Intégration universitaire des écoles de sages-femmes

Intégration universitaire des écoles de sages-femmes

La Revue Sage-Femme (2010) 9, 211—218 PÉDAGOGIE Intégration universitaire des écoles de sages-femmes Integration of schools of midwifery into the un...

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La Revue Sage-Femme (2010) 9, 211—218

PÉDAGOGIE

Intégration universitaire des écoles de sages-femmes Integration of schools of midwifery into the university system M.-C. Leymarie École de sages-femmes, Hôtel-Dieu, 34, avenue Vercingétorix, 63058 Clermont-Ferrand cedex 1, France Disponible sur Internet le 8 aoˆ ut 2010

MOTS CLÉS Sage-femme ; Formation ; LMD, composante ; École universitaire ; Contractualisation

KEYWORDS Midwife; Training; LMD, component; University school,

Résumé Dans le cadre de l’harmonisation européenne des formations de l’enseignement supérieur, la formation des sages-femmes va être intégrée dès la rentrée 2010 avec la mise en place de la licence, première année commune aux études de santé. La loi Hôpital, patients, santé, territoire (HPST) permet sur le plan juridique d’organiser la formation initiale de sagefemme au sein des universités mais n’aborde pas la question de l’intégration des écoles dans les universités. Cette intégration répond à plusieurs objectifs développés dans cet article. La loi liberté et responsabilité des universités laisse le choix aux universités d’intégrer de nouvelles structures selon différentes modalités qui sont détaillées. Enfin, les avantages de l’intégration sous la forme d’une composante de type école universitaire sont nombreux, c’est la structure juridique qui semble la plus adaptée. Mais le transfert des écoles de sages-femmes vers les universités nécessite d’étudier les ressources humaines, architecturales, financières et juridiques qui sont des questions par nature extrêmement nombreuses et complexes. La perspective de transfert des écoles de sages-femmes vers l’université constitue l’ébauche d’un incontournable processus de contractualisation. L’intégration universitaire du cursus complet de maïeutique s’inscrit désormais dans une dynamique européenne et peut se faire grâce à la conservation d’une filière autonome ; la reconnaissance du diplôme d’État au grade de master ; puis la création du doctorat avec l’inscription de la maïeutique comme discipline académique. © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Summary As part of the European harmonisation of higher education, from the beginning of the 2010 new academic year midwifery training is going to be integrated, with the implementation of the licence (bachelor’s degree), first year common to health studies. The Hospital, Patients, Health, Territories (HPST) law enables initial midwifery training to be legally organised within universities but does not tackle the question of integrating the schools of midwifery

Adresse e-mail : [email protected]. 1637-4088/$ — see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.sagf.2010.06.001

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contractualisation

M.-C. Leymarie into the university system. This integration meets several objectives underlined in this article. The law for the freedom and responsibility of universities allows universities the freedom to integrate new structures according to different modalities, which are listed. Finally, integration in the form of a university school type component offers lots of advantages, it is the legal structure, which seems the most suitable. But the transfer of schools of midwifery to the university system requires a study of the human, architectural, financial and legal resources, which are by nature extremely numerous and complex issues. The prospect of transferring schools of midwifery to the university system constitutes the rough outline of an incontrovertible contractualisation process. From now on, integration of the complete maieutics curriculum into the university system falls within the scope of a European dynamic and can be achieved through the preservation of an autonomous strand; recognition of the Masters level diplôme d’État (state diploma); plus the creation of the doctorate with registration of maieutics as an academic discipline. © 2010 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Introduction La naissance est un thème primordial car il touche aux fondements traditionnels de la parentalité, de la famille, et plus largement de la société. En raison de son incidence importante en termes de santé publique, les événements de la période périnatale devraient être considérés comme une priorité de santé. Dans le domaine de la périnatalité, les responsabilités assumées par les sages-femmes sont essentielles et les conséquences de leurs décisions sont très grandes même si elles ne se révèlent que des années plus tard. De ces constats, résulte une obligation de formation qui participe à la fois de la déontologie professionnelle et de l’éthique personnelle. Les exigences de la formation initiale et continue des sages-femmes sont évidentes, en raison également de l’évolution rapide des connaissances, des techniques, des méthodes et de la législation. Les compétences de la sage-femme ainsi que son rôle prépondérant et croissant dans le domaine de la périnatalité, nécessitent une formation initiale et continue de haut niveau.

