Impact dosimétrique des prothèses de hanche lors d’un traitement radiothérapeutique

Impact dosimétrique des prothèses de hanche lors d’un traitement radiothérapeutique

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Cancer/Radiothérapie 12 (2008) 102–109

Mise au point

Impact dosimétrique des prothèses de hanche lors d’un traitement radiothérapeutique Dosimetric influence of hip prosthesis during radiotherapeutic treatement R. Gschwind a,∗ , E. Buffard a,c , H. Masset a , C. David b,c , L. Makovicka a a

IRMA/CREST/FEMTO, UMR CNRS 6174, pôle universitaire des Portes-Jura, B.P. 71427, 25211 Montbéliard cedex, France b Département radiothérapie et oncologie, centre hospitalier Belfort-Montbéliard, 25209 Montbéliard cedex, France c Département de radiothérapie, centre hospitalier E.-Muller-Moenchsberg, 68070 Mulhouse cedex, France Rec¸u le 10 septembre 2007 ; rec¸u sous la forme révisée le 13 novembre 2007 ; accepté le 23 novembre 2007 Disponible sur Internet le 8 janvier 2008

Résumé La population vieillit et de plus en plus de patients traités pour un cancer du pelvis sont porteurs d’une prothèse de hanche. Les balistiques préconisées dans ce type de traitement doivent éviter le passage au travers de la prothèse, mais quelquefois le passage au travers de l’implant est inévitable. Il est donc fondamental dans ces conditions, de quantifier avec précision les modifications de dose engendrées par la présence de cet implant. Cette étude a eu donc pour objectif d’analyser par méthode de Monte Carlo ces changements à l’aide de modèles simples et complexes (fantômes anthropomorphiques) en tenant compte à la fois de la géométrie et de la composition de la prothèse et des revêtements. Puis, la méthodologie développée pour ce travail a été utilisée pour étudier le comportement d’un système de planification de traitement dans ce contexte extrême. © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Abstract As the population become aged, many patients with hip prosthesis are treated for a pelvic cancer. The recommended ballistic must avoid to pass in the prosthesis, but sometimes it is inevitable. So it is essential to quantify with accuracy the dose modifications linked to the presence of metallic implant. The aim of this study is to analyze by Monte Carlo method these modifications in simple and complex models (anthropomorphic phantom) which take into account the geometry and the composition of the prosthesis and its coatings. Then, this methodology was used to study the behaviour of a treatment planning system in theses extreme conditions. © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Prothèse de hanche ; Système de planification de traitement ; BEAMnrc ; Fantôme anthropomorphique Keywords: Hip prosthesis; Treatment planning systems; BEAMnrc; CT-based phantom

1. Introduction Cette étude a pour objectif de quantifier par simulation Monte Carlo, méthode qui a fait ses preuves dans les milieux hétérogènes, les modifications de dose engendrées par la présence de prothèses de hanche, hétérogénéité de forte densité, lors d’une irradiation conformationnelle du pelvis. Les paramètres tels que la géométrie de la prothèse, sa composition et ses revêtements ∗

Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (R. Gschwind).

1278-3218/$ – see front matter © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.canrad.2007.11.006

ont été analysés. Les recommandations de l’article d’Agapito [1] et du rapport 63 de l’AAPM (American Association of Physicists in Medicine) [10] préconisent l’utilisation de balistiques qui évitent le passage au travers de la prothèse. Cependant, l’optimisation d’une radiothérapie externe pour un patient porteur d’une prothèse par une balistique évitant l’implant revient ainsi : • d’une part à maîtriser plus difficilement l’homogénéité de la dose au volume cible et les tolérances pour les organes à risque ;

