Ann Cardiol Angéiol 2001 ; 50 : 82-9 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S0003-3928(01)00005-1/FLA
Article original
La maladie de Buerger ou thromboangéite oblitérante P. Léger ∗ , A. Pathak, L. Hajji, C. Faivre-Carrere, H. Boccalon Service de médecine vasculaire, CHU Rangueil, 1, avenue Jean Poulhès, 31403 Toulouse cedex 4, France (Accepté le 22 décembre 2000) Résumé La maladie de Buerger ou thromboangéite oblitérante (TAO) est une maladie inflammatoire non athéromateuse qui touche les artères et les veines de moyen et petit calibre. On la retrouve dans toutes les populations, mais elle est plus fréquente en Europe de l’Est au Moyen Orient, en Asie et en Asie du Sud-Est. L’homme jeune, fumeur est le plus touché. L’incidence de la maladie est en augmentation chez la femme. Les causes de la maladie ne sont pas encore connues. Le fait le plus remarquable est la relation entre la TAO et le Tabac. Le diagnostic est le plus souvent tardif devant une ischémie digitale des membres. Des examens complémentaires guident le diagnostic et la prise en charge mais aucun n’est spécifique en dehors de l’anatomopathologie. L’évolution de l’atteinte se fait vers la gangrène distale avec, dans 5 à 10 % des cas une amputation. La prostacycline a démontré son efficacité. La chirurgie de revascularisation est difficile mais parfois réalisable. La sympathectomie, la stimulation médullaire doivent être proposées. La survie des patients n’est pas en jeu, le pronostic est surtout fonctionnel. L’arrêt définitif du tabac est l’élément le plus important du traitement. 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS ischémie / maladie de Buerger / Tabac / thromboangéite oblitérante Summary – The Buerger’s disease or thromboangiitis obliterants. The Buerger’s disease or thromboangiitis obliterants (TAO) is a non atheromatous inflammatory disease which alters medium and small-sized arteries and veins. It can be found world-wide, but it is more frequent in Eastern Europe, Middle East, Asia and Southeast Asia. Young men and smokers are the most affected. The incidence of this disease is increasing among women. The cause of this disease is unknown yet. The most striking fact is the relationship between TAO and tobacco. The diagnostic is most often late in front of a digital leg ischemia. Complementary exams help to its diagnostic and management but none of them are specific out of the pathology. The affection is evolving towards distal gangrene with amputation in 5 to 10% of cases. Prostacyclin demonstrated its efficiency. Revascularization surgery is difficult but sometimes possible. Sympathectomy, medular stimulation must be suggested. The patient survival is not at stake and the prognosis is above all functional. The most important element in the treatment is stop smoking definitively. 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS Buerger’ disease / ischemia / thromboangiitis obliterans / tobacco
∗ Correspondance et tirés à part.
La maladie de Buerger ou thromboangéite oblitérante
La thromboangéite oblitérante (TAO) a été décrite pour la première fois par Von Winiwarter en 1879 [1]. En 1908 Léo Buerger en fait une description anatomique et clinique précise [2]. L’existence de la TAO est remise en question par Wessler en 1960 [3] mais depuis, de nombreuses publications ont confirmé l’existence de l’entité décrite par Buerger. La maladie de Buerger est décrite partout dans le monde. Elle est fréquemment retrouvée dans les pays à forte consommation de tabac. La prévalence de la TAO est élevée au Moyen Orient, en Asie, en Asie du Sud-Est et en Europe de l’Est [4 – 11], alors qu’elle est plus faible en Europe de l’Ouest et en Amérique du Nord. En Inde la TAO représente 70 % des atteintes vasculaires périphériques, ce qui en fait la maladie vasculaire la plus fréquente [12]. L’incidence de la maladie a tendance à diminuer dans de nombreux pays [13 – 17] sans que les raisons en soient connues. La baisse de la consommation tabagique et l’utilisation de critères diagnostiques plus stricts participent partiellement à cette diminution. Au Japon le nombre de nouveaux cas de TAO diagnostiqués entre 1984 et 1993 est estimé à 22 % de ceux diagnostiqués pendant la période de 1974 à 1983 [15, 18]. Aux États-Unis, l’incidence de la TAO a diminué de 104/100 000 en 1947 à 10/100 000 en 1986 [14]. En Pologne, la prévalence de la TAO est estimée à 8,1/100 000 habitants [17], en Amérique du nord entre 6,5 et 50 cas/100 000 habitants [19]. Lors de la première description de la maladie faite par Léo Buerger la prévalence est importante dans la population juive [2]. Ces résultats sont en fait faussés, les patients ayant été recrutés dans un hôpital Newyorkais très fréquenté par des patients juifs. Plusieurs travaux ont bien démontré l’absence de prédisposition religieuse ou ethnique à la TAO [9, 20, 21]. Dans la description de Buerger [2] la maladie touche exclusivement l’homme, avec moins de 2 % de femmes atteintes dans les premières séries publiées [11]. Des publications récentes retrouvent une augmentation de la prévalence de la TAO chez la femme avec 11 % pour Lie [11], 19 % pour Mills [22], 23 % pour Olin [9], 9,3 % pour Sasaki [12], 14,5 % pour Dehaine Bamberger [23]. La modification du sex-ratio dans la distribution de la maladie peut être expliquée par l’augmentation du tabagisme de la femme jeune [9, 14, 24].
