Bull Cancer 2015; 102: 245–255
La connaissance du statut de BRCA1 devrait-elle avoir un impact sur le choix d'un cytotoxique dans le cancer du sein ? Revue de la littérature
Article original
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Océane Clergue 1,2, Natalie Jones 2, Nicolas Sévenet 2, Nathalie Quenel-Tueux 1, Marc Debled 1
Reçu le 8 octobre 2014 Accepté le 15 janvier 2015 Disponible sur internet le : 27 février 2015
1. Institut Bergonié, département d'oncologie médicale, 33076 Bordeaux cedex, France 2. Institut Bergonié, département de bio-pathologie, laboratoire de génétique moléculaire, unité d'oncogénétique, 33076 Bordeaux cedex, France
Correspondance : Marc Debled, Institut Bergonié, département d'oncologie médicale, 33076 Bordeaux cedex, France.
[email protected]
Keywords Breast cancer Chemotherapy BRCA1 Literature review Neoadjuvant Metastatic
Résumé Les mutations de BRCA1 ou BRCA2 représentent 40 % des mutations identifiées de prédisposition héréditaire à un cancer. Les protéines codées par ces gènes sont impliquées dans les voies de réparation de l'ADN, principalement la voie de la recombinaison homologue. De ce fait, la perte de fonctionnalité de BRCA1 ou BRCA2 pourrait modifier la sensibilité des tumeurs à certaines chimiothérapies. Cette revue de la littérature vise à répondre à la question : la connaissance d'une mutation BRCA1 doit-elle modifier le choix des traitements systémiques ? L'analyse de la littérature a permis de sélectionner 14 articles et 4 abstracts portant sur 12 analyses rétrospectives et 6 études prospectives, en phase néoadjuvante pour 11 études et métastatiques pour 7 études. Les protocoles de type CMF et à base de taxanes semblent peu efficaces, tandis que l'activité des anthracyclines apparaît peu modifiée par le statut de BRCA1. Ces tumeurs semblent très sensibles aux sels de platine que ce soit en phase néoadjuvante ou métastatique. L'olaparib, un inihibiteur de PARP, n'a été évalué que dans une étude en phase métastatique avec des résultats prometteurs. La présence d'une mutation de BRCA1 peut conduire à une adaptation des thérapeutiques en phase métastatique. L'identification rapide des mutations BRCA1 et l'adaptation du traitement selon ce statut en phase (néo-)adjuvante sera probablement réalisée dans les années à venir.
Summary Should knowledge of BRCA1 status impact the choice of chemotherapy in metastatic breast cancer: A review BRCA1 and BRCA2 mutations account for 40% of cancer predisposition gene mutations identified in the current French diagnostic setting. The proteins encoded by these genes are implicated in
tome 102 > n83 > mars 2015 http://dx.doi.org/10.1016/j.bulcan.2015.01.010 © 2015 Société Française du Cancer. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
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Mots clés Cancer du sein Chimiothérapie BRCA1 Revue de la littérature Néoadjuvant Métastatique
Article original
O. Clergue, N. Jones, N. Sévenet, N. Quenel-Tueux, M. Debled
DNA repair pathways. As a result, loss of BRCA1 or BRCA2 function may modify chemo-sensitivity. This literature review aims to determine whether BRCA1 mutation status should influence the choice of systemic treatment in breast cancer. Fourteen articles and four abstracts from 12 retrospective analyses and 6 prospective studies were identified in the literature review. CMF-type and taxane-based protocols appear to be insufficiently effective, while anthracycline activity does not seem to be affected by BRCA1 status. BRCA1-mutated tumours appear to be highly sensitive to platinum, in both the neoadjuvant and metastatic setting. Olaparib, a PARP inhibitor, has only been evaluated in one study in metastatic patients, with promising results. The presence of a BRCA1 mutation can lead to an adaptation of therapies in the metastatic stages in breast cancer. The rapid identification of BRCA1 mutations and the adaptation of treatment according to this status in the (neo)adjuvant setting is likely to become a reality in the coming years.
