Pratique Neurologique – FMC 2018;9:173–185
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La maladie de Wilson en 2018 Wilson's disease in 2018 A. Poujois P. Chaine F. Woimant
Département de neurologie, centre de référence de la maladie de Wilson et autres maladies rares liées au cuivre, hôpital Lariboisière, Assistance publique– Hôpitaux de Paris (AP–HP), 2, rue Ambroise-Paré, 75010 Paris, France
RÉSUMÉ
MOTS CLÉS
La maladie de Wilson (MW), qui entraîne une surcharge en cuivre, fait partie de ces maladies génétiques rares qui bénéficient de traitements efficaces ayant révolutionné leur pronostic. La mise en place d'un centre de référence en 2005, qui a été re-labélisé cette année, et l'inclusion des patients dans un registre national, nous permet de progresser dans la connaissance et la prise en charge de cette pathologie rare. La prévalence clinique de la MW en France a pu être estimée à 1,5/100 000, mais la prévalence génétique est bien plus élevée autour de 1/7000. Une pénétrance incomplète du gène ou la présence de gènes modificateurs expliquent probablement la différence de prévalence. Le spectre clinique de la MW apparaît plus large avec notamment des formes pauci-symptomatiques et un début tardif après 40 ans chez 6 % des patients. Si le diagnostic peut être évoqué devant une céruloplasminémie basse et une cuprurie/24 h élevée, une avancée diagnostique majeure a reposé sur la mise en place du dosage direct du cuivre libre toxique, appelé cuivre échangeable. Le REC correspondant au ratio (cuivre échangeable/cuivre total) permet un diagnostic certain de MW s'il est > 18,5 %. Par ailleurs, une valeur de cuivre échangeable > 2,08 mmol/L au diagnostic est un marqueur de l'atteinte extra-hépatique (neurologique et cornéenne) et de sa sévérité. Le traitement de la MW repose sur une phase initiale de chélation active et prolongée par un chélateur (Trolovol® ou Trientine®) qui est suivie ensuite par une phase d'entretien par la Trientine® ou un sel de Zinc. Les principaux risques à surveiller sont l'aggravation neurologique lors de la phase initiale et la mauvaise observance médicamenteuse lors de la phase d'entretien. La greffe hépatique est indiquée dans les cas d'hépatite fulminante ou de décompensation de cirrhose ; elle doit être discutée rapidement dans les aggravations neurologiques pharmaco-résistantes. Le suivi clinique, biologique et échographique régulier est fondamental pour évaluer l'efficacité, la tolérance et l'observance du traitement, mais aussi pour dépister l'apparition d'un carcinome hépatocellulaire sur un foie cirrhotique. Le futur proche est prometteur avec l'arrivée, sur le marché, d'un nouveau chélateur le tetrathiomolybdate, qui entraîne moins d'aggravation neurologique initiale et le développement de la thérapie génique.
Maladie de Wilson ATP7B Cuivre Chélateurs Greffe hépatique
KEYWORDS Wilson's disease ATP7B Copper Chelators Liver transplant
© 2018 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
SUMMARY Wilson's disease (WD) is characterized by deleterious copper accumulation in the liver and the brain. It is one of those rare genetic disorders that benefits from effective treatments which have dramatically transformed the prognosis. The establishment of a national reference center in 2005 that was re-certified this year and the inclusion of patients in a national registry allowed us to progress in the knowledge and management of this rare disease. In France, the clinical prevalence is estimated to 1.5/100 000 but the genetic prevalence is higher around 1/7,000. An incomplete penetrance of the gene or the presence of modifier genes may account for the difference. The clinical spectrum of WD is wider as expected with pauci-symptomatic presentations and a late onset of the disease over the age of 40 in 6 % of patients. WD is suspected when ceruloplasminemia is low and 24h-urinary copper excretion is elevated. Recently, a major diagnostic advance has been reached with the implementation of the direct dosage of toxic free copper, called exchangeable copper. The ratio of exchangeable copper/total copper (REC) > 18.5 % provides the diagnostic of WD with high sensitivity and specificity. Moreover, copper exchangeable > 2.08 mmol/L at diagnosis is indicative of the severity of the extra-hepatic (brain
Auteur correspondant : A. Poujois, Département de neurologie, centre de référence de la maladie de Wilson et autres maladies rares liées au cuivre, hôpital Lariboisière, Assistance publique– Hôpitaux de Paris (AP–HP), 2, rue Ambroise-Paré, 75010, Paris, France. Adresse e-mail :
[email protected]
https://doi.org/10.1016/j.praneu.2018.01.002 © 2018 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 173
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and retina) involvement. Treatment of WD is based on an initial active and prolonged chelating phase (by Trolovol® or Trientine®) followed by a maintenance phase with Trientine® or Zinc salt. The two major problems which may be encountered are neurological worsening during the initial phase and non-compliance to treatment during the maintenance phase. Liver transplantation is the recommended therapeutic option in WD with acute liver failure or end-stage liver cirrhosis; its indication should be considered when a rapid neurological worsening occurs despite effective chelation. Regular clinical, biological and liver ultrasound follow-up is essential to evaluate treatment efficacy, tolerance and adherence but also to detect the appearance of hepatocellular carcinoma on a cirrhotic liver. The near future is promising with the arrival of a new chelator, tetrathiomolybdate and with the development of gene therapy. © 2018 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
INTRODUCTION En juillet 2017, le centre national de référence de la maladie de Wilson et autres maladies rares liées au cuivre vient d'être relabélisé pour cinq ans. Il fait partie depuis 2016 de la filière Groupement des maladies héréditaires du métabolisme (G2M) et est constitué d'un centre coordonnateur (Lariboisière, Paris), d'un centre constitutif (hospices civils de Lyon) et de huit centres de compétence répartis sur l'ensemble du territoire français (Marseille, Lille, Besançon, Rennes, Toulouse, Bordeaux et Paris). Cette re-labelisation nous donne l'occasion de faire le point sur les actualités de la maladie de Wilson (MW), cette maladie de surcharge en cuivre qui fait collaborer neurologues, hépatologues et pédiatres. La MW fait partie de ces maladies génétiques rares qui bénéficient de traitements efficaces ayant révolutionné leur pronostic [1]. Poser le diagnostic de MW n'est donc pas qu'une satisfaction intellectuelle, mais a un réel impact thérapeutique. Depuis sa première description clinique il y a plus d'un siècle par Sir SA Wilson, neurologue britannique [2], la connaissance de la MW continue à s'enrichir et sa prise en charge à évoluer. Cet article détaille les dernières avancées concernant l'épidémiologie, la génétique, la clinique, les moyens diagnostiques biologiques et d'imagerie, ainsi que les traitements. La dernière partie s'intéressera aux diagnostics différentiels à évoquer devant des anomalies du bilan cuprique.
