base de langue, de la partie horizontale de la mandibule et du plancher buccal, via le muscle mylo-hyoïdien, les récidives après chirurgie radicale survenant dans 2/3 des cas au niveau de la cavité orale. – Dans les formes localement évoluées, l’espace parapharyngé puis les muscles masticateurs sont infiltrés. L’IRM permettra de détecter avec le plus de précision possible l’infiltration intramusculaire, pour délimiter au mieux le niveau de résection chirurgicale (fig. 10). L’atteinte des branches du V3 avec extension intracrânienne possible est à rechercher comme pour les tumeurs du cavum par l’étude dans le plan coronal (20-21) (fig. 11).
1.1. Extension antérolatérale C’est la plus fréquente (2/3 des cas), la tumeur longe le plan du constricteur jusqu’au RPM puis diffuse le long de celui-ci. – Dans les formes hautes (fig. 7), centrées sur l’ogive amygdalienne, il faudra rechercher une lyse de la ptérygoïde ou de la tubérosité maxillaire ainsi qu’une infiltration de la fente ptérygopalatine, à partir de laquelle nous avons déjà décrit les extensions possibles (cf. cavum). – Dans les formes moyennes, centrées sur l’amygdale, il faut rechercher l’infiltration du muscle ptérygoïdien médial et/ou du
1.2. Extension antérieure Le long du pilier antérieur de l’amygdale (muscle palato-glosse), la tumeur peut parfois infiltrer la zone de jonction linguale. Lorsqu’elle est limitée, l’extension intralinguale est souvent infraclinique et doit impérativement être mise en évidence par l’imagerie car elle modifie la prise en charge thérapeutique (fig. 12).
1.3. Extension inférieure Plus fréquente, l’extension le long du pilier postérieur (muscle palato-pharyngien) est possible dans les formes basses et/ou évoluées. Elle impose une analyse des sinus piriformes si nécessaire en TDM pour une meilleure analyse en manœuvre de Valsalva. Les lésions de stade T1 et T2 sont préférentiellement traitées par radio-chimiothérapie. La chirurgie étant réservée aux lésions localement évoluées encore résécables, envahissant l’os (T3, T4), et/ ou résistant au traitement conservateur (12, 22). Il peut s’agir d’une intervention mutilante (BPTM) en cas d’atteinte mandibulaire ou plus limitée « Mandibular Swing » lorsqu’il n’y a pas d’atteinte osseuse. Dans ce dernier cas, le chirurgien pratique une mandibulotomie paramédiane entre l’incisive latérale et la canine J Radiol 2008;89
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Fig. 6 : a-c
Radio-anatomie axiale des régions tonsillaires (= amygdaliennes). Muscles toujours bien visibles en isosignal T2/formations lymphoïdes en hypersignal T2 relatif. Pilier postérieur (flèche pleine) toujours plus volumineux que le pilier antérieur (flèche en pointillé). Commissure antérieure située en avant du pilier antérieur au contact du ramus mandibulaire et du muscle ptérygoïdien médial (flèche courbe).
a b
Fig. 7 : a b
Tumeur de l’ogive amygdalienne (partie haute de la région tonsillaire). TDM : lésion peu rehaussée après injection, appréciation du volume tumoral impossible. IRM : délimitation nette de la masse tumorale dont le signal remplace l’hyposignal du muscle constricteur et des muscles du voile.
pour mieux exposer la lésion pharyngée postérieure. L’imagerie doit alors étudier la tumeur mais aussi la mandibule pour s’assurer de l’intégrité de la zone de mandibulotomie.
2. La base de langue D’examen clinique difficile, les tumeurs de la base de langue sont souvent découvertes tardivement devant des dysphagies hautes et/ou des otalgies récidivantes. Lorsqu’elles sont de petit volume, elles peuvent être difficiles à différencier des formations lymphoïdes linguales, mais toute asymétrie d’épaisseur et tout signe d’infiltration profonde doit faire suspecter une lésion tumorale. L’IRM en coupes axiales et sagittales permet de préciser au mieux les extensions profondes (fig. 13). Les muscles sains restent en hyposignal T1 et T2, recouverts par l’hypersignal T2 des formations lymphoïdes sous-muqueuses d’épaisseur variable et de surface parfois irrégulière, mais en règle symétrique. Sa musculature est continue avec celle de la langue mobile et du plancher J Radiol 2008;89
buccal (muscles intrinsèques et muscles génioglosses), expliquant l’envahissement sous-muqueux fréquent de la cavité orale. Les coupes sagittales précisent au mieux l’extension antérieure vers la cavité orale qui sera décrite secondairement, et l’extension inférieure vers les vallécules et la zone des trois replis. Les coupes axiales précisent l’extension vers la région sous-amygdalienne et le dépassement éventuel de la ligne médiane, qui contre-indique en théorie la prise en charge chirurgicale. Ces lésions sont le plus souvent traitées par radio-chimiothérapie.