Introduction
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Le nombre annuel de consultations d'oncogénétique a, en France, presque triplé en dix ans, dépassant 40 000 en 2012. Environ 60 000 tests génétiques sont réalisés chaque année. Au total, depuis 2003, le dispositif national d'oncogénétique a permis d'identifier 37 601 personnes porteuses d'une mutation les prédisposant héréditairement à un cancer, dont 5107 pour la seule année 2012 [1]. Les mutations génétiques les plus fréquemment documentées portent sur les gènes BRCA1 et BRCA2, représentant 40 % des cas, soit environ 15 000 personnes [1]. Ces mutations, qui prédisposent à un risque élevé de cancer du sein et/ou de l'ovaire à un âge jeune, sont présentes chez une femme sur 400 dans la population générale (en excluant les Ashkénazes), chez une femme atteinte de cancer du sein sur 50, chez une femme sur 10 en cas de cancer du sein avant 40 ans, et une sur huit en cas de cancer de l'ovaire [2]. Alors que des recommandations très étayées ont été posées concernant l'identification des femmes à haut risque, les modalités du dépistage et les propositions de prévention [3], la prise en charge thérapeutique de ces patientes est bien moins codifiée. Pourtant, selon les chiffres cités, un cancer du sein est diagnostiqué chez près de 1000 patientes porteuses d'une mutation de BRCA1 ou BRCA2 chaque année. La fonctionnalité de BRCA1 et BRCA2 pourrait modifier la sensibilité à certaines chimiothérapies, les protéines produites par les gènes BRCA1 et BRCA2 étant impliquées dans les voies de réparation des cassures double brin de l'ADN par recombinaison homologue [4–6]. De ce fait, nous nous proposons de revoir les données cliniques qui pourraient conduire à modifier les standards des traitements systémiques en cas de mutation de BRCA1 identifiée. Bien que moins fréquentes que les mutations de BRCA2 (2 mutations de BRCA1 pour 3 mutation de BRCA2), nous avons limité l'analyse aux seules mutations de BRCA1 (BRCA1 m). Les fonctions cellulaires de BRCA1 et BRCA2 ne sont pas strictement identiques, et il n'est pas sûr que l'impact des mutations soit le même dans la sensibilité aux agents
cytotoxiques. Les patientes susceptibles de porter une mutation de BRCA1 sont également plus faciles à identifier, les tableaux cliniques évoquant une telle mutation étant plus caractéristiques (femme jeune atteinte d'une tumeur triple négatif). Surtout, les tumeurs du sein survenant dans un contexte de mutation de BRCA1 documentée sont dans 60 à 70 % des cas de phénotype triple négatif, tumeurs très agressives et rapidement associées à une chimiorésistance. Cette étude analysera les traitements administrés en situation néoadjuvante et métastatique qui permettent d'évaluer directement l'impact des différentes chimiothérapies. En phase adjuvante, seules les études randomisées ont été recherchées, les cohortes ne permettant pas d'évaluer l'impact du traitement par rapport au pronostic de la maladie.
Matériel et méthodes La recherche bibliographique a été réalisée via la base de données Pubmed à partir de l'équation suivante : « "breast'' [TITLE] AND ("BRCA1''[TITLE] OR "BRCA1/2''[TITLE] OR "BRCA''[TITLE]) AND "chemotherapy''[All Fields] NOT "ovarian''[TITLE] » La dernière recherche a été effectuée le 24/09/2014. Seuls les articles écrits en anglais et en français ont été analysés. Les résumés des meetings de l'Annual Conference on Hereditary Cancers (ACHC), du congrès San Antonio Breast Symposium (SABCS) et l'American Society of Clinical Oncology (ASCO) présentés entre 2011 et 2014 ont été analysés. Tous les résumés d'intérêt ont été sélectionnés parmi ceux contenant le mot « BRCA1 ». Les case report n'ont pas été retenus. Les articles ont été analysés en deux groupes distincts selon le niveau de preuve : les analyses rétrospectives, d'une part, les études prospectives, d'autre part. Les informations suivantes ont été considérées : type d'étude, critères de sélection des patientes, nombre de patientes inclues, type de chimiothérapie, résultat principal. Pour les analyses rétrospectives, la réalisation d'un appariement avec la population témoin et les facteurs retenus pour cet ajustement (en particulier la classification
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immuno-histologique et le grade), ainsi que la réalisation ou non d'analyses multifactorielles ont été analysés.
Résultats L'équation prédéfinie a permis de sélectionner 100 articles publiés entre 2000 et 2014. Parmi ces articles, 79 ne correspondaient finalement pas à notre sujet, 7 ont été exclus (trois revues, trois case report et un éditorial). Finalement, 14 articles ont été retenus [7–20], auxquels ont été joints cinq résumés (correspondant à quatre études), deux du congrès de San Antonio 2012 [21,22] et trois de l'ASCO 2014 [23–25] (figure 1). Onze analyses ont été effectuées en phase néoadjuvante, sept en phase métastatique. Il n'a pas été trouvé d'étude randomisée en phase adjuvante.
Les analyses rétrospectives [7–15,21–24] Les neuf analyses rétrospectives publiées sous forme d'article [7–15] sont pour la plupart relativement anciennes, deux seulement depuis 2011 (tableau I). Quatre résumés présentés au cours des deux dernières années ont été adjoints [21–24]. Dans neuf de ces études, il s'agissait d'une comparaison rétrospective de la réponse à une chimiothérapie donnée entre des patientes indemnes de mutation identifiée et des patientes porteuses d'une mutation BRCA1 (une étude) ou d'une mutation BRCA1 ou BRCA2 (huit études). Dans une étude, la réponse a été comparée entre les patientes porteuses d'une mutation BRCA1 et celles porteuses d'une mutation BRCA2 [11]. Il a également été rapporté une analyse comparative de différentes chimiothérapies administrées chez des patientes mutées pour BRCA1