Bref rappel historique Dans les années 1950, avant de devenir hospitalières, les écoles de sages-femmes étaient départementales. En 1968, la loi Faure sur les universités aurait permis aux écoles de sages-femmes d’être intégrées à l’instar des écoles municipales de chirurgie dentaire pour lesquelles il y a eu la création des unité d’enseignement et de recherche (UER) en odontologie. Mais les enjeux financiers et économiques du fonctionnement des soins périnatals sont souvent restés au second plan. Ces questions ont été peu abordées, car historiquement les sages-femmes, depuis plus d’un siècle, sont restées en retrait par rapport aux autres disciplines médicales. Ainsi la formation s’est construite dans un environnement hospitalier bien que le diplôme soit délivré depuis 1882 par les universités habilitées et plus d’un siècle auparavant, pour les plus anciennes universités comme Montpellier.

Depuis le milieu du xxe siècle, l’approche traditionnelle de la formation des sages-femmes a davantage été vue à travers le prisme de la seule formation hospitalière en relation avec les besoins d’une profession qui exerce majoritairement en mode hospitalier, public ou privé. Or, les conditions d’exercice de la profession apparaissent en pleine évolution avec l’élargissement des compétences sous l’effet d’un environnement où les attentes des usagers et de la société ne sont plus de même nature.

Pourquoi l’intégration universitaire des écoles de sages-femmes aujourd’hui ? L’intégration des études de sage-femme dans une structure universitaire répond à plusieurs objectifs.

La filière sage-femme est la seule filière médicale à ne pas être une filière universitaire L’intégration à l’université permettrait de développer une culture médicale commune pour l’optimisation d’un travail pluridisciplinaire dans le champ de la périnatalité. Cela donnerait la possibilité aux sages-femmes de s’inscrire dans la complémentarité en collaboration avec les gynécologuesobstétriciens, les pédiatres, les médecins généralistes dans le cadre du réseau de périnatalité. Cette notion est d’ailleurs soulignée dans le rapport de J.F. Bach du 21 février 2008 (rapport proposant une réflexion sur la L1 santé) : « La différence de traitement de la maïeutique avec les trois autres filières est due au fait que cette formation n’est pas encore intégrée au cursus universitaire » [1]. Force est de constater qu’il est indispensable aujourd’hui d’ouvrir la possibilité d’intégrer la formation des sagesfemmes à l’université, à l’instar des autres professions médicales et pharmaceutiques. Cette possibilité répond aux enjeux européens de la formation initiale et doit permettre d’organiser l’offre de soins dans une logique de développement des coopérations entre professionnels de santé, favorisée dès la formation initiale.

Intégration universitaire des écoles de sages-femmes Comme pour les autres professions médicales, le système LMD représente une formidable opportunité de repenser notre offre de formation. Pour les sages-femmes, de formation jusqu’ici hospitalière, intégrer la filière universitaire signifie, plus de 40 ans après, se retrouver au côté des autres formations médicales hospitalo-universitaires, et accéder à une juste reconnaissance institutionnelle et sociale. C’est aussi la perspective nouvelle de développer une véritable culture de la recherche.

L’accès à la recherche Afin de pouvoir maintenir le savoir spécifique inhérent à la périnatalité, l’accès à la recherche est une nécessité. Le Code de déontologie des sages-femmes, tout comme celui des médecins, indique que nous devons donner des soins conformes aux données actuelles de la science. Une formation de qualité se base sur la vérité scientifique, la clinique, la recherche, l’actualité, les nouvelles compétences et la créativité. Les sages-femmes franc ¸aises ont la volonté de s’affirmer en tant que professionnels autonomes, ayant une véritable démarche médicale et souhaitent une plus large collaboration avec les autres professionnels de la périnatalité. Par ses exigences tant sur les enseignements que sur les enseignants, par sa mission de recherche et sa démarche de qualité, l’université est une opportunité pour tendre vers la reconnaissance du rôle des sages-femmes en tant qu’acteur de santé. À l’université, la transmission du savoir exige un lien actif entre recherche et enseignement. Le Royal College of Midwives précise qu’une dynamique de recherche doit être impulsée à la formation de sage-femme : elle « apporte un unique et inestimable moyen d’apprendre à s’interroger sur nos pratiques professionnelles relatives à la prise en charge des mères et des nouveau-nés et prépare les étudiants et les sages-femmes à être des professionnels autonomes et réflexifs ». L’intégration de la recherche dans le programme de formation des études de sage-femme offrira aux professionnels l’opportunité de réfléchir et de remettre en question leurs pratiques qui seront alors basées sur des preuves scientifiques. La nécessité d’évaluation des pratiques professionnelles dans le cadre de la certification est d’ailleurs imposée par la Haute Autorité de santé (HAS). Ainsi, un impact favorable sur la prise en charge des femmes et des nouveau-nés et sur l’économie de la santé peut être attendu.