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• d’autre part, n’est pas toujours réalisable, car le nombre de personnes âgées augmentant, il est de plus en plus fréquent de traiter des patients porteurs de double prothèse de hanche ou à mobilité réduite. Dans ces cas extrêmes, le passage au travers de la prothèse est inévitable. Il est donc fondamental, d’une part, de quantifier les modifications de dose engendrées par la présence de ces implants métalliques [7,12] et d’autre part, de connaître avec précision les paramètres physiques de l’implant. 2. Généralités sur les prothèses Les prothèses de hanche sont constituées de deux parties principales (Fig. 1). Une première pièce métallique (partie A) remplace l’extrémité supérieure du fémur, divisée en trois zones : la tige fémorale, fixée dans le canal médullaire, le col et la tête de la prothèse. La seconde pièce (partie B) est appelée cupule. Elle traite le cotyle et s’articule autour de la tête fémorale. Selon le type d’implant, la prothèse de hanche peut être composée de la partie A seule ou des deux pièces métalliques (A et B). Il existe trois catégories de prothèse de hanche : les prothèses céphaliques (prothèses monoblocs qui remplacent l’extrémité supérieure du fémur), les prothèses intermédiaires (constituées d’une pièce fémorale couplée à une cupule qui coiffe la tête de la prothèse sans être scellée dans le cotyle) et les prothèses totales. Ces dernières se décomposent en trois parties : • une cupule cotyloïdienne qui est scellée dans le bassin et qui rec¸oit la tête de la prothèse ; • la tête ou extrémité de la prothèse fémorale qui s’articule avec la cupule ; • la tige fémorale qui est enfoncée dans le fémur. Le choix se fait en fonction de l’âge, du sexe, de la qualité osseuse et de la géométrie du fémur. Les matériaux qui constituent la tige et la tête fémorale sont en acier inoxydable, en TA6V4 (alliage de titane) ou en alliage CrCoMo. Les cupules sont essentiellement composées de polyéthylène. Le mode de fixation le plus usité est le ciment, qui garantit une stabilité

Fig. 1. Prothèse totale de hanche : illustration du manuel de l’opéré de l’American Academy of Orthopaedic Surgeons (AAOS). La partie A remplace l’extrémité du fémur, elle regroupe la tige et la tête fémorale. La partie B est substituée au cotyle implanté dans le bassin.

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immédiate et parfaite de l’implant en acier inox ou en CrCoMo. Pour les prothèses non cimentées, généralement en alliage titane, la fixation est assurée par le remplissage optimum de la cavité osseuse par l’implant tant au niveau du cotyle que du fémur. Les implants présentent alors un traitement de surface, souvent d’hydroxyapatite (HAP) qui favorise l’ostéogenèse endostale donc une fixation biologique. 3. Matériels et méthodes Lors d’une irradiation avec passage d’un faisceau au travers de l’implant, deux types de perturbation sont observés. La première est une forte atténuation du faisceau d’irradiation dans l’ombre de la prothèse qui dégrade l’homogénéité de la dose au niveau du volume cible. La seconde consiste en une augmentation locale de la dose à l’interface tissu–métal qui accroît les risques de nécrose de l’os [10] et par conséquent, les descellements de prothèse. Dans ce but, deux modèles ont été développés : l’un (modèle A) pour évaluer l’augmentation locale de la dose au contact de l’implant et décrire l’influence de certains revêtements, l’autre (modèle B) pour traiter l’atténuation du faisceau d’irradiation lorsque celui-ci traverse la prothèse. Dans un premier temps, l’étude a été réalisée avec ces modèles simples avant de passer, dans un second temps, à un travail plus complexe avec des fantômes anthropomorphiques. Les modèles ont été élaborés avec le code Monte Carlo BEAMnrc [11], qui est constitué de deux programmes. Le premier BEAM permet de modéliser un accélérateur linéaire médical d’électrons et de calculer un fichier d’espace des phases (fichier contenant toutes les informations sur les particules : énergie, nature, position. . .) soit en sortie des mâchoires de l’accélérateur ou en entrée du milieu. Le second DOSXYZnrc [13] utilise ce fichier d’espace des phases comme source pour calculer des distributions de dose dans un fantôme voxelisé qui est soit réalisé directement dans le programme, soit conc¸u indirectement à partir d’images tomodensitométriques par l’intermédiaire du module complémentaire CTCreate. Le code CTCreate permet de concevoir des fantômes voxelisés dans un format spécifique lisible par le code DOSXYZnrc pour calculer les distributions de dose. Dans le cas de patient porteur d’implants, l’imagerie scanographique comporte de multiples artefacts qui engendrent des erreurs d’interprétation de densité des matériaux dans la conception des fantômes voxelisés par CTCreate et ensuite, des erreurs dans les distributions de dose. Pour pallier à ce problème, un programme-maison « EGSphantOpener » a été spécialement conc¸u au laboratoire. Ce programme, écrit en langage C, est capable de lire et de modifier les données tomodensitométriques pour permettre la prise en compte des implants métalliques tout en s’affranchissant des artefacts. Il offre deux possibilités : • soit il corrige le fantôme obtenu à partir des données tomodensitométriques d’un patient porteur d’une prothèse de hanche, en redessinant chaque volume et en leur assignant une densité donnée ; • soit il modifie les données tomodensitométriques d’un patient sans implant en ajoutant coupe par coupe un implant métallique.

