Psychologie française 58 (2013) 17–40
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Article original
La robotique éducationnelle : état des lieux et perspectives夽 Educational robotics: Survey and perspectives I. Gaudiello 1, E. Zibetti 2,∗ EA 4004, laboratoire Chart-Lutin (cognition humaine et artificielle), EPHE Paris, Cité des sciences et de l’industrie, université Paris 8, 2, rue de la Liberté, 93526 Saint-Denis cedex 02, France
i n f o
a r t i c l e
Historique de l’article : Rec¸u le 5 octobre 2011 Accepté le 28 septembre 2012 Mots clés : Robotique éducationnelle Kit robotique - TICE Innovation pédagogique Transfert de compétences
r é s u m é La relation dyadique entre progrès technologique et finalités éducatives a récemment engendré un nouveau champ de recherche, à la croisée de la psychologie, des sciences de l’éducation et de l’intelligence artificielle : la robotique éducationnelle (RE). Cet article fournit un état de l’art critique sur la RE, ses origines et son positionnement au sein des technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement (TICE). Il analyse les finalités éducatives atteignables en fonction du statu et des modalités d’apprentissage spécifiques aux différents types de robot. Parmi eux, une attention particulière est accordée aux kits robotiques. L’accent est mis sur le potentiel pédagogique qu’ils offrent, notamment en termes de transfert de compétences, et sur les limites à dépasser pour relever le défi de leur intégration en milieu scolaire. © 2012 Publié par Elsevier Masson SAS pour la Société française de psychologie.
a b s t r a c t Keywords: Educational robotics Robotic kit-ICTE Pedagogical innovation Competences transfer
The dyadic relation between technological progress and educational objectives has recently engendered a new field of research at the crossroads of psychology, science education and artificial intelligence: Educational Robotics (ER). This article provides a critical state of the art about ER, its origins and its position in the world of ICTE. It analyzes the educational goals that are achievable according
夽 Ce manuscrit n’a pas été antérieurement publié ni a été soumis simultanément pour publication dans une autre revue. ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (E. Zibetti). 1 Doctorante Université Paris VIII. 2 Maître de Conférences Université Paris VIII. 0033-2984/$ – see front matter © 2012 Publié par Elsevier Masson SAS pour la Société française de psychologie. http://dx.doi.org/10.1016/j.psfr.2012.09.006
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to the status and the specific learning modalities of the different types of robot. Among these different types, a special attention is paid to the robotics kits. Emphasis is given on the educational potential they offer, especially in terms of competences transfer, and on the limits to be overcome in order to meet the challenge of their integration in the school programs. © 2012 Published by Elsevier Masson SAS on behalf of Société française de psychologie.
La robolution n’est pas une figure de style ni un lifting marketing. C’est un nouveau prisme de lecture des sciences et de techniques. Cette robolution engendre tellement de bouleversements dans notre quotidien qu’il est capital d’adopter une démarche pédagogique à côté de celle économique. (. . .) La plupart de robots sont des produits nouveaux dont la valeur perc¸ue est souvent bien supérieure à la valeur réelle. (. . .) B. Bonnel, Viva la Robolution (2010), 279–284. 1. Introduction Depuis les années 1980, la démocratisation de la technologie dans les sphères du travail, de l’éducation et dans le domaine ludique a ouvert la voie à des nouveaux modes d’apprentissage. À l’aube de l’introduction des ordinateurs dans nos sociétés, Seymour Papert et Cynthia Solomon publient « Vingt choses à faire avec un ordinateur »3 . Ces auteurs constatent que, lorsque les individus sont interrogés sur leur vision des ordinateurs dans l’éducation, ils évoquent des représentations assez diverses. Certains évoquent l’utilisation de l’ordinateur pour « programmer » les jeunes élèves, d’autres l’engagement des élèves pour programmer l’ordinateur. En ce début de siècle, une nouvelle révolution technologique s’impose et marque ce qu’on appelle déjà l’ère du robot. L’utilisation de la robotique est encouragée dans plusieurs domaines du quotidien, dont le milieu éducatif (Bonnel, 2010). Il convient de considérer avec prudence les promesses d’une révolution qui pourrait paraître dictée par le développement industriel et le progrès technologique plus que par des finalités éducatives spécifiques. C’est pourquoi il reste indispensable de dessiner des usages et des applications constructives pour son intégration dans le système éducatif. D’où l’émergence d’un champ d’étude spécifique : la robotique éducationnelle (RE). Elle vise à introduire au sein de l’école une gamme technologique d’intelligences artificielles incarnées (robots humanoïdes, animats4 , robots évolutifs, kits robotiques). Son but est de favoriser et renouveler l’enseignement du côté des éducateurs et l’apprentissage du côté des élèves (Denis & Baron, 1994). Au bout de 30 ans, les temps sont matures pour commencer à dresser les contours de ce nouveau champ de recherche et à réfléchir aux « Vingt choses à faire avec un robot », en particulier avec un robot éducatif. Cet article vise donc à donner un aperc¸u de la nature de la RE, en passant par une série de questions : les robots sont-ils des outils techno-pédagogiques comme des autres ou présentent-ils des caractéristiques particulières par rapport aux technologies implémentées auparavant (Druin & Hendler, 2000) ? La technologie robotique en soi peut-elle avoir un impact sur le développement des compétences chez les élèves ou y a-t-il des « customisations » à apporter en ce qui concerne les démarches pédagogiques en œuvre (Bottino & Chiappini, 2002) ? Dès lors, pour faire de cette nouvelle technologie un outil techno-pédagogique efficace pour l’apprentissage, n’est-il pas nécessaire de se pencher attentivement sur les finalités éducatives5 que l’on souhaite atteindre grâce aux spécificités de cette nouvelle technologie (Resnick & Wilensky, 1993) ? Et enfin, ne faut-il pas trouver des critères d’évaluation appropriés (Nourbakhsh, Hamner, Dunlavey, Bernstein & Crowley, 2005) ?
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Twenty things to do with a computer, Papert & Solomon (1972). Le terme « animat » a été introduit par Wilson (1985). Un animat est un animal simulé ou un robot dont la structure et les fonctionnalités sont inspiré des modèles biologiques actuels. 5 L’expression “finalités éducatives” demeure sans doute assez approximative. Les questions posées à ce sujet par Resnick & Wilensky (1993) nous aident à mieux spécifier le sens de cette expression : « Quel type d’apprentissage peut être nourri dans un environnement pédagogique basé sur la construction, la programmation et le contrôle des robots ? Quels sens et quels concepts peuvent être appréhendés dans ce contexte ? ». 4
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Ces questions sont cruciales pour définir le rôle de la robotique dans l’univers éducatif et envisager son développement. Afin d’y répondre, nous serons amenés à décrire dans un premier temps les origines historiques de la RE et son positionnement au sein des technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement (TICE) pour clarifier son implication dans la pédagogie (Chapitre 2). Dans un deuxième temps, on examinera un type particulier de robot éducatif : le kit robotique. Les théories, approches, scénarisations et les premiers résultats qui concernent l’application de ce dispositif technologique dans des contextes scolaires et parascolaires seront résumés (Chapitre 3). Cela permettra d’identifier les sujets clé du débat autour de son implémentation en milieu éducatif, ses atouts, notamment sur le thème crucial du transfert. Les contraintes, la redéfinition des objectifs pédagogiques et les méthodes d’évaluation seront également examinées (Chapitre 4). Cela nous conduira à un premier bilan des bénéfices attendus et des risques potentiels sur la base des espoirs et des préoccupations soulevés par la communauté des enseignants et des chercheurs (Chapitre 5). Enfin, nous conclurons sur les aspects à prendre en compte pour un développement des technologies robotiques, dont les effets sur l’apprentissage soient profitables au-delà de l’engagement à court terme de l’élève provoqué par la nouveauté de l’outil (Chapitre 6). 2. Origines, positionnement et implications pédagogiques d’un champ de recherche émergent La RE naît à une période où l’écart séparant la jeune génération d’utilisateurs des technologies « digital natifs » et la génération précédente « digital immigrants » devient manifeste en termes de maîtrise de ces technologies et de fac¸on de penser (Prensky, 2001). Cet écart techno-générationnel débouche dans le domaine de l’éducation sur des avis partagés. Le clivage passe par l’intégration des robots éducatifs dans les programmes scolaires de sciences et technologie, ou au contraire par le fait de les cantonner à des activités parascolaires (Arroyo, Arroyo & Schwaartz, 2003). Certes, la question d’une éducation aux technologies n’est pas nouvelle, mais celle d’une éducation à ce type spécifique de technologie – la robotique – l’est suffisamment pour exiger des clarifications initiales. En effet, tout en étant « encore à ses balbutiements » (Mataric, 2004), la RE présente déjà trois caractéristiques saillantes : • un héritage pluridisciplinaire ; • un positionnement spécifique du robot éducatif parmi les TICE ; • des combinaisons diverses hardware-software qui engendrent différentes exploitations didactiques. Afin de mieux saisir l’identité de la robotique éducative et la situer par rapport au passé et au présent de l’éducation numérique, nous allons donc aborder ces trois caractéristiques dans les chapitres qui suivent. 2.1. Un héritage pluridisciplinaire Un bilan des recherches réalisées en RE montre que ce champ de recherche est au carrefour de plusieurs disciplines des sciences cognitives : la psychologie, les sciences de l’éducation et l’intelligence artificielle (IA). Pour commencer, les études fondamentales de la psychologie cognitive sur l’acquisition du raisonnement abstrait chez l’enfant (Piaget, 1952), sur l’apprentissage intrinsèquement versus extrinsèquement motivé (Lepper & Henderlong, 2000), sur les stratégies de résolution de problème chez les novices et les experts (Polya, 2007), et sur la métacognition (Gagné, Leblanc & Rousseau, 2009) sont incontournables si l’on veut mettre en évidence les processus mentaux sous-jacents à l’utilisation d’une nouvelle technologie et en étudier les apports en termes d’apprentissage (Andler & Guerry, 2008). Les sciences de l’éducation constituent le deuxième domaine disciplinaire sur lequel s’appuie la RE. En tant que champ dédié à rendre opérationnels les résultats théoriques sur les mécanismes cognitifs à l’œuvre pendant l’apprentissage (Meltzoff, Kuhl, Movellan & Sejnowski, 2009), il fournit un répertoire d’études de cas qui rend compte des pratiques pédagogiques courantes (Bru & Donnay, 2002), des