La modernisation de l’enseignement, tant sur le plan des méthodes pédagogiques que sur les contenus pédagogiques L’intégration à l’université permettrait de : • conserver, voire améliorer le suivi de l’acquisition du savoir-faire et du savoir-être professionnel, notamment sous la forme d’un tutorat et d’un accompagnement personnalisé ;

213 • respecter des dispositions européennes et organiser la formation pour offrir aux étudiants plus de temps de travail personnel, plus d’autonomie et la possibilité de valider plusieurs options tout au long du parcours de formation. L’école de sages-femmes apporte son savoir-faire dans la conception de la formation d’une profession et l’université apporte le cadrage nécessaire à la mise en place des procédures. « Le service public de l’enseignement supérieur contribue à l’évolution du niveau scientifique, culturel et professionnel de la nation et des individus qui la composent » [2].

La reconnaissance de l’acquisition clinique lors des stages La formation clinique actuelle permet d’exercer toutes les compétences dévolues à la profession dès l’obtention du diplôme, même si certains domaines nécessitent un approfondissement et une qualification supplémentaire comme pour les médecins (exemple de l’échographie). Ainsi grâce à la formation clinique, le cursus de sage-femme s’intègre totalement dans l’actuelle dynamique professionnalisante de l’université.

La mise en œuvre du processus Licence-Master-Doctorat (LMD) La mise en œuvre du processus LMD initialisé à la Sorbonne (1998), Bologne (1999), Prague (2001), Berlin (2003), qui a pour objectif de constituer un espace commun assurant la mobilité des étudiants, des enseignants et des professionnels [3,4]. L’achèvement en 2010 de cet espace européen de l’enseignement supérieur et de la recherche était un impératif. Si la plupart des universités franc ¸aises ont adapté progressivement mais sûrement l’offre de formation au LMD, les filières relevant du domaine de la santé ont résisté au changement. À ce jour, aucune des formations aux professions dites de santé, hormis la formation infirmière, n’est intégrée dans le LMD. Pour la filière médicale, la discordance entre la durée des cycles universitaires actuels et celle des grades LMD explique partiellement ce retard. Dans le champ des professions paramédicales, l’hétérogénéité des filières et des diplômes délivrés ne facilite pas la mise en place du LMD, même si elle le justifie d’autant mieux. Dans la perspective d’un domaine santé réunissant l’ensemble des formations en sciences de la santé, la création d’un master pour la profession de sage-femme a été adoptée au regard de l’implication des sages-femmes franc ¸aises en matière de périnatalité. L’inscription de la profession de sage-femme dans le cursus LMD constitue une perspective positive, légitime et fructueuse. Dans le continuum de la future L1 santé, l’intégration universitaire de la formation en maïeutique est un point acquis par l’ensemble des partenaires inscrits dans la démarche. Les universités franc ¸aises jouent un rôle fondamental comme les autres universités en Europe, la formation dite « en école professionnelle » ne répond plus à l’indispensable dynamique nationale et européenne pour former des

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sages-femmes qui doivent et devront exercer toutes leurs compétences médicales. Dans l’esprit de la déclaration de Dublin, l’European Midwives Association s’est engagée clairement et avec force pour la poursuite de « l’universitarisation » au sein de l’Union européenne. Elle souligne les avantages attendus au regard des impératifs de santé publique et considère que la profession de sage-femme doit s’inscrire pleinement dans cette dynamique. Cette évolution institutionnelle et pédagogique conduirait à recentrer l’activité des sages-femmes sur la grossesse et la naissance physiologiques, les examens pré- et postnatals et la contraception, celle des gynécologuesobstétriciens sur la pathologie.

• sélection des étudiants admis à suivre les études de sages-femmes à l’issue de la première année des études médicales ; • responsabilité sur l’organisation des contrôles continus de connaissances et aptitudes aux examens ; • désignation du jury ; • délivrance du diplôme final par l’université.