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La connaissance du statut de BRCA1 devrait-elle avoir un impact sur le choix d'un cytotoxique dans le cancer du sein ? Revue de la littérature
Figure 1
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Analyse bibliographique
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O. Clergue, N. Jones, N. Sévenet, N. Quenel-Tueux, M. Debled
TABLEAU I Les analyses rétrospectives Auteur principal
Type d'étude
Nombre de patientes
Chimiothérapie
Résultat principal
Arun (2011) [7]
Néoadiuvant : comparaison des réponses thérapeutiques des BRCA1/2 m vs non mutées
57 BRCA1 m 23 BRCA2 m 237 non mutées
Anthracyclines FEC (n = 40) Paclitaxel ou docétaxel (n = 16) Antracyclines + taxanes (n = 261)
pCR : 46 % des BRCA1 m, 13 % des BRCA2 et 22 % en absence de mutation (p < 0,001) En analyse multivariée, le statut BRCA1 est un facteur prédictif de la réponse thérapeutique (OR = 3,16 ; IC95 % = [1,55 – 6,42] ; p < 0,002)
Chappuis (2002) [8]
Néoadiuvant : comparaison des réponses thérapeutiques des BRCA1/2 m vs non mutées
7 BRCA1 m 4 BRCA2 m 27 non mutées
CT à base d'anthracyclines 1 patiente traitée par taxantes seules (paclitaxel)
cCR : 10/11 BRCA1/2 m (93 %) contre 8/27 (30 %) en absence de mutation, (p = 0,0009)
Telli (2012) [21]
Néoadiuvant : comparaison des réponses thérapeutiques des BRCA1/2 m vs non mutées
77 tumeurs triple négatif : 12 BRCA1 m 4 BRCA2 m 1 BRCA1/2 m 60 non mutées
CT carboplatinegemcitabine, iniparib
Réponse histologique complète majeure : 16/19 (84 %) des BRCA1/2 m vs 48 % en absence de mutation (p = 0,005)
Fourquet (2009) [9]
Néoadjuvant : comparaison des réponses thérapeutiques des BRCA1/2 m vs non mutées
93 tumeurs avec ATCD familiaux : 28 BRCA1 m 9 BRCA2 m 54 non mutées
CT à base d'anthracyclines AC/FAC/ FEC (n = 74 tumeurs) Autres tumeurs traitées par RT exclusive
cCR : 15/39 tumeurs BRCA1/2 m (46 %) contre 7/54 (17 %) en absence de mutation (p = 0,008)
Sharma (2014) [23]
Néoadjuvant : comparaison des réponses thérapeutiques des BRCA1/2 m vs non mutées
42 tumeurs triple négatif : 11 BRCA1 m 3 BRCA2 m 28 non mutées
Carboplatine + docétaxel
pCR : 86 % (12/14) chez les BRCA1/2 m vs 50 % (14/28) en absence de mutation (p = 0,04)
Byrski (2008) [10]
Néoadjuvant : comparaison des réponses thérapeutiques des BRCA1/2 m vs non mutées
44 BRCA1 m 41 non mutées
CMF (n = 19) AC/FAC (n = 37) Anthra-docétaxel (n = 27) Anthra-vino (n = 2)
9/15 BRCA1 m traitées par taxanes ne présentant pas de réponse thérapeutique, alors que 12/12 patientes non mutées traitées par taxanes présentent une réponse partielle 19/19 BRCA1 m traitées par anthracyclines ont une réponse partielle ou complète, vs 16/ 18 non mutées. Réponse partielle chez 10/10 BRCA1 m traitées par CMF vs 9/9 chez non mutées Le taux de réponse moindre au traitement néoadjuvant chez les BRCA1 m est limité au sousgroupe traité par taxanes
Hubert (2009) [11]
Néoadiuvant : comparaison des réponses thérapeutiques des BRCA1 m vs BRCA2 m
15 BRCA1 m 7 BRCA2 m
CT à base d'anthracyclines AC/FAC/FEC
Meilleure cCR et pCR chez BRCA1 m comparées avec BRCA2 m, différence non significative (respectivement 40 % vs 14,3 % pour cCR et 26,6 % vs 0 % pour pCR, p = 0,26)
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TABLEAU I (Suite). Auteur principal
Type d'étude
Nombre de patientes
Chimiothérapie
Résultat principal
Byrski (2010) [12]
Néoadjuvant : comparaison des réponses thérapeutiques entre différentes classes de CT néoajuvantes administrées chez des BRCA1 m
102 BRCA1 m < 50 ans
CMF (n = 14) AT (n = 25) AC/FAC (n = 51) Cisplatine (n = 12)
pCR : CMF : 7 % ; AT : 8 % ; AC/FAC : 22 % ; Cisplatine : 83 %
Kriege (2012) [13]
Métastatique : comparaison des réponses thérapeutiques des BRCA1/2 m vs non mutées
35 BRCA1 m 13 BRCA2 m 95 non mutées
Taxanes
Réponses objectives : 23 % si BRCA1 m, 38 % en absence de mutation, 84 % si BRCA2 m (p < 001)
Kriege (2009) [14]
Métastatique : comparaison de la réponse thérapeutique des BRCA1/2 m vs non mutées
93 BRCA1 m probables (51 prouvées) 28 BRCA2 m 121 sporadiques
Anthracycline (n = 147) CMF/CMF-like (n = 68) Cisplatine (n = 2) Taxanes (n = 21) Autres (n = 4)
Réponses à l'anthracycline BRCA2 m vs non mutées : RO : 89 % vs 50 % (p = 0,001) ; PFS : HR = 0,64 (p = 0,04) ; survie : HR = 0,53 (p = 0,005) BRCA1 m vs non mutées : RO : 66 % vs 50 % (p = 0,07) ; PFS : HR = 0,79 (p = 0,14) ; survie : HR = 0,87 (p = NS)
Isakoff (2012) [22]
Métastatique : comparaison de la réponse thérapeutique des BRCA1/2 m vs non mutées
76 tumeurs triple négatif : 9 BRCA1 m 2 BRCA2 m 65 non mutées
Cisplatine 75 mg/m2 ou carboplatine AUC 6
Réponse objective : 55 % si BRCA1/2 m vs 26 % en absence de mutation (p = 0,05). Pas de différence en survie sans progression Cinq des six patientes en rémission prolongée ont une mutation BRCA
Wysocki (2008) [15]
Métastatique : analyse de la fréquence des BRCA1 m parmi une cohorte de cancer du sein métastatique résistante aux taxanes
19 tumeurs résistantes au taxanes
Taxanes
Fréquence élevée de BRCA1 m dans le groupe de patientes résistantes aux taxanes (5/ 19 soit 26,3 %) Fréquence élevée de BRCA1 m dans le sous-groupe de tumeurs triple négatif (5/7, soit 71 %, p < 0,002)
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AT : doxorubicine + docétaxel ; ATCD : antécédent ; BRCA1 m : patientes avec mutations constitutionnelles de BRCA1 ; BRCA2 m : patientes avec mutations constitutionnelles de BRCA2 ; BRCA1/2 m : patientes avec mutations constitutionnelles de BRCA1 ou BRCA2 ; cCR : réponse complète clinique ; CMF : cyclophophamide + méthotrexate + fluorouracile ; CT : chimiothérapie ; FEC : épirubine + cyclophosphamide + fluorouracile ; HR : Hazard Ratio ; pCR : taux de réponse complète histologique ; PFS : survie sans progression ; RO : taux de réponse objective.