RAPPELS DE PHYSIOPATHOLOGIE La MW est une maladie monogènique de transmission autosomique récessive touchant un gène de 21 exons, l'ATP7B situé sur le chromosome 13. Ce gène code pour une ATPase transporteuse du cuivre, localisée préférentiellement dans le foie, mais aussi dans le cerveau. Cette protéine ATP7B intervient dans l'homéostasie du cuivre. Elle a deux actions : l'incorporation du cuivre à l'apocéruloplasmine au sein de l'hépatocyte pour former l'(holo) céruloplasmine qui est excrétée dans la circulation sanguine et l'élimination physiologique du cuivre dans la bile et les selles. Son dysfonctionnement entraîne une accumulation de cuivre non lié à l'apocéruloplasmine dans le foie qui est ensuite libéré sous forme libre dans la circulation sanguine et une élimination urinaire plutôt que biliaire du cuivre. Le cuivre libre dit « échangeable » qui s'échappe du foie se dissémine alors dans l'organisme avec une prédilection pour la cornée et le cerveau, y entraînant des dommages oxydatifs et une apoptose cellulaire. D'une maladie hépatique initiale, la MW devient alors multisystémique [3].
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Bien que prédominant dans les hépatocytes, l'ATP7B est aussi présente dans différentes régions cérébrales, mais à un moindre degré qu'une autre ATPase, l'ATP7A. Sa contribution à l'homéostasie cérébrale du cuivre reste obscure. Par contre, les astrocytes semblent avoir un rôle clé lors de l'arrivée massive intracérébrale de cuivre libre par voie sanguine ou via le LCR [4].
AVANCÉES EN GÉNÉTIQUE ET EN ÉPIDÉMIOLOGIE Nouvelles techniques de séquençage Les technologies de séquençage dites de « nouvelle génération », Next Generation Sequencing (NGS) sont utilisées depuis quelques années dans les laboratoires de génétique moléculaire et permettent de proposer pour les gènes de grandes tailles, un diagnostic moléculaire plus rapide et plus exhaustif que celui basé sur la méthode de référence de Sanger. À ce jour, plus de 600 mutations ont été décrites et concernent plus volontiers les régions centrales du gène avec une prédilection pour les exons 8 et 14, notamment en Europe. En France, si le taux de positivité de l'analyse moléculaire est de l'ordre de 98 %, il en résulte que seulement 2 % des patients atteints d'une MW avérée présentent une seule mutation hétérozygote voire aucune mutation dans le gène ATP7B. En France, la mutation ayant une fréquence allélique la plus élevée (15 %) est la mutation faux-sens p.His1069Gln sur l'exon 14. En l'absence de mariage consanguin, la majorité des patients sont hétérozygotes composites avec une mutation différente sur chaque allèle. Néanmoins, un certain nombre de patients sont porteurs de trois mutations différentes [5]. Qu'il y ait deux ou trois mutations, les recherches de corrélations génotypes-phénotypes sont restées jusqu'à présent décevantes.
Pseudo-dominance et MW Récemment, des cas de transmission parent–enfant ont été rapportés ce qui incite à proposer systématiquement un dépistage familial très large malgré le caractère autosomique récessif de la transmission [6–8]. Les recommandations proposent donc en plus du dépistage classique des frères et sœurs du cas index (risque de 25 %), celui de leurs enfants, parents, oncles, tantes et neveux. L'étude des parents du cas index permet aussi de confirmer que les mutations de ce dernier sont sur deux allèles différents.
Prévalence clinique et prévalence génétique Jusqu'à présent une publication princeps faisait référence avec une prévalence clinique mondiale estimée à 30 par
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Figure 1. Prévalence de la MW en France en 2013. (Poujois A, et al. Characteristics and prevalence of Wilson's disease : a 2013 observational population-based study in France. Clin Res Hepatol Gastroenterol [2017]).