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PATHOGÉNIE L’étiologie de la TAO n’est pas encore connue. Le tabac joue un rôle majeur dans la survenue de la TAO mais son mode d’action n’est pas encore élucidé. La plus grande majorité des patients atteints de TAO sont fumeurs même si quelques cas ont été décrits chez les non fumeurs [12, 25, 26] et chez des patients ayant stoppé leur intoxication tabagique [27]. La gravité de l’évolution est très liée à la persistance de l’intoxication tabagique [9, 28]. Olin [9] montre que 40 % des patients qui ont continué à fumer ont subi une amputation des doigts ou des orteils contre 5 % dans le groupe qui a stoppé son intoxication. Le tabagisme passif n’aurait pas de rôle dans la survenue de la TAO mais pourrait être responsable de l’aggravation de la maladie lorsqu’elle existe déjà [20, 28]. Le type de tabac ou le mode de consommation (cigarettes, cigarettes roulées, tabac à priser, fumer sans inhalation) a été peu étudié. Toutefois la prévalence de la TAO est très importante en INDE où la consommation de tabac pur roulé (Bidis) est très élevée [29]. Il existe de rares cas chez les fumeurs qui n’inhalent pas la fumée [30] ou qui chiquent le tabac [31]. Les facteurs génétiques ont été évoqués dans l’étiopathogénie de la TAO. La répartition géographique avec la prévalence élevée en Europe de l’Est et l’Asie sont un des arguments indirects de cette prédisposition génétique. Certains auteurs ont retrouvé des associations entre TAO et phénotype HLA : HLA-B52 [32] et HLA-B54 [33], HLA-A9 et HLAB5 [34], HLA-B8 [35], HLA-DR4 [36]. D’autres études ne retrouvent pas de relation entre le système HLA et la TAO [22, 37]. Ces différents résultats peuvent s’expliquer par les méthodes diagnostiques employées et la variation des phénotypes HLA au sein des différentes populations étudiées. L’origine auto-immune a été évoquée dès 1933. Harkavy suggère le rôle de l’hypersensibilité à des antigènes du tabac pour expliquer la survenue d’une TAO [38]. D’autres arguments sont décrits. Une réactivité plus importante des leucocytes de sujets atteints de TAO au collagène de type I et III que celle des leucocytes de patients atteints d’athérosclérose [39]. Un taux d’anticorps anticellules endothéliales plus élevé a été retrouvé chez des patients porteurs d’une TAO active ou en rémission par rapport à des sujets témoins [40].
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Des anomalies de la vasodilatation endothélium dépendantes ont été récemment retrouvées chez des patients porteur d’une TAO [41]. Alors que la vasodilatation non endothélium dépendante reste normale. Des anomalies de la coagulation sont décrites dans certains cas de TAO sans que la relation de cause à effet soit démontrée : des anticorps antiphospholipides [42 – 45], une hyperhomocystéinémie [43, 46, 47], un déficit en protéine S [48], une hyperagrégabilité des plaquettes [49], un taux élevé de lipoprotéines a [50, 51], l’association d’une mutation du facteur V Leiden et d’une mutation de la prothrombine 20-210 [52], des anomalies de la fibrinolyse [53] ou de la réponse aux DDAVP [54].