3. La paroi pharyngée postérieure Les coupes sagittales en IRM permettent de mesurer précisément la taille de la lésion et d’analyser l’infiltration du plan postérieur vers l’espace rétro-pharyngé puis l’espace prévertébral. Des adénopathies rétropharyngées doivent être recherchées jusqu’en C3C4. Ces lésions sont rarement chirurgicales. Le bilan d’imagerie permet d’apprécier le volume lésionnel à irradier.
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Fig. 8 : a b c
Tumeur de la commissure intermaxillaire gauche. Séquence spin écho T1. Masse en isosignal T1. Séquence en T2. Masse en hypersignal. Séquence T1 après injection de chélate de Gadolinium. Rehaussement de la tumeur.
a b c
Fig. 9 : a b c
Tumeur de la commissure intermaxillaire (CIM) droite infiltrant l’angle mandibulaire par contiguïté. Contre-indication à la radiothérapie. Séquence T1 sans injection : hyposignal intra-médullaire limité au contact de la lésion. Séquence T2 : hypersignal (flèche). Séquence T1 avec injection et saturation de la graisse : prise de contraste lésionnelle s’étendant à l’angle mandibulaire.
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Fig. 10 : a b c
Tumeur de la région amygdalienne et de la CIM droite infiltrant les muscles masticateurs et l’angle mandibulaire. Indication opératoire formelle. Coupe axiale en pondération T1 : hyposignal suspect de l’angle mandibulaire. Coupe axiale en pondération T1 après injection confirmant l’extension osseuse. Coupe coronale en pondération T1 après injection permettant de définir l’extension dans les muscles ptérygoïdien et temporal (flèche), avant la prise en charge chirurgicale.
a b
Fig. 11 : a b
Volumineuse lésion de l’amygdale et de la CIM gauche. Coupe axiale en pondération T1 après injection : volumineuse lésion avec extension osseuse. Coupe coronale en pondération T1 après injection : extension tumorale périneurale le long du V3 jusqu’à la base du crâne contreindiquant la prise en charge chirurgicale.
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Fig. 12 : a b c
Lésion de la CIM droite et du pilier antérieur s’étendant à la zone de jonction linguale. Coupe anatomique sagittale montrant le pilier antérieur de l’amygdale pénétrant dans la zone de jonction linguale au niveau de la partie latérale du « V » lingual, à la jonction langue mobile- base de langue. 1 : pilier antérieur, 2 : zone de jonction linguale, 3 : commissure intermaxillaire, 4 : orifice tubaire, 5 : récessus pharyngé postérieur. Lésion de la CIM infiltrant le pilier antérieur (flèche). Envahissement de la zone de jonction.
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Fig. 13 : a-b c-d
Volumineuse lésion ulcéro-infiltrante de la base de langue. Séquence axiale T2 avec saturation de graisse : lésion ulcérée dépassant la ligne médiane venant au contact des 2 pédicules linguaux. Adénopathies bilatérales. Séquence sagittale T1 après injection : extension majeure dans le plancher buccal, respectant le plan des muscles mylo-hyoïdiens.
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4. Les tumeurs du voile Comme pour les autres localisations, il peut s’agir de carcinomes épidermoïdes, mais il faut penser aux tumeurs des glandes salivaires accessoires. En cas de suspicion de carcinome adénoïde kystique, il faudra spécifiquement rechercher une extension périnerveuse le long des nerfs palatins vers la fosse ptérygo-palatine, puis le long du nerf trijumeau jusqu’à son émergence au niveau du tronc cérébral. L’IRM est l’examen de référence nécessitant le plus souvent une acquisition dans les 3 plans de l’espace, mais la TDM peut être très utile pour l’étude des structures osseuses et des canaux palatins. L’imagerie devra rechercher les contre-indications classiques à la prise en charge chirurgicale : extension vers le cavum ou dépassement de la ligne médiane inopérable, adénopathies rétropharyngées.