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conditions de la réussite scolaire avec son effet sur le life-long learning (voir OECD (2010)6 , PISA7 2009 Results) et des directives pour l’amélioration du système éducatif (Vosniadou, 2001). Le troisième domaine sur lequel s’appuie la RE est celui de l’IA (Heudin, 1994), plus récemment déployée comme informatique cognitive (Wang et al., 2010). Ces dernières années, ce domaine de recherche s’est lancé des défis importants, aboutissant à l’application de l’IA dans des robots aux aspects, aux fonctionnalités et aux usages variés. Dans cette logique, la RE confronte les jeunes élèves au défi d’approcher des entités – les robots – qui brouillent la limite entre « vivant » et « non-vivant », d’explorer de nouveaux modes d’interaction avec celles-ci par des application programming interface (API) (Turkle, 1995) et d’en contrôler le comportement (Martin, Mikhak, Resnick, Silverman & Berg, 2000). Au fur et à mesure que la robotique gagne du terrain dans le domaine scolaire et parascolaire et que les études de cas se multiplient, ces héritages disciplinaires débouchent sur une analyse qui permet de situer les robots éducatifs par rapport aux TICE qui les ont précédés. Intégrant les considérations théoriques développées lors de l’implémentation des ordinateurs dans les écoles, la robotique éducative attribue un statut et des modalités d’apprentissage spécifiques à ces nouveaux dispositifs éducatifs. 2.2. Le robot éducatif : une technologie de l’information et de la communication pour l’enseignement comme une autre ? Dans les 20 dernières années, différents types de technologies ayant des finalités éducatives diverses ont fait leur apparition. Les logiciels éducatifs, par exemple, visent un apprentissage interactif (de Vries, 2001). Le e-learning, l’apprentissage à distance (Rosenberg, 2001) et le cartable électronique (Tijus, Poitrenaud, Bouchon-Meunier & De Vulpillières, 2006) permettent des parcours pédagogiques personnalisés. L’ensemble des savoirs et des réflexions critiques sur l’assimilation de ces TICE au sein des environnements scolaires donne lieu à de nombreuses interrogations. Par exemple, « Quel est le rôle des médias dans l’éducation ? Quel est le rôle de l’ordinateur parmi ces médias ? ». À ces questions on rajoute, suite à la naissance de la RE, des interrogations ultérieures : en quoi le robot ressemble-t-il à ses prédécesseurs, par exemple l’ordinateur ? En quoi s’en différencie-t-il ? Pour commencer, deux caractéristiques peuvent faire l’objet d’une comparaison entre ordinateur et robot : le statut et les modalités d’apprentissage. En ce qui concerne le statut, l’ordinateur présente une double singularité : c’est une machine que l’on peut aborder en tant qu’objet et en tant que TICE (Andler & Guerry, 2008). En tant que TICE, il représente une ressource pour l’innovation pédagogique et se décline en médium, matière et outil de production (Baron & Bruillard, 1996). À travers le médium, les élèves approchent des logiciels qui sont conc¸us pour instrumenter les activités d’enseignement et permettre l’acquisition des nouvelles connaissances. L’acception de matière fait plutôt appel à la fonctionnalité de gestion et traitement d’information spécifique à un certain domaine. Enfin, l’ordinateur comme outil de production sert à l’élaboration de textes et des calculs. Cette distinction est également applicable au statut du robot. Le robot se situe entre un objet (c.-à-d., un dispositif technologique à construire et programmer) et un outil éducationnel par le quel concrétiser et transmettre des contenus d’apprentissage et des savoirs faire (Ionita & Ionita, 2007). En RE, l’aspect d’outil éducationnel s’additionne à celui d’objet, la différentiant en cela de l’éducation à la robotique dont le but éducationnel est uniquement l’étude du robot en tant qu’objet (son assemblage et son fonctionnement) (Mikropoulos & Bellou, 2006). En ce qui concerne les modalités d’apprentissage, en interaction avec l’ordinateur, les élèves peuvent apprendre « via » (from) ou « avec » (with). Dans le premier cas, la technologie sert à augmenter les connaissances des élèves. C’est le cas des logiciels éducationnels qui visent la compréhension des concepts scientifiques et mathématiques (Bottino & Chiappini, 2002). Dans le deuxième cas, la
6 Organisation for Economic Co-operation and Development. Source : « The OECD’s Online Library of Statistical Databases, Books and Periodicals », http://www.oecd-ilibrary.org/. 7 PISA : Programme for International Student Assessment, enquête internationale, mise en place par l’OCDE, évaluant les performances des élèves de 15 ans.
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technologie peut être appliquée à une variété de buts dans le processus d’apprentissage8 et servir de ressource pour aider à développer une pensée d’ordre supérieur (Ringstaff & Kelley, 2002). C’est le cas de certains logiciels éducationnels, qui visent le développement de compétences métacognitives (Zibetti, Chevalier, & Eyraud, 2011), ou d’autres encore qui visent à favoriser la motivation et l’engagement des élèves (Prensky, 2005). De la même fac¸on, le potentiel pédagogique des robots éducatifs est étroitement lié aux modalités d’apprentissage permises par un type spécifique de robot. En se penchant sur la littérature en RE, on distingue trois modalités d’apprentissage qui peuvent en être dégagées (Tejada et al., 2006). La première est celle de l’apprentissage de la robotique, à travers laquelle le robot est utilisé comme plateforme d’exercice de mécanique, électronique, informatique (Alimisis, 2009). La deuxième consiste en l’apprentissage avec la robotique, notamment les compagnons robotiques (e.g., le robot Roboovie) qui se situent « au même niveau » que l’élève, et qui donc apprennent en même temps que lui. Par exemple, l’enfant, en interagissant avec le robot, apprend et fait apprendre au robot du vocabulaire d’une langue étrangère (Kanda, Hirano, Eaton & Ishiguro, 2004). La troisième est celle de l’apprentissage par la robotique, comme dans le cas des robots-assistants à l’enseignement (e.g., le robot Irobi) qui exploitent des dispositifs de projection, d’interaction verbale, etc., à l’instar d’un support de scénarisation multimodal des lec¸ons à l’usage de l’enseignant (Hyun, Kim, Jang & Park, 2008). À l’issue de cette comparaison entre ordinateur et robot comme TICE, il convient de mettre en évidence deux spécificités du robot. La première est que le robot se distingue par sa nature d’objet réel et systémique qui s’oppose à celle d’artefact virtuel et intégré caractérisant le logiciel éducationnel sur l’ordinateur (Hsu, Chou, Chen, Wang & Chan, 2007). En tant qu’ensemble mécanique et électronique, le robot est un dispositif contrôlable par l’ordinateur (d’où le système ordinateur-robot) avec différents degrés de transparence (i.e., programmabilité) et interactivité (i.e., délai de feed-back) (Gaudiello, Zibetti & Pinaud, 2012). La seconde spécificité est sa disposition à pouvoir combiner l’apprentissage de la robotique et par la robotique : outre la maîtrise de l’objet technologique en soit, l’implémentation des robots comme objets et outil éducatifs propose la possibilité de donner un habillage tangible aux contenus et aux exercices scolaires. Par conséquent, ses finalités éducatives sont davantage tributaires de la structure hardware et software des différentes typologies de robots. 2.3. Les finalités éducatives servies par la typologie hardware/software du robot Plusieurs programmes de recherche et groupes de réflexion ont été mis sur pied au plan national (e.g., RASPO9 ; COMPAS10 ) et international (voir les rapports de Frangou et al., 2008) pour développer de nouveaux usages des technologies robotiques et les intégrer au domaine de l’éducation. Aujourd’hui, on observe que la structure hardware/software du robot est le pivot autour duquel s’articulent le statut, les modalités d’apprentissage, et les finalités éducatives (Tableau 1). Par exemple, dans le cas des robots humanoïdes, l’accent est plutôt mis sur l’aspect hardware. La physionomie humaine de ces robots (e.g., Qrio, Rubi, Roobovie, Nao, Roboto, Asimo, ICube, etc.) a pour finalité de provoquer des réactions empathiques et de créer des interactions cognitives et sociales, supposées favoriser les apprentissages scolaires (Chang, Lee, Chao, Wang & Chen, 2010). En ce qui concerne les animats ou robots-animaux aussi (Aibo, Furby, etc.) c’est l’aspect hardware qui est privilégié, à fin d’étudier la différence entre les schémas d’interaction humaine avec les animaux vivants et avec les animats (Kerepesia, Kubinyib, Jonssonc, Magnussonc & Miklósib, 2006). Ces deux types de robots (humanoïde et animat) se caractérisent généralement par un statut de technologie interactive mais « pas transparente » ou « black box » (Kynigos, 2008), c’est-à-dire hermétiques à la programmation de leur comportement par l’élève. Dans cette première catégorie de robots les aspects software ne jouent qu’un rôle secondaire dans l’apprentissage. En revanche, l’attention accordée à l’aspect software a su engendrer la production de langages de programmation de haut niveau (Logo, Alice, etc.) spécifiquement conc¸us pour faire réaliser aux élèves 8 En général l’apprentissage peut être conc¸u en termes d’acquisition de connaissances, de compétences et d’habilités (Hoskins & Fredriksson, 2008).Voir Chapitre 4 pour approfondissement. 9 RASPO : http://www.capdigital.com/projet-raspo/. 10 COMPAS : http://compas.risc.cnrs.fr/.