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(n = 3 études), anthracycline-cyclophosphamide (n = 7), anthracycline-taxane (n = 4), anthracycline-vinorelbine (n = 1), taxane seul (n = 4), taxane-platine (n = 1), platine seul (n = 3), platineiniparib (n = 1). L'étoposide et la capécitabine n'ont jamais été utilisées, la vinorelbine n'a été utilisée que dans une étude, chez deux patientes et n'est donc pas évaluable. Parmi les neuf études comparant la réponse à une chimiothérapie donnée entre des patientes indemnes de mutation identifiée et des patientes porteuses d'une mutation de BRCA1, trois sont d'analyse difficile, en l'absence d'appariement sur les récepteurs hormonaux et d'analyse des résultats selon ce
249
[12], ainsi que la documentation de mutation de BRCA1 chez 18 patientes métastatiques dont la tumeur présentait une résistance aux taxanes [15]. Neuf analyses ont été réalisées en situation néoadjuvante [7–12,21,24], quatre en phase métastatique [13–15,22,23], totalisant 390 patientes porteuses d'une mutation caractérisée de BRCA1. Seulement trois comportaient au moins 50 patientes mutées [7,12,14]. Différents schémas de chimiothérapie ont été utilisés dans cinq études, un seul traitement était évalué dans sept études. D'une façon globale, les schémas suivants ont été utilisés : CMF
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O. Clergue, N. Jones, N. Sévenet, N. Quenel-Tueux, M. Debled
facteur [8–10,14]. D'autres analyses ont inclus un trop faible nombre ( 15) de tumeurs de femmes mutées [8,11,15,21–24]. Seules trois analyses ont inclus au moins 50 patientes BRCA1 m et ont analysé les résultats en distinguant les tumeurs RH ou triple négatif [7,12,14]. Seules ces études seront détaillées. En situation néoadjuvante, Byrski a revu les résultats observés avec différentes chimiothérapies utilisées entre 1996 et 2008 chez 102 patientes BRCA1 m âgées de moins de 50 ans [12]. Un taux global de réponse complète histologique (pCR) de 24 % a été observé, variable selon les protocoles utilisés : taux faible avec le CMF (1/14 : 7 %) ou l'association anthracyclinedocétaxel (2/25 : 8 %), intermédiaire avec l'AC ou le FAC (11/ 51 : 22 %), beaucoup plus élevé avec le cisplatine (10/12 : 83 %). Ces résultats peuvent être discutés en raison d'une absence de relecture actualisée des prélèvements chirurgicaux. L'expérience néoadjuvante du MD Anderson [7] suggère que les tumeurs BRCA1 m traitées par l'association anthracyclinetaxane (81 % des 57 patientes) ou par une association anthracycline-cyclophosphamide (FEC, FAC ou AC : 16 %) seraient plus sensibles que les tumeurs sporadiques ou BRCA2 m, avec un taux de pCR de 46 % pour les tumeurs BRCA1 m contre 13 % pour les tumeurs BRCA2 m et 22 % pour les tumeurs sans mutation identifiée. Surtout, le statut BRCA1 apparaît comme un facteur associé à l'obtention d'une pCR en analyse multifactorielle (OR = 3,16 ; 95 %IC 1,55–6,42 ; p = 0,002), ainsi que la négativité des récepteurs des estrogènes ou l'utilisation du trastuzumab. Avec un suivi médian de 3,2 ans, il n'est cependant observé aucune différence pour le risque de rechute. En phase métastatique, l'étude réalisée par Kriege [13] confirme que les tumeurs BRCA1 m RH seraient peu sensibles aux taxanes (docétaxel dans 80 % des cas, paclitaxel dans 20 % des cas) : 20 % de réponse objective vs 42 % en l'absence de mutation ; 70 % de progression vs 26 %, p = 0,003. À l'inverse, il n'est pas observé de différence selon le statut génétique pour les tumeurs RH+ ou encore pour les tumeurs BRCA2 m. Des résultats similaires ont été observés pour la survie sans progression : en cas de tumeur RH , les patientes BRCA1 m traitées par taxane ont une survie sans progression significativement plus courte que les patientes sans mutation identifiées (1,8 m vs 3,8 m ; p < 0,004). L'analyse n'a pas été réalisée selon la ligne de traitement, les patientes ayant pu recevoir le taxane en première (23 % des BRCA1 m, 16 % des sporadiques), deuxième (54 % et 64 %) ou troisième ligne (23 et 20 %).