La réforme des études de sages-femmes

L’organisation de la formation à l’université

C’est après dix années d’expérience à la faculté de Grenoble, qu’enfin en 2001, la réforme de la première année des études médicales intégrant l’enseignement des futures sages-femmes a été une des étapes de l’inscription de cette formation dans un cursus universitaire. L’examen classant après la première année du premier cycle des études médicales (PCEM1) devient alors le mode d’entrée dans la totalité des écoles. En fonction de leur rang de classement, les étudiants ont la possibilité d’intégrer le cursus des études de sages-femmes [5]. Le redéploiement des écoles de sages-femmes s’inscrit dans la mise en œuvre de la première année de la licence (L1) santé qui sera effective dès la rentrée 2010 ; la première année de PCEM devient la licence première année en santé, appelée Première année des études de santé (PAES). Les sages-femmes, les médecins, les dentistes et les pharmaciens auront un enseignement commun et un enseignement spécifique pour chaque filière, quatre concours seront organisés afin que chaque étudiant s’oriente en fonction de son choix ou de ses choix, il sera possible, en effet de se présenter aux quatre unités spécifiques [6,7]. À partir de 2011, les années L2 et L3 seront suivies par la formation en master maïeutique (M1 et M2). Le doctorat de troisième cycle est à créer afin de reconnaître la maïeutique comme discipline académique. Les enseignements de la L1 santé sont tous communs, et de nombreuses heures pourront être mutualisées en L2 et L3. Cette structuration au sein de l’université s’inscrit dans un projet de collaboration d’enseignements. La formation en maïeutique concerne tout d’abord les étudiants (auxquels l’université délivre le diplôme de sage-femme) mais également les professionnels de santé qui nous sollicitent dans le cadre de la formation médicale continue réglementairement obligatoire. De plus, les nombreux outils pédagogiques de l’université et les laboratoires de recherche, à disposition des étudiants et des équipes enseignantes des écoles, constitueraient un bénéfice pédagogique considérable pour la formation initiale et continue. Les universités et leurs UFR de médecine interviennent dans le fonctionnement des écoles de sages-femmes sur les domaines suivants : • organisation institutionnelle ; • inscription des étudiants sages-femmes ;

La délivrance du diplôme d’État de sage-femme dépendant de l’enseignement supérieur, nous sommes contraints à l’application des politiques européennes de ce secteur. Les différentes structures de l’enseignement supérieur, concernées par les politiques européennes depuis la conférence de Bologne en 1999 se sont engagées dans un passage progressif à l’architecture européenne LMD.

La loi Hôpital, patients, santé, territoire (HPST) permet sur le plan juridique d’organiser la formation initiale de sage-femme au sein des universités mais ne précise pas la question de l’intégration des écoles dans les universités [8].

L’intégration des écoles à l’université Il semble nécessaire pour réussir le transfert des écoles de sages-femmes à l’université qu’une loi relevant de Code de l’éducation prévoit le processus de l’intégration. Une fois les décisions prises, il serait nécessaire de constituer une commission de concertation regroupant les représentants des universités, des sages-femmes directrices et des collectivités territoriales. Cette commission définirait les modalités de l’intégration, base d’un texte de cadrage national et notamment d’un décret définissant le même statut pour toutes les écoles et les statuts des personnels. Ce cadre national devrait être suffisant dans un contexte d’autonomie renforcée des universités entraînant perte d’unité et d’équité, concurrence et inégalités sur le territoire. Le mode d’intégration devrait être le même pour toutes les écoles, l’autonomie et la pérennité de la formation en dépendent. Mais dans le cadre de la loi Liberté, responsabilité des universités (LRU) il paraît difficile d’imposer aux universités la création d’une nouvelle composante [9]. Seul un statut pour les sages-femmes enseignantes et directrices à l’université peut être créé par voie législative. De même qu’une loi pourrait abroger l’organisation actuelle des études en validant l’intégration universitaire des structures. Les questions juridiques, statutaires, financières et matérielles sont par nature extrêmement nombreuses et complexes. Leur traitement, parfois très imbriqué, si ce n’est paradoxal, est loin d’être aisé, tant les niveaux d’interaction sont variés et multidimensionnels. Un travail préparatoire important est à effectuer concernant : • l’acte juridique d’intégration des écoles ; • la forme statutaire de cette intégration ; • la gestion des personnels sages-femmes de la Fonction publique hospitalière (FPH) ;

Intégration universitaire des écoles de sages-femmes • l’analyse financière ; • la gestion du patrimoine. Il convient à présent d’envisager de cadrer ce nouveau cursus avec l’enseignement supérieur afin d’intégrer notre formation en maïeutique aux universités et d’en assurer le transfert. Pour cette réforme importante et délicate, l’impact financier est important à étudier, de même que le transfert des ressources humaines, pédagogiques. La structure juridique qui sera choisie déterminera en grande partie notre autonomie de filière universitaire.

Les structures pour intégrer l’université L’intégration à l’université peut être envisagée selon différentes modalités. L’université offre plusieurs structures possibles.

Une unité de formation et de recherche (UFR) de maïeutique Cette structure offre une grande autonomie sous la direction d’un conseil d’UFR [10]. Le projet éducatif inclut la recherche. Les études au sein d’une UFR seraient une suite logique à la première année de L1 santé comme pour les dentistes et les médecins. L’UFR de maïeutique pour les sages-femmes permettrait de conserver l’activité hospitalière des étudiants, à l’instar des études médicales comme le précise le Code de l’éducation. Pour les études de médecine, l’organisation est fixée par arrêtés du ministre chargé de l’Enseignement supérieur (ministère de l’Éducation nationale) et du ministre chargé de la Santé (ministère de l’Emploi et de la Solidarité). Cette situation est strictement identique à celles des sages-femmes dont le programme des études est fixé conjointement par ces deux ministères. Les unités de formation et de recherche sont créées par vote du conseil d’administration de l’université après avis du conseil scientifique. Cependant, l’effectif actuel de nos structures ainsi que leur organisation même ne sont guère compatibles avec la création d’une UFR. De plus, la structure se compose d’un département recherche qui nécessite une offre de formation en troisième cycle ainsi que des équipes et laboratoires de recherche ce qui semble précoce à l’heure actuelle pour notre filière.