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La première méthode offre l’avantage d’estimer les dommages d’une prothèse pour un patient donné. Cependant, sa mise en œuvre est longue et les calculs Monte Carlo sont effectués dans une géométrie simplifiée due aux corrections manuelles. La seconde méthode, choisie dans le cadre de notre travail, nécessite de travailler sur deux patients différents mais de morphologie proche. Elle présente l’avantage de permettre des calculs de distribution de doses dans des fantômes voxelisés prenant en compte l’anatomie réelle du patient sans erreur de construction liée aux artefacts. La validation du programme EGSphantOpener en milieu homogène et hétérogène a été réalisée [5]. Après cette étude dosimétrique Monte Carlo, il nous a paru intéressant d’utiliser cette méthodologie pour tester le système de planification de traitement (TPS) dont nous disposions au centre hospitalier de Montbéliard : Theraplan v3.7 (MDS Nordion/Nucletron). 4. Résultats 4.1. Étude dosimétrique Monte Carlo de l’implant

Fig. 2. Rendements en profondeur calculés pour un implant de TA6V4 avec et sans revêtement d’HAP. Le dépôt d’HAP est repéré par deux droites pointillées [4].

4.1.1. Évaluation de la dose au contact de l’implant Le modèle A est constitué d’un échantillon de 1 × 1 × 0,2 cm3 placé sur l’axe du faisceau d’irradiation à 5 cm de profondeur dans un fantôme équivalent d’eau (30 × 30 × 30 cm3 ). L’épaisseur de 0,2 cm a été choisie en fonction des échantillons de prothèses disponibles pour les mesures expérimentales. Ce modèle a été validé par des mesures avec des pastilles thermoluminescentes [2]. Les pas de calcul varient de 50 à 100 ␮m au voisinage de l’interface. Les calculs ont montré que les électrons secondaires déposent leur énergie très localement (dans les 2 mm de l’interface) et les doses au contact de la prothèse atteignent des valeurs très élevées. À 100 ␮m du métal, une augmentation d’environ 20 % est enregistrée pour des hétérogénéités d’acier inoxydable (M30NW) et de CrCoMo et d’environ 13 % pour l’alliage titane (TA6V4) par rapport à l’augmentation de dose produite au même point par un échantillon d’os [3,4].

produite par un échantillon de TA6V4 vierge. En revanche, les ciments de PMMA entraînent une réduction partielle de ces fortes doses aux interfaces. Des épaisseurs de 500 et de 1000 ␮m de PMMA réduisant la dose au sein du tissu respectivement de 8 et de 16 % par rapport à un implant vierge (Fig. 3). Si l’épaisseur de ciment atteint 1 mm, le dépôt d’énergie à l’interface tissu–PMMA s’écarte de 3 % de la valeur, en dose relative, produite par un « implant d’os ». Les doses au contact de la prothèse sont ainsi abaissées à des valeurs acceptables. Les effets de l’irradiation sur les ciments de PMMA ne sont pas examinés, mais il est peu probable que ceux-ci soient endommagés lors du traitement compte tenu de l’importance des doses utilisées pour la stérilisation des matériaux biocompatibles (environ 10 KGy). Outre les modifications de dose au contact du métal, une deuxième perturbation liée à l’atténuation du faisceau d’irradiation peut conduire à altérer les distributions de dose