Les études prospectives
250
Cinq études prospectives ont été publiées ces cinq dernières années [16–20] : deux en phase néoadjuvante, publiées par la même équipe, portant initialement sur 10 patientes mutées pour BRCA1 [16], puis sur 107 patientes [17], et trois études en phase métastatique comportant 33, 26 et 20 patientes mutées [18–20] (tableau II). Dans ces trois études, l'objectif prinicpal était le taux de réponse objective.
À ces études prospectives non randomisées de phase II seront adjoints les résultats communiqués cette année à l'ASCO portant sur une analyse secondaire initialement planifiée de l'étude GEPARSIXTO testant en phase II randomisée le carboplatine en situation néoadjuvante pour des tumeurs de phénotype triple négatif [25]. Suite à de très bons résultats observés dans des analyses rétrospectives, Byrsky et al. ont évalué le cisplatine en monothérapie à la dose de 75 mg/m2 en phase néoadjuvante, d'une part, en phase métastatique, d'autre part, chez des patientes présentant toutes une mutation de BRCA1. En phase néoadjuvante, dans une phase pilote [16], neuf des dix patientes ont bénéficié d'une rémission complète histologique. Cette cohorte vient de faire l'objet d'une nouvelle publication, portant cette fois-ci sur 107 patientes [17]. Après 4 cures, le taux de pCR a été de 61 %, un peu inférieur au taux observé dans la phase pilote. Soulignons que neuf des 16 tumeurs RH+ ont pu également être mises en pCR. Aucune donnée concernant le taux de rechute n'est disponible. L'étude réalisée en phase métastatique publiée par le même auteur [18] a concerné des patientes à différents stades évolutifs et 9 des 20 patientes ont été traitées en troisième ou quatrième ligne de chimiothérapie. Quatorze des 20 tumeurs étaient de phénotype triple négatif ; sept ont été classées comme étant des carcinomes médullaires. Une réponse objective a pu être enregistrée dans 80 % des cas (dont 45 % de réponse complète), sans différence évidente selon l'expression des récepteurs hormonaux ou la ligne thérapeutique. La survie médiane avant progression était de 12 mois, la survie médiane de 30 mois et, pour les patientes en réponse complète, le délai médian avant rechute était de 17 mois. Les résultats préliminaires (car non publiés) concernant les sels de platine ont été présentés par Von Minckwitz à l'ASCO cette année [25]. Cette étude de phase II comportait une double randomisation, l'une portant sur le bevacizumab, l'autre sur le carboplatine (hebdomadaire à la dose AUC2) chez des patientes traitées en phase néoadjuvante par une association de paclitaxel et de doxorubicine liposomale hebdomadaires pour une tumeur triple négatif. Dans cette analyse secondaire initialement planifiée, l'apport du carboplatine a été analysé selon que les patientes présentaient une mutation génétique BRCA1, BRCA2 ou RAD50/51 (n = 44), une histoire familiale de cancer du sein ou de l'ovaire sans mutation retrouvée (n = 79), ou un cancer du sein de survenue sporadique (n = 171). Les résultats (tableau III) montrent un bénéfice du carboplatine pour le taux de réponse complète histologique beaucoup plus apparent en cas de contexte familial (+ 27 %) et en cas de mutation BRCA (+23 %). Un autre agent alkylant, la trabectédine, a fait l'objet d'une étude de phase II multicentrique [19]. Parmi les 40 patientes analysées, 26 présentaient une mutation de BRCA1, 13 une mutation de BRCA2 et une présentait une mutation sur les deux
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TABLEAU II Les études prospectives Auteur principal
Type d'étude
Nombre de patientes
Chimiothérapie
Résultat principal
Byrski (2009) [14]
Néoadiuvant multicentrique : objectif I : réponse complète histologique
10 BRCA1 m
Cisplatine (75 mg/ m2 toutes les 3 semaines, 4 cycles)
pCR = 90 % (9/10)
Byrski (2014) [17]
Néoadiuvant multicentrique : objectif I : réponse complète histologique
107 BRCA1 m
Cisplatine (75 mg/m2 toutes les 3 semaines, 4 cycles)
pCR = 61 % (65/107)
Von minckwitz (2014) [25]
Néoadjuvant : comparaison des réponses thérapeutiques des BRCA1/ 2 m vs non mutées
295 tumeurs triple négatif : 35 BRCA1 m 3 BRCA2 m 78 cancers du sein familiaux 179 cancers sporadiques sans mutation
Anthracycline-paclitaxel carboplatine
pCR : 57,9 % si mutation BRCA vs 44,9 % en cas d'ATCD familiaux sans mutation identifiée, vs 40 % en l'absence de mutation ou ATCD L'adjonction de carboplatine augmente le taux de pCR de 11 % (OR 1,6) en absence d'antécédents familiaux, de 27 % (OR 3,0) en cas d'antécédents familiaux, et 23 % (OR 2,6) en cas de mutation BRCA
Byrski (2012) [18]
Métastatique : multicentrique : objectif I : taux de réponse objective (RECIST)
20 BRCA1 m
Cisplatine
RO = 80 % (RC = 45 %) Délai médian avant progression : 12 mois (compris entre 1 et 36)