million avec un portage hétérozygote de 1/90 [9]. En Europe où le taux de consanguinité est moindre, la prévalence de la MW était estimée entre 1,2 et 2/100 000 [10]. En France, une étude épidémiologique récente a permis d'identifier 906 cas de MW grâce aux données de la base médico-économique, Système national d'information inter-régimes de l'Assurance maladie (SNIIR-AM) [11] (Fig. 1). La répartition des cas au sein du territoire s'est révélée relativement hétérogène avec une prédominance dans le Centre et l'Est (Fig. 2). La prévalence calculée de la MW est de 1,5/100 000, chiffre en accord avec les données européennes. Cependant, la prévalence de la MW est probablement sous-estimée comme en attestent deux publications récentes, une anglaise et une coréenne [12–13]. Après séquençage par NGS de la totalité du gène ATP7B de plus de 1000 ADN issus de populations générales, la fréquence de portage hétérozygote du gène ATP7B a été retrouvée dans les deux publications autour de 1/40, ce qui conduit à une prévalence de la maladie autour de 1/7 000. Une pénétrance incomplète du gène ou la présence de gènes modificateurs (COMMD1, ATOX1, XIAP, HFE, protéine prion, méthylènetetrahydrofolate MTHF réductase, apolipoprotéine E) [14–15] pourrait être à l'origine de phénotypes atténués (expression clinique pauci- ou asymptomatique, début tardif). Ceci expliquerait la discordance importante observée entre les données cliniques et génétiques.
neurologiques en France est de 18 mois, deux fois plus que dans les formes hépatiques. Il passe à deux ans lorsque la présentation initiale est purement psychiatrique. Les signes neuropsychiatriques inauguraux s'installent habituellement sur quelques semaines à quelques mois et les plus fréquents sont le tremblement (de repos, d'action ou d'attitude) et la dysarthrie (hypophonique, dystonique ou tremblante) qui sont présents chez environ 45 % des patients. Les modifications du comportement associées parfois à un tableau psychiatrique classique (dépression, irritabilité, anxiété), les phénomènes dystoniques et les signes parkinsoniens sont les autres présentations classiquement rencontrées. Sur le plan cognitif, les troubles sont essentiellement liés à l'atteinte des ganglions de la base et des boucles sous-corticales frontales. Ils sont marqués par une dysfonction exécutive pouvant aller du simple trouble attentionnel au syndrome frontal marqué. L'intelligence verbale, la mémoire épisodique et les capacités visuo-spatiales sont habituellement préservées [16]. Au stade neurologique, bien que le bilan biologique puisse être normal, les patients ont toujours une atteinte hépatique avec le plus souvent une cirrhose compensée détectée lors de l'échographie abdominale [17]. Une consultation hépatique spécialisée doit être proposée dès le diagnostic afin de confirmer le statut hépatique, de rechercher des varices œsophagiennes et de mettre en place un suivi adapté pour surveiller notamment l'apparition d'un carcinome hépatocellulaire [18].
DES PRÉSENTATIONS CLINIQUES VARIÉES
Un spectre clinique plus étendu
Une maladie classiquement de l'enfant et de l'adolescent
La MW peut devenir symptomatique à un âge tardif. Nous suivons à l'hôpital Lariboisière une famille composée de deux frères et d'une sœur dont le diagnostic de la MW a été porté après 60 ans. Le cas index présentait l'association d'une crampe de l'écrivain et d'une discrète cytolyse hépatique depuis trois ans et le diagnostic a été posé à 62 ans. Le dépistage familial a permis de diagnostiquer son frère de 60 ans qui présentait aussi une dystonie à l'écriture et sa sœur de 61 ans qui était asymptomatique. Dans le Registre français, 10 % des 604 patients inclus en 2015 ont déclarés les premiers symptômes de la maladie après 30 ans et 6,2 % après 40 ans.
La MW est initialement une maladie hépatique de l'enfant comme le confirment les données issues du registre national de la MW portant sur 604 patients inclus. En effet au diagnostic, 47,4 % des patients ont moins de 16 ans et 46,4 % ont une forme hépatique alors que 33,9 % ont une forme neurologique et 19,7 % sont détectés lors du dépistage familial. L'âge de début de la forme neurologique initiale est plus tardif que pour la forme hépatique. Le délai diagnostic des formes
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Figure 2. Prévalence standardisée par région de la MW/100 000 habitants en France en 2013. (Poujois A, et al. Characteristics and prevalence of Wilson's disease : a 2013 observational population-based study in France. Clin Res Hepatol Gastroenterol [2017]).
Ces derniers ont un âge moyen au diagnostic de 48 6,9 ans et 42 % ont eu une présentation neurologique initiale dominée par un tremblement, une modification de l'écriture et/ou une dysarthrie. 11 % ont été diagnostiqués sur un dépistage familial et 8 % devant la découverte d'un anneau de Kayser– Fleischer isolé. Le diagnostic de ces formes tardives reste difficile malgré le phénotype classique comme en atteste le délai diagnostique qui est de 3,7 ans dans cette population. Les résultats d'une large étude multicentrique européenne portant sur 1223 patients [19], ainsi que quelques cas cliniques isolés [20] confirment les données françaises. La physiopathologie de la MW à début tardif est probablement différente comme en atteste l'apparition rapide chez certains de nos patients d'une carence en cuivre induite par le traitement chélateur classique qui a dû par conséquent être arrêté. Aucune mutation n'a été associée à ce jour à un début tardif de la maladie, mais l'existence de gènes modificateurs (tels celui de la MTHF reductase ou de l'APOE) ou un mécanisme épigénétique sont suspectés.