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Tableau 1 Types et fonctions des robots en relation avec leurs statuts, finalités éducatives et modalités d’apprentissage en éducation à la robotique et robotique éducationnelle. Types and functions of robots along with their status, educational objectives and learning modalities in robotics education and in educational robotics. Type de robot Éducation à la robotique Robot mobile (e.g. Khepera) Bras robotique (e.g. Lynx Arm) Robot auto-reconfigurables (e.g. Hydra)
Robot adaptatif (e.g. Psikharpax) Animat (e.g. Furby)
Robotique Éducationnelle Humanoïde (e.g. Roboovie, Nao) Animat (e.g. Pleo) Humanoïde (e.g. Irobi) Kit Robotique (e.g. Lego Mindstrom NXT)
Fonction du robot
Plateforme de construction et programmation Plateforme de construction et programmation Plateforme de programmation par la construction (« program by building ») Plateforme de test des hypothèses de recherche Robot domestique
Statut
Objet
Modalité d’apprentissage
De
Finalité éducative
Maîtrise des mécanismes de contrôle Maîtrise des mécanismes de contrôle Conception d’artefacts intelligents
Études sur la robotique biomimétique Apprentissage ludique de la robotique
Compagnon
Outil
Avec
Assistant à l’enseignement Matériel de scénarisation
Outil
Par
Objet & outil
De & par
Co-apprentissage, apprentissage des langues étrangères, remédiation. Apprentissage multimodale Apprentissage de compétences cognitives et métacognitives
des tâches de dessin ou des déplacements de robots virtuels sur l’écran mais adaptables également à des robots réels (Scratch, Roboprog, etc.). La finalité éducative de ce type de technologie est essentiellement l’enseignement de la programmation et l’explication des notions de mathématiques (Conway, Pausch, Gossweiler & Burnette, 1994 ; Resnick et al., 2009). Enfin, un secteur spécifique est celui des kits robotiques assemblables et programmables comme Lego Mindstorm RCX – et son successeur NXT – Lego WeDo, Pico Cricket, Roboloid Fischertechnik, K’NEX, etc. Cette dernière typologie de robots, contrairement aux deux précédemment décrites, présente à la fois de vastes possibilités de construction et de programmation. Il se caractérise donc à la fois comme une technologie interactive et transparente. Une telle combinaison semble favoriser une approche éducative au profit de l’élève. C’est la philosophie de « playing piano, not stereos » (Resnick, Martin, Sargent & Silverman, 1996) qui donne à l’élève l’occasion de devenir auteur plutôt que consommateur de technologie, et qui introduit la différence cruciale entre « robots à utiliser » et « robots avec lesquels penser ». Pour cette raison le kit robotique est de plus en plus perc¸u dans la communauté des chercheurs et des éducateurs comme un atout pour l’éducation et un moyen de sensibilisation aux futurs scénarios d’apprentissage (Papert, 2000). Cette liste de robots éducatifs n’a pas la prétention d’être exhaustive. L’exhaustivité est difficile à cause de l’évolution rapide des technologies. Pire, une telle liste risque de tomber dans le piège du « catalogue de vente » pointé par de Vries (2001). Autrement dit, une classification des technologies éducatives basée uniquement sur les caractéristiques hardware-software risque de sous-estimer la nature intrinsèquement dyadique de la relation entre finalités éducatives et
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technologies éducatives. Si l’utilisation des technologies éducatives peut préfigurer de nouvelles fonctions à inclure dans la technologie, ces nouvelles fonctions peuvent faire évoluer les modèles des pratiques et renouveler à leur tour les finalités éducatives qui ont inspiré la construction de la technologie elle-même. Par exemple, une première réflexion sur les « Vingt choses à faire avec un robot éducatif » par Resnick et al. (1996) a abouti à une liste de 20 idées d’activités à expérimenter avec les kits robotiques Lego (voir Annexe dans Resnick et al., 1996). Dans cette optique, nous engageons une réflexion critique sur un type de robotique spécifique où la relation dyadique entre technologie et finalités éducatives est équilibrée. Cette technologie est le kit robotique assemblable et programmable. 3. Focus sur les kits robotiques pour l’apprentissage : dès théories aux premiers résultats Les kits robotiques se prêtent au développement d’un large éventail d’activités éducatives. Pour cette raison la définition d’ « outil-caméléon » attribuée aux technologies éducatives au sens large (Strommen & Lincoln, 1992) semble particulièrement leur convenir. La dimension « low floor, high ceiling and wide walls » (Papert, 1981) de ces dispositifs permettrait aux enseignants et aux élèves d’avoir une approche simplifiée de la robotique (« low floor »), de réaliser des projets de plus en plus complexes et diversifiés (« high ceiling »), afin de motiver les élèves aux styles d’apprentissage différents (« wide walls »). Dès les années 1980, les pratiques éducationnelles ont proposé l’encadrement d’activités d’apprentissage attrayantes pour les élèves, dont l’un des atouts majeurs réside dans le fait que l’élève est incité à donner une forme (par la construction) puis un comportement (par la programmation) à un objet de sa propre création. Par conséquent, la rencontre avec le kit robotique, selon Ackermann (1991), permettrait à l’élève d’endosser le rôle d’« ingénieur » et de « psychologue » en même temps. Il devient auteur de technologie et s’interroge sur la nature de l’objet auquel il fait face (son « intelligence », ses possibilités de comportements, etc.). Cette vision est résumée par le célèbre slogan de Resnick et al. (1996), « les choses qui pensent sont plus intéressantes quand elles agissent également comme des choses avec lesquelles penser »11 . La robotique devient alors un moyen séduisant de mettre en pratique des notions didactiques (Goldman, Eguchi & Sklar, 2004 ; Kröse, Bogaard & Hietbrink, 2000) dont la scénarisation repose sur des bases théoriques qui légitiment la mise en œuvre de certaines approches spécifiques, abordées dans la section suivante. 3.1. Les kits de robotiques : théories, approches et scénarisations Chaque innovation technologique s’accompagne de l’élaboration d’un appareillage théorique (Salomon & Perkins, 1996). Dès sa naissance, la RE tend à établir un passage de l’instructionnisme12 au constructionnisme (Papert, 1980). D’où, l’élaboration du constructivisme guidé (Lund & Pagliarini, 2000), qui établit le cadre épistémologique de la RE (Ackermann, 2001 ; Alimisis & Kynigos, 2009). Issue des théories pédagogiques de tradition plus ancienne – comme le constructivisme de Kelly (1955) et de Piaget (1972) – le constructionnisme et le constructivisme guidé soulignent le fait que l’acquisition de connaissances n’est pas une simple question de transmission, d’internalisation ou d’accumulation de savoirs, mais plutôt une question d’engagement actif de l’apprenant dans la construction des connaissances à partir de l’expérience concrète et des informations fournies par l’enseignant (Salomon & Perkins, 1996). De ce point de vue, les activités pédagogiques de la RE sont porteuses d’une action organisatrice grâce à la quelle les élèves externalisent les connaissances activement construites à l’appui d’un objet concret – le robot – et tissent des liens personnels et épistémologiques avec d’autres connaissances dans d’autres domaines (Papert, 2000).
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“Things that think are more interesting when they also act as things to think with” (Resnick et al., 1996). L’instructionnisme renvoie à des pratiques qui sont axées sur l’enseignant, fondées sur les compétences, orientées vers le produit, non interactives et très prescriptives (Johnson, 2005). 12
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Aujourd’hui, les nombreuses applications des kits éducatifs dans le milieu scolaire ont permis le développement du noyau théorique constructiviste fournissant des indications concrètes pour faire évoluer les théories éducatives (Catlin & Blamires, 2010). Ces principes ont l’objectif de définir l’adaptabilité des kits robotique aux différentes contextes éducatifs en termes : • • • •
d’environnement culturel : principes d’apprentissage durable et de pertinence vis à vis du curriculum de type de robot : principes d’intelligence, interaction et embodiment ; de rôle de l’enseignant : principes pédagogique, de la méthode et de la pratique et ; de l’élève : principes de personnalisation, équité, engagement.
