La structure de la marge occidentale de la Sardaigne et la fragmentation de l'ile au Cenozoique

Marine Geology, 83 (1988) 31-41

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Elsevier Science Publishers B.V., Amsterdam - - Printed in The Netherlands

LA STRUCTURE DE LA MARGE OCCIDENTALE DE LA SARDAIGNE ET LA FRAGMENTATION DE L'ILE AU CENOZOIQUE BRUNO T H O M A S ~, M A U R I C E

GENNESSEAUX

~ et LUCIANO L E C C A 2

1Universitd Pierre et Marie Curie, Ddpartement de Gdologie Dynamique, 4 place Jussieu, 75252 Paris Cedex 05 (France) 2Universit~ di Cagliari, Dipartimento Scienze della Terra, Via Trentino 51, 09100 Cagliari, Sardinia (Italie) (Requ le 20 octobre, 1987; r~vis~ et accept~ le 22 avril, 1988)

Abstract Thomas, B., Gennesseaux, M. et Lecca, L., 1988. La structure de la marge occidentale de la Sardaigne et la fragmentation de l'ile au Cenozoique. (The structure of the western continental margin of Sardinia and the fragmentation of the island during the Cenozoic.) Mar. Geol., 83: 31-41. Sardinia is commonly considered as part of a continental arc. During the Early Miocene (21 19 Ma) anticlockwise rotation of the island and oceanic drifting led to the opening of the Western Mediterranean Basin. Among the structures inherited from the rifting phase (Late Oligocene) the 30-40 km wide N S Sardinian Graben is the salient tectonic feature of the island. It divides the Hercynian basement into two blocks: the main eastern massif, and on the western side the Nurra Massif and the Iglesiente Sulcis. Further west, the continental margin extends 100 km towards the Western Mediterranean Basin. The western continental margin is divided by a large median NW SE fracture zone into two areas: a northern part where the two sets of faults coexist, and a southern part where the NE SW set progressively disappears towards the south. The southwestern margin of the island is therefore affected only by the remaining broadly NW-SE faults. The median fracture is a composite zone consisting of an array of normal faults locally featuring a narrow graben. It runs from the bottom of the slope (and presumably the o c e a n - c o n t i n e n t boundary) to the southern end of a small N E - S W graben underlying the continental shelf of Oristano. At its northern end the Oristano shelf graben is bounded by another major NW SE fracture, the south bounding fault of the Campidano Graben. This fault runs from the Gulf of Oristano to the Gulf of Cagliari, and separates the Iglesiente-Sulcis Block from the Eastern Sardinian Massif. The island is thus crossed from the bottom of the western slope to the Gulf of Cagliari by a continuous set of N W - S E enechelon faults. This en-echelon system is contemporaneous with the rifting phase in the Western Mediterranean Basin and delineates three crustal blocks through the Sardinian basement. Although this set of faults displays mainly extensional activity, apparent flower structures are present in some seismic records from the western margin, suggesting left-lateral strike-slip displacement. In Plio-Quaternary times, a new extensional event overprinted the earlier structures in the Campidano area. The fragmentation of the Sardinian basement is therefore still active. The displacement of blocks related to the opening of the NW SE Plio-Quaternary Campidano Graben is indeed transformed at both ends by two strike-slip structures: along the Ichnusa Seamount at the southern end and, to the north, along a reactivated N E - S W Hercynian fault. The latter runs across the eastern massif (from the Gulf of Oristano to the Capo Comino to the east), and is accompanied by Plio-Quaternary basic volcanics. Hence, except for brief and low intensity Miocene compressive events, Sardinia appears to be mostly affected by extension and fragmentation from the end of the oceanic drifting to the Recent. Therefore, the Corso-Sardinian Block does not seem to transmit the compressional stress to Southern Europe due to the northward displacement of the African plate.