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BIOMARQUEURS DIAGNOSTIQUES : L'INTÉRÊT DU DOSAGE DU CUIVRE ÉCHANGEABLE La triade classique habituellement associée au diagnostic de MW (hypocuprèmie totale, hypocéruloplasminémie et hypercuprurie) peut être prise à défaut dans certains cas. En effet, elle est incomplète ou absente chez 3 % des patients avec MW confirmée sur la biologie moléculaire et présente chez 16 % des hétérozygotes sains. Le calcul du cuivre non lié à la Céruloplasmine, potentiellement toxique, a longtemps été proposé comme test diagnostique, mais s'est avéré peu fiable du fait du manque de précision à faible concentration des méthodes de dosage de la Céruloplasmine [21]. Une grande avancée a été réalisée, en 2009, quand l'équipe de l'hôpital Lariboisière a mis au point le dosage direct du cuivre échangeable ou cuivre non lié à la Céruloplasmine [22]. Ce dosage du cuivre échangeable se fait actuellement en routine dans les laboratoires de toxicologie de l'hôpital Lariboisière (Paris) et des hospices civils de Lyon et d'autres laboratoires sont en
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train de valider la technique en partenariat avec le centre de référence. Le cuivre échangeable a deux intérêts [23]. le ratio (cuivre échangeable/cuivre total sérique) appelé REC est un excellent biomarqueur diagnostique avec une sensibilité et une spécificité proche de 100 % pour le diagnostic de MW lorsque sa valeur est > 18,5 % [24]. Il permet, ainsi par exemple, de différencier les hépatopathies wilsoniennes des hépatopathies d'autre origine (NASH, auto-immune, infectieuse) [25]. De plus, le REC est d'un apport majeur dans le dépistage familial, permettant de différencier les porteurs hétérozygotes ou les sujets sains des sujets malades [26]. le cuivre échangeable au diagnostic est un marqueur de l'atteinte extra-hépatique et de sa sévérité. Une valeur > 2,08 mmol/L oriente ainsi vers une atteinte de la cornée et du cerveau (Se = 86 %; Sp = 94 %), l'atteinte étant d'autant plus sévère cliniquement et diffuse à l'IRM cérébrale et que la valeur est élevée [27]. Une valeur élevée du cuivre échangeable au diagnostic, témoin d'une diffusion extra-hépatique, incite à être prudent dans l'instauration du traitement chélateur pour ne pas risquer d'aggraver les signes neurologiques. Ainsi, devant une suspicion de MW ou lors du dépistage familial, les trois tests cupriques importants à réaliser sont le cuivre échangeable, le dosage de la céruloplasmine et la cuprurie des 24 h. Des résultats anormaux permettront d'instaurer un traitement chélateur sans délai en attendant la confirmation définitive du diagnostic par l'étude en biologie moléculaire du gène ATP7B.
APPORT DES EXAMENS D'IMAGERIE Imageries hépatiques L'atteinte hépatique inhérente à la MW nécessite la réalisation systématique au diagnostic d'une échographie hépatique, d'un Fibroscan® (ou élastométrie impulsionnelle) et d'une fibroscopie gastrique à la recherche de varices œsophagiennes. L'échographie hépatique sera ensuite annuelle ou semestrielle si des signes de cirrhose existent, ce qui est courant au stade neurologique de la MW. Le Fibroscan® qui mesure l'élasticité du foie, y est associé afin d'évaluer la fibrose hépatique et l'hypertension portale [28]. Des valeurs autour de 6,6 kPa signent une fibrose modérée alors qu'au-delà de 8,4 kPa la fibrose est sévère [29].
Imageries cérébrales Imageries morphologiques Sur le plan cérébral, l'IRM est toujours anormale si le patient a des signes neurologiques cliniques avec principalement des anomalies liées à l'effet direct des dépôts de cuivre intracérébraux, mais aussi parfois à l'effet indirect d'une encéphalopathie hépatique par shunt porto-systémique (Fig. 3). En dehors de la situation particulière de l'encéphalopathie, les patients neurologiques présentent classiquement des hypersignaux Flair (ou des hyposignaux T1 au stade plus avancé) symétriques des ganglions de la base (putamens > noyaux caudés > thalami), du mésencéphale, du pont ou des noyaux dentelés liées aux dépôts de cuivre [30]. Le signe classique de « la face de Panda géant » correspondant à un
hypersignal T2 du tegmentum épargnant les noyaux rouges et la substance noire pars compacta associé à un hyposignal des colliculi supérieurs, reste peu fréquent (18 %). L'atteinte de la substance blanche est possible. Le corps calleux est, ainsi le siège d'hypersignaux Flair/T2 dans sa partie postérieure chez 23 % des patients neurologiques [31]. Des lésions de la SB sous-corticales et du cortex sont décrites dans des formes sévères (2,6 %) et prédominent dans les lobes frontaux voire temporaux. Elles sont alors volontiers asymétriques et associées à une épilepsie pharmaco-résistante [32]. L'atteinte de substance grise est à l'origine d'une atrophie corticale qui est corrélée à la durée de la maladie, mais aussi sous-corticale prédominant dans les noyaux caudés et les GPi [33]. Dans les cas d'encéphalopathie hépatique, les patients présentent des hypersignaux T1 bilatéraux des Globus Pallidum internes (GPi) et des putamens avec une extension possible à l'hypothalamus et au mésencéphale si l'encéphalopathie n'est pas contrôlée. Sur le plan physiopathologique, ces anomalies IRM correspondent à des dépôts de manganèse associés à un œdème astrocytaire (Fig. 3). Certains patients neurologiques présentent des hyposignaux T2* des GPi similaires à ceux observés dans certaines pathologies liées au fer telles les neurodegeneration with brain iron accumulation (NBIA) [34–35], avec un aspect en « œil de tigre » [36]. Ces anomalies IRM couplées au fait que les cupro-enzymes interviennent dans le métabolisme du fer (la Céruloplasmine a une activité ferroxydasique et certains patients présentent une ferritine élevée), font émettre l'hypothèse que le fer est aussi impliqué dans la physiopathologie de la MW.