4.1.2. Influence des revêtements Les prothèses de hanche sont fixées lors de leur implantation dans le patient au moyen d’un ciment de PMMA ou à l’aide d’un revêtement d’HAP qui améliorent la fixation dans l’os. Les prothèses de hanche non cimentées, généralement constituées de TA6V4, sont recouvertes d’un dépôt de 150 ␮m d’HAP, les prothèses cimentées, généralement composées d’acier inox et d’alliage CrCoMo, sont implantées à l’aide d’un ciment de PMMA dont l’épaisseur varie. Ainsi, des épaisseurs de 150, 500 et 1000 ␮m ont été modélisées. Comme les travaux de Carolan et al. [6] ont montré que les revêtements pouvaient réduire les surdosages à l’interface, il nous a paru intéressant d’approfondir cette étude avec l’ensemble des revêtements utilisés à l’heure actuelle. L’étude d’un revêtement d’hydroxyapatite a montré qu’une épaisseur de 150 ␮m d’HAP ne diminue pas la dose au contact de la prothèse (Fig. 2). Les électrons secondaires créés dans le revêtement compensent ceux absorbés par celuici. Il en résulte une augmentation de dose identique à celle

Fig. 3. Rendements en profondeur calculés pour un implant d’acier recouvert de ciment de PMMA d’épaisseurs variables [4].

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lors d’une irradiation du pelvis, notamment par une réduction de l’homogénéité de dose au sein du volume à traiter. 4.1.3. Évaluation de l’atténuation Le modèle B décrit une prothèse totale de hanche à partir de voxels de 0,008 cm3 (0,2 × 0,2× 0,2 cm3 ). La position de la prothèse dans le champ d’irradiation a été définie à l’aide des images scanographiques et des plans de traitement de patients traités au centre hospitalier de Montbéliard. Une atténuation de 15 et de 30 % est enregistrée derrière une tige fémorale, respectivement de TA6V4 et d’acier par rapport à la dose obtenue dans l’eau sur le faisceau d’irradiation à la profondeur de mesure de 10 cm. Ces deux valeurs sont à évaluer par rapport à l’atténuation produite par une tige d’os, estimée à 5 % par rapport à l’eau. Il n’est pas surprenant que les perturbations produites soient d’autant plus importantes que la densité et le numéro atomique du matériau qui constituent l’implant sont élevés. La tête de la prothèse, très massive, conduit à des valeurs d’atténuation encore plus élevées que derrière la tige fémorale. Des réductions de dose de 25 à 45 % sont ainsi relevées derrière une tête fémorale, respectivement de TA6V4 et d’acier [2]. L’ensemble des résultats met ainsi en évidence que la présence, dans le champ d’irradiation, d’une prothèse de hanche engendre d’importantes modifications des distributions de dose. La géométrie et la position de la prothèse ont une action directe sur l’atténuation du faisceau et par conséquent sur l’homogénéité de la dose au sein du volume à traiter. C’est pourquoi, des modèles anthropomorphiques ont été développés au moyen du module CTCreate, intégré au code BEAMnrc. 4.1.4. Impact des prothèses de hanche lors de l’irradiation d’un pelvis La combinaison des codes CTCreate-EgsphantOpener a permis de créer des fantômes voxelisés contenant des prothèses de hanche. Dans un premier temps, un fantôme anthropomorphique d’un patient non porteur d’implant a été conc¸u avec CTCreate. Puis, dans un second temps, le fantôme a été modifié avec EgsphantOpener pour ajouter différents modèles de prothèses de hanche. Les conditions d’irradiation sont celles d’un plan de traitement du cancer de la prostate : irradiation avec un faisceau de photons de 25 MV par un champ latéral droit à DSP (distance source-peau) 100 cm. Le premier temps de traitement cible la prostate et les vésicules séminales et le second temps de traitement cible uniquement la prostate [4]. La Fig. 4 illustre le plan transverse central passant par l’axe du faisceau d’irradiation sur lequel sont repérés : le rendement en profondeur sur l’axe du faisceau d’irradiation ainsi que les profils de dose à 10 cm et à 20 cm dans le sens antéro-postérieur du patient. Les profils de dose à 10 cm donnent une indication sur la dose au niveau des têtes fémorales et ceux à 20 cm renseignent sur la dose au niveau des volumes à traiter. 4.1.4.1. Influence du type de prothèse sur la distribution de dose. Deux types de prothèses de hanche ont été étudiés : une prothèse céphalique et une prothèse totale avec armature de maintien. L’ensemble des cartographies de dose présentées a été visualisé à l’aide du programme DOSXYZ show (Fig. 5) et a été obtenu

Fig. 4. Position du faisceau latéral droit sur la coupe centrale.