ANATOMOPATHOLOGIE La TAO est une maladie inflammatoire et thrombosante sans athérosclérose [55, 56]. L’aspect histologique varie avec le stade évolutif de la maladie ; les artères et les veines sont toutes deux atteintes. Au stade avancé de la maladie, l’histologie est beaucoup moins spécifique que lors de la phase aiguë. Les prélèvements sont parfois difficiles à obtenir au stade aigu avec ischémie critique du membre. L’analyse est souvent effectuée sur les pièces d’amputation ou sur des biopsies de thromboses veineuses superficielles. Les membres inférieurs et supérieurs sont les plus touchés ; mais des lésions ont été décrites au niveau des artères digestives, cérébrales, coronaires, pulmonaires, aortiques, ou iliaques [57 – 62]. Les lésions touchent les artères de moyen calibre, l’atteinte est segmentaire et plurifocale au niveau veineux, les veines superficielles sont le plus souvent atteintes, il existe toutefois parfois des lésions des veines profondes. Au stade aigu, on retrouve un aspect de panvascularite avec inflammation de l’adventice, de la média et de l’intima. L’aspect pathognomonique de la TAO est un thrombus inflammatoire associé à des micro-abcès, des cellules géantes et des polynucléaires [14, 63]. Lors de la phase intermédiaire il y a une organisation progressive du thrombus artériel et veineux avec persistance d’un infiltrat cellulaire inflammatoire [25]. Au stade chronique on note une recanalisation et une néovascularisation importante de la média.
CLINIQUE La TAO survient habituellement chez les hommes jeunes de moins de 40 ans, fumeurs, ne présentant pas d’autres facteurs de risque cardiovasculaires. La maladie touche de plus en plus de femmes [9, 11, 12, 22, 23]. Le diagnostic est évoqué chez ces sujets présentant à la fois une atteinte artérielle distale et des thromboses veineuses migratrices des membres supérieurs ou inférieurs. Le diagnostic est souvent posé au stade d’ischémie distale avec troubles trophiques [9, 64]. On retrouve à l’interrogatoire une claudication ayant précédé ce stade d’ischémie ; elle est souvent très distale, intéressant la plante du pied et peut évoluer en donnant une claudication du mollet. Ces claudications « atypiques » font souvent errer le diagnostic vers un problème rhumatologique [20]. L’atteinte des membres supérieurs se manifeste dans de nombreux cas par un phénomène de Raynaud souvent asymétrique, des nécroses digitales mais rarement une claudication [65]. Plusieurs membres sont souvent atteints [66, 67], Shinoya retrouve 16 % de patients atteints de deux membres, 41 % de trois et 43 % des quatre [66]. L’examen clinique est pauvre au début de la maladie avec des pouls distaux souvent perçus. Le test d’Allen qui permet d’explorer les artères distales est systématiquement réalisé chez ces patients jeunes, fumeurs, présentant des symptômes des extrémités. Soixante-trois pour cent des patients atteints d’une TAO ont un test d’Allen pathologique dans la série d’Olin [9]. Les thromboses veineuses migratrices sont fréquentes, 38 % dans la série d’Olin [9], 23 % dans celle de Wysakinski [17] elles surviennent le plus souvent sur le pied, la cheville, les jambes, les avant-bras. Les thromboses veineuses profondes sont rares [25]. Des douleurs, des sensations d’engourdissement ou de paresthésies des doigts ou des orteils peuvent être retrouvées spontanément ou déclenchées par le froid avec parfois un véritable syndrome de Raynaud. Ces sensations sont rapportées à une possible neuropathie ischémique ou à un engainement inflammatoire des fibres nerveuses [20]. Certaines atteintes topographiques rares ont été décrites. Ainsi pour les manifestations digestives, une trentaine de cas [68] ont été publiées. Les douleurs abdominales sont le point d’appel dans la plupart des cas, le diagnostic d’ischémie digestive est confirmé chez ces patients souvent opérés avec une mortalité très importante (30 % dans la série de Lie) [60]. On dénombre un cas d’accident vasculaire
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cérébral dû à une TAO [69], un cas d’atteinte d’un pontage veineux coronaire [70], une atteinte de l’atteinte temporale [71], des atteintes des artères pulmonaires. Des manifestations rhumatismales sont rares mais précoces, elles précèdent de dix ans en moyenne le diagnostic de TAO ; 12,5 % des patients atteints de TAO ont présenté ces manifestations dans la série de Puechal [72]. Elles se présentent sous forme d’atteinte monoarticulaire, migratrice, inflammatoire, non érosive [72].