Les tumeurs de la cavité orale Elles sont découvertes souvent plus précocement que les lésions de l’oropharynx, car facilement accessibles à l’examen clinique et sont de meilleur pronostic à volume tumoral égal (fig. 14). L’IRM est l’examen de choix, car elle permet de différencier les 4 principaux types de tissus mous de la région, souvent mal définis en TDM : les muscles, les glandes salivaires, la muqueuse et les espaces graisseux profonds (23-24) (tableau II). Les glandes sublinguales et submandibulaires présentent un signal intermédiaire entre les muscles et la graisse en pondération T1, généralement supérieur à celui du processus tumoral. Elles sont en hypersignal T2, généralement supérieur au signal de la lésion, et se rehaussent après injection. La TDM en constante osseuse haute résolution peut être indiquée en complément, pour mieux étudier les corticales osseuses et prévoir une éventuelle plastie mandibulaire. L’anatomie de la langue est très complexe. En pratique radioanatomique, on retiendra que les muscles intrinsèques impairs et sous muqueux sont inconstamment visibles et que les muscles extrinsèques se répartissent en 3 plans sagittaux de part et d’autre du septum (fig. 15). Le plan médial est constitué par les muscles génioglosses et génio-hyoïdiens, le plan intermédiaire par le muscle hyoglosse, et le plan latéral par les muscles stylo- et palato-glosses dans la langue mobile et par le muscle mylohyoïdien dans le plancher. Ces plans musculaires permettent de repérer l’artère linguale immédiatement en dehors du plan médial et le pédicule du nerf hypoglosse et lingual sous le plan
Tableau II Classification TNM des tumeurs de la cavité orale. Stade T1
Tumeur < ou égale à 2 cm de plus grand diamètre
Stade T2
Tumeur de 2 à 4 cm de plus grand diamètre
Stade T3
Tumeur de plus de 4 cm de plus grand diamètre
Stade T4a
Tumeur envahissant la mandibule, les muscles extrinsèques de la langue, le sinus maxillaire ou la peau
Stade T4b
Tumeur envahissant l’espace masticateur, l’apophyse ptérygoïde, la base du crâne, ou englobant la carotide
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intermédiaire. Avec le septum, ces structures musculaires et vasculonerveuses sont de véritables voies d’extension tumorale dans le plan sagittal. L’imagerie doit visualiser ces extensions profondes, définir le franchissement éventuel du septum, mesurer la distance entre la lésion et le pédicule lingual homolatéral quand un geste chirurgical conservateur est envisagé, et enfin rechercher une extension mandibulaire.
1. Les tumeurs de la langue mobile Elles se développent sur les faces latérales ou ventrales de la langue. L’IRM doit permettre de mettre en évidence la taille de la lésion et ses rapports avec le septum et le pédicule vasculaire homolatéral qui définissent les marges de résection chirurgicales (fig. 16). Les plans d’étude appropriés sont le plan axial et le plan coronal. Cependant, en cas d’infiltration du muscle génioglosse, le plan sagittal permettra de vérifier l’extension souvent infraclinique vers la base de la langue et le plancher buccal.
2. Les tumeurs du plancher antérieur Elles sont responsables d’une obstruction précoce du canal de Wharton avec sous-maxillite d’amont (fig. 17). Elles envahissent rapidement les muscles génio-hyoïdiens et génioglosses bien étudiés dans le plan sagittal.
3. Les tumeurs du plancher latéral Elles doivent être étudiées en coupes axiales et frontales pour mieux définir la préservation où l’infiltration du muscle mylohyoïdien, point clé de la résection chirurgicale. En cas d’atteinte de ce plan musculaire, il faudra rechercher une infiltration par contiguïté de la loge submandibulaire à différencier des adénopathies métastatiques.