Fig. 5. Distributions de dose calculées dans le fantôme voxelisé contenant une prothèse totale de hanche en acier et visualisées au moyen de DOSXYZ show dans le plan transverse central passant par l’axe du faisceau d’irradiation.

pour une irradiation qui cible à la fois la prostate et les vésicules séminales. Les rendements (Figs. 6 et 7) et les profils ont été comparés à ceux obtenus dans les mêmes conditions d’irradiation pour un patient sans implant. La cartographie de doses (Fig. 5) montre l’atténuation du faisceau d’irradiation. La

Fig. 6. Rendements en profondeur calculés dans le fantôme voxelisé contenant une prothèse céphalique.

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Fig. 7. Rendements en profondeur calculés avec le fantôme voxelisé contenant une prothèse totale (cupule et armature de maintien).

présence de la cupule métallique dans le cas de la prothèse totale de hanche accentue la dégradation du faisceau (Figs. 6 et 7). Elle accentue les points chauds au contact de l’implant et a un effet plus marqué au niveau de l’irradiation des volumes cibles, puisque pour ce type d’implant les vésicules séminales sont touchées par l’atténuation du faisceau d’irradiation. On relève ainsi, sur les profils de dose à 20 cm, une atténuation du faisceau d’irradiation de 45 et de 15 % sur une partie du volume délimitant les vésicules séminales, respectivement pour un implant d’acier et d’alliage titane. L’irradiation de la prostate est, quant à elle, altérée par une atténuation variant de 45 à 60 % et de 25 à 30 %, respectivement pour les mêmes matériaux. 4.1.4.2. Impact dosimétrique de la prothèse dans les deux temps de traitement. Selon la position du champ d’irradiation, l’impact de la prothèse au niveau du volume à traiter diffère. Des calculs ont donc été réalisés pour les deux temps de traitement pour un patient porteur d’une prothèse céphalique. Les résultats obtenus indiquent que les vésicules séminales restent en dehors de l’atténuation du faisceau d’irradiation. En revanche, l’irradiation du volume prostatique semble être largement altéré. Les profils de dose permettent de quantifier cette perturbation. La présence d’une prothèse de hanche de type céphalique tend à réduire la dose au niveau de la prostate de 25 à 45 % et de 20 à 25 % à 20 cm de profondeur, respectivement pour un implant d’acier et d’alliage titane [4]. Dans le cas du champ réduit qui cible uniquement la prostate, les résultats montrent que le champ latéral réduit est aussi dégradé par la présence de la prothèse (Fig. 8(a et b)). La Fig. 9 illustre l’impact de la prothèse de hanche en acier et en alliage titane sur l’axe du faisceau d’irradiation. Par rapport à la première séquence de traitement, la prothèse est située sur l’axe du faisceau d’irradiation plus en surface. Les augmentations locales de dose enregistrées au contact de l’implant sont alors plus conséquentes (jusqu’à + 120 %). De même, l’analyse de la Fig. 8(c) souligne que la position de la prothèse par rap-

Fig. 8. (a, b, c) : distributions de dose calculées dans le fantôme voxelisé avec une prothèse céphalique en acier et visualisées au moyen de DOSXYZ show dans : (a) le plan transverse central passant par l’axe du faisceau d’irradiation, (b) le plan sagittal passant par la prothèse à 6,7 cm de profondeur, (c) le plan sagittal passant par les volumes cibles.

port au volume prostatique affecte largement l’homogénéité de dose au sein de la prostate. L’analyse des profils à 20 cm permet de quantifier l’atténuation du faisceau. Le sous-dosage du volume prostatique est estimé entre 10 et 25 % et entre 25 et 50 %, respectivement pour un implant en alliage titane et en acier [4].

Fig. 9. Rendements en profondeur calculés dans le fantôme voxelisé contenant une prothèse type céphalique. Irradiation par un champ latéral réduit.