Les approches du serious game ou edutainment (Van Eck, 2010), du teaching by design (Dick, Carey & Carey, 2004), de la pédagogie du projet ou project based learning (Huber, 1999), de l’apprentissage par problèmes ou problem based learning (Kiili, 2007) et le learning by doing (Schank, Berman & Macpherson, 1999) qui contribuent à la création d’un environnement éducatif immersif ont inspiré le développement de la RE. Dans la lignée de cette littérature, la RE kit est souvent présentée comme une alternative aux méthodes traditionnelles. Elle est susceptible d’exploiter des matériaux similaires à ceux que les élèves ont dans leur coffres à jouets à la maison – les briques Lego® (serious game), de customiser des outils éducatifs (teaching by design) et de prendre en charge des activités (project based learning), dans des projets où l’apprentissage est guidé par la résolution de problèmes (problem based learning) tout en découvrant et en s’appropriant de la théorie dans la pratique (learning by doing). De ces approches, l’apprentissage par la résolution de problèmes est aujourd’hui la plus diffusée pour scénariser les activités en RE kit. Elle permet une organisation pratique des séances didactiques par unités13 ayant un déroulement et un objectif déterminé, tout en impliquant l’élève dans une procédure de résolution ouverte (open-ended activity) (Barak & Zadok, 2009). Dans l’une des initiatives les plus riches proposées à ce jour, qui emploie des kits robotiques (Terecop14 ), une organisation praxéologique est justement suggérée pour articuler les problèmes dans une succession allant des problèmes de la même classe de comportement des robots, aux problèmes d’une nouvelle classe de comportement des robots, jusqu’aux problèmes de comportement conditionnel (ou adaptés au contexte). Selon les auteurs de cette initiative, un enseignement, qui emploie des kits robotiques devrait inclure la résolution par les élèves d’une série de problèmes qui se référent à une classe de comportement du robot, ainsi que le transfert des compétences de résolution à une nouvelle classe de comportement. Ce corpus de théories, approches et scénarisations débouche sur un ensemble d’étude appliquées qui peuvent commencer à être systématisées en termes de types d’activité, finalités éducatives, mesures d’évaluation et résultats obtenus au sein de trois contextes éducatifs : scolaire, parascolaire, et formation des enseignants (Tableau 2a à c). 3.2. L’implémentation scolaire et parascolaire des kits robotiques Un bilan des travaux actuels révèle que cette technologie éducative est majoritairement employée pour accompagner l’apprentissage de la robotique plus que comme outil techno-pédagogique ouvrant à de nouvelles formes d’apprentissage. Les robots sont exploités comme plateformes de construction et programmation finalisées à la maîtrise des technologies de contrôle – la réalisation de mécanismes d’ouverture et fermeture - e.g. le robot Lego (Mioduser, Venezky & Gong, 1996) – la création des
13 L’analyse de la littérature révèle la présence de schémas chronologiques qui découpent les phases d’activités de la robotique de fac¸on à les rendre planifiables pour les enseignants et analysables par les chercheurs lors de leur conception et évaluation. Barker & Ansorge (2007), par exemple, proposent d’articuler les activités en cinq phases : (1) l’expérience, c.-à-d. la réalisation de l’activité, (2) le partage des réactions et des observations dans un contexte social, (3) le processus, c.-à-d. l’analyse et la réflexion sur la réalisation de l’activité, (4) la généralisation de ce qui a été appris à des situations nouvelles, et (5) son application réitérée dans des situations semblables ou différentes. De même, Frangou et al. (2008) distinguent cinq étapes successives : l’engagement, l’exploration, l’enquête, la création, et l’évaluation (Frangou et al., 2008). Enfin, Atmatzidou et al. décrivent six phases de formation suivie d’une phase de défi (Atmatzidou, Markelis, & Demetriadis, 2008). 14 TERECoP : http://www.terecop.eu/.
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Tableau 2a Types d’activités scolaires et de finalités éducatives en correspondance avec leurs méthodes d’évaluation et résultats obtenus. Types of curricular activities and of educational objectives with relation to evaluation methods and obtained results. Activité
Finalité éducative
Évaluation
Résultats obtenus
Référence
Conception, construction et programmation de mécanismes automatisés
Compréhension du flux d’informations au sein du système
Qualitative : analyse des plans dessinés et des modèles construits
Mioduser, Venezky, & Gong, 1996
Conception, construction et programmation (tâches littéraires et scientifiques)
Compréhension et rédaction de textes Compréhension de concepts de sciences et ingégnerie
Construction et programmation (résolution de problèmes mathématiques à l’appui du robot versus résolution de problèmes mathématiques sans robots)
Quantifier l’impact de la robotique éducative sur la capacité de résolution de problèmes mathématiques et sur l’attitude des élèves vers les robots
Qualitative : analyse des logs pour observer la complexification de la conception et l’application des concepts de sciences et ingénierie Qualitative : observations et entretiens Quantitative : pré et post-test (mathématiques et résolution de problèmes)
Construction et programmation de véhicules robotiques
Observer quelle typologie de scaffolding révèle le développement des capacités de résolution de problèmes
Qualitatives : analyse des projets, cahiers et vidéos
Conception, construction et programmation pour compétition robotique interne
Quantifier l’impact de la robotique sur la motivation et sur les capacités en ingénierie
Quantitative : questionnaires sur la motivation et sur 17 domaines de l’ingénierie
Mise en évidence d’une compréhension progressive de la causalité des mécanismes : quatre types de modèles mentaux (black box, reactive, switch, control). Amélioration dans les matières littéraires Meilleure compréhension des concepts scientifiques abstraits et appliqués Amélioration dans l’apprentissage des mathématiques mais pas d’amélioration significative dans la procédure de résolution de problèmes Mise en évidence de différentes styles d’apprentissage (erreurs et tentative, coopération, expertise) L’usage des diagrammes améliore la capacité de résolution de problèmes et permet à l’enseignant d’observer le développement des capacités de l’enfant Impact positif sur la motivation Amélioration des compétences en électroniques Peu d’amélioration en programmation, mécanique, physique
Rogers & Portsmore, 2004
Hussain, Lindh, & Shukur, 2006
Chambers, Carbonaro, & Rex, 2007
Ahlgren & Verner, 2003
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Tableau 2b Types d’activités parascolaires et finalités éducatives en correspondance avec leurs méthodes d’évaluation et résultats obtenus. Types of extra-curricular activities and of educational objectives with relation to evaluation methods and obtained results. Activité
Finalité éducative
Évaluation
Résultats obtenus
Référence
Conception, construction et programmation (vacances éducatives)
Acquisition du raisonnement scientifique
Application concrète du raisonnement scientifique acquis
Sullivan, 2008
Construction et programmation pour activités STEM (longue durée versus courte durée versus aucune formation) (vacances éducatives) Conception, Construction et Programmation pour des compétitions dans un cadre Inquiry Based Learning (IBL) (activités parascolaires)
Quantifier l’impact de formations robotiques de différentes durées sur l’acquisition de compétences STEM
Quantitatives : analyse de vidéos ; pré- et post-test sur l’acquisition du raisonnement scientifique Quantitatives : préet post-test sur les contenus de l’apprentissage et l’attitude vers le robot
Meilleurs résultats aux post-tests pour les enfants du groupe longue durée
Nugent, Barker, Grandgenett, & Adamchuck, 2010
Combiner l’approche IBL et la robotique éducationnelle
Qualitative : observations et analyse du cahier des activités robotiques
Eguchi & Uribe, 2012
Construction and programmation (activités parascolaires)
Vérifier l’impact de la robotique sur l’apprentissage des disciplines SET et la validité des outils d’évaluation employés
Quantitative : préet post-test sur les connaissances en sciences, ingénierie, technologie
Programmation dans un cadre IBL (ateliers du musée des sciences)
Étudier les heuristiques de contrôle
Conception, construction et programmation (Compétition RoboCup Junior et Robo Festa)
Apprentissage de la programmation et des principes de l’ingénierie
Quantitative : grille d’observation : actions, interactions, verbalisations Qualitative : entretiens et vidéos
Mise en évidence des différents type d’acquis (le ratio distance/temps ; les opérateurs du flux d’information, le travail de groupe) Amélioration des compétences SET. Les outils d’évaluation sont valides mais pas généralisables en dehors de cette étude Identification de trois heuristiques : procédurale, déclarative et métacognitive.
Conception, construction et programmation (Compétition RoboCup Junior)
Étudier la valeur éducative de la RoboCup Junior
Qualitative : entretiens avec les enseignants
Amélioration de l’apprentissage en électronique, en programmation et du travail en groupe Amélioration de 12 compétences scolaires et personnelles (i.e., confiance en soi.)
Barker & Ansorge, 2007
Gaudiello & Zibetti, accepté
Petre & Price, 2004
Sklar, Eguchi, & Johnson, 2003
nouveaux artefacts intelligents15 – e.g., le robot Hydra (Lund & Nielsen, 2003) – et la modélisation des comportements biomimétiques – e.g., le robot Psikharpax (Meyer et al., 2005). Ce n’est que très récemment que la pratique pédagogique basée sur l’apprentissage de la robotique et par la robotique (voir Chap. 1.2 – Tableau 1) est venue enrichir ce contexte éducatif (Shin & Kim, 2007 ; Gaudiello, Tijus & Zibetti, 2011).
15 Dans le projet Hydra un exemple d’artefact intelligent est le robot modulaire réalisé à travers une procédure pionnière de « program by building », où l’assemblage des différents modules correspond à la programmation même du robot (Lund & Nielsen, 2003).
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Tableau 2c Types d’activités pour la formation initiale et continue des enseignants et finalités éducatives en correspondance avec leurs méthodes d’évaluation et résultats obtenus. Types of activities for pre-service and in-service teachers’ education along with the educational objectives, the evaluation methods and the obtained results. Activité
Finalité éducative
Evaluation
Résultats obtenus
Référence
Conception, construction et programmation (formation initiale)
Appliquer les principes du constructivisme à l’école
Qualitative : cahiers, dessins, photos, présentations lors de l’implémentation au sein de l’école
Bers, Ponte, Juelich Viera, & Schenker, 2002
Conception, Construction et Programmation de robot pour l’entrainement des enseignants (Projet TERECOP) (formation continue)
Développer une méthodologie pour l’implémentation du constructivisme dans l’école primaire, secondaire et dans les universités Adaptation du contenu des matières STEM (Sciences, Technologies, Ingénierie, Mathématique) chez un public féminin
Qualitative : rapport d’activités lors de l’implémentation au sein de l’école
Les enseignants semblent prêts à prendre en charge la conception des activités. Les enfants maîtrisent de la technologie et acquièrent confiance en soi Les activités passent d’ouvertes à structurées La maîtrise des activités passe progressivement des éducateurs aux élèves Amélioration dans l’estime de soi et les capacités techniques
Construction et programmation de robots Lego pour des activités de biologie adaptées à un publique de filles (projet ROBERTA) (formation continue)
Méthodes qualitatives observation, self-évaluation, etc.