4. Les tumeurs envahissant la mandibule Quelles soient antérieures ou latérales, les tumeurs du plancher buccal peuvent envahir la mandibule. Les lyses corticales seront au mieux définies en TDM alors que l’infiltration médullaire relève de l’IRM. Elle peut survenir sans lyse corticale, au travers du collet des dents en mauvais état au contact de la lésion. Elle se traduit par la disparition de l’hypersignal graisseux médullaire en T1, avec rehaussement après injection. Il faudra toutefois se méfier de l’absence de spécificité de ces signes qui peuvent se rencontrer dans toutes les atteintes infectieuses et/ou inflammatoires d’origine dentaire et jusqu’à plus de 6 mois après soin dentaire. Pour cette raison, il faudra corréler l’aspect IRM à l’état stomatologique du patient et éviter les extractions dentaires avant l’imagerie (fig. 18).
Les adénopathies cervicales des tumeurs de l’oropharynx et de la cavité orale La région cervicale est proportionnellement la région du corps humain la plus riche en relais ganglionnaires, et les carcinomes épidermoïdes sont très lymphophiles (4, 25-26). Pour les tumeurs de l’oropharynx et de la cavité orale, les premiers relais atteints sont les aires sous-mento-maxillaires (I), jugulaires supérieures (II) puis moyennes (III), au-delà toutes les autres aires cervicales
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a b
Fig. 14 : a b
Anatomie clinique des tumeurs de la cavité orale. Lésion du bord libre de la langue mobile. Lésions du plancher buccal antérieur et de la face inférieure de la langue mobile dite en feuillet de livre si elles descendent sur le plancher buccal.
a bc
Fig. 15 : a-b
c
Radio-anatomie de la cavité orale. Radio-anatomie axiale du plancher. Trois plans musculaires sagittaux de part et d’autre du septum : plan latéral : muscle mylohoïdien (flèche courbe) ; plan moyen : muscle hyoglosse (flèche en pointillé) ; plan médial : muscles génioglosse et génio-hyoïdien (flèche pleine). Savoir repérer les pédicules vasculaires (marges chirurgicales). Coupe sagittale : volumineux muscle génio-glosse (1) s’ouvrant en éventail dans le plancher, la base de langue puis la langue mobile. Muscles intrinsèques sous-muqueux supérieurs (2), mal visualisés en coupes axiales. Muscle génio-hyoïdien (3).
peuvent être atteintes. On portera une attention particulière aux aires rétro-pharyngées en cas d’atteinte du voile, de la partie haute des amygdales et de la paroi pharyngée postérieure. De même, certaines tumeurs de la pointe de langue se drainent directement dans les aires cervicales inférieures (IV). La détection d’une extension ganglionnaire a des implications pronostiques et thérapeutiques majeures. Plus de 25 % des patients considérés comme N0 clinique ont des envahissements ganglionnaires confirmés à l’examen histologique.
Dans les régions superficielles, l’échographie associée à la ponction cytologique a montré sa bonne précision diagnostique. Cependant, elle ne permet pas un bilan d’extension exhaustif des régions profondes et reste extrêmement opérateur dépendant (27). La TDM et l’IRM possèdent la même rentabilité diagnostique. Des adénopathies infracliniques sont mises en évidence, mais les micrométastases insuffisamment dépistées, y compris avec les produits de contraste spécifiques récemment testés en IRM (sensibilité de la TDM : 67-90 % et de l’IRM : 71-91 %). Le bilan J Radiol 2008;89
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Fig. 16 :
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ganglionnaire doit donc être le plus précis possible, mais il ne permet pas de se passer du curage diagnostique du premier relais ou de l’irradiation systématique, pour la plupart des localisations. Seules de petites tumeurs de la cavité orale N0 clinique et radiologique peuvent être dans certaines équipes simplement surveillées du point de vue ganglionnaire après traitement tumoral local. Les critères sémiologiques d’atteinte ganglionnaire sont identiques en TDM et en IRM et seront développés dans un article spécifique. L’imagerie recherchera le nombre et la taille des ganglions ainsi que la bilatéralité. En cas d’adénopathies cervicales inférieures, récurrentielles ou rompues, il faudra systématiquement rechercher une extension métastatique thoracique et osseuse. Les rapports avec l’axe jugulo-carotidien seront précisés pour prévoir la dissection chirurgicale. La persistance d’un liseré graisseux entre l’adénopathie et l’axe carotidien est un facteur de bon pronostic. À l’inverse, le contact sur moins de la moitié de la circonférence ne traduit pas obligatoirement la non-dissécabilité. Dans ce cas, la confrontation radio-clinique reste indispensable. Les ganglions devront être localisés en fonction de la classification internationale (I à VI), sous oublier les ganglions rétro-pharyngés et intraparotidiens, non décrits dans cette classification (25). J Radiol 2008;89
Tumeur du bord libre du 1/3 antérieur gauche de langue. Lésion peu volumineuse (< 2 cm), restant à distance du septum, mais venant au contact du pédicule lingual homolatéral (flèche). Séquence T1 sans injection. Séquence T2 avec saturation de graisse. Séquence T1 avec injection et saturation de graisse.