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4.2. Étude de la réponse du système de planifications des traitements (TPS) Theraplan v3.7 (MDS Nordion/Nucletron) 4.2.1. Description des implants par les TPS Avant même d’estimer la précision des algorithmes de calcul de la dose dans le cas de patients porteurs d’implants métalliques, il est important de s’assurer que le TPS est capable de les décrire convenablement. Trois questions peuvent permettre d’évaluer les TPS dans ces cas limites : • est-il possible de retoucher les images scanographiques en dessinant manuellement la prothèse ? ; • est-il possible d’éditer des matériaux de densité élevée ? ; • existe-il une valeur de nombre tomodensitométrique ou de densité limite ? Il est à noter que, selon le TPS, les matériaux sont renseignés en terme de densité ou de densité électronique. Les TPS, comme Theraplan v3.7 de MDS Nordion/Nucletron, offrent la possibilité de retoucher les images scanographiques et ainsi de s’affranchir des artefacts. Ces TPS construisent le modèle de densité à partir d’une courbe CT-densité et autorisent la création de nouveaux matériaux sans limitation de valeur pour renseigner la densité. Pour améliorer la prise en charge de la prothèse, une procédure possible consiste alors à dessiner, sur chaque coupe, l’implant métallique et à lui assigner manuellement une valeur de densité, pour les densités élevées. Cette démarche implique que la densité correspondant au volume du contour externe soit fixée à l’unité et que tous les contours internes importants soient eux aussi redessinés. À titre d’exemple, dans le cas d’un traitement de la prostate, la vessie, la paroi du rectum, les os, la prostate, voire les vésicules séminales sont contourés (Fig. 10) et la densité respective de chacun de ces volumes est assignée manuellement. Cependant, une prise en compte correcte de la prothèse exige également de renseigner la densité des matériaux qui la composent. Or cette donnée n’est pas toujours accessible. Pour garantir une prise en compte correcte des hautes densités, on pourrait, par exemple, construire dans le TPS différents fantômes avec une prothèse dessinée à la main pour laquelle on lui assigne manuellement une densité. Puis, il

Fig. 10. Représentation d’une coupe scanner de patient avec prothèse de hanche pour laquelle tous les contours ont été redéfinis.

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faudrait réaliser une vérification des données du TPS par des mesures afin de valider la méthode. Enfin, lorsque cela est possible, l’AAPM [10] recommande de réaliser une vérification de la dose par une mesure in vivo lors de la première séance de traitement. Ce contrôle peut être effectué soit au moyen de dosimètres thermoluminescents, soit au moyen de diodes semi-conductrices. Cette étape peut notamment être très utile lorsque la composition de l’implant n’est pas ou mal connue. En fonction de la mesure, le plan de traitement peut alors être réajusté. 4.2.2. Test de l’algorithme de calcul utilisé : évaluation à l’aide des modèles anthropomorphiques L’analyse de l’algorithme Pencil Beam (PB) a été effectuée dans des géométries simples et complexes en confrontant la réponse du TPS à celle du code BEAMnrc. Comme le comportement de l’algorithme PB est bien connu, nous ne présenterons que les résultats obtenus dans des géométries réalistes. Ce travail a pu être réalisé grâce aux fantômes voxelisés développés au moyen des codes CTCreate et EgsphantOpener. Toujours selon la même procédure, des modèles identiques ont été élaborés avec le code BEAMnrc et avec Theraplan. Sous BEAMnrc, les coupes scanographiques d’un patient sans implant ont été utilisées pour construire un fantôme anthropomorphique. Le ré-échantillonnage des coupes scanographiques originelles (512 × 512) de 2,5 mm d’épaisseur a conduit à la réalisation d’un fantôme voxelisé pour une taille de voxel constante de 0,4 × 0,4 × 0,25 cm3 (la dernière dimension correspondant à l’épaisseur de coupe). Ensuite, à l’aide du code EgsphantOpener, ce fantôme initial a été modifié par ajout d’une prothèse de hanche céphalique. En parallèle, l’acquisition scanographique du même patient sans implant a été importée dans Theraplan. À l’aide des outils de délinéation, la même prothèse de hanche céphalique a été dessinée. Pour corréler le découpage du fantôme voxelisé élaboré pour le calcul Monte Carlo, la grille de calcul utilisé dans Theraplan a été fixée à 0,4 × 0,25 × 0,4 cm3 (la deuxième dimension étant l’épaisseur de coupe). Ainsi, les fantômes anthropomorphiques ont été utilisés pour tester la réponse du TPS Theraplan directement dans les coupes scanographiques du patient. Cette approche est intéressante car, dans la littérature, très peu de publications [8,9] propose ce type de comparaison. Les tests ont été réalisés sur des fantômes anthropomorphiques contenant une prothèse de hanche céphalique en acier et en alliage titane. Les distributions de dose ont été calculées pour une irradiation des fantômes par un faisceau de photons de 25 MV. Dans Theraplan, la taille de pinceau élémentaire a été fixée à 0,5 cm et la correction d’hétérogénéité ETAR a été activée. La Fig. 11 montre la comparaison des rendements en profondeur obtenus sur l’axe du faisceau d’irradiation au moyen du code BEAMnrc et au moyen de Theraplan. L’axe du faisceau d’irradiation passe au voisinage de la prothèse mais sans la traverser. On constate ainsi que les simulations Monte Carlo calculent les variations du rayonnement diffusé aux environs de l’implant contrairement à l’algorithme PB. La Fig. 12(a et b) illustre les profils de dose calculés par les deux méthodes à 10 cm de profondeur dans le sens antéro-postérieur du patient. Le plan à 10 cm passe au travers de la prothèse (cf. Fig. 4). Les