Frangou et al., 2008
Bredenfeld & Leimbach, 2010
La carence d’études expérimentales complètes, de descriptions détaillées des protocoles utilisés et les méthodes d’évaluation employées ne permettent pas encore un travail approfondi de métaanalyse de la littérature. Néanmoins, un premier état de l’art peut commencer à être dressé. Les trois tableaux synoptiques ci-après (Tableau 2a à c) donnent un aperc¸u de quelques études significatives de l’implémentation des kits robotiques dans les domaines de l’éducation scolaire et parascolaires et engage une réflexion critique de leur l’impact sur l’apprentissage. Première remarque, cinq seulement des 25 études considérées (Hussain et al., 2006 ; Denis & Hubert, 2001 ; Lindh & Holgersson, 2007 ; Pásztor et al., 2010 ; Nugent et al., 2010 – voir Tableau 2a à b) proposent une démarche expérimentale basée sur une comparaison entre groupes contrôle et groupes expérimentaux. Les autres études s’appuient sur le constat des différences entre les connaissances et les compétences dont les enfants et les enseignants disposent avant et après les activités de robotique. Cela rend difficile une évaluation rigoureuse de l’impact des kits robotiques sur l’apprentissage. Pour autant, ces kits ont commencé à être utilisés dans différents contextes éducatifs : à l’école, après l’école, dans les compétitions robotiques et les ateliers scientifiques des musées, ainsi que pour les formations initiales et continues destinées aux enseignants. Ces catégories ne sont pas hermétiques. Souvent, par exemple, la formation en vue d’une compétition de robotique est proposée comme partie intégrante des activités scolaires dans le cadre des programmes ministériels (par exemple, Van Lith, 2007 ; Sklar et al., 2003). Les types d’activités proposées16 comportent généralement trois phases principales : la conception, la construction et la programmation de robots, avec quelques spécificités en fonction des contextes
16 Toutes les activités dans les tableaux 2a à c sont réalisées à l’appui des kits robotiques Lego WeDo et Mindstorm (RCX ou NXT), avec les logiciels Lego-Logo ou Robolab. Deux des études considérées utilisent une interface spécifiquement conc¸ue. L’étude de Sougné (2004) propose une interface spécialement modifiée à fin d’inclure une représentation dynamique et historique de
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éducatifs dans lesquels elles se déroulent. Dans certaines études de cas, l’absence de la phase de conception indique que les activités de robotique sont mises en œuvre en faisant recours à des instructions et des modèles préconstruits. Cette pratique est symptomatique du fait que le passage d’une approche classiquement instructionniste à celle plus moderne du constructionnisme (cf., Chapitre 3.1) peut prendre un certain temps à pénétrer dans le milieu scolaire. Contrairement à d’autres, ce contexte éducatif est fortement tributaire de programmes nationaux spécifiques, de rythmes de mise à niveau et de modes de transmission des connaissances. À ce propos, il est utile de rappeler que certaines études démontrent que les interventions de longue durée obtiennent des meilleurs résultats que les interventions de courte durée (Nugent et al., 2010), et qu’un changement systématique dans la fac¸on de penser la pédagogie à l’appui des robots exige une participation de plusieurs acteurs – enseignants, élèves et parents (Rogers & Portsmore, 2004). Le sujet du contenu éducatif à transmettre appelle une autre observation. Une grande partie des études répertoriées (Tableau 2a à c) a comme finalité l’apprentissage de la technologie (le fonctionnement hardware-software). Une petite partie seulement mixe dans ses contenus des notions scientifiques et technologiques (par exemple l’apprentissage des disciplines STEM – sciences, technologies, ingénierie, mathématiques). Une très mince littérature rapporte des activités dont le contenu vise principalement l’apprentissage des sciences (biologie et physique). La prédominance d’études qui se rapportent à des activités dont l’objectif est limité à l’apprentissage de notions technologiques est sans doute motivée par le fait qu’une phase d’alphabétisation et de normalisation a été nécessaire pour qu’enseignants et élèves puissent maîtriser cette technologie robotique et en disposer comme un outil pédagogique. L’ensemble de ces études permet de procéder à une première analyse des résultats de l’impact de la robotique kit en milieu éducatif. 3.3. Premiers résultats de l’impact de la robotique kit en milieu éducatif Comme on peut le remarquer sur le Tableau 2a, un certain nombre d’études émerge sur la spécification d’une typologie de modèles de raisonnement utilisés par les élèves lors du contrôle des robots. Les premiers résultats montrent que la maîtrise de cette nouvelle technologie de la part des élèves exige beaucoup plus qu’une simple connaissance des composantes du hardware, de la syntaxe et de la sémantique de programmation. Un certain degré d’abstraction est exigé de la part de l’élève, du fait de la circulation de l’information entre l’ordinateur et le robot et entre l’environnement et le robot qui font de ce dernier un système complexe. En particulier, des représentations abstraites des références temporels (Sougné, 2004), des mécanismes causales (Mioduser, Venezky & Gong, 1996), et des règles conditionnelles (Mioduser, Levy & Tallis, 2009) sont à l’œuvre pendant la programmation du robot. Dans l’étude de Sougné (2004) par exemple, les enfants programment un bras robotique à l’aide d’une interface Logo spécifique pour inclure une représentation dynamique et historique de l’évolution de l’état de chaque entrée et sortie de l’interface et de l’horloge. Les enfants semblent alors exploiter deux types de stratégies temporelles de complexité progressive : les stratégies basées sur les durées métriques et celles basées sur la simultanéité et la succession d’événements extérieures. De même, Mioduser et al. (1996) montrent que les enfants bâtissent des modèles mentaux du flux d’information (black box, reactive, switch, control) qui révèlent une compréhension graduelle de la causalité au sein du système robotique. Les représentations du comportement conditionnel du robot évoluent vers une complexité croissante. On passe des épisodes (une séquence unique d’événements), aux scripts (schémas temporels récurrents), puis aux règles (associations atemporelles entre les conditions environnementales et l’action du robot) (Mioduser, Levy & Tallis, 2009). L’exploitation des robots en tant qu’outils pédagogiques semble donc demander une connaissance préalable profonde de leur fonctionnement, qui est progressivement obtenue en parallèle au développement cognitif des élèves. D’autres résultats concernent l’acquisition de connaissances et de compétences dans le champs technologique, scientifique, cognitif, ou motivationnel. Les apprentissages liés à l’acquisition de l’évolution de l’état de chaque sortie de l’interface, des entrées et de l’horloge. L’étude de Mioduser, Levy & Tallis (2007) introduit une interface pour la navigation dans différents types de surfaces avec quatre règles conditionnelles de complexité progressive (half-a-rule, one-rule, two interdependent rules, two interrelated rules).
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notions technologiques (variable, sous-routines, compteur, etc.) semblent être facilités par l’utilisation de la robotique au cours des premières années de l’éducation (Petre & Price, 2004). Une accélération dans l’acquisition de notions liées à l’électronique, aux microprocesseurs, aux capteurs, et au transfert de l’information est constatée au collège (Ahlgren & Verner, 2002). Dans ce contexte, l’utilisation du robot a un impact positif et apporte une amélioration de la compréhension et de la maîtrise de la programmation par rapport à l’utilisation du seul ordinateur (Pásztor et al., 2010). Lorsque les apprentissages véhiculés par les activités robotiques visent les mathématiques ou les sciences, l’apport de la RE se manifeste de deux fac¸ons. D’une part, elle apporte une amélioration en termes d’application concrète des notions mathématiques et scientifiques abstraites (Chambers et al., 2007). D’autre part, elle semble avoir un effet facilitateur dans l’acquisition d’un raisonnement scientifique chez l’élève (« scientific thinking skills and processes » – Sullivan, 2008), et plus largement dans le développement de compétences sciences, ingénierie et technologie (SET) (Barker & Ansorge, 2007). Cependant, certaines études révèlent que l’utilisation de robots n’a pas systématiquement un impact positif sur l’apprentissage. Par exemple, certains auteurs n’enregistrent aucun impact positif imputable à l’utilisation des kits robotiques sur la résolution de problèmes mathématiques (Lindh & Holgersson, 2007 ; Hussain et al., 2006) ni des progrès significatifs dans l’acquisition de concepts de physique, mécanique et programmation de haut niveau (Ahlgren & Verner, 2003). De plus, si les étudiants semblent acquérir, grâce à la programmation de robots, une meilleure compréhension de certaines notions géométriques de base, en comparaison à un cours traditionnel, cette amélioration se produit uniquement lorsque les enseignants attirent explicitement l’attention des élèves sur le concept visé (Papert, 1980). Ce premier ensemble de résultats hétérogènes sur les apports de la RE lors de l’enseignement de notions scientifiques et technologiques, rend nécessaire la prise en considération des aspects cognitifs et motivationnels de l’apprentissage spécifiquement véhiculés par la RE. En ce sens, des études spécifiques menées dans le cadre de préparation aux compétitions robotiques examinent un large éventail de compétences acquises par les enfants lors de la préparation au défi. À titre d’exemple, une amélioration de treize compétences entraînées au cours de la compétition nationale RoboCup a été enregistrée via un questionnaire post-compétition. Ces compétences concernent l’acquisition du contenu scolaire (mathématique, physique, etc.), mais aussi l’organisation de la tâche à exécuter en but et sous buts à atteindre pour relever le défi au niveau individuel et collectif (Sklar et al., 2003). Les résultats de ces études montrent toutefois une variation selon la population interviewée : enseignants versus élèves. L’acquisition de compétences cognitives de haut niveau (e.g., capacité de communication) et l’amélioration des aspects motivationnels (e.g., confiance en soi, organisation d’équipe, etc.) sont le plus souvent constatées lorsqu’on interroge les enseignants, tandis que les enfants expriment une difficulté à reconnaître une réelle amélioration. Pour cette raison, des outils de scaffolding17 sont souvent utilisés de fac¸on à rendre visibles certaines phases du travail de groupe. Par exemple, des diagrammes de flux sont exploités pour la répartition en étapes de la procédure de résolution de problème, ce qui permet de rendre explicite la transformation d’un problème formulé en langage naturel en un problème formulé en langage computationnel (Chambers et al., 2007). En revanche, les études sur la remédiation de dysfonctionnements cognitifs (Caci & D’Amico, 2005) et sur l’augmentation de la motivation lors des apprentissages (Ribeiro et al., 2009) mettent clairement en exergue les effets positifs découlant des activités robotique en termes d’autonomie et de motivation de la part des élèves. Ces effets semblent même persister au-delà des moments d’utilisation des kits (Ribeiro et al., 2009). Un autre pan de cette littérature montre que des stratégies très diverses (e.g., essai et erreurs, coopérative versus compétitives, etc.) sont déployées par les élèves au cours de l’interaction avec le robot (Hussain et al., 2006). Des différences dans le type d’heuristique de programmation (procédurale, déclarative, métacognitive) sont également observées en fonction des différents degrés de 17 Dans le processus de scaffolding traditionnel (Wood et al., 1976) l’enseignant ou le tuteur a le rôle « d’ancrage d’expertise » pour l’apprenti novice. Ce processus est souvent présenté sous une nouvelle forme au sein de la RE. La RE ajoute à l’interaction dyadique tuteur-élève l’interaction élève - élève via la résolution collective de problème et la répartition des tâches entre élèves (Wyeth, Venz & Wyeth, 2004).