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R~sum~ La Sardaigne est un ~l~ment d'arc continental dont la rotation anti-horaire et la migration au Miocene inf~rieur (21 19 M.A.) a entrain~ la formation du bassin oc~anique de la M~diterran~e occidentale. A l'int~rieur de File, le graben sarde N S (30 40 km de large) constitue une des structures majeures h~rit~es de la phase de rifting oligoc~ne sup~rieur. I1 divise le substratum hercynien en deux parties: le massif oriental, et ~ l'ouest les massifs de la Nurra et de l'Iglesiente Sulcis. Plus ~ l'ouest, la marge continentale s'~tend jusqu'a 100 km vers le bassin occidental. L'~tude de cette marge peu connue a ~t~ entreprise ~ partir de 1200 km de lignes sismiques enregistr~es au cours de la campagne SARD 85. Le socle hercynien sarde se prolonge sur la pente continentale sous une faible ~paisseur de s~diments (2500 3000 m). Sa structuration se fait selon un groupe de failles normales et de blocs bascul~s NE SW, et un r~seau de fractures NW SE de direction analogue aux failles transformantes du bassin occidental. Une large fracture m~diane NW SE divise la pente continentale en une partie nord off les deux rdseaux de failles coexistent, et une partie sud off les accidents NE SW disparaissent progressivement jusqu'au SW de l'ile, affect~e uniquement par les fractures NW SE. Cet accident majeur consiste en un alignement de failles normales, de grabens ~troits ou de faisceaux de failles. I1 traverse la marge depuis le bas de la pente (et probablement la limite continent ocean) jusqu'au rebord du plateau off il se relie/~ l'extr~mit~ sud d'un petit graben NE- SW de la plateforme d'Oristano. La terminaison nord de ce graben est elle-m~me raccord~e h une autre fracture majeure NW SE: la faille sud du graben du Campidano, qui s~pare l'Iglesiente Sulcis du massif oriental, depuis le Golfe d'Oristano jusqu'a celui de Cagliari. Cet alignement continu d'accidents a permis pendant la phase de rifting le d~coupage du socle sarde en trois blocs. Son jeu semble principalement distensif mais certains profils sismiques sugg~rent un d~placement lateral s~nestre ("structure en fleur"). La surimposition au Plio-Quaternaire d'un foss~ tectonique dans la r~gion du Campidano montre que la fragmentation du socle est toujours active. Le mouvement des blocs lors de l'ouverture de ce graben est transform~ h chacune de ses extr~mit~s, le long de deux structures coulissantes: au sud le long de l'Ichnusa, et au nord par un accident hercynien NE SW, joignant le Golfe d'Oristano au Capo Comino, r~activ~ et jalonn~ par des emissions volcaniques au Plio-Quaternaire. Ainsi, except~ de brefs ~v~nements compressifs mioc~nes de faible intensitY, la Sardaigne est principalement affect~e par une tectonique distensive depuis l'~poque de la d~rive oc~anique jusqu'a l'Actuel. Le bloc corso-sarde ne semble donc pas transmettre la pouss~e de la plaque africaine directement vers le nord.

Introduction

La Sardaigne est g~n~ralement consid~r~e comme l'~l~ment d'un pseudo-arc insulaire dont la s~paration de l'Europe puis la d~rive vers l'est, au Tertiaire, a donn~ naissance au bassin occidental M~diterran~e ~ fond oc~anique (Fahlquist et Hersey, 1969; Auzende et al., 1973; Alvarez et Cocozza, 1974; Boccaletti et Guazzone, 1974; Chabrier et Mascle, 1975; BijuDuval et al., 1978; Auzende, 1978; R~hault, 1981; Le Douaran et al., 1984) (Fig.l). La rotation de 30 ° environ de ces ~l~ments tithosph~riques (Corse, Sardaigne et Kabylies), estim~e par le pal~omagn~tisme des roches

volcaniques sardes, aurait eu lieu pendant l'Aquitanien sup~rieur Burdigalien inf~rieur, soit entre 21 et 19 M.a. d'apr~s Edel (1980), Montigny et al. (1981), R~hault (1981), Thomas et Gennesseaux (1986) ou aurait commenc~ plus tSt: 24 M.a. d'apr~s Burrus (1984) et Cherchi et Montadert (1982). Le rifting d~buta dans l'Oligoc~ne, vers 35 M.a., fragmentant File en deux grands ~l~ments s~par~s par un alignement m~ridien de grabens complexes limit,s par des failles d'orientation NW-SE, NE-SW et N S (Vardabasso 1963; Cocozza et al., 1974; Cherchi et Montadert, 1982). D'abondantes ~missions de laves et d'ignimbrites s'y superposent jusque dans le Miocene moyen

Fig.1. Carte morphostructurale montrant les principales provinces de la M~diterran~e occidentale. (d'apr~s Vanney et Gennesseaux, 1985). 1 = plaine; 2= plate-forme continentale ( S B ...... shelf break); 3 = escarpement; 4 = plateau marginal (a) et mont sous-marin ( b e t c); 5 = pente continentale et canyon; 6 = glacis et cSnes s~dimentaires (a); 7= dSmes salifbres; 8 = plaine bathyale; N E - - Escarpement Nurra; S E - - Escarpement Sulcis; I C Mont Ichnusa. Fig.1. Map showing the major provinces of the Western Mediterranean. (after Vanney and Gennesseaux, 1985). 1= plain; 2= continental shelf ( S B ....... shelf break); 3 - escarpment; 4= marginal plateau (a) and seamount (b and c); 5= continental slope and canyon; 6= continental rise and sediment cones (a); 7 = salt domes; 8 = bathyal plain; N E - - Nurra Escarpment; S E Sulcis Escarpment; I C Ichnusa Seamount.