Tutt (2010) [20]
Métastatique : multicentrique : objectif I : taux de réponse objective (RECIST)
54 patientes, dont : 33 BRCA1 m 20 BRCA2 m et 1 BRCA1/2 m
Olaparib (iPARP) Cohorte 1 : 800 mg/j (n = 27) Cohorte 2 : 200 mg/j (n = 27)
Cohorte 1 : RO = 41 % (IC95 % = 25–59) Délai médian avant progression : 5,7 mois (IC95 % = 4,6–7,4) Cohorte 2 : RO = 22 % (IC95 % = 11–41) Délai médian avant progression : 3,8 mois (IC95 % = 1,9–5,5)
Delaloge (2014) [19]
Métastatique : multicentrique : objectif I : taux de réponse objective (RECIST)
40 patientes dont : 26 BRCA1 m 13 BRCA2 m et 1 BRCA1/2 m
Trabectédine
RO = 17 %, (IC95 % = 7–34) Délai médian avant progression : 3,9 mois (IC95 % = 1,6–5,5)
Article original
La connaissance du statut de BRCA1 devrait-elle avoir un impact sur le choix d'un cytotoxique dans le cancer du sein ? Revue de la littérature
BRCA1 m : patientes avec mutations constitutionnelles de BRCA1 ; BRCA2 m : patientes avec mutations constitutionnelles de BRCA2 ; BRCA1/2 m : patientes avec mutations constitutionnelles de BRCA1 ou BRCA2 ; pCR : taux de réponse complète histologique ; ATCD : antécédent ; OR : odds ratio ; RO : taux de réponse objective ; RC : taux de réponse complète ; cCR : réponse complète clinique ; CMF : cyclophophamide + Methotrexate + fluorouracile ; AT : doxorubicine + docétaxel ; AC (FAC) : doxorubicine + cyclophosphamide (fluorouracil + doxorubicine + cyclophosphamide) ; FEC : épirubine + cyclophosphamide + fluorouracile ; iPARP : inhibiteur de poly(ADP-ribose) polymerase ; CT : chimiothérapie ; RT : radiothérapie.
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n'ont pu être confirmées, et six patientes ont eu une stabilisation prolongée. Finalement, la survie sans progression médiane était de 3,9 mois (1,6–5,5) et la survie sans progression à six mois a été de 27 % (8,9–44,9). Les résultats portant spécifiquement sur les patientes BRCA1 m n'ont pas été communiqués.
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gènes. Le nombre de tumeurs triple négatif n'est pas précisé, 36 % des tumeurs étant RH+. Bien qu'administrée en phase très avancée (nombre médian de chimiothérapies antérieures : 4, allant jusqu'à 10), six des 35 patientes analysables ont présenté une réponse partielle, soit un taux de réponse objective de 17 % (95 % : 7–34). Deux autres réponses partielles
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TABLEAU III Étude GEPARSIXTO : résultats préliminaires PCR (sans/avec carboplatine)
Différence absolue
Odds ratio
p
Cancer sporadique, pas de mutation (n = 171)
34,5 %/46,0 %
+11,5 %
1,61
0,13
Contexte familial Pas de mutation (n = 79)
30,8 %/57,5 %
+26,7 %
3,04
0,02
Mutation génétique (n = 44)
43,5 %/66,7 %
+23,2 %
2,60
0,13
La quatrième et dernière étude de phase II concerne l'olaparib, un inhibiteur de l'enzyme PARP1, donné également en monothérapie, chez 54 patientes dont 33 porteuses d'une mutation de BRCA1 [20]. Cette étude a comporté deux cohortes successives de patientes, l'une traitée à la dose de 400 mg, deux fois par jour, l'autre à la dose de 100 mg deux fois par jour. Au total, 33 patientes incluses avaient une mutation BRCA1, 20 patientes une mutation BRCA2 et une patiente une mutation sur chacun des deux gènes. Cinquante-sept pour cent des tumeurs étaient de phénotype triple négatif. Les patientes avaient pu recevoir jusqu'à cinq lignes de chimiothérapie au préalable (médiane : trois). Un taux de réponse objective (objectif principal de l'étude) de 34 % a été enregistré, 42 % dans la cohorte à 800 mg/j (n = 27), 25 % dans la cohorte à 200 mg/jour (n = 27), pour un taux de bénéfice clinique (réponse objective et stabilisation prolongée) de 52 % et 26 % respectivement. Des réponses ont pu être observées même chez des patientes ayant précédemment reçu de multiples traitements. La durée médiane de survie sans progression était de 5,7 et 3,8 mois respectivement. Les données de survie ne sont pas disponibles. Peu d'informations sont disponibles pour la seule population de patientes BRCA1 m : un taux de réponse objective de 35 % dont une seule réponse complète parmi les 34 réponses analysables.
Analyse selon les différents types de médicaments Le cyclophosphamide En absence d'anthracycline, le cyclophophamide a toujours été utilisé en association au méthotrexate et au fluorouracile dans le protocole CMF, sans préciser si le médicament était utilisé par voie orale, sur plusieurs jours, ou en intraveineux en bolus une fois toutes les trois semaines [10,12,14]. Ce schéma thérapeutique s'avère peu efficace en phase néoadjuvante [10,12], et l'existence d'une mutation BRCA1 et/ou BRCA2 ne semble pas prédictive d'une plus grande efficacité en première ligne métastatique [14].
