KIT et KIT : de la biologie à la clinique

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Synthèse General review Volume 99 • N◦ 2 • février 2012 John Libbey Eurotext © KIT et KIT : de la biologie à la clinique KIT and KIT: from biology ...

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Synthèse General review

Volume 99 • N◦ 2 • février 2012 John Libbey Eurotext

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KIT et KIT : de la biologie à la clinique KIT and KIT: from biology to clinical use Elsa Curtit1 , Laura Mansi1 , Erika Viel1 , Erion Dobi1 , Loïc Chaigneau1 , Thierry Nguyen1 , Xavier Pivot1 , Jean-Yves Blay2 , Elsa Kalbacher1 Article rec¸u le 3 janvier 2010, accepté le 15 mai 2011 Tirés à part : E. Curtit

1 CHU Jean-Minjoz, 3, boulevard Fleming, 25030 Besanc¸on Cedex, France 2 Hôpital Édouard-Herriot, unité Inserm 453, centre Léon-Bérard, 69003 Lyon, France

Pour citer cet article : Curtit E, Mansi L, Viel E, Dobi E, Chaigneau L, Nguyen T, Pivot X, Blay JY, Kalbacher E. KIT et KIT : de la biologie à la clinique. Bull Cancer 2012 ; 99 : 191-7. doi : 10.1684/bdc.2011.1386.

Résumé. Les connaissances scientifiques sur les tumeurs stromales gastro-intestinales (GIST) ont énormément progressé ces dix dernières années. Les mutations activatrices de KIT, bases moléculaires de la transformation oncogénique, ont été identifiées en 1998 par Hirota et al. Le produit du proto-oncogène KIT, la protéine KIT, est un récepteur transmembranaire à activité tyrosine kinase. Les inhibiteurs de tyrosine kinase, à savoir l’imatinib et plus récemment le sunitinib, le nilotinib, le masitinib ou le sorafenib ont complètement modifié le pronostic des GIST. La biologie moléculaire est en train de devenir un outil de routine pour orienter le traitement des GIST. Chez les patients avec des GIST avancées, l’imatinib doit être prescrit jusqu’à progression puis d’autres inhibiteurs de tyrosine kinase ciblant KIT doivent être proposés. En adjuvant, la durée optimale de traitement par imatinib reste incertaine. 

Mots clés : KIT, imatinib, sunitinib, tumeurs stromales gastro-intestinales, récepteur tyrosine kinase

Définition, structure et fonctionnement du récepteur KIT Dans une cellule non tumorale

doi : 10.1684/bdc.2011.1386

Structure et activation physiologique de KIT Le proto-oncogène KIT et la protéine KIT ont tout d’abord été étudiés dans les modèles oncogènes rétroviraux des sarcomes félins. Le produit du gène KIT, localisé sur le bras long du chromosome 4, est un récepteur transmembranaire qui appartient à la grande famille des récepteurs tyrosine kinase [1]. La structure du récepteur KIT est celle d’un récepteur à activité tyrosine kinase classique, à savoir Bull Cancer vol. 99 • N◦ 2 • février 2012

Abstract. Scientific knowledge on gastrointestinal stromal tumors (GIST) has highly progressed over the last 10 years. The molecular bases of oncogenic transformation, KIT activating mutations, were identified in 1998 by Hirota et al. The product of KIT proto-oncogene, KIT protein, is a transmembrane receptor with tyrosine kinase activity. Tyrosine kinase inhibitors targeting these mutated activated kinases, namely imatinib and more recently sunitinib, nilotinib, masitinib or sorafenib, have deeply modified GIST prognosis. Molecular biology in GIST is now becoming a routine tool for treatment selection. In patients with advanced GIST, imatinib should be given until progression, and then, other tyrosine kinase inhibitors targeting KIT should be used. In the adjuvant setting, the optimal duration of imatinib treatment remains unknown.  Key words: KIT, imatinib, sunitinib, gastrointestinal stromal tumors, tyrosine kinase receptor

[2, 3] (figure 1) : – une portion extracellulaire qui permet la fixation du ligand appelé stem cell factor (SCF) ; – une portion transmembranaire ; – une portion intracellulaire avec deux domaines tyrosine kinase (TK) et de multiples sites de phosphorilation.

Conséquences de l’activation physiologique de KIT par son ligand L’activation de KIT par son ligand SCF entraîne une homodimérisation accompagnée d’une modification de la structure tridimensionnelle. Les domaines kinases du récepteur sont activés et provoquent une

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E. Curtit, et al.