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(Coulon, 1977; Edel, 1980). Une seconde phase distensive a r6affect6 au Plio-Quaternaire la partie m~ridionale, par surimposition du graben du Campidano et ~mission de laves basiques plioc~nes (Savelli, 1984). Ce graben m6dian, dont la profondeur d6passe 1800 m est rempli de s~diments oligoc~nes h quaternaires, alternativement continentaux et marins (PomesanoCherchi, 1971). I1 se prolonge au nord dans le Golfe d'Asinara par une mosaique de petits grabens (analogues probablement h ceux, mal connus, qui structurent le graben continental) et s'interrompent sur des rides volcaniques jalonnant des failles transformantes (Gennesseaux et al., 1974; Thomas et Gennesseaux, 1986). Au sud, il forme le Golfe de Cagliari, fortement s6dimentaire, et est limit~ brutalement par une vaste ride oblique de socle, le mont sous-marin Ichnusa (Fig.l). La sismique industrielle (AGIP), faite sur le plateau de Cagliari, montre une structure en demi-graben pent~e vers l'est off l'~paisseur des d6p6ts c~nozo~ques atteint 3 s temps double, soit plus de 4000 m (Fanucci et al., 1976; Thomas, 1986). Selon Cherchi et Montadert (1982), les bordures du rift continental pr6sentent un 6tagement caract6ristique de blocs bascul~s d61imit6s par un r~seau complexe de failles NNW SSE h NNE-SSW, comparable h celui observ6 dans le Golfe d'Asinara et off on peut diff~rencier les d6p6ts syn- et post-rift. Ce vaste graben m6dian fait partie d'un ensemble de rifts parallSles subm~ridiens, probablement de mSme ~ge. On trouve h l'est, le foss~ de la marge orientale de la Sardaigne (Fabbri et Nanni, 1980). A l'ouest, la sismique industrielle a permis de d~couvrir, sous la plate-forme d'Oristano, l'existence de petits foss6s comparables aux grabens continentaux et remplis de s6diments oligoc~nes fi quaternaires (Fanucci et al., 1976; Thomas, 1986). Bien que la sismique monotrace faite sur les parties septentrionale et m6ridionale de ce plateau ne permette pas de l'affirmer avec certitude, on pense g6n6ralement que ces grabens ne se prolongent pas vers le nord et le sud (Lecca, 1982; Lecca et al., 1983). Plus ~ l'ouest encore, la pente continentale reprbsente la bordure d'un ancien graben

~volu~ en bassin oc~anique (bassin alg~roprovenqal). Le socle hercynien sarde apparait ainsi d6coup6 en plusieurs blocs parall~les dont le plus important est le massif centro-oriental soud6 h la Corse cristalline. Le second, form~ par les massifs de la Nurra et de l'IglesienteSulcis, est ennoy~ sous les s6diments dans la partie m~diane off l'affleurement granitique de File du Mal di Ventre d6montre cependant sa continuit6 du nord au sud de la marge. Le graben du Campidano, dont la profondeur d6passe 1500 m prSs d'Oristano, s'interrompt donc brutalement prSs du littoral. Les relations structurales entre le Campidano, la plate-forme (Lecca, 1982) et plus particuli~rement la pente continentale, dont l'6tude g~ologique n'avait jamais 8t~ entreprise, ont fait l'objet d'une campagne de sismique r~flexion ~ bord du N.O. Catherine Laurence (CNRS). Au cours de cette mission, 1200 km de profils haute definition ont ~t6 obtenus h partir d'un 6quipement compos6 d'un canon h air (10 in3), d'une chaine de capteurs AMG et d'enregistreurs graphiques Bell et Howell. La densit~ des profils (Fig.2) et l'~paisseur relativement modeste des d6p6ts s~dimentaires ont permis de cartographier le substratum ant6rift bien identifib ant6rieurement par quelques coupes de sismique Flexotir traitSes (Finetti et Morelli, 1973). Resultats La pente continentale, depuis l'escarpement de la Nurra jusqu'h File de San Pietro atteint 65 km de large. Elle est peu d~clive et prolonge une plate-forme d'une largeur assez exceptionnelle pour la M6diterran~e, soit 10-50 km. Elle est classiquement structur6e en blocs bascul6s, recouverts part une s~rie syn-rift caract~ris6e par la disposition en ~ventail de ses r~flecteurs et s6par6e de la couverture miocene post-rift par une discordance majeure. Les d6p6ts plioquaternaires, de 200-400 m d'6paisseur, recouvrent une surface d'~