EXPLORATIONS Les explorations vasculaires non invasives, Doppler continu avec mesure de l’indice systolique de cheville et échographie Doppler permettent de confirmer l’atteinte artérielle distale et l’absence de lésions proximales athéromateuses ou emboligènes. Au stade précoce la mesure de la pression artérielle et l’étude de la pulsatilité digitale permettent de confirmer l’atteinte artérielle digitale. À un stade plus avancé, la mesure de la pression transcutanée d’oxygène apprécie la gravité de l’ischémie. L’artériographie lorsqu’elle est réalisée doit visualiser les artères distales des membres mais elle doit aussi comporter pour les membres inférieurs une exploration de l’aorte abdominale, des iliaques, et pour les membres supérieurs une exploration de l’aorte thoracique, des artères sous clavieres, axillaires et humérales à la recherche d’athérosclérose ou d’une source emboligène [25, 26]. Les artères de petit et moyen calibre sont occluses de façon segmentaire. Les artères touchées sont pour les membres supérieurs les artères digitales, les arcades palmaires, l’artère radiale et ulnaire. Pour les membres inférieurs ce sont les artères digitales, les arcades palmaires, les tibiales et les péronières. Les collatérales sont caractérisées par leur aspect en tire-bouchon qui sont en fait des vasa-vasorum dilatés qui dessinent le trajet des artères occluses. Les lésions retrouvées à l’artériographie ne sont pas spécifiques de la TAO. En effet, les mêmes lésions peuvent être trouvées dans la sclérodermie, le CREST Syndrome, le lupus érythémateux disséminé, d’autres connectivites ou le syndrome des antiphospholipides [26, 73 – 78]. Aucun examen biologique n’apporte d’élément au diagnostic positif de la TAO. Ils ont par contre une grande importance dans le diagnostic différentiel. Il n’existe pas de syndrome inflammatoire, la numération formule sanguine, le bilan lipidique, les
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glycémies sont normaux (un diabète élimine le diagnostic de TAO) [26]. La recherche d’anticorps antinucléaires, d’ANCA, d’antiphospholipides, un bilan hépatique rénal et une analyse urinaire sont effectués.
LES CRITÈRES DIAGNOSTIQUES Plusieurs auteurs ont proposé des critères diagnostiques [21, 26, 79, 80]. Ceux proposés par Olin [26] sont : 1) L’âge de moins de 45 ans, 2) un tabagisme actif ou récemment stoppé, 3) une ischémie périphérique confirmée par des examens non invasifs (claudication, douleurs de repos, troubles trophiques ischémiques ou gangrène), 4) l’absence de pathologie auto-immune, de pathologie de l’hémostase, de diabète certifiés par des examens biologiques, 4) l’absence de pathologie artérielle emboligène, certifiée par l’échographie et l’artériographie, 5) des lésions artériographiques compatibles avec le statut clinique. Mozes [80] avait proposé en 1970, une classification en trois classes : suspicion de TAO, TAO probable, TAO certaine. Shinoya [81] propose des critères cliniques : 1) tabagisme, 2) début des symptômes avant l’âge de 50 ans, 3) lésions occlusives sous poplitées, 4) soit une atteinte des membres supérieurs ou des thromboses veineuses migratrices et 5) l’absence de facteurs de risque cardiovasculaires autres que le tabac. Tous ces critères restent discutés. Des critères diagnostiques différents expliquent en partie la variation de prévalence de la TAO en fonction des études.