252
Les anthracyclines Les patientes mutées traitées par anthracyclines semblent tirer plus de bénéfice de leur chimiothérapie néoadjuvante que les patientes non mutées [7], avec des réponses intermédiaires,
représentées des taux de pCR qui se situent entre 22 et 46 % [7,8,10–12]. En situation métastatique, si les mutations de BRCA2 semblent prédire une plus grande efficacité des protocoles à base d'anthracyclines (tant pour la réponse, que pour le délai avant progression, ou la survie), ces résultats ne semblent pas être observés en cas de mutation de BRCA1 : la réponse, le délai avant progression et la survie sont tout à fait identiques aux tumeurs sporadiques [14]. Les taxanes Les patientes BRCA1 m ne semblent pas tirer de bénéfices particuliers des taxanes en phase néoadjuvante. Un traitement par taxane en monothérapie n'est administré que chez un sousgroupe de patientes dans une seule étude, sans conclusion possible ce sous-groupe n'ayant pas été analysé séparément [7]. Les résultats d'association aux anthracyclines sont tout à fait comparables aux schémas de type AC, FAC ou FEC. Dans l'étude GEPARSIXTO, l'association docétaxel-anthracycline liposomale hebdomadaires pourrait être discrètement plus efficace chez les patientes mutées par rapport aux tumeurs sporadiques (tableau III) [25]. À l'inverse, le taux de réponse complète histologique apparaît très faible dans les deux études polonaises [10,12]. En situation métastatique, les deux analyses réalisées, bien que de méthodologie tout à fait différentes, montrent une faible efficacité des taxanes (le docétaxel a été très majoritairement utilisé) [14,15]. Les sels de platine Toutes les études utilisant un sel de platine que ce soit en monothérapie ou en association [16–18,21,24,25] montrent en phase néoadjuvante une grande efficacité chez les patientes BRCA1 m, avec des taux de pCR supérieurs à 60 %. Ces résultats, observés en particulier dans trois études prospectives, sont confortés par ceux observés en phase métastatique dans une autre étude prospective [18], avec des réponses très prolongées, inhabituelles pour des tumeurs de grade III triple négatif. Ces durées prolongées de réponse n'ont cependant pas été confirmées dans une autre analyse chez des patientes traitées pour une tumeur triple négatif en première ou deuxième ligne : bien que le taux de réponse était très significativement plus
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élevé en cas de mutation BRCA1 ou 2, il n'a pas été noté de différence pour la survie sans progression ou la meilleure survie globale [22,23]. Autres médicaments Les résultats des études de phase II portant sur l'olaparib et la trabectédine ont été précédemment détaillés.
Discussion Alors que le nombre de patientes atteintes d'un cancer du sein avec une mutation identifiée de BRCA1 a fortement augmenté ces dernières années, cette revue de la littérature montre le très faible nombre de patientes incluses dans les études testant la chimiosensibilité (644 réparties dans 16 études réalisées sur une période de plus de 10 ans) et une absence d'augmentation du nombre de publications sur le sujet au cours des dernières années. La difficulté pour réaliser des études chez ces patientes est claire. Les patientes ayant une mutation génétique connue entrent dans des programmes de dépistage renforcé et les diagnostics sont le plus souvent réalisés à des stades où les tumeurs sont accessibles à une chirurgie conservatrice d'emblée ; dans les cas plus évolués, lorsqu'une chimiothérapie néoadjuvante est décidée, celle-ci est initiée rapidement, sans attendre le diagnostic de la mutation, qui sera posé plusieurs
semaines plus tard, ne permettant que des analyses rétrospectives. Le nombre de patientes métastatiques avec mutation de BRCA1 identifiée est également faible. Ainsi, à l'Institut Bergonié, sur un total de 264 patientes ayant eu un diagnostic de mutation BRCA1 ou BRCA2 suite à un cancer du sein ou de l'ovaire depuis 1993, 28 seulement ont présenté une évolution métastatique d'un cancer du sein. Si l'on se restreint aux cancers BRCA1 m, ceux-ci ne représentent que 1 % des cancers du sein métastatiques pris en charge dans cet institut depuis 2007 (14/1314). La puissance limitée de ces études, mais également les particularités des situations cliniques des tumeurs BRCA1 m limitent les conclusions qui peuvent être établies, surtout concernant la question soulevée par le plus grand nombre des analyses rétrospectives : les tumeurs mutées pour BRCA1 présentent-elles un profil de chimiosensibilité différent des tumeurs sporadiques ? Répondre à cette question impose de tenir compte du type moléculaire de ces tumeurs, paramètre essentiel de l'efficacité des traitements en néoadjuvant [26] (tableau IV), la distribution des tumeurs BRCA1 m étant très différente des tumeurs sporadiques : index mitotique constamment élevé, tumeurs triple négatif beaucoup plus fréquentes (60 à 70 % des cas contre 10 % pour l'ensemble des cancers du sein), rareté des tumeurs HER2 positives.
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La connaissance du statut de BRCA1 devrait-elle avoir un impact sur le choix d'un cytotoxique dans le cancer du sein ? Revue de la littérature
TABLEAU IV Taux de réponse histologique en phase néoadjuvante Auteur
Nombre
RHS
Triple neg
Type de mutation
Taux de RC pathol.