Un département maïeutique C’est un établissement public de l’enseignement supérieur qui serait sous la tutelle de l’UFR de médecine [10]. Le département est créé par délibération du conseil d’administration de l’UFR, à la majorité des deux tiers de ses membres, sur proposition du conseil scientifique. Cette hypothèse ne permettrait pas un développement optimal et autonome du cursus maïeutique puisqu’il serait placé sous la tutelle de l’UFR de médecine : • l’ensemble des décisions relatives à notre formation devraient être approuvées par le conseil de gestion de la faculté de médecine ;

215 • l’autonomie de formation en maïeutique devient ambiguë car pour se déclarer profession autonome, les étudiants doivent être formés par une équipe enseignante « autonome » et non dirigée par l’UFR de médecine ; • les liens avec l’université seront indirects puisque notre hiérarchie directe sera l’UFR de médecine. Dans ces conditions on peut se demander si les échanges entre différentes formations (médecine > dentaire, médecine > pharmacie) doivent impliquer une nécessaire hiérarchisation ? ; • la représentativité de la filière sage-femme au sein des conseils centraux se fera au travers de l’UFR de médecine. Un étudiant en médecine, du fait du nombre, pourra donc prétendre à une plus grande représentativité, qu’un étudiant sage-femme. Il en va de même a fortiori des enseignants ; • enfin, cette structure n’ayant pas d’existence juridique, elle n’est opposable à personne. Elle ne garantit aucune sécurité puisque les tutelles pourront reprendre leur droit de gestion à tout moment. « Un appareil de formation géré par des professionnels issus du corps considéré est un critère d’autonomisation d’une profession caractérisant les professionnels du corps considéré » [11].

Une école universitaire de maïeutique ou un institut universitaire de maïeutique Ceux-ci sont autonomes au sein des universités. Ils sont créés par décret après avis du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche. « Les instituts et les écoles faisant partie des universités sont administrés par un conseil élu et dirigés par un directeur choisi dans l’une des catégories de personnels qui ont vocation à enseigner dans l’institut ou l’école, sans condition de nationalité. Les directeurs d’école sont nommés par le ministre chargé de l’Enseignement supérieur sur proposition du conseil et les directeurs d’instituts sont élus par le conseil. Leur mandat est de cinq ans renouvelable une fois. Le conseil, dont l’effectif ne peut dépasser 40 membres, comprend de 30 à 50 % de personnalités extérieures ; les personnels d’enseignement et assimilés y sont en nombre au moins égal à celui des autres personnels et des étudiants. Le conseil élit pour un mandat de trois ans, au sein des personnalités extérieures, celui de ses membres qui est appelé à le présider. Le mandat du président est renouvelable. Le conseil définit le programme pédagogique et le programme de recherche de l’institut ou de l’école dans le cadre de la politique de l’établissement dont il fait partie et de la réglementation nationale en vigueur. Il donne son avis sur les contrats dont l’exécution le concerne et soumet au conseil d’administration de l’université. Il est consulté sur les recrutements. Le directeur de l’institut ou de l’école prépare les délibérations du conseil et en assure l’exécution. Il est ordonnateur des recettes et des dépenses. Il a autorité sur l’ensemble des personnels. Aucune affectation ne peut être prononcée si le directeur de l’institut ou de l’école émet un avis défavorable motivé. Les instituts et les écoles disposent, pour tenir compte des exigences de leur développement, de l’autonomie

216 financière. Les ministres compétents peuvent leur affecter directement des crédits et des emplois attribués à l’université » [12]. La structure d’école ou d’institut universitaire est la solution retenue car la plus adaptée au développement et à l’autonomie de la filière universitaire maïeutique. L’institut universitaire est la forme d’intégration universitaire la plus en accord actuellement avec nos demandes car elle nous permet de conserver notre indépendance pédagogique donc professionnelle, de construire des projets, de développer la recherche dans la filière sage-femme et de structurer l’offre de formation continue dans notre filière.

Transfert des écoles à l’université Le transfert des écoles de sages-femmes vers les universités nécessite de prendre en compte plusieurs éléments : • les ressources humaines ; • l’immobilier ; • les aspects financiers ; • les aspects juridiques.