Imageries fonctionnelles de la voie nigro-striée Quel que soit leur forme clinique (dystonique, tremblante ou extra-pyramidale), mais du fait de l'atteinte systématique du striatum, les patients wilsoniens neurologiques ont une altération concomitante des voies pré- et post-synaptiques nigro-striées. La scintigraphie SPECT 13I-ß-CIT (Datscan®), marqueur de la fibre présynaptique, montre une hypofixation du striatum qui tend cependant à diminuer avec le temps sous traitement chélateur. L'atteinte post-synaptique authentifiée par une hypofixation de l'123I-IBZM en SPECT reste stable au cours du temps et pourrait expliquer en partie l'absence de dopa-sensibilité des signes parkinsoniens dans la MW [37]. Les formes hépatiques de MW peuvent avoir des anomalies à l'IRM cérébrale sans expression neurologique clinique. Il s'agit alors de discrets hypersignaux Flair des putamens sans atteinte scintigraphique pré- ni post-synaptique de la voie nigro-striée. Une diminution du coefficient de diffusion apparent dans les putamens sans anomalie en séquences de Diffusion ni en Flair peut aussi être visualisée chez ces sujets hépatiques sans signe neurologique [38].
Traitements actuels Recommandations générales Le traitement de la MW repose sur la prise à vie de chélateurs du cuivre (la D-Pénicillamine [DP] ou Trolovol®, et la Triéthylènetétramine ou Trientine®) qui induisent une élimination urinaire du cuivre ou de sels de zinc (acétate de zinc Wilzin® ou sulfate de zinc en préparation magistrale, mais ce dernier
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Tableau I. Traitements actuels disponibles dans la maladie de Wilson. Trolovol®
Trientine®
Wilzin®
Sulfate de zinc
DCI
D-Penicillamine
Triéthylène tétramine dihydrochloride
Acétate de zinc
Sulfate de zinc
Indication
Phase de chélation active Phase de chélation active quelle que soit la forme de quelle que soit la forme de la la maladie maladie Phase d'entretien
HORS AMM Phase d'entretien Sujets présymptomatiques ou Phase d'entretien sujets asymptomatiques Sujets présymptomatiques ou asymptomatiques
Mode de dispensation
Officine
ATU - Pharmacie hospitalière
Pharmacie hospitalière
Officine (préparation magistrale)
Mode de conservation
Température ambiante
+48C
Température ambiante
Température ambiante
Galénique et dosage
Comprimé pelliculé de 300 mg
Gélule de 300 mg
Gélule de 50 mg (et 25 mg pour forme pédiatrique)
Gélule de 200 mg
Posologie habituelle
300 mg 3/j
300 mg 3/j
50 mg 3/j
200 mg 3/j
Effets indésirables entraînant un changement de traitement
20–30 %: Réaction d'hypersensibilité (fièvre, rash cutané, lymphadénopathie), protéinurie, atteinte cutanée du tissu élastique, atteintes auto-immunes. . .
Très rares : anémie sidéroblastique, gastrite, syndrome lupus-like, rash cutané
Irritation gastrique, syndrome dyspeptique, douleurs abdominales
Quelques troubles digestifs possibles
Mode d'action
Chélateur du cuivre
Chélateur du cuivre
Diminue l'absorption digestive Diminue l'absorption du cuivre digestive du cuivre
ATU : autorisation transitoire d'utilisation
est hors AMM) qui inhibent l'absorption intestinale du cuivre. Ce traitement ne doit jamais être arrêté, même lors des grossesses durant lesquelles la posologie est, dans certains cas, réduite. L'association à un régime pauvre en cuivre est recommandée au moins durant la première année de traitement. Le traitement comporte deux phases : une phase initiale de chélation active et une phase d'entretien où la chélation doit être plus modérée pour éviter la carence en cuivre [39]. Le Tableau I résume les différents traitements actuels de la MW.
Phase initiale de chélation active Bien qu'il n'y ait aucune étude prospective comparative disponible, les recommandations européennes placent les chélateurs sur un pied d'égalité et recommandent l'un ou l'autre en première intention chez le patient symptomatique [40]. En France, l'HAS propose les mêmes recommandations, le traitement devant être instauré après avis du centre de référence [41]. Il est recommandé de prendre contact avec le centre de référence de la MW. Ceci permet en outre de recenser le nombre de nouveaux cas diagnostiqués et de les
inclure dans le registre France afin de favoriser la recherche sur cette maladie rare. Le choix du chélateur est souvent orienté par le profil de tolérance du traitement. La DP est contre-indiqué en cas d'allergie à la Pénicilline et est connue pour ses nombreux effets secondaires ; qu'ils soient aigus dans les trois semaines (réaction d'hypersensibilité avec fièvre, rash cutané, lymphadénopathie ou atteinte rénale avec protéinurie) ou chroniques (néphropathie, atteinte cutanée du tissu élastique et atteintes auto-immunes. . .). La Trientine® est beaucoup mieux tolérée (rare anémie sidéroblastique, gastrite, syndrome lupus-like, rash cutané). Elle occasionne quatre fois moins d'arrêt de traitement que la DP [42]. Le seul problème pratique de la Trientine, en plus du fait qu'elle ne soit disponible qu'en ATU, est qu'elle doit être conservée au froid. Une étude de phase 3 testant une nouvelle formulation non conservable au froid est en cours. Contrôler la maladie hépatique demeure plus facile que contrôler les symptômes neurologiques. Une étude multicentrique rétrospective ayant inclus 380 patients avec forme hépatique ou neurologique, a montré qu'au bout de quatre ans de traitement, l'effet des chélateurs était plus important au niveau
Figure 3. Les différents aspects pouvant être observés à l'IRM cérébrales. A. Hypersignaux Flair de la tête des noyaux caudés et des putamens ; B. Hypersignaux Flair de la partie externe des putamens et des thalami ; C. Image en « tête de Panda » du mésencéphale ; D. Hypersignaux Flair des noyaux dentelés ; E. Atrophie mésencéphalique ; F. Atteinte corticale bi-frontale ; G. Hyposignaux T2* bi-pallidaux témoignant de dépôts de fer ; H. Hypersignaux T1 bi-pallidaux dans les cas d'encéphalopathie hépatique avec dépôts de manganèse.