Ligand = Stem Cell Factor

Fixation du ligand Domaine extra-cellulaire

Transduction du signal

Domaine transmembranaire

Domaines TK

Prolifération cellulaire

Domaine intracellulaire

Inhibition de l’apoptose

Figure 1. Structure et activation physiologique du récepteur KIT (d’après la figure du diaporama présenté au cours de l’Aerio de J.-Y. Blay, d’après [2]).

transphosphorylation des résidus tyrosines du récepteur. L’ensemble de ces réactions enzymatiques aboutit au recrutement et à la phosphorylation de multiples effecteurs et à la mise en œuvre de voies de transduction en aval. La voie Ras Raf MEK MAKP impliquée dans la survie et la prolifération cellulaire est activée alors que la voie Pi3 Kinase AKT qui contrôle l’apoptose est inhibée.

Dans une cellule tumorale L’activation de KIT est impliquée dans différentes pathologies humaines : les tumeurs stromales gastrointestinales, appelées par leur acronyme « GIST » [4] certains mélanomes acraux, mais également certains lymphomes, certaines leucémies, les mastocytoses.

Mécanismes d’activation anarchique de KIT Plusieurs mécanismes d’activation indépendants du ligand du récepteur KIT sont identifiés : – les mutations activatrices ; – les amplifications (rares) ; – la surexpression du ligand (non démontrée).

Les mutations activatrices de KIT : des mutations diverses, un même résultat En 1998, Hirota et al. [3] identifient des mutations activatrices du gène KIT dans des GIST sporadiques

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et familiales. Elles peuvent concerner différents exons : – exon 11 dans 67,5 % des cas ; – exon 9 dans 11 % des cas ; – exon 18 dans 6,3 % des cas ; – exon 13 dans 0,9 % des cas ; – exon 17 dans 0,5 % des cas ; et toucher différentes portions du récepteur KIT [5-7] : – sa portion extracellulaire avec les domaines de fixation du ligand et de dimérisation ; – sa portion juxta membranaire ; – sa portion intracellulaire avec les domaines d’activation des kinases et la poche à adénosine triphosphate (ATP). De plus la mutation au niveau d’un même exon, par exemple l’exon 11, peut prendre différentes formes : il existe plus de 30 délétions différentes de l’exon 11 [8] (tableau 1). Dans les GIST, certaines localisations s’accompagnent de mutations préférentielles sur un exon : par exemple, les GIST de l’intestin grêle ont une mutation sur l’exon 9 dans 25 % des cas.

Les mutations activatrices de KIT : un événement oncogénique précoce et majeur L’analyse moléculaire a objectivé l’importance des mutations dans la physiopathologie des GIST. Les mutations activatrices de KIT présentent un événement moléculaire oncogénique précoce et essentiel dans Bull Cancer vol. 99 • N◦ 2 • février 2012

KIT et KIT : de la biologie à la clinique Tableau 1. Mutations activatrices de KIT : exons touchés et fréquence [4-8]. Exon muté

Fréquence dans les GIST (%)

Localisation de l’anomalie au niveau du récepteur

Exon 11

67,5

Domaine intracellulaire

Exon 9

11

Domaine juxtamembranaire, portion extracellulaire

Exon 17

0,5

Domaine tyrosine kinase 2, intracellulaire

l’apparition et le développement des GIST [9, 10]. Dans une série d’autopsies, Agaimy et al. [11] retrouvent des tumeurs stromales de l’estomac de 1 à 6 mm chez 22 % des patients décédés, ces lésions sont appelées microGIST. Soixante-dix pour cent de ces tumeurs sont associées à une mutation activatrice de KIT ou de platelet-derived growth factor receptor A (PDGFRA). Dans une série plus petite qui regroupe des GIST de 1 cm ou moins, Corless et al. rapportent 85 % de mutation de KIT [12]. Ces études confirment que l’activation de KIT indépendamment de son ligand est un événement oncogénique essentiel et précoce de la carcinogenèse des GIST mais (heureusement) non suffisant. En 2003, Heinrich et al. décrivent également des mutations de platelet-derived growth factor receptor (PDGFR) dans 5 à 7 % des GIST [13, 14].

capacités d’adhésion et de différenciation de la cellule (figure 2).