M.-C. Leymarie un établissement de santé dont le financement était assuré par la dotation globale annuelle. Leurs sorts étaient donc extrêmement liés, d’autant qu’il existe une forte imbrication des activités de soins et de formation, tant sur le plan des personnels, des locaux et des équipements. En effet, depuis 1992, l’établissement de santé n’était plus soumis à l’obligation d’élaborer un budget annexe pour les activités de formation des centres qui lui étaient rattachés. Une comptabilité analytique existe au sein des établissements de santé mais cet exercice et les résultats ne sont pas orientés vers les activités d’enseignement. Dans ces conditions, il a été difficile d’identifier et d’évaluer les dépenses réalisées au profit des formations sanitaires. Par ailleurs, ces dernières années, le numerus clausus de l’entrée en formation des sages-femmes a fortement augmenté et il aurait été tout à fait judicieux de procéder à un examen objectif des charges de gestion prenant en compte cet élément. Des ressources supplémentaires sont donc nécessaires en matière de capacité d’accueil ainsi que de cursus de formation et de certification.

L’aspect juridique Les ressources humaines Les sages-femmes enseignantes et directrices dans ce cadre universitaire devront développer les actions de recherche et la publication de leurs travaux. Le temps consacré à la recherche devra être intégré dans la répartition des activités : ainsi une évaluation des effectifs sera nécessaire au regard des activités nouvelles et du temps de travail. Cette position entraînera un changement statutaire nécessitant d’analyser les aspirations de chaque individu susceptible de candidater sur ces nouvelles fonctions, associé au bilan de compétences, la gestion personnalisée permettra de détecter les potentiels.

L’immobilier Depuis la loi du 13 août 2004 dite de « décentralisation », la région a la charge de fonctionnement et d’équipement des établissements publics de formation dans le secteur sanitaire [13]. Les charges de fonctionnement comprennent les dotations aux amortissements ainsi que les charges d’intérêts liées aux remboursements d’emprunts. Ainsi, la règle selon laquelle la compensation est calculée sur la moyenne des dernières années (trois années pour les dépenses de fonctionnement et cinq pour les dépenses d’investissement) a favorisé les régions dotées d’un parc immobilier et d’équipements récents, et a contrario, pénalisé celles dont le parc immobilier nécessitait des investissements et dont les équipements étaient à renouveler. Cette question peut trouver différentes solutions dans le financement qui peut relever d’un plan national, d’une part, et du développement des ressources propres envisageables grâce à la mise en œuvre de la formation médicale continue, d’autre part.

Le financement Les organismes publics des formations sanitaires ne sont pas dotés de la personnalité juridique et sont adossés à

Actuellement les universités et les UFR de médecine interviennent dans le fonctionnement des écoles de sages-femmes sur les bases législatives et réglementaires suivantes : • une formation universitaire de santé définie par le Code de l’éducation et le Code de la santé publique [14] ; • des modalités d’admission en école de sages-femmes définies par le Code de l’éducation [5] ; • le nombre de candidats à admettre et la répartition du nombre de places entre les universités fixés chaque année par un arrêté annuel des ministres chargés de l’enseignement supérieur et de la santé [5,15] ; • le programme des études, l’organisation des examens, la composition du jury, prévue par décrets et arrêtés conjoints du ministre chargé de la Santé et du ministre chargés des Universités [16] ; • la délivrance d’un diplôme national de l’enseignement supérieur, diplôme d’État de sage-femme [17] ; • l’existence d’une convention entre l’école de sagefemme et l’université dans laquelle les étudiants s’inscrivent en vue de leur sélection par le PCEM1 [18]. Il s’agit à présent de dépasser le stade de convention et d’intégrer dans une loi, le transfert des écoles de sage-femme à l’université. Pour cela, il est nécessaire de constituer un statut de la composante universitaire correspondant à la structure juridique qui sera choisie.

Un projet pour les écoles de sages-femmes dans le cadre universitaire : la contractualisation La question des contrats d’objectifs et de moyens (COM) ne saurait être abordée comme un dispositif administratif supplémentaire, elle s’inscrit à la fois dans une logique d’évolution structurelle, une rupture culturelle et un contexte sociétal en pleine mutation, celui d’une société