TRAITEMENT L’arrêt du tabac est le seul traitement qui permet de limiter l’évolution de la maladie et de réduire les amputations [9, 26, 82]. L’arrêt définitif du tabac doit donc être obtenu quels que soient les moyens utilisés. La reprise ou le maintien de l’intoxication même à quantité minime (une à deux cigarettes par jour suffit à l’évolution de la maladie [30, 31]). Une prostacycline (l’iloprost) par voie intraveineuse a été comparée à l’aspirine dans une étude multicentrique Européenne prospective randomisée en double aveugle. L’iloprost était supérieur à l’aspirine à 28 jours sur la réduction de la taille du trouble trophique, sur la réduction de la douleur et
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de la consommation d’antalgiques. À six mois cet effet était maintenu avec 88 % de répondeur dans le groupe Iloprost par rapport à 21 % dans le groupe aspirine [83]. L’iloprost a ensuite été testée par voie orale à deux doses (200 µg/24 h et 400 µg/24 h) dans une étude multicentrique européenne contrôlée, randomisée en double aveugle contre placebo. Il n’a pas été retrouvé de différence entre ces deux groupes sur la guérison des troubles trophiques. Seule la dose la plus faible était efficace sur la disparition des douleurs et sur un critère combiné de jugement (absence d’amputation, de troubles trophiques, de douleurs et de prises d’antalgiques). Un effet de vol musculaire aux dépens des zones superficielles expliquerait l’absence de bénéfice de la forte dose [84]. La thrombolyse in situ de streptokinase a été testée chez 11 patients et a réduit le nombre d’amputations de 58 % [85]. Son utilisation ne peut toutefois pas être proposée de façon systématique sur cette seule étude. La stimulation électrique médullaire permet d’obtenir de bons résultats sur la cicatrisation des troubles trophiques [86, 87], même dans certains cas résistant aux autres thérapeutiques [88]. Isner a testé l’efficacité d’un plasmide recombinant exprimant le VEGF (Vascular Endothelial Growth Factor) par voie intramusculaire sur sept membres inférieurs dont six atteints de TAO. Les ulcères ont cicatrisé dans trois cas sur cinq. Ces résultats nécessitent confirmation, ce d’autant que l’innocuité de ce type de traitement à moyen et long terme n’est pas établi [89]. La sympathectomie chirurgicale ou chimique, thoracique ou lombaire est parfois proposée [26] dans le but de réduire le nombre et le niveau des amputations, de contrôler les douleurs et de favoriser la guérison des troubles trophiques [9, 90 – 92]. La revascularisation chirurgicale difficile du fait du caractère anatomique des lésions est parfois réalisable. La perméabilité à cinq ans des pontages veineux sous-poplités chez des patients atteints de TAO est estimée en moyenne à 50 % [93, 94]. Il n’existe pas d’étude randomisée comparant le traitement médical bien conduit avec arrêt de tabac à la chirurgie. Nishikami note un devenir satisfaisant des membres alors qu’il existe un échec de revascularisation et conseille donc de prendre son temps avant une amputation ou une revascularisation toujours délicate chez ces patients [95].
L’amputation reste parfois nécessaire. Le taux d’amputation majeur à cinq ans varie entre 5 et 15 % selon les études [13, 20, 23]. La prise en charge du pied ou de la main est fondamentale. Le pied ischémique doit être protégé. La moitié des amputations survenant du fait d’une lésion provoquée par un chaussage inadapté [25]. L’infection locale doit être rapidement traitée avec une antibiothérapie adaptée. La détersion chimique ou mécanique des ulcères favorise leur bourgeonnement. Les thromboses veineuses superficielles sont traitées par des anti-inflammatoires locaux.
DEVENIR L’espérance de vie des patients atteints de TAO n’est pas modifiée par rapport à une population normale [22, 96, 97]. Les patients atteints de TAO développent des lésions d’athérosclérose au même âge que dans la population générale. Ils présentent une mortalité importante de cancers dus au tabac [98]. Le pronostic local et général de la maladie est donc directement lié à l’arrêt définitif du tabac.
CONCLUSION La TAO est rare mais grave sur le plan fonctionnel. Sa pathogénie n’est pas encore élucidée. Le lien avec le tabac est majeur dans la survenue de la maladie mais aussi dans son évolution. Sa prévalence diminue. L’homme n’est plus exclusivement touché. Le diagnostic est souvent tardif du fait de l’absence de marqueur spécifique. Le traitement associe l’arrêt de l’intoxication tabagique, des perfusions de prostacyclines. D’autres thérapeutiques ont été proposées mais elle n’ont pas toutes fait la preuve de leur efficacité ou de leur innocuité. De nombreuses questions sont dans cette maladie encore sans réponse.
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