Dans le cas des adénopathies sans porte d’entrée (ASPE), on rappelle qu’une origine amygdalienne ou basi-linguale est retrouvée dans 80 % des cas justifiant l’amygdalectomie et les biopsies basilinguales systématiques lors de l’endoscopie si le bilan préthérapeutique reste muet (28). À noter, le cas particulier des adénopathies pseudo-kystiques des groupes II et III, simulant parfois un kyste branchial, qui apparaissent chez des patients jeunes sans facteur de risque alcoolo-tabagique plusieurs mois avant la lésion primitive, cliniquement et radiologiquement occultes au moment du diagnostic ganglionnaire. Il s’agit, soit d’une lésion thyroïdienne de type papillaire, soit d’une origine amygdalienne indifférenciée, justifiant l’amygdalectomie systématique lors du bilan endoscopique.
Place du TEP-scanner Son utilisation dans l’exploration des tumeurs ORL a fait l’objet de multiples études, justifiant un niveau de preuve B2. Cependant, ses indications précises restent à définir en fonction de l’expérience des Services spécialisés, en tenant compte du coût de l’examen et de sa faible disponibilité dans la plupart des régions. • Pour le staging T, la faible résolution de cet examen ne permet pas d’améliorer le diagnostic. La TEP a cependant une indica-
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Fig. 17 : a-b c-d
e
Tumeur du plancher buccal antérieur révélée par une sousmaxillite droite. Coupe axiale T2 : lésion du plancher antérieur dépassant la ligne médiane, dilatation d’amont du canal de Wharton droit (flèche). Absence d’anomalie osseuse décelable. Coupe axiale et reconstruction sagittale en TDM : lésion peu rehaussée par le produit de contraste, extension dans le plancher mal analysée. Absence de lésion mandibulaire décelée en constante osseuse. Séquence sagittale T1 après injection : extension dans le plancher mieux délimitée, anomalie de signal du bord alvéolaire de la mandibule au contact de la tumeur sans anomalie dentaire connue (flèche). Suspicion d’infiltration tumorale par le collet de la dent qui sera confirmée lors du traitement chirurgical.
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Fig. 18 : a-b
Anomalie de signal aspécifique de la mandibule. Séquences axiales T2 avec saturation de graisse. Lésion du plancher antérieur sans extension mandibulaire. Les anomalies de signal en plage de la médullaire osseuse sont d’origine inflammatoire après extractions dentaires récentes.
a bc
Fig. 19 : a-b c
Volumineuse tumeur oro-pharyngée droite. IRM : ganglion de 12 mm controlatéral homogène (flèche) conservant une morphologie normale : infiltration tumorale ? TEP : fixation pathologique du ganglion controlatéral donc suspect (flèche). Confirmation par le curage.