Intégration universitaire des écoles de sages-femmes post-industrielle, par ailleurs ébranlée dans ses fondements par la crise économique. Les COM représentent une démarche nouvelle pour les structures d’enseignement mais il s’agit d’un fonctionnement qui est déjà répandu dans le secteur sanitaire. La notion de contractualisation est apparue dans le secteur sanitaire avec les ordonnances d’avril 1996, cette notion est devenue pluriannuelle avec les ordonnances de mai 2005. La mise en œuvre déjà bien engagée des procédures de contractualisation interne des services de soins dans les CHU permet de penser qu’il est urgent de concevoir les COM des dispositifs de formation en santé. De plus, l’évolution du contexte des instituts et des écoles hospitalières avec la loi de décentralisation de 2004 donnant la responsabilité du financement des formations sanitaires et sociales aux régions, nous incitera sans doute à développer une démarche contractuelle. Il n’existe à ce jour aucune obligation légale pour les écoles de sages-femmes de s’engager dans un processus formalisé de démarche contractuelle. Cependant, la perspective de transfert des écoles de sages-femmes vers l’université constitue l’ébauche d’un incontournable processus de contractualisation. La contractualisation des écoles de sages-femmes devra structurer la politique de l’établissement dans une logique de projet incluant des objectifs précis et des obligations de résultats. De ce fait, le plan de formation, élément central du projet, doit être conforme au programme national, au référentiel de compétences et aux orientations données ciaprès. Ainsi, sans faire obstacle aux innovations positives que peut proposer chaque école, la contractualisation induira une harmonisation accrue des plans de formation. La traduction des objectifs dans le plan sera un élément majeur d’appréciation lors de l’expertise. La sage-femme dont l’exercice professionnel est spécialisé en périnatalité représente un intervenant efficient dans la politique de santé publique en France visant à la prévention, l’éducation et la restauration de la santé. Ces exigences doivent permettre de conserver à l’exercice de la profession, la maîtrise des compétences nécessaires à une mise en sécurité optimale des patientes, des couples et des nouveau-nés dont les sages-femmes assument la responsabilité. Actuellement, la mission institutionnelle des sagesfemmes enseignantes est d’accompagner les futurs professionnels afin qu’ils soient capables de répondre aux besoins de la population dans le domaine de la périnatalité. L’intégration de la structure de formation en tant que composante universitaire s’avère légitime au regard du haut niveau de compétences et de responsabilités des sagesfemmes. De plus, il est important que les sages-femmes puissent développer une attitude et une pratique de recherche scientifique individuelle et en équipe. La profession doit se donner les moyens de s’adapter à un monde médical en évolution constante ; elle doit aussi prévoir et anticiper les mutations professionnelles qui seront les siennes demain. Voyons à présent, les principes généraux sur lesquels le projet de contrat d’objectifs et de moyens pourrait être élaboré entre une école de sages-femmes (nouvelle composante) et une université.

217 L’élaboration d’un projet doit être l’occasion, pour l’établissement, de faire le point sur sa situation globale, de mesurer ses forces et ses faiblesses éventuelles, la pertinence des actions menées par rapport à l’ensemble des moyens mobilisés, d’établir si les objectifs qui avaient été fixés au moment de l’élaboration du projet précédent ont bien été atteints. Ce projet se nourrit de la démarche d’autoévaluation initiée en interne. Le projet lui-même, partant de cette autoévaluation, doit être l’occasion pour l’établissement, de : • dégager ses grands axes de développement ; • expliciter sa stratégie scientifique et pédagogique, l’articulation entre les forces de recherche et la politique de formation ; • parvenir à une définition claire de ses priorités, en cohérence avec les objectifs fixés au niveau national ; • élaborer en corollaire des outils de pilotage et des indicateurs de mesure des objectifs et de suivi de leur réalisation. La loi organique relative aux lois de finances (Lolf) est entrée en application au 1er janvier 2006 [19]. Elle doit désormais être prise en compte dans le pilotage de chaque établissement et l’élaboration de son projet à moyen terme. La Lolf vise à moderniser la gestion publique et à renouveler la nature et les outils du contrôle parlementaire, en confiant aux gestionnaires publics davantage de liberté en contrepartie d’une plus grande responsabilité. Son principal objectif est de passer d’une culture de moyens à une culture de performance. La gestion publique est donc orientée vers les résultats et la recherche de l’efficacité.

Tableau 1

Programme 150.

Actions Lolf Actions formation 150.01. Formation initiale et continue du baccalauréat à la licence 150.02. Formation initiale et continue de niveau master 150.03. Formation initiale et continue de niveau doctorat Objectifs Répondre aux besoins de qualification supérieure Améliorer la réussite à tous les niveaux de formation Maîtriser l’offre de formation Faire de l’enseignement supérieur un outil performant de formation tout au long de la vie Accroître l’attractivité internationale de l’offre franc ¸aise de formation et son intégration dans le système européen et mondial Lolf : loi organique relative aux lois de finances.