Byrski (2009) [16]
10
100 %
NA
BRCA1
Cisplatine : 90 % (9/10)
Byrski (2014) [17]
107
80 %
77 %
BRCA1
Cisplatine : 61 %
Arun (2011) [7]
57
73 %
64 %
BRCA1
Anthra : 44 % (4/9) Anthra-taxane : 46 % (21/46)
Byrski (2010) [12]
102
85 %
NA
BRCA1
CMF : 7 % (1/14) AC/FAC : 22 % (11/51) Anthra-Docétaxel : 8 % (2/25) Cisplatine : 83 % (10/12)
Fourquet (2009) [9]
28
77 %
NA
BRCA1/2
AC/FAC/FEC : 45 % (15/33)1
Von Minckwitz (2014) [24]
35
100 %
100 %
BRCA1 : 35 ; BRCA2 : 6 ; RAD50/51 : 3
Anthra-paclitaxel : 43,5 % (10/23) Id + Carboplatine : 66,7 % (14/21)
Byrski (2008) [10]
44
91 %
50 %
BRCA1
CMF : 0 (0/10) AC/FAC : 21 % (4/19) Anthra-taxane : 0 (0/15)
Chappuis (2002) [8]
9
NA
NA
BRCA1/2
Anthra : 44 % (4/9)
Hubert (2009) [11]
15
80 %
73 %
BRCA1
FAC : 26,6 % (4/15)2
Telli (2012) [21]
12
100 %
100 %
BRCA1
Carbo-gemcit-iniparib : 84 % (10/12)2
Sharma (2014) [23]
14
100 %
100 %
BRCA1/2
Carbo-docétaxel : 86 % (12/14)
2
réponse clinique complète. réponse histologique complète et subcomplète.
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1
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En accord avec des données précliniques [5,27], cette synthèse suggère une faible efficacité du CMF ou des taxanes utilisés en monothérapie. L'activité des anthracyclines semble peu modifiée par la caractérisation d'une mutation de BRCA1. Les sels de platine, qui ne font pas partie de l'arsenal thérapeutique habituellement utilisé dans les cancers du sein, apparaissent particulièrement actifs contre les tumeurs survenant en cas de mutation BRCA1, que ce soit en phase néoadjuvante ou métastatique. Le niveau de preuve limité de ces études (absence de phase III randomisée dédiée à ce contexte génétique) ne peut effacer l'importance du bénéfice observé, et les résultats obtenus nous semblent suffisants pour proposer rapidement en phase métastatique l'utilisation d'un sel de platine chez une patiente mutée. « Platinum chemotherapy for BRCA1-related breast cancer : do we need more evidence? » écrivait ainsi en titre Nick Turner et Andrew Tutt dès 2012 [28]. Les données semblent insuffisantes pour leur utilisation en phase (néo-) adjuvante et la réalisation d'études randomisées pour cette population doit être une priorité. Bien que le carboplatine soit d'utilisation plus aisée, différentes analyses suggèrent une supériorité du cisplatine sur la carboplatine [23,29,30], comme ceci est observé pour d'autres localisations tumorales. Bien que prometteurs, les résultats portant sur les inhibiteurs de PARP demeurent très préliminaires. Outre l'étude citée [20], deux autres études ont évalué l'olaparib en phase métastatique, mais n'ont pas été reprises ici, aucune patiente ayant une mutation BRCA1 n'ayant été inclus dans la première [31], uniquement quatre dans la seconde [32]. Enfin, une étude de phase I/Ib utilisant l'olaparib en monothérapie a concerné spécifiquement des patientes atteintes d'un cancer du sein ou de l'ovaire dans
un contexte de mutation BRCA1 ou 2 : six patientes sur les huit traitées pour un cancer du sein ont eu une réponse objective (durée médiane de 10 mois), et une réponse complète durant 23 mois a même été observée [33]. Au-delà de l'impact dans la prévention ou le diagnostic précoce d'une deuxième pathologie tumorale, les résultats observés et les études qui reprennent pour évaluer les inhibiteurs de PARP dans ce contexte génétique (étude BRAVO évaluant le niraparib dans un contexte localement avancé ou métastatique ; étude OLYMPIA comparant l'olaparib et un placebo en adjuvant chez les patientes à haut risque de rechute ; étude NEO OLYMPIA en phase néoadjuvante) sont aujourd'hui en faveur d'une recherche précoce de mutation BRCA dans le cancer du sein, lorsque l'histoire familiale suggère la présence d'une telle mutation, ou chez les femmes jeunes atteintes d'un cancer triple négatif. Les modalités de cette caractérisation génétique sont désormais au premier plan, tant dans sa partie technique pour un résultat rapide, que dans l'organisation du rendu du fait de l'impact personnel et familial de l'identification d'une telle mutation génétique. Et l'avenir proche ne s'arrête pas là, puisque d'autres tumeurs présentent des anomalies des voies de réparation de dommage à l'ADN en l'absence de mutations identifiées de BRCA1 ou BRCA2, les tumeurs dîtes « BRCAness » [34]. Ces tumeurs semblent avoir un profil de chimiosensibilité identique aux tumeurs BRCA1, et devront donc très certainement être également identifiées en utilisant d'autres techniques de biologie moléculaire [35–37]. Déclaration d'intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d'intérêts en relation avec cet article.
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