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Faites le point hépatique qu'au niveau cérébral. L'amélioration des formes hépatiques concernait 90,7 % des patients sous DP et 92,6 % des patients sous Trientine alors que l'amélioration des formes neurologiques ne concernait que 67,5 % des patients sous DP et 55 % des patients sous Trientine [42]. Cette différence de résultat est expliquée pour une part par les aggravations neurologiques paradoxales, parfois irréversibles, à l'initiation du traitement qui sont décrites chez 13,8 % des patients neurologiques sous DP et chez 8 % des patients sous Trientine [43]. Jusqu'à présent, l'apparition de signes neurologiques à l'instauration du traitement n'est pas décrite chez les patients avec un phénotype hépatique pur. Les hypothèses physiopathologiques de cette aggravation seraient une trop forte mobilisation du cuivre intra-hépatique avec relargage massif de cuivre libre dans la circulation sanguine associée à une mobilisation intracérébrale elle aussi trop brutale stimulant les mécanismes oxydatifs et l'apoptose [4]. Chez le patient neurologique nouvellement diagnostiqué, et ce d'autant qu'il a un cuivre échangeable > 2,08 mmol/L, il est, ainsi recommandé une augmentation progressive des doses de chélateurs (150 mg tous les 10 jours) avec adaptation en fonction de la cuprurie des 24 h et du dosage du cuivre échangeable, cela afin de réduire le risque d'aggravation paradoxale initiale. D'après une étude rétrospective polonaise portant sur 60 patients neurologiques, le zinc pourrait être proposé en monothérapie de première intention dans les formes neurologiques peu sévères. Après un suivi moyen de douze ans, les auteurs ont montré que le zinc prescrit en première intention et en monothérapie, était aussi efficace que la DP sur les symptômes neurologiques et qu'il était mieux toléré. Les aggravations neurologiques étaient cependant aussi décrites (4,3 %) [43]. En France, cette indication n'est pas encore retenue.
fonctionnelle et permet la restauration d'une fonction hépatique normale ainsi que l'atténuation d'une hypertension portale. Elle est le traitement de référence dans les cas d'hépatite fulminante ou de cirrhose hépatique décompensée. Elle a aussi sa place dans les cas d'adénocarcinome hépatique ne pouvant être enlevé chirurgicalement. Les résultats à long terme de la GH pour indication hépatique sont excellents avec selon l'étude nationale française menée par le centre de référence une survie de 87 % à 20 ans [44]. Son indication dans les aggravations neurologiques sans défaillance hépatique est sujette à controverses, car peu et mal étudiée. Une publication pilote récente du centre de référence français semble indiquer que la GH a probablement une place pour les formes neurologiques graves résistant à un traitement chélateur bien conduit [45]. Dans un travail en cours de publication coordonné par le centre de référence national, seulement 32 patients ont été publiés dans le monde, dont une majorité sous forme de cas cliniques. L'expérience française de ces dernières années montre que, sur 18 patients greffés sur indication neurologique stricte, les résultats sont encourageants avec un taux de survie de 88,8 % à 1 an et de 72,2 % à 5 ans. Après cinq ans de suivi, les patients sont passés d'un handicap majeur avec alitement permanent (Rankin modifié de 4,9 0,4) à un handicap faible à modéré leur permettant la marche seule (Rankin modifié de 2,3 1,5 [p < 0,0001]). Soixante pour-cent avaient une amélioration majeure de leur score neurologique clinique Unified Wilson Disease Rating Scale (UWDRS), 30 % une amélioration modérée et 10 % l'absence d'amélioration [46]. Cette indication est exceptionnelle, mais fait partie de l'arsenal thérapeutique à notre disposition et mérite d'être discutée si la situation se présente avec l'ensemble des spécialistes du centre de référence de la MW.
Phase d'entretien Après plusieurs années de traitement chélateur et lorsque la MW est bien contrôlée, deux possibilités s'offrent actuellement au patient pour la phase d'entretien. La première possibilité est le maintien d'un chélateur du cuivre, si possible la Trientine® qui n'a pas d'effets secondaires notoires au long cours contrairement à la DP. La seconde option est une monothérapie de zinc [40]. Le zinc qui inhibe l'absorption intestinale du cuivre, occasionne surtout des troubles gastro-intestinaux marqués par une irritation gastrique, un syndrome dyspeptique ou des douleurs abdominales. Si les troubles digestifs persistent, un inhibiteur de la pompe à protons est alors associé à la prescription. Le sulfate de zinc (préparation magistrale) qui est mieux toléré, peut aussi être proposé en remplacement de l'acétate de zinc (Wilzin®), mais sa prescription est hors AMM. La principale difficulté durant cette phase d'entretien est de s'assurer de la bonne compliance au traitement.
Traitements symptomatiques des signes neurologiques L'atteinte neurologique est marquée par la variété des signes cliniques avec cependant une prédilection pour les symptômes en lien avec l'atteinte des ganglions de la base. En attendant l'effet des chélateurs ou au stade séquellaire, de nombreuses molécules ont été essayées pour traiter le tremblement, la dystonie, le syndrome parkinsonien, etc. . .., mais leur efficacité reste modérée. Le Tableau II présente un résumé des différents traitements symptomatiques. Concernant la dystonie et le syndrome parkinsonien persistant après au moins deux ans de traitement de la maladie, un PHRC initié par l'équipe lyonnaise du centre de référence est actuellement en cours. L'objectif de cette étude est de montrer l'efficacité de la stimulation cérébrale profonde (du GPi ou du NST) dans les séquelles dystoniques ou parkinsoniennes des patients avec MW.