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Le programme 150 La mission recherche et enseignement supérieur comporte 13 programmes dont le programme 150 : formations supérieures et recherche universitaire [20]. C’est sur ce programme 150, et plus particulièrement sur les actions de formation, que nous pouvons baser notre travail de COM (Tableau 1). La politique contractuelle devra intégrer principalement : • le renforcement de la dimension universitaire et professionnelle de la formation des sages-femmes dans une démarche qualité ; • la prise en charge de la formation continue des professionnels et des enseignants ; • le développement de la recherche ; • l’ouverture internationale ; • la modernisation du pilotage de la formation des sagesfemmes.

Conclusion Dans un contexte économique difficile, les entreprises publiques ou privées, cherchent de nouveaux leviers pour diminuer les coûts. Concernant les écoles de sages-femmes, il nous semble important de choisir des indicateurs pertinents afin de les mesurer et de les suivre. Mais tout n’est pas mesurable à un coût raisonnable, les managers (directeurs de composantes) ne doivent pas se contenter des indicateurs de contrôle de gestion mais ils doivent constater ce qui se passe réellement au sein de la structure. Sous l’effet du contexte économique et des pressions budgétaires, il convient de ne pas négliger la dimension pédagogique qui est au carrefour des responsabilités opérationnelles. L’intégration universitaire du cursus complet de maïeutique s’inscrit désormais dans une dynamique européenne et peut se faire grâce aux axes suivants : • la conservation d’une filière autonome ; • la reconnaissance du diplôme d’État au grade de master ; • la création du doctorat avec l’inscription de la maïeutique comme discipline académique ; • l’instauration de passerelles entre les différentes filières. D’une manière plus large, cette évolution institutionnelle et pédagogique pourrait conduire à envisager de nouvelles perspectives pour cette profession : • le recentrage de l’activité des gynécologues-obstétriciens sur la grossesse pathologique et des sages-femmes sur la grossesse physiologique, la prévention gynécologique, les examens prénatal et postnatal et la contraception ; • l’évolution vers un véritable statut médical hospitalier pour les sages-femmes avec l’institutionnalisation de l’autonomie de la profession maïeutique. Actuellement les sages-femmes enseignantes et directrices des écoles appartiennent au personnel de la

M.-C. Leymarie fonction publique hospitalière, un nouveau statut hospitalouniversitaire marquant la bi-appartenance est donc à envisager. Les axes qui devront guider la réflexion sur l’évolution statutaire sont de répondre au besoin d’un fonctionnement plus efficient mais aussi de prendre en compte les différentes facettes de l’exercice professionnel qui doivent laisser du temps pour la recherche, l’enseignement et les soins.

Références [1] Thuillez C. Rapport de la commission sur l’intégration des professions médicales et pharmaceutiques au cursus LMD ; http://bdesfnice.free.fr/Divers/Fichier%20divers/ mobilisation/rapportthuillez.pdf. [2] Code de l’éducation ; http://www.legifrance.gouv.fr/. [3] Construire l’espace européen de l’enseignement supérieur ; http://www.education.gouv.fr/int/espeuropsup. [4] Textes de références pour le thème LMD ; http://www. amue.fr/textesRef/Default.asp. [5] Code de l’éducation — Art. L.631-1 ; http://www.legifrance. gouv.fr/. [6] Loi no 2009-833 du 7 juillet 2009 portant création d’une première année commune aux études de santé et facilitant la réorientation des étudiants ; http://www.legifrance.gouv. fr/. [7] Arrêté du 28 octobre 2009 relatif à la première année des études de santé ; http://www.legifrance.gouv.fr/. [8] Loi no 20009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients à la santé et au territoire. Art. 60 ; http://www.legifrance.gouv.fr/. [9] Loi no 2007-1199 du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités ; http://www.legifrance.gouv.fr/. [10] Code de l’éducation — Art. 713-1 ; http://www.legifrance. gouv.fr/. [11] Carbuccia H, Aymard C, Roux C. « L’identité. Modèles professionnels et identification des élèves infirmières au début du xxe siècle en France ». Sciences—Croisées 2008;no 2—3. [12] Code de l’éducation — Art. 713-9 ; http://www.legifrance. gouv.fr/. [13] Loi no 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales ; http://www.legifrance.gouv.fr/. [14] Code de l’éducation — Art. L.635-1 ; http://www.legifrance. gouv.fr/. [15] Code de la santé publique — Art. D.4151-5 ; http://www. legifrance.gouv.fr/. [16] Code de la santé publique — Art. D.4151-3 ; http://www. legifrance.gouv.fr/. [17] Loi no 84-52 du 26 janvier 1984 sur l’enseignement supérieur ; http://www.legifrance.gouv.fr/. [18] Code de la santé publique — Art. D.4151-1 ; http://www.legifrance.gouv.fr/. [19] Loi no 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances ; http://www.legifrance.gouv.fr/. [20] Projet de loi de finances — Programme 150 ; http://www. performance-publique.gouv.fr/.