tion formelle en cas d’ASPE à imagerie normale, car la localisation initiale (80 % amygdalienne ou basi-linguale) est révélée par la TEP dans 30 % des cas. • Pour le staging N, la TEP ne différencie pas les stades N1, N2a et N2b. Cependant, elle améliore le diagnostic étiologique des ganglions d’aspect aspécifique en TDM ou IRM dans plus de 30 % des cas. Elle peut ainsi mettre en évidence une adénopathie controlatérale sur un ganglion d’aspect non formellement pathologique en imagerie de coupes (fig. 19). Dans le cadre des bilans clinique et radiologique N0, elle ne permet pas de révéler les micrométastases avec une valeur prédictive négative (VPN) insuffisante pour se passer du curage ou de l’irradiation systématique des premiers relais (29). • Pour le staging M, la TEP permet, en un temps, un repérage de la quasi-totalité des lésions. Cependant, ces tumeurs J Radiol 2008;89
sont rarement d’emblée métastatiques. Il faut le rechercher en cas de lésion T4 ou de lésions supérieures à N2b et, a fortiori, en rupture capsulaire. De même, il faut y penser en cas de lésion agressive apparue rapidement chez un sujet jeune, sans facteur de risque, et chez les patients déjà traités pour un carcinome ORL. Les différentes publications actuelles développent plutôt la valeur fonctionnelle de la TEP en tant que facteur prédictif de réponse au traitement. Ainsi, la mise en évidence d’une SUV (standard uptake value) élevée dans le site tumoral initial serait un facteur de mauvais pronostic, avec risque de rechute locale plus élevé, justifiant d’intensifier le traitement. L’arrivée de nouveaux traceurs permettra sans doute d’améliorer ces études fonctionnelles.
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Conclusion L’IRM est l’examen de choix pour explorer les tumeurs de l’oropharynx et de la cavité orale. Le compte rendu doit préciser le site précis de la lésion, sa taille et les extensions qui guident la prise en charge thérapeutique. La TDM osseuse peut être indispensable pour apprécier une érosion corticale ou planifier une reconstruction mandibulaire. La TDM cervicale doit être réservée aux cas localement avancés pour lesquels un simple traitement palliatif est envisagé. La TDM thoracique, dans le cadre du bilan d’extension, doit être effectuée lorsqu’il s’agit d’un carcinome adénoïde kystique et pour les carcinomes épidermoïdes T4 et/ou N2 et plus, notamment lorsqu’une rupture capsulaire est possible. Le TEP-scan reste encore réservé dans notre pratique à quelques cas particuliers. Points à retenir • L’IRM est l’examen de référence pour l’exploration des tumeurs de l’oropharynx et de la cavité orale. – Utiliser des séquences d’écho de spin rapide pour limiter le temps d’examen à 20 minutes en moyenne. – Déglutition autorisée, mais immobilisation parfaite de la tête, de la mandibule et si possible de la langue mobile. • Le pronostic dépend du stade T et surtout N : aires ganglionnaires à explorer attentivement. – Décrire le point de départ de la lésion, donner sa plus grande taille et préciser les extensions qui vont guider le choix thérapeutique. • La TDM est indiquée dans certaines lésions : – la TDM osseuse peut être utile en complément à la recherche d’érosion corticale ou pour prévoir une reconstruction mandibulaire ; – la TDM thoracique est indiquée pour les tumeurs localement avancées notamment avec envahissement ganglionnaire qui prédit le risque métastatique.
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Cas Clinique
Histoire de la maladie
Questions
Patient de 55 ans sans antécédent ni d’intoxication alcoolotabagique. Dysphagie depuis plusieurs semaines attribuée à une angine et ainsi traitée (fig. 1).
1. Analyse sémiologique de la lésion : topographie, extension. 2. Quel diagnostic histologique peut-on évoquer ? 3. Quel examen est nécessaire pour assurer le bilan d’extension avant la prise en charge thérapeutique.
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IRM. Séquence T1 sans injection et sans saturation de graisse. Séquence T1 après injection et saturation de graisse, coupe axiale. Séquence T1 après injection et saturation de graisse, coupe sagittale.
Réponses 1. Masse infiltrante centrée sur la base de langue, sans perte de substance. Prédominant à droite, elle dépasse largement la ligne médiane. Infiltration profonde massive dans le plancher buccal le long des faisceaux musculaires extrinsèques et vasculo-nerveux. Elle englobe le pédicule lingual droit et vient à proximité du pédi-
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cule lingual gauche. Respect du plan des muscles mylo-hyoïdiens et du larynx. Dimension axiale maximale : 3,5 cm. Absence de ganglion morphologiquement suspect dans les premiers relais. 2. L’imagerie ne permet pas de donner un diagnostic histologique, mais le contexte pouvait orienter. Il s’agit ici d’un carcinome adénoïde kystique de glandes salivaires accessoires. 3. TDM thoracique en raison du diagnostic histologique.