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transparence et interactivité des robots (Gaudiello & Zibetti, accepté). Quelques études concernant les différences entre filles et garc¸ons montrent que les filles ont tendance à concevoir les robots avant de passer à la phase de construction proprement dite et à préférer des tâches dont la finalité est explicitement énoncée plutôt que de découvrir ce que l’on peut faire en programmant un robot. Les garc¸ons ont le comportement inverse (Rogers & Portsmore, 2004 ; Lindh & Holgersson, 2007). Le transfert de l’apprentissage consolidé au cours des activités robotiques à des nouvelles activités ou à d’autres matières scolaires est l’un des atouts le plus fréquemment invoqués de l’utilisation de ce type de TICE (Denis & Hubert, 2001 ; Alimisis, 2009). Néanmoins, un nombre très limité d’études met en évidence de manière empirique l’importance des effets de l’utilisation de cette technologie en termes de transfert (Barker & Ansorge, 2007). En particulier, soulignent des auteurs (Van Lith, 2007), si la plupart des élèves établit spontanément des liens avec d’autres domaines disciplinaires, ils ne lui accordent pas la même valeur que les enseignants. L’apparente contradiction entre l’importance accordée au processus de transfert et l’ambiguïté qui demeure à son sujet, nous amène à accorder un intérêt particulier aux questions suivantes. Quelles sont les connaissances, compétences, procédures et/ou processus qui font l’objet du transfert ? À quelles conditions ce transfert se produit-il ? Comment l’évaluer ?
4. Les kits robotiques et le « transfert » Le transfert de connaissances et de procédures de résolution est l’un des objectifs majeurs de l’éducation (Mayer, 2002a ; Perkins, 1992). Le but du transfert est celui d’amener progressivement les étudiants à réaliser une tâche (i.e., résoudre le problème posé) et à transférer ce qu’ils ont appris dans une situation donnée (i.e., le domaine de base) à une nouvelle situation (i.e., le domaine cible) (Mayer, 2002b). Au cœur de la réussite scolaire, le transfert est considéré par des nombreux auteurs comme la clé de voûte pour la consolidation des savoirs à long terme (Rakisona & Yermolayevaa, 2011). Une ambiguïté demeure toutefois sur ce qui est à acquérir et à transférer : connaissances, procédures, processus, habilités, compétences, sont généralement évoqués (Everwijn, Bomers, & Knubben, 1993). Dans le cadre de la résolution de problèmes au sens large, Mayer (2002a), par exemple, propose de répondre à cette question en faisant appel à la taxonomie des types de connaissances (factuelle, conceptuelle, procédurale, métacognitive) et des processus cognitifs (rappeler, comprendre, appliquer, analyser, évaluer, créer) proposés par Anderson et al. (2001). En ce qui concerne la résolution de problèmes avec des kits robotiques, le sujet central semble le transfert de compétences et habilités. Au sein de la pratique de l’éducation, les termes « compétence » et « habilité » sont souvent utilisés de fac¸on interchangeable. En revanche, dans la recherche en éducation et en psychologie, ces termes ont des définitions distinctes. Une habilité est normalement définie comme une capacité, généralement acquise par la formation et l’entraînement à effectuer des actions qui permettent d’atteindre un résultat souhaité (Hoskins & Fredriksson, 2008). Une compétence fait appel à la capacité d’appliquer les connaissances au savoir-faire déployés dans une situation récurrente ou en évolution. C’est ce deuxième terme qui retient l’attention des chercheurs lorsqu’on s’intéresse au transfert et à son évaluation. Bien qu’on ne dispose pas encore d’une classification exhaustive, on peut identifier des compétences cruciales faisant l’objet du transfert qui sont évoquées dans la littérature en RE : La planification, c’est-à-dire la définition de la part de l’élève d’un but et de sous-buts à réaliser dans un ordre établi (Limbos, 1994). Le codage, c’est-à-dire la traduction des actions pertinentes pour la résolution du problème en une suite de variables, fonctions et paramètres (Karatrantou & Panagiotakopoulos, 2008). L’imbrication de procédures, c’est-à-dire l’utilisation hiérarchisée de fonctions par le rappel d’un code de programmation défini au préalable (Argles, 1994). L’autocorrection, c’est-à-dire la localisation des erreurs de la part de l’élève, issue de l’identification de l’écart entre le plan et son exécution (Klahr & Carver, 1988). La métacognition, c’est-à-dire l’évaluation de la part de l’élève de la validité des heuristiques de résolution employées, issue de l’identification de l’écart entre le but et le résultat obtenu (La Paglia, Caci, Barbera & Cardaci, 2010).
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En ce sens, la RE kit semble être un « mindtool » très prometteur. Son usage raisonné est susceptible de favoriser chez les élèves le développement des compétences cognitives liées à la résolution de problèmes (Chambers et al., 2007) et les compétences métacognitives liées au computational thinking18 . C’est à travers cette démarche que les enfants se posent la question de comment résoudre un problème et la méta-question de comment faire résoudre ce problème à un ordinateur (Wing, 2008). Néanmoins, il est nécessaire de s’interroger sur les conditions dans lesquelles ce transfert de compétences peut avoir lieu et surtout, comment il peut être favorisé par l’utilisation de cette TICE. 4.1. Le kit robotique et les conditions d’un transfert effectif En ce qui concerne les conditions du transfert, il est utile de rappeler que, dans le cadre de la résolution des problèmes au sens large, l’accent est classiquement mis sur le caractère structurellement versus superficiellement isomorphe du problème (Davidson & Sternberg, 2003). Autrement dit, le transfert a lieu si le problème dans le domaine de base et le problème dans le domaine-cible présentent la même structure. En revanche, dans le cadre de résolution des problèmes avec les kits robotiques, l’accent est mis sur un ensemble de facteurs que nous allons détailler cidessous. Cette liste donne un aperc¸u de la variété des hypothèses envisagées dans la littérature sur les conditions qui facilitent ou entravent le transfert. L’externalisation des connaissances via la manipulation du robot réel par rapport au robot virtuel est supposée faciliter le transfert car, en dépit des avantages offerts par la robotique virtuelle (Zhang, 2010), la meilleure fac¸on d’apprendre un artefact est de construire l’artefact (Piaget, 1974), d’expérimenter comment ses fonctionnalités dépendent de cette construction et comment son comportement varie suite à la programmation (Lund & Nielsen, 2003). L’usage d’instructions précises et d’activités très structurées versus la simple exposition à la programmation non domain dependent facilite le transfert, car les concepts base de la programmation – variable, paramètre, boucle, etc. – peuvent être facilement saisis par les élèves sans pour autant être utilisés dans des domaines cible (Clements & Meredith, 1993). Le niveau d’expertise chez les élèves conditionne bien évidemment la mise en œuvre du transfert, car seuls les élèves qui maîtrisent la programmation sont en mesure d’en abstraire les principes et les concepts à transférer (Pea & Kurland, 1983). L’importance de la présentation de plusieurs instances du problème dans le domaine de base renforce chez les élèves la compréhension de la structure du problème et facilite donc le transfert des stratégies de résolution (Salomon & Perkins, 1987). Le degré de similarité entre domaine de base et domaine cible facilite le transfert. Le near transfert demande un effort mineur en termes d’abstraction par rapport au far transfert, bien que les deux types de transfert soient également instructifs (Klahr & Carver, 1988). Repérer les conditions qui permettent le transfert de compétences représente à notre avis un point crucial pour appréhender et estimer l’efficacité des kits robotiques pour l’apprentissage. Mais résoudre la question des méthodes d’évaluation demeure un préalable. 4.2. Le kit robotique et l’apprentissage : premières mesures d’évaluation La prédominance de méthodes qualitatives pour évaluer l’impact de la robotique kit en milieu éducatif, répond à la nécessité fondée de mieux identifier les paramètres susceptibles de pourraient constituer les variables d’observation lors d’études expérimentales. Une première approche consiste à se référer aux critères d’évaluation déjà utilisés dans les études relatifs à l’implémentation les TICE à l’école. Deux typologies d’effets sur l’apprentissage avec les TICE
18 Dans son article « Computational thinking and thinking about computing », J.M. Wing suggère que la pensée computationelle est de nos jours une compétence fondamentale qui devrait être enseignée aux élèves dès leur plus jeune âge, d’où l’importance d’intégrer ce type de pensée dans les disciplines enseignées à l’école primaire. La definition de computational thnking donnée par cette autrice est la suivante : « Operationally, computing is concerned with answering the question: How would I get a computer to solve this problem? » On adapte cette citation en remplac¸ant « computer » par « robot », (Wing, 2008).
