Journal de Chirurgie (2009) 146, 281–284
Technique chirurgicale
La cicatrisation dirigée par pression négative dans les pertes de substance musculocutanées étendues : principes et techniques C. Trésallet, B. Royer, F. Menegaux Service de chirurgie générale, digestive et endocrinienne, hôpital de La Pitié-Salpêtrière - Paris. Correspondance : F. Menegaux, service de chirurgie générale, digestive et endocrinienne, hôpital de La Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital, F 75013 Paris. e-mail :
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Mots-clés : Divers. Perte de substance. Cicatrisation dirigée. VAC.
Introduction La prise en charge des plaies complexes avec perte de substance cutanéo-musculaires est grandement facilitée par l’emploi d’un système à pression négative qui permet de favoriser et d’accélérer la cicatrisation en : – évitant la stagnation de sérosités et en diminuant ainsi la prolifération bactérienne localement indésirable ; – stimulant la formation du tissu de granulation par la majoration de l’influx capillaire local (néo-angiogénèse majorée de 200 %) et par l’augmentation du nombre de mitoses. Ces effets seraient liés au stress mécanique induit par l’aspiration ; – rapprochant les berges de la plaie et en en diminuant la surface ; – préparant un support humide non œdématié propice à une repousse dermique ou à une greffe cutanée. La diffusion mondiale de la technique a été initiée par Argenta et al. en 1997 [1, 2]. Cette équipe est à l’origine du développement d’un système commercialisé utilisant une éponge en mousse de polyuréthane au sein de laquelle est appliquée une pression négative par l’intermédiaire d’une unité centrale régulant l’importance de la dépression (Vacuum Assisted Closure ; VAC® Therapy™). Ce système ne doit être appliqué qu’après détersion et parage chirurgical de la plaie à appareiller, l’opération étant à renouveler si nécessaire entre chaque pansement.
Contre-indications Le dispositif aspiratif ne doit pas être apposé au contact direct d’organes (viscères abdominaux, vaisseaux) non protégés par un support d’interface (plaque de Vicryl®, pansement à base d’hydrocolloïdes), d’une ostéomyélite non traitée, de tissus nécrotiques non parés ou en présence de tissus cancéreux ou d’une fistule digestive non dirigée. L’application du système semble s’avérer dangereuse en cas d’anastomose digestive sous-jacente non protégée [3] et ne peut pas être appliqué sur des tissus nécrotiques ou dévitalisés.
doi:10.1016/j.jchir.2009.07.007
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C. Trésallet et al.
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Matériel
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Découpe de la mousse
Les systèmes de pansements à pression négative associent divers accessoires permettant l’application d’une pression négative sur la plaie : un pansement en mousse de polyuréthane à pores ouverts (réticulés), hydrophobe (repoussant les sécrétions), et des films plastiques adhésifs permettant d’obtenir l’étanchéité au niveau de la plaie, l’unité centrale régulant la dépression qui est reliée à la mousse par l’intermédiaire d’une tubulure.
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Débridement de la plaie
La prise en charge est initialement chirurgicale pour débrider la plaie, la rendre facilement appareillable et pour s’assurer de la bonne évolution cicatricielle. La première pose peut se faire sous anesthésie générale, au bloc opératoire. Le patient peut par la suite être suivi en hospitalisation à domicile avec des consultations chirurgicales régulières. De nouveaux dispositifs portatifs, en particulier l’unité centrale d’aspiration, ont été développés, ce qui permet de changer le pansement à domicile par des infirmières formées, sous le contrôle et la surveillance du médecin traitant.
La mousse polyuréthane est découpée au bistouri à lame froide ou à l’aide de ciseaux aux dimensions et à la forme approximative de la plaie à recouvrir. Selon la profondeur de la plaie, on utilise des mousses d’épaisseurs différentes. Il est aussi possible de superposer plusieurs plaques de mousse afin de combler la cavité. Il faut éviter de rentrer en force la mousse dans la plaie ce qui pourrait générer des douleurs. La malléabilité de ces mousses permet de les adapter à de nombreux types et formes de plaies.
Cicatrisation dirigée par pression négative dans les pertes de substance musculocutanées
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Étanchéité du dispositif
Avant d’appliquer une pression négative sur la mousse, il est nécessaire de rendre l’ensemble du système « mousseplaie » étanche à la pression atmosphérique. Un ou plusieurs films plastiques adhésifs sont appliqués en tension sur la mousse en la débordant sur la peau adjacente d’au moins 5 cm. La mise en place de ces films est parfois difficile, car elle dépend de l’anatomie des lésions à traiter (périnée, région péri-anale, face…).
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Raccord de la mousse au générateur
Un orifice circulaire est découpé sur le plastique, d’environ 1 à 2 cm de diamètre, au milieu de la mousse afin de la rendre accessible à l’aspiration. La tubulure reliée à l’unité centrale est fixée sur la mousse à cet endroit par l’intermédiaire d’une collerette adhésive à laquelle elle est solidarisée.
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a b
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Mise en route du système
La tubulure est raccordée à un réservoir intégré dans le générateur (a). Une dépression est générée au sein de la mousse que l’on doit voir se rétracter et durcir (b). La pression négative utilisée varie entre 20 et 200 mmHg et est appliqué de façon intermittente ou continue. En chirurgie générale, les pressions sous-atmosphériques les plus couramment utilisées oscillent entre 100 et 150 mmHg. Le pansement est changé systématiquement tous les 2 à 3 jours sauf en cas de plaie infectée où la fréquence peut être augmentée (toutes les 12 à 24 heures). La succion ne doit pas s’arrêter plus de 2 h par jour au risque de favoriser une infection. Avant le retrait de la mousse pour le pansement suivant, il est nécessaire d’arrêter la succion au moins une heure et parfois d’humidifier la plaie et la mousse par l’injection de sérum physiologique par la tubulure. En effet, le retrait de la mousse peut être douloureux ou provoquer des saignements de la cavité traitée, en raison de phénomènes d’accolement de la mousse aux tissus environnants.
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Arrêt du système
L’objectif est atteint lorsque la plaie est complètement fermée ou lorsqu’une fermeture chirurgicale sur tissus sains est envisageable (fermeture directe ou greffe de peau). La réépithélialisation est considérablement simplifiée lorsqu’on constate un tissu de granulation homogène et bien vascularisé, affleurant les berges de la plaie. La poursuite de la cicatrisation peut alors être réalisée par une cicatrisation dirigée à l’aide de pansements gras ou colloïdes.
Références 1. Durmishi Y, Gervaz P, Bühler L, et al. Le Vacuum Assisted Closure : utilité dans le traitement des plaies abdomino-périnéales complexes. J Chir 2008;144:209-213. 2. Arigon JP, Chapuis O, Sarrazin E, Pons F, Bouix A, Jancovici R. Prise en charge des abdomens ouverts par la thérapie Vacuum Assisted Closure (VAC®) : évaluation rétrospective de 22 malades. J Chir 2008;145:252-261. 3. Rao M, Burke D, Finan PJ, Sagar PM. The use of vacuum-assisted closure of abdominal wounds: a word of caution. Colorectal Dis 2007;9:266-268.