Facteurs pronostiques et prédictifs liés aux mutations de KIT Facteurs pronostiques En plus des facteurs pronostiques classiques des GIST (taille, localisation de la tumeur et nombre de mitoses par champ [16]), des données moléculaires ont un rôle pronostique. Le type de mutation de KIT est corrélé à la survie sans progression et globale. Ainsi les patients avec une tumeur présentant une mutation de l’exon 11 sont de meilleur pronostic que ceux avec une autre mutation. Au niveau d’un même exon, certaines mutations sont plus défavorables que d’autres (par exemple la délétion 557 de l’exon 11 est de moins bon pronostic) [17, 18].

Conséquences sur la cellule des mutations activatrices Les différents mécanismes d’activation de KIT impliqués dans la cancérogenèse entraînent [2] : – une indépendance du récepteur vis-à-vis de son ligand ; – des modifications structurelles et fonctionnelles de la cellule : modification de la localisation cellulaire de KIT avec fixation sur l’appareil de Golgi et sur le réticulum endoplasmique. Ce trapping intracellulaire de KIT entraîne une diminution de l’expression de KIT à la surface membranaire de la cellule. Cette internalisation du récepteur explique l’inefficacité des anticorps anti-récepteur KIT [15] ; – une acquisition par la cellule de propriétés oncogéniques par modification des signaux de transduction : augmentation de la survie et du potentiel de prolifération, inhibition de l’apoptose, modification des Bull Cancer vol. 99 • N◦ 2 • février 2012

Activation du récepteur sans fixation du ligand

Transduction du signal

Domaines TK

Prolifération cellulaire

Trapping intracellulaire de KIT

Inhibition de l’apoptose

Figure 2. Activation anarchique du récepteur KIT dans les GIST (mutations activatrices) (d’après la figure du diaporama présenté au cours de l’Aerio de J.-Y. Blay, d’après [2]).

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E. Curtit, et al.

Facteurs prédictifs de la réponse à l’imatinib En 2003, Heinrich et al. [19] rapportent pour la première fois l’impact du type de mutation de KIT sur l’efficacité du traitement. La survie médiane globale chez les patients traités par imatinib est nettement supérieure s’il existe une mutation de l’exon 11. Elle est de 63 mois avec l’exon 11 muté versus 44 mois s’il s’agit d’une mutation de l’exon 9 versus 8 mois en l’absence de mutation. Le taux de réponse est également influencé par le type de mutation : il passe de 68 % (mutation de l’exon 11) à 34 % (mutation de l’exon 9) et à 25 % (pas de mutation) [20]. Dans une méta-analyse regroupant 1640 patients, Van Glabbeke montre que les patients avec une mutation de l’exon 9 bénéficient d’un traitement par imatinib à forte dose (800 mg/j versus 400 mg/j) avec un avantage significatif en survie sans progression et en survie globale [21]. Facteurs prédictifs de la réponse au sunitinib Le génotype tumoral a également une influence sur l’efficacité du traitement par sunitinib. Le bénéfice clinique est maximal chez les patients dont la tumeur présente une mutation de l’exon 9 ou un génotype sauvage (génotypes par ailleurs souvent corrélés à une résistance relative à l’imatinib) [22]. Variation du génotype tumoral L’ensemble de ces facteurs pronostiques et prédictifs est toutefois soumis à une variation du génotype tumoral dans l’espace (selon l’endroit de la tumeur analysé, le génotype peut varier) et dans le temps (acquisition de mutations secondaires au cours du temps) [7, 20].

Conséquences et utilisation en clinique des inhibiteurs de KIT L’ensemble des données biologiques démontre l’intérêt d’inhiber KIT, en particulier dans les GIST. L’analyse de la mutation de KIT peut guider le choix de l’inhibiteur de KIT et de la posologie.

L’imatinib L’imatinib, développé initialement pour cibler la protéine de fusion Bcr-Abl impliquée dans la leucémie myéloïde chronique, inhibe également l’activité tyrosine kinase de KIT, de PDGFR alpha et bêta, d’Abl related genes (ARG) et de receptor for colony stimulating factor 1 (FMS). Son développement reste