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sont généralement distinguées et admises : les effets « avec » (with) et les effets « de » (of). Les effets « avec » surviennent lorsque les apprenants travaillent en partenariat avec des objets technologiques, tandis que les effets « de » se produisent lorsque de tels partenariats ont des retombées cognitives ultérieures pour les apprenants travaillant loin des objets technologiques. On estime aussi que les effets « avec » et les effets « de » dépendent de l’engagement conscient de l’individu dans le partenariat avec l’objet technologique (Salomon, Perkins & Globerson, 1991). Toutefois ette distinction ne peut pas être appliquée aisément à la robotique. En effet, en ce qui concerne les effets « avec » il est difficile de différencier les effets principaux (main effects e.g., le transfert des compétences de planification, autocorrection, etc.) des effets collatéraux (side effects : e.g., l’effet nouveauté, ludique, etc.) et des effets liés au contenu de la tâche en soi (e.g., une tâche de résolution de problèmes arithmétiques peut produire elle-même des effets de transfert de compétences de planification, codage, imbriquement de procédures) (Gaudiello et al., 2011). Deuxièmement, en ce qui concerne les effets « de », la rareté des études longitudinales sur les effets de la RE19 pour l’apprentissage et sur les kits robotiques en particulier n’offre pas le recul nécessaire pour vérifier ce type d’effets. Ainsi, d’autres approches d’évaluation s’imposent. Il est par exemple envisagé d’examiner les états intermédiaires observables que les élèves produisent au cours de leur processus de résolution de problèmes avec le robot (Carbonaro, Rex & Chambers, 2004), plutôt que d’établir les résultats des performances d’un élève en utilisant une évaluation finale comme dans l’apprentissage traditionnel. Comme le remarque un certain nombre d’auteurs, ce type de données observationnelles n’est pas toujours évident à interpréter en tant que donnée qualitative. De plus, dans les études expérimentales, on constate l’absence d’une étape d’évaluation entre la phase expérimentale – au cours de laquelle l’élève résout le problème de base – et la phase contrôle – où l’élève résout le problème cible qui fait l’objet du transfert. Cette carence constitue une difficulté objective dans l’évaluation des effets réels des kits de robotiques sur l’apprentissage. D’où les effets hétérogènes des méthodes d’évaluation répertoriées (voir Tableau 2a à 2c). Dans ce contexte, certaines études commencent à s’interroger sur la pertinence de leurs propres méthodes d’évaluation. Par exemple, les indicateurs traditionnels de difficulté de la tâche (le nombre d’erreurs et les types de marqueurs langagiers) pourraient ne pas être les plus appropriés pour deux raisons (Gaudiello & Zibetti, accepté). La première est que, dans le cadre d’activités scientifiques élaborées avec des kits robotiques, les enfants sont souvent amenés à procéder par essais et erreur. La deuxième est qu’ils ont un vocabulaire technologique très développé en vertu de l’omniprésence de la technologie dans leur vie courante. D’autres études, en revanche, soulignent les difficultés à généraliser des méthodes d’évaluation qui se sont révélées efficace dans un contexte d’expérimentation précis (Barker & Ansorge, 2007). Ceci nous conduit à considérer avec prudence les effets réels des kits robotiques sur l’acquisition et le transfert de compétences et à mettre en évidence la nécessité de considérer une reconfiguration des activités autour de contenus spécifiques. Ce type d’articulation des contenus à enseigner et apprendre permettrait de mesurer les effets réels de cette TICE en ce qui concerne l’apprentissage et le transfert. Il paraît évident que la technologie robotique en soi ne peut pas avoir d’effets sur l’apprentissage. Il faut « l’orchestrer » (Trouche, 2005) ou « l’apprivoiser » (Charlier & Péraya, 2002) selon les finalités éducatives souhaitées. Améliorer la compréhension de la valeur pédagogique de la RE passerait alors par la conception de protocoles expérimentaux spécifiques, permettant de structurer d’avantage les activités robotiques et de mesurer les effets de certains facteurs sous observation.
19 Les études longitudinales dont nous disposons sont assez rares, et elles concernent avant tout les interactions entre robots sociaux et êtres humains (e.g., Moshkina & Arkins, 2005) et non pas entre robot éducatifs et élèves.
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5. La robotique éducationnelle entre espoirs et préoccupations L’arrivée de la robotique dans le milieu éducatif, accompagnée de promesses de changement radical, est accueillie de manière partagée, entre enthousiasmes et scepticismes (Bonnel, 2010). De fait, dans les années 1980–1990, ces promesses ne semblent pas avoir été tenues. Des premiers résultats concernant les robots humanoïdes et les animats sont positifs et encourageants. Certaines études montrent des effets positifs sur les compétences des élèves en mathématiques, en sciences, sur le développement des capacités linguistiques, sur la créativité et sur les interactions sociales au moment de l’introduction des premiers langages de programmation (Clements, 1999 ; Bers, 2008). Mais les rares études longitudinales montrent que le niveau d’engagement décroît avec le temps (Bridgeman & Bridgeman, 2007 ; Van Lith, 2007). Et d’autres études soulignent que les élèves s’arrêtent à des résultats modestes, qui ne semblent pas susceptibles d’être développés ultérieurement (Kynigos, 2008). Face à ces premiers résultats mitigés, de nouvelles directions de recherche se sont développées. Elles accordent un rôle central aux interfaces et aux langages de programmation semi-transparents nommés « black & white box » (Kynigos, 2008). Elles proposent également une interaction « tangible », à partir de blocs de code en bois pouvant être combinés pour obtenir un algorithme et de marqueurs destiné à le transmettre à l’ordinateur (voir le langage Horn, Crouser & Bers, 2011). Enfin, on voit progressivement apparaître des études visant à mieux définir les différents types d’activités robotiques et à les scénariser selon le public ciblé – par exemple, filles et garc¸ons (Rusk, Resnick, Berg & PezallaGranlund, 2008). Le débat actuel voit ainsi se confronter les préoccupations liées à des potentiels nouveaux échecs et aux difficultés d’incarnation des contenus pédagogiques dans cette nouvelle technologie, et l’espoir des bénéfices apportés par l’introduction de la robotique en milieu scolaire.
5.1. Les bénéfices attendus Parmi les attentes engendrées par l’implémentation de la RE, la plus forte concerne le transfert des compétences de résolution de problèmes à de nouveaux types de problèmes (Chapitre 4). Comme le soulignent Klahr et Carver (1988), l’intérêt des psychologues pour la programmation informatique provient essentiellement du potentiel longtemps recherché d’un exercice mental qui permettrait d’accroître la capacité de réflexion générale et d’acquérir des compétences de haut niveau (la planification, la décomposition de problème, l’autocorrection, etc., Linn, 1985). S’ajoute l’idée plus controversée selon laquelle transformer le travail en jeu et le jeu en travail (voir l’exemple des serious games) pourrait aider les élèves à acquérir plus rapidement ces compétences et à adopter un apprentissage auto-motivé et durable (De Freitas & Jarvis, 2007). Le lifelong playing est ainsi proposé en substitution au lifelong learning (Csink & Farkas, 2010). En ce sens, l’intégration de la robotique à l’école est censée renforcer la motivation et l’engagement des élèves (Chronaki & Alimisi, 2010). Une troisième attente concerne une problématique récurrente de l’école : la dichotomie entre savoir et savoir-faire. Lorsque l’on désire mesurer le degré d’assimilation par les élèves d’une connaissance particulière acquise à l’aide d’un outil technologique, il est nécessaire de bien séparer les capacités de maîtrise technique acquises de la compréhension qu’ils ont de cet outil et du contenu véhiculé. De nombreuses études témoignent qu’un élève peut très bien exécuter une procédure apprise sans pour autant comprendre ce qu’il est en train de faire (Brown & Burton, 1978). Aujourd’hui, le contexte social, l’usage omniprésent de la technologie et l’introduction de dispositifs techno-pédagogiques en milieu éducatif semblent encourager la maîtrise technique ou technological fluency plutôt que la compréhension (Bers, 2008). Cette dichotomie entre savoir et savoir-faire pourrait rapidement prendre des proportions importantes et avoir à moyen terme des impacts négatifs sur l’apprentissage et la résolution de problème (Zibetti, Eyraud & Chevalier, 2011). La RE et, en particulier, les kits robotiques proposent un environnement pédagogique immersif dans lequel savoir et savoir-faire sont réunis (Malec, 2001). Elle ouvre donc une voie de résolution de cette dichotomie. Enfin, il n’est pas anodin rappeler que l’introduction de la RE à l’école est souvent vécue comme un « remède » à l’intérêt décroissant pour le contenu de l’enseignement (Parisi, 2001).