Formes asymptomatiques Les patients asymptomatiques diagnostiqués lors du dépistage familial nécessitent eux aussi un traitement à vie. Les recommandations européennes préconisent l'instauration d'un traitement par acétate de zinc [40] couplée à une surveillance annuelle en centre de référence.
Cas de la greffe hépatique Dans la MW, la greffe hépatique (GH) est un traitement curatif salvateur qui apporte une protéine ATP7B hépatique
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PERSPECTIVES THÉRAPEUTIQUES Tetrathiomolybdate L'ammonium de tetrathiomolybdate (TTM) est un chélateur spécifique développé dans les années 60 qui réduit l'absorption intestinale du cuivre et forme un complexe puissant dans le sang avec le cuivre et l'albumine, complexe éliminé dans la bile. Les premières études ont montré que le TTM agissait
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Tableau II. Revue des traitements symptomatiques neurologiques de la maladie de Wilson. Symptômes Tremblement
Tremblement dystonique
Dystonie
Syndrome parkinsonien
Chorée
Hypersalivation
Classe pharmaceutique/ Molécule
Doses
Effets du traitement
Bêtabloquant/propranolol
40 à 120 mg/j
Bon à modéré
Barbituriques/primidone
75 à 750 mg/j
Très bon à modéré
Benzodiazépine/clonazépam
0,5–4 mg/j
Léger
Anticholinergiques/trihexyphénidyl
Début à 5 mg/j puis adaptation en fonction de la tolérance/effet
Partiel
Benzodiazépine/clonazepam
0,5–4 mg/j
Léger
Toxine botulique
Adaptés aux muscles injectés
Bon à très bon
Anticholinergiques/trihexyphénidyl
Début à 5 mg/j–dose moyenne 30 mg/j
Partiel à modéré
Baclofène
60–120 mg/j
Bon à modéré
Benzodiazépine/clonazepam
0,5–4 mg/j
Léger à modéré
Neuroleptique atypiqueprésynaptique : la tétrabénazine
Début à 12,5 mg/j-dose moyenne 50–75 mg/j
Bon à modéré
Antiépileptique/Gabapentine
900 mg/j
Bon
Levodopa
300 à 900 mg/j
Aucun - Dyskinésies dopainduites si forte dose
Apomorphine sc
1 à 6 mg/j–dose moyenne 4 mg/j
Aucun
Amantadine
300 mg/j
Aucun
Neuroleptique atypiqueprésynaptique : la tétrabénazine
Début à 12,5 mg/j-dose moyenne 50–75 mg/j
Bon
Toxine botulique
35U dans chaque parotide
Bon
Anticholinergiques/trihexyphénidyl
Début à 5 mg/j–dose moyenne 15 mg/j
Bon
rapidement en quelques semaines en neutralisant le cuivre libre et qu'il n'induisait que de très rares cas d'aggravation neurologique initiale à l'instauration du traitement à la différence des autres chélateurs classiques. Il a par ailleurs des propriétés anti-inflammatoires en inhibant des cytokines cupro-dépendantes et a un profil de sécurité et de tolérance satisfaisant [47]. Une étude internationale de phase 3 à laquelle le centre de référence national va participer va débuter fin 2017. Elle portera sur 90 patients et comparera l'effet du TTM au traitement chélateur standard pendant neuf mois.
Thérapie génique La majorité de l'ATP7B étant hépatique, l'approche développée actuellement par la thérapie génique a pour objectif de restaurer le métabolisme hépatique du cuivre très précocement, avant l'apparition des signes hépatiques ou neurologiques. Les premières études chez l'animal avec transduction d'un nouvel ATP7B via un vecteur lentivirus LV dérivé du VIH ont été prometteuses, montrant l'expression du transgène dans les hépatocytes, la réduction du cuivre intra-hépatocytaire et l'amélioration de la fibrose [48]. Une autre étude a montré les mêmes résultats après transfert prénatal du gène ATP7B via le LV chez un modèle murin de MW, ouvrant ainsi la porte à la thérapie génique in utero [49]. Depuis peu, le vecteur LV semble être supplanté par un parvovirus plus petit et efficace appelé virus adéno-associé recombinant (rAAV)
[50]. Les premières études cliniques de phase 3 devraient commencer dans les prochains mois.
SUIVI DU PATIENT WILSONIEN Que les patients aient une forme hépatique ou neurologique, la surveillance clinique, biologique et radiologique régulière est fondamentale afin de vérifier l'efficacité et la tolérance du traitement ainsi que sa bonne observance. Le suivi est adapté à la phase du traitement. Lors de la phase initiale de chélation active, il permet de surveiller l'efficacité du traitement, de diagnostiquer les éventuelles aggravations neurologiques initiales paradoxales et les effets secondaires précoces. Lors de la phase d'entretien, le suivi se focalisera sur l'observance, le dépistage d'éventuels carcinomes hépatocellulaires compliquant les cirrhoses ou de carence en cuivre induite par une chélation trop importante et l'apparition d'effets secondaires chroniques telles que l'élastopathie sous DP.