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un exemple de succès de l’application clinique d’un concept biologique. Avant l’ère des thérapies ciblées, seule la chimiothérapie était proposée dans les GIST avancées, qui gardaient un pronostic particulièrement sombre. Dans une série de patients traités par doxorubicine, le taux de réponse était inférieur à 5 % [23]. L’imatinib a révolutionné la prise en charge de ces patients. Alors que la survie à un an des GIST avancées était de 35 % avec les traitements par chimiothérapie [24], elle est passée à 90 % avec l’imatinib. Moins d’un an s’est déroulé entre le premier cas rapporté dans le New England Journal of Medicine en Avril 2001 [25] et l’autorisation de l’utilisation du médicament par la Food and Drug Administration. L’utilisation d’un traitement qui cible précisément une anomalie moléculaire de la tumeur, mécanisme différent des cytotoxiques et cytostatiques classiques, apporte trois nouveaux concepts : – efficacité majeure : l’efficacité de la thérapeutique ciblée étant nettement supérieure à celle d’une chimiothérapie standard, il n’y a pas eu besoin d’étude de phase III randomisée entre imatinib et chimiothérapie à base d’anthracyclines pour le démontrer [23, 24]. Le taux de réponse passe de moins de 10 % à plus de 50 %, la survie sans progression médiane de deux mois à 24 mois et la survie globale de 18 mois à 58 mois [26-29] ; – poursuite du traitement le plus longtemps possible : la durée optimale de traitement par imatinib dans les GIST avancées (non opérables ou métastatiques) est évaluée dans l’essai de phase III BFR14 récemment publié [26]. À un an de traitement, 58 patients sont randomisés entre arrêt du traitement (32 patients) et poursuite de l’imatinib à 400 mg/j (26 patients). Quatre-vingt-un pour cent des patients ayant arrêté le traitement progressent rapidement avec une survie médiane sans progression de 18 mois, versus 30 % avec une survie médiane sans progression de 61 mois pour ceux qui le continuent. On retrouve des résultats superposables lorsque l’on arrête à trois ans (Asco 2007) [27]. Ces études cliniques justifient la prescription de l’imatinib dans les GIST avancées jusqu’à progression de la maladie ou toxicité inacceptable, même si elles se basent sur un nombre restreint de patients [30] ; – doublement de dose à progression : deux essais de phase III randomisés réalisés en Europe et en Australie (essai EORTC 62005 [31]) et aux États-Unis (essai S0033 [28]) évaluent l’intérêt de prescrire l’imatinib à Bull Cancer vol. 99 • N◦ 2 • février 2012

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forte dose, soit 800 mg/j versus 400 mg/j. Dans l’essai américain, il n’existe pas d’augmentation significative ni du taux de réponse ni de la survie globale lors de l’utilisation de l’imatinib à forte dose. Dans l’essai européen, en revanche, il existe une augmentation de la survie sans progression dans le bras à 800 mg/j, ce qui est confirmé par la méta-analyse des deux essais [32]. Dans ces essais, les patients dont la maladie progressait sous imatinib à la dose de 400 mg/j passaient dans le bras imatinib 800 mg/j (cross over). Un tiers de ces patients en ont un bénéfice clinique (réponse objective ou stabilisation de la maladie) [33].

Résistance à l’imatinib Que faire en cas de résistance à l’imatinib y compris après doublement de la dose ? Deux stratégies sont licites : inhiber KIT avec d’autres molécules ou agir en aval, notamment en inhibant la voie mTOR. Van den Abbeele et al. [34] ont démontré qu’une partie des cellules tumorales restaient toujours sensibles à l’imatinib. Poursuivre l’inhibition de KIT par imatinib ou par d’autres inhibiteurs de tyrosine kinase est donc possible (figure 3).

Utilisation d’autres inhibiteurs de KIT Les inhibiteurs de KIT sont : – sunitinib : le sunitinib bloque de nombreuses cibles, dont KIT, VEGFR1,2 et 3 (vascular endothelial growth factor receptors), PDGFR [35]. Plusieurs études de phase III comparant le sunitinib à un placebo après échec de l’imatinib, ont montré un avantage en termes de réponse objective et de survie sans progression [3639] ; – nilotinib : le nilotinib a été développé in vitro pour sa capacité à agir sur des formes tumorales résistantes à l’imatinib. Les études de phase I avec le nilotinib seul ou en combinaison avec l’imatinib ont permis d’obtenir des réponses partielles et des stabilisations de la maladie avec une tolérance satisfaisante [40]. Son efficacité après échec à l’imatinib et au sunitib est en cours d’évaluation ; – masitinib : il existe des essais de phase II et III en cours ; – sorafenib : le sorafenib permet également d’inhiber KIT. Nimeri et al. ont démontré dans un essai de phase II l’intérêt du sorafenib dans les maladies résistantes à l’imatinib et au sunitinib [41] ; – inhibiteurs de heat shock protein 90 : ces inhibiteurs permettraient également de contourner les résistances à