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Si l’essentiel de la technologie proposée à l’école est déjà utilisé en dehors de l’école, ce qui peut en biaiser le potentiel éducatif, ce n’est pas le cas de la robotique, puisque sa diffusion dans la société est plus récente. Ainsi, en manipulant les robots, les élèves sont incités à vivre la technologie comme apprentis intentionnels – « intentional learners » (Bereiter & Scardamalia, 2000) – et co-auteurs de leurs propres outils d’apprentissage et pas seulement comme utilisateurs. Au-delà de toute technophilie et technophobie, ces attentes sont contrebalancées par des préoccupations exprimées par les éducateurs et les chercheurs sur les impacts réels de la RE. 5.2. Les risques potentiels Différents types de risques liés à l’intégration de la RE en milieu scolaire sont aujourd’hui perc¸us dans le milieu enseignant et celui de la recherche. Des craintes s’expriment tout d’abord chez enseignants : elles concernent la technisation de l’apprentissage (Charlier & Péraya, 2002). L’introduction des TICE en milieu scolaire a souvent été interprétée comme une « obligation » de procurer les apprentissages par le biais de la technologie. La question : « Les technologies s’imposent-elles comme un contexte obligatoire ? » (Andler & Guerry, 2008) est légitimement posée, non seulement parce qu’elle est justifiée par le droit des enseignants à choisir leur propre pédagogie, mais aussi parce que les effets attendus d’une technologie sur les apprentissages doivent être suffisamment importants pour justifier l’effort de leur intégration au système éducatif. En effet, l’intégration de la robotique en milieu éducatif nécessite un changement significatif du rôle classiquement dévolu aux enseignants et aux apprenants. Elle requiert de l’enseignant un abandon de son rôle de distributeur incontesté de connaissances « prêtes à l’emploi » (ready-made knowledge – Kynigos, 2008), pour celui de médiateur entre les idées des élèves et leur faisabilité (Ilieva, 2010), ou encore de médiateur entre l’élève et le robot (Chang et al., 2010). L’adoption de la robotique exige aussi de l’enseignant une aisance à l’égard de la technologie (Bers et al., 2002) et une nouvelle forme de scaffolding élève–artefact, élève–élève et enseignant–élève (Wood, Bruner & Ross, 1976 ; Wyeth et al., 2004). D’autres craintes concernent les véritables raisons qui conduisent les enseignants à adopter la technologie robotique et les motivations qui guident le milieu de la recherche à accompagner ce phénomène. Par exemple, Salomon et Perkins (1996) appellent le « the Mont Everest rationale » l’idée selon laquelle les technologies seraient utilisées parce qu’ « elles sont là ». Pour ces auteurs, la facilité avec laquelle les jeunes élèves manipulent les technologies n’est pas une raison suffisante pour en prescrire l’utilisation à l’école. Les raisons (i.e., rationale) qui poussent à l’assimilation d’une technologie en milieu éducatif doivent provenir de réflexions pédagogiques qui sont externes à l’outil lui-même (Salomon & Perkins, 1996). Ces réflexions pédagogiques concernent les contenus d’apprentissage, les méthodes de transmission des contenus chez les enseignants et l’évaluation de leur réception chez les élèves. Les chercheurs craignent de jouer un rôle de fournisseurs de justifications théoriques, si les raisons qui poussent le système éducatif à adopter des robots comme outils éducatifs ne sont pas bien définies. Salomon et Perkins (1996), discutant des problèmes dérivés du « technocentrisme » de notre société, disent de fac¸on critique : « Une garde-robe entière de théories et de pratiques pédagogiques peut être taillée pour être adaptée à un seul bouton brillant et flambant-neuf ». Ces deux métaphores, du « Mont Everest » et de la « garde-robe », résument assez bien l’idée selon laquelle il est inutile, d’un point de vue pédagogique, d’introduire les technologies disponibles dans le système éducatif alors que les stratégies éducatives ne sont pas convenablement révisées, et du point de vue scientifique, qu’il est redondant de bâtir des théories nouvelles chaque fois qu’une technologie éducative est proposée (De Corte, 1996). 6. Conclusions et perspectives Sur la base d’une revue de questions critiques, cet article engage la discussion sur l’état de l’art, les perspectives et les enjeux liés à l’émergence et à l’usage des robots éducatifs au service de l’apprentissage. Il en ressort que la RE paraît un moyen séduisant de mettre en pratique des notions
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didactiques (Kröse et al., 2000) et qu’elle dispose pour ce d’atouts spécifiques. Parmi les différentes typologies de robots, les kits robotiques en particulier semblent présenter d’importantes potentialités éducatives. En effet, la combinaison de construction et de programmation fait de ces objets une technologie « avec laquelle penser ». Leur utilisation en milieu scolaire implique l’acquisition et envisage le transfert de compétences transversales grâce à la démarche de résolution de problème. En outre, elle favorise le développement de la métacognition quand cette démarche est appliquée en termes de computational thinking. Néanmoins, l’évolution rapide de la technologie robotique suscite une série d’interrogations sur son adaptation en milieu scolaire, sur le niveau d’expertise demandé pour s’en approprier en tant qu’outil pédagogique, et enfin sur son impact réel sur l’apprentissage. Ces interrogations conduisent à une réflexion plus approfondie et critique des promesses de changement pédagogique radical qui accompagnent l’apparition de toute nouvelle TICE. Jusqu’à présent la mise en œuvre des TICE a été marquée par une relation dyadique entre technologie et éducation : les besoins éducatifs sont source d’inspiration pour la conception de nouvelles fonctionnalités ciblées et les progrès technologiques engendrent de nouveaux supports qui renouvèlent la fac¸on même de concevoir la pédagogie. Autrement dit, la technologie ne peut pas avoir en soi un impact sur l’apprentissage des élèves. Dans le cas spécifique des robots, cette relation dyadique est encore marquée aujourd’hui par un déséquilibre en faveur de la technologie. Il existe plus de structures différentes hardware et software engendrant des scénarios techno-pédagogiques, que de besoins et de finalités éducatives exprimées déterminant le choix de la technologie. Le résultat est une pédagogie basée sur un « catalogue de vente » (de Vries, 2001). Il est donc nécessaire de trouver un autre équilibre dans le rapport entre robotique et éducation. Pour ce, une reconfiguration des méthodes pédagogiques et de leur évaluation s’impose à plusieurs niveaux. Premièrement, les finalités et contenus éducatifs : chaque type de technologie est le support de différentes finalités et à chaque finalité doit correspondre un contenu éducatif adapté. Par conséquent, la robotique ne peut ni simplement s’ajouter et/ou se substituer aux TICE déjà implémentées, ni prétendre véhiculer tout type de finalités et contenus éducatifs. Dans cette optique, l’atout spécifique de la RE kit semble être celui de véhiculer l’acquisition de compétences plutôt que de connaissances. Une reconfiguration des méthodes pédagogiques qui permettrait de valoriser cet atout consiste alors dans la sélection d’un éventail restreint et bien défini de compétences à développer (e.g., compétences cognitives liées à la résolution de problèmes et compétences métacognitives liées au computational thinking). Deuxièmement, la transmission/réception de telles finalités et contenus : l’introduction des TICE en milieu scolaire a demandé de repenser le scaffolding qui caractérise la dynamique enseignant–support technologique–élève. Dans cette optique, un atout important de la RE consiste à placer l’élève au cœur d’un processus d’apprentissage conscient qui le voit impliqué en tant qu’auteur de ces propres outils d’apprentissage. Cependant, un tel changement est lourd de conséquences. Par exemple, l’enseignant est conduit à renouveler des pratiques éducatives dont la scénarisation, la maîtrise et la mise à jour demandent un développement approprié. Une reconfiguration des méthodes pédagogiques qui permettrait de valoriser cet atout de la RE consiste alors dans l’élaboration de scénarios pédagogiques qui attribuent à chaque acteur de cette dynamique un rôle constructif, en veillant à l’équilibre entre les efforts fournis pour cette reconfiguration et une perception accrue de résultats effectifs. Troisièmement, l’évaluation de la transmission et de la réception ayant lieu dans un environnement RE : nous estimons que le renouvellement des méthodes pédagogiques et celui des méthodes d’évaluation des effets de la robotique sur l’apprentissage devrait se dérouler en parallèle. Dans un environnement pédagogique basé sur la construction, la programmation et le contrôle des robots, différentes mesures qualitatives et quantitatives ont été proposées pour évaluer l’impact de ces derniers sur l’apprentissage. Cependant, l’hétérogénéité de ces mesures et le nombre restreint d’études quantitatives nous montre qu’il n’est pas évident d’évaluer les effets du robot à la fois comme objet d’apprentissage et comme outil d’apprentissage, ces deux aspects étant souvent séparés dans les questionnaires. Donc, une reconfiguration pédagogique doit s’accompagner d’une conception de méthodes d’évaluation qui puissent restituer des estimations réellement probantes, permettant de percevoir la valeur réelle de la RE pour l’apprentissage.
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L’ensemble de ces arguments nous montre que l’adoption de la robotique est à l’heure actuelle fortement tributaire de l’élaboration de ces nouveaux protocoles expérimentaux. Les questions que nous avons soulevées fournissent les premières lignes directrices de réflexion sur l’utilisation de ces technologies robotiques, afin que celles-ci ne deviennent pas de simples supports fonctionnels de substitution aux TICE traditionnelles, mais qu’elles apportent une évolution réelle de l’apprentissage scolaire. Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Remerciements Les auteurs tiennent à remercier Anne Daubrée pour ses commentaires avisés durant l’élaboration de cet article ainsi que les experts anonymes pour la qualité de leur expertise et de leurs suggestions qui ont contribué à l’amélioration du manuscrit original. Références Ackermann, E. (1991). 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