Efficacité L'efficacité du traitement chélateur du cuivre est évaluée sur les données cliniques et biologiques qui s'améliorent progressivement en 2–6 mois pour les fonctions hépatiques avec une normalisation en un an. Les signes neurologiques mettent de
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Figure 4. Orientation diagnostique devant un bilan du cuivre perturbé.
leur côté parfois des années à disparaître, des séquelles étant possible. Le bilan cuprique se modifie sur plusieurs semaines dès que la dose efficace est atteinte : cuprurie des 24 h élevée sous chélateurs et basse sous sels de zinc, normalisation du cuivre échangeable. La céruloplasmine reste le plus souvent basse comme la cuprémie totale et le REC élevé, ces trois derniers marqueurs ayant peu d'intérêt dans le suivi.
Observance L'inobservance au traitement est le problème majeur le plus souvent rencontré dans cette pathologie chronique et qui peut conduire à des hépatites fulminantes ou à l'apparition ou l'aggravation parfois irréversible de signes neurologiques dans un délai variable. Le passage entre l'adolescence et l'âge adulte est la période charnière durant laquelle la compliance au traitement est la plus délicate.
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Fréquence du suivi Après initiation du traitement, les patients doivent être réévalués très souvent, la fréquence étant aussi adaptée à la sévérité de leur atteinte. Dans notre expérience, tout patient, même asymptomatique, devrait avoir un suivi clinique et biologique (fonctions hépatiques et de coagulation, NFS, cuprurie des 24 h, cuivre échangeable) rapproché la première année : une fois par semaine le premier mois, puis une fois tous les quinze jours le deuxième mois, puis tous les deux mois pendant quatre mois et enfin tous les trois mois jusqu'à la fin de la première année de traitement. L'IRM cérébrale sera recontrôlée à six mois puis un an si elle était anormale initialement et en fonction de l'état clinique. L'anneau de Kayser–Fleischer pourra être ré-évalué annuellement jusqu'à disparition. Lors de la phase d'entretien, un suivi clinique et biologique semestriel est recommandé. L'échographie abdominale
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couplée à un Fibroscan® sera réalisée à chaque visite semestrielle si une cirrhose est présente afin de détecter précocement un carcinome hépatocellulaire et de suivre l'élasticité du foie. En cas de doute sur un nodule > 1 cm, une IRM hépatique est préconisée ; le bilan radiologique sera annuel si les signes de cirrhose ne sont pas détectés.
cuivre (malabsorption, résection de l'estomac ou de l'intestin, chirurgie bariatrique) ou une intoxication par le zinc qui entre en compétition avec l'absorption du cuivre au niveau des entérocytes (abus de pate dentaire riche en zinc).
CONCLUSION DIAGNOSTICS DIFFÉRENTIELS À ÉVOQUER DEVANT UN BILAN CUPRIQUE ANORMAL D'autres pathologies rares en dehors de la MW doivent être évoquées devant un bilan du cuivre anormal. L'âge de découverte des anomalies est un élément clé d'orientation (Fig. 4). La majorité des diagnostics différentiels sont des maladies génétiques rares, mais la carence en cuivre est un autre diagnostic non héréditaire important à évoquer, car la supplémentation en cuivre peut améliorer le pronostic fonctionnel des patients. Elle se manifeste initialement par une anémie, une leucopénie puis par un tableau médullaire avec ataxie proprioceptive progressive sur quelques semaines et parfois un tableau complet de sclérose combinée de la moelle. La cuprémie et la céruloplasmine sont basses et la cuprurie normale ou basse. L'IRM médullaire montre un hypersignal des cordons postérieurs de la moelle cervicothoracique, identique à celui des carences en vitamine B12. Les principales causes sont un trouble de l'absorption intestinale du
La connaissance de la maladie de Wilson continue à évoluer grâce notamment aux données précieuses (car rares) du registre Wilson France et à la mise en place du centre de référence et des centres de compétence à travers l'ensemble du territoire. Le dosage du cuivre échangeable permet un diagnostic rapide et fiable via le REC et permet d'initier rapidement un traitement chélateur en attendant le résultat définitif de l'étude génétique. La greffe hépatique fait partie de l'arsenal thérapeutique et peut avoir sa place dans les cas d'aggravation neurologique fulminante résistante aux traitements chélateurs habituels. Le futur est prometteur avec le développement de nouvelles thérapeutiques efficaces notamment la thérapie génique dont les études de phase 3 débutent. Remerciements Les auteurs remercient Emeline Ruano pour son aide logistique précieuse. Déclaration de liens d'intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d'intérêts.
Points essentiels La MW est une maladie génétique rare de surcharge en cuivre, curable ; l'atteinte est initialement hépatique puis multisystémique et devient létale en absence de traitement pris à vie ; la prévalence clinique en France de la MW est de 1,5/ 100 000, mais la prévalence génétique apparaît bien plus importante autour de 1/7 000. Une pénétrance incomplète du gène ou la présence de gènes modificateurs pourrait expliquer le décalage important entre les données cliniques et génétiques ; 6 % des patients français déclarent la MW après 40 ans ; le ratio (Cuivre échangeable/cuivre total) appelé REC permet le diagnostic de MW avec une sensibilité et une spécificité proche de 100 % lorsqu'il est >18,5 % ; le cuivre échangeable au diagnostic est un marqueur de l'atteinte extra-hépatique (cornéenne et cérébrale) et de sa sévérité ; le traitement comporte une phase initiale de chélation active par un chélateur (Trolovol® ou Trientine®) puis une phase d'entretien par Trientine® ou Wilzin® ; dans les situations d'aggravation neurologique grave malgré le traitement médical bien conduit par chélateur, la greffe hépatique peut être discutée au cas par cas par l'ensemble des spécialistes du centre de référence de la MW ; le développement de la thérapie génique arrive aux études de phase 3.
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