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Fig. 11. Rendements en profondeur calculés sur l’axe du faisceau d’irradiation dans un fantôme anthropomorphique contenant une prothèse de hanche céphalique.

profils de dose sont normalisés par la valeur de dose calculée sur l’axe du faisceau d’irradiation pour le patient sans implant. La Fig. 13(a et b) représente les profils de dose calculés par les deux méthodes à 20 cm de profondeur dans le sens antéro-postérieur du patient. Le plan à 20 cm contient les volumes à traiter, à savoir la prostate et les vésicules séminales (cf. Fig. 4). L’avantage des modèles anthropomorphiques est qu’ils offrent une réelle quantification des performances de l’algorithme PB dans des géométries réalistes. Ainsi, la Fig. 13(a et b) valide l’insuffisance de l’algorithme PB à modéliser le rayonnement diffusé puisque les profils de dose calculés fournissent uniquement l’image de l’atténuation de la composante primaire du faisceau. Des différences de l’ordre de 20 % sont ainsi relevées entre la réponse de l’algorithme PB et les méthodes de Monte Carlo. En ce qui concerne les distributions de dose obtenues dans un plan à 20 cm de profondeur, soit au niveau des volumes à traiter, la Fig. 13(a et b) souligne l’aptitude de l’algorithme PB à fournir une estimation de l’atténuation du faisceau avec une précision comprise entre 5 et 10 %.

Fig. 12. (a, b) : profils de dose calculés par le code BEAMnrc et par Theraplan v3.7 à 10 cm de profondeur dans un fantôme anthropomorphique contenant une prothèse de hanche, (a) en acier et (b) en alliage titane.

Fig. 13. (a, b) : profils de dose calculés par le code BEAMnrc et par Theraplan v3.7 à 20 cm de profondeur dans un fantôme anthropomorphique contenant une prothèse de hanche, (a) en acier et (b) en alliage titane.

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5. Discussion L’effet de la présence d’une prothèse de hanche céphalique pour deux positions du faisceau d’irradiation et pour deux types de matériaux sur la distribution de dose a été mis en évidence. En effet, les résultats ont confirmé l’influence non négligeable de la composition, mais aussi de la géométrie de la prothèse sur la distribution de dose. L’étude des deux temps de traitement pour un faisceau latéral traversant la prothèse dans la balistique d’irradiation a montré le « sous-dosage » du volume prostatique. L’ensemble des résultats a souligné l’apport du programme EgsphantOpener, car pour des balistiques de traitement pour lesquelles le passage par la prothèse est inévitable, il offre la possibilité d’évaluer les modifications de dose liées à la présence de l’implant métallique aussi bien à son contact qu’à l’intérieur ou encore au niveau des volumes à traiter. Ces avancées répondent à un besoin important de quantifier la dose au voisinage des implants métalliques, puisque les systèmes de planification de traitement actuels ne le permettent pas. En outre, ce programme n’est pas limitatif au cas des prothèses de hanche, car il permet de dessiner n’importe quel type d’implant ; ce qui ouvre des perspectives d’étude nombreuses (implant dentaire, grains d’or pour le repositionnement de la prostate. . .). Le travail que nous avons mené a souligné l’importance de tester les TPS en milieu fortement hétérogène pour optimiser leur utilisation dans ces cas limites. Pour faciliter cette démarche, les informations du fabricant sont primordiales. Deux points importants ont été relevés. Le premier est qu’il est indispensable de déterminer l’aptitude du TPS à décrire la géométrie de la prothèse et à lui assigner une valeur de densité. Le second insiste sur la nécessité d’évaluer la réponse des algorithmes de calcul en présence d’implants métalliques tout en s’appuyant sur les travaux déjà publiés sur le sujet [9,10,14]. Les outils de délinéation des TPS Theraplan ont prouvé leur aptitude à modifier les images scanographiques et à leur assigner une valeur de densité correspondant à la prothèse. Concernant les techniques de calcul, l’algorithme PB implémenté dans Theraplan a pu être complètement testé à l’aide des résultats du code Monte Carlo Omega/BEAMnrc obtenus dans différents fantômes. L’originalité de l’évaluation qui a été réalisée pour ce TPS a été l’utilisation de fantômes anthropomorphiques qui a permis d’établir et de comparer des distributions de dose dans des géométries réalistes. Pour le TPS Theraplan, la comparaison avec les résultats Monte Carlo a montré que la dose calculée par l’algorithme PB au sein et au voisinage de l’implant n’est pas