Activation du récepteur sans fixation du ligand

IMATINIB

Transduction du signal

Sunitinib Inhibiteurs de tyrosine kinase de KIT

Domaines TK

Prolifération cellulaire

Inhibition de l’apoptose : voie mTOR, AKT Pi3K

Nilotinib

Sorafenib

Inhibition de la voie mTOR

Figure 3. Moyens thérapeutiques pour bloquer l’effet des mutations activatrices de KIT (figure adaptée à partir des figures 1 et 2, E. Curtit). Bull Cancer vol. 99 • N◦ 2 • février 2012

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E. Curtit, et al.

l’imatinib [42]. Cependant le développement clinique de l’IPI504, le premier développé dans cette classe a été interrompu du fait de sa toxicité.

Agir en aval : bloquer la voie mTOR En cas de résistance à l’imatinib, agir au niveau des voies de transduction du signal situées en aval de KIT est un concept séduisant. In vitro, Fletcher et al. ont montré que l’association de RAD001 (inhibiteur de mTOR) et de l’imatinib permet de limiter la prolifération de cellules tumorales résistantes à l’imatinib [43]. Des études cliniques sont en cours.

Traitement adjuvant par imatinib dans les GIST Plusieurs grands essais de phase III menés par l’American College of Surgeon Oncology Group (Acosog), l’European Organisation for Research and Treatment of Cancer (EORTC) et le Scandinavian Sarcoma Group (SSG) sont en cours. Les résultats intermédiaires ont montré l’intérêt de l’imatinib pendant un an pour les GIST de trois centimètres et plus dans l’essai de l’Acosog Z9001, la survie sans progression à 30 mois est de 84,2 % dans le bras avec traitement versus 69,6 % dans le bras placebo (HR = 0,398 (0,2590,610) ; p < 0,000 1) [33, 44]. Cet impact positif sur la survie sans progression a permis à l’imatinib d’avoir l’autorisation de mise sur le marché (AMM) aux ÉtatsUnis et en Europe pour les GIST en situation adjuvante. Toutefois, plusieurs questions restent en suspens [45] pour l’utilisation de l’imatinib en situation adjuvante : – à quels patients faut-il proposer un traitement adjuvant ? Comment éviter de sur-traiter un patient déjà guéri par la chirurgie ? – pour quelles tumeurs et quels génotypes ? Comment éviter de traiter une tumeur non sensible au traitement ? – pour combien de temps ? Un, deux, cinq ans ? À vie ? – avec quelle toxicité ? Il manque des données pour avoir un recul sur le long terme ; – avec quelle efficacité ? Quel est l’impact réel sur la guérison et la survie globale ? Les résultats de l’essai européen, le seul construit pour apporter une réponse sur la survie globale, ne sont encore pas disponibles.

Conclusion KIT est un oncogène parmi les plus étudiés. L’activation de KIT reste un événement précoce et majeur dans l’oncogenèse des GIST, sarcomes digestifs les plus fré-

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quents. La compréhension de ces mécanismes a permis le développement de traitements ciblés. Les caractéristiques moléculaires de la tumeur (en particulier le type d’exon muté) sont de plus en plus utilisées en routine clinique pour évaluer le pronostic et orienter le traitement des GIST. L’inhibition de KIT au long cours, tout d’abord par imatinib à dose standard de 400 mg/j puis à 800 mg/j, et, ensuite par d’autres inhibiteurs de KIT comme le sunitinib est le principe de base du traitement des GIST avancées. Ces nouvelles thérapies ont complètement modifié l’histoire naturelle des GIST et leur pronostic. En 2009, l’imatinib a deux autorisations de mise sur le marché dans le traitement des GIST : le traitement des patients atteints de GIST KIT positives non résécables et/ou métastatiques et le traitement adjuvant des patients adultes qui présentent un risque significatif de rechute après résection d’une GIST KIT positive.  Conflits d’intérêts : L. Chaigneau est investigateur principal des essais thérapeutiques AB 07001 et AB 04030 ; E. Kalbacher est co-investigatrice de ces mêmes essais ; X. Pivot est consultant avec honoraires auprès des laboratoires Roche, GlaxoSmithKline, Novartis et Sanofi-Aventis ; J.-Y. Blay est investigateur principal et co-investigateur d’essais cliniques de Novartis, Pfizer, GSK, Bayer et Roche en lien avec le texte publié.

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