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toujours valable. En revanche, au niveau des volumes à traiter, la dose est calculée entre 5 et 10 % près en ne tenant compte que de l’atténuation de la composante primaire du faisceau. Remerciements Les auteurs souhaitent remercier le Cancéropôle Grand-Est (projet OPRAD), la Ligue contre le cancer, la région FrancheComté, la CAPM pour leur soutien matériel et l’équipe AND du LIFC pour sa collaboration. Références [1] Agapito J. Radical radiation therapy for carcinoma of the prostate in patients with a single hip prosthesis: a technical analysis using dose volume histograms. Med Dosim 2001;26:243–50. [2] Buffard E, Gschwind R, Makovicka L, Martin E, Meunier C, David C. Study of the impact of artificial articulations on the dose distribution under medical irradiation. Nucl Instrum Methods Phys Res B 2005;229:78–84. [3] Buffard E, Gschwind R, Makovicka L, David C. Theoretical determination of the dose perturbations caused by a hip prosthesis during a pelvic irradiation. Biomed Tech (Berl) 2005;50:1022–5. [4] Buffard E, Gschwind R, Makovicka L, David C. Monte Carlo calculations of the impact of a hip prosthesis on the dose distribution. Nucl Instrum Methods Phys Res B 2006;251:9–18. [5] Buffard E. Développement de modèles dosimétriques en radiothérapie externe par methods de Monte Carlo. Étude des effets liés à la présence d’implants artificiels. Thèse n◦ 91 de l’université de Franche-Comté 2006. [6] Carolan M, Dao P, Fox C, Metcalfe P. Effect of hip prostheses on radiotherapy dose. Australas Radiol 2000;44:290–5. [7] Ding GX, Yu CW. A study on beams passing through hip prosthesis for pelvic radiation treatment. Int J Radiat Oncol Biol Phys 2001;51:1167–75. [8] Keal PJ, Siebers JV, Jeraj R, Mohan R. Radiotherapy dose calculations in the presence of hip prostheses. Med Dosim 2003;28:107–12. [9] Laub WU, Nüsslin F. Monte Carlo dose calculations in the treatment of a pelvis with implant and comparison with pencil-beam calculations. Med Dosim 2003;28:229–33. [10] Reft C, Alecu R, Das IJ, Gerbi BJ, Keall P, Lief E, et al. Dosimetric considerations for patients with hip prostheses undergoing pelvic irradiation. Report of the AAPM Radiation Therapy Committee Task Group 63. Med Phys 2003;30:1162–82. [11] Rogers DWO, Walters B, Kawrakow I. BEAMnrc Users Manual. NRCC Report PIRS 2004; 509 rev H. [12] Sibata CH, Mota HC, Higgins PD, Gaisser D, Saxton JP, Shin KH. Influence of hip prostheses on high energy photon dose distributions. Int J Radiat Oncol Biol Phys 1990;18:455–61. [13] Walters B, Rogers DWO. DOSXYZnrc users Manual. NRCC Report PIRS 2004; 794 rev A. [14] Wieslander E, Knöös T. Dose perturbation in the presence of metallic implants: treatment planning system versus Monte Carlo simulations. Phys Med Biol 2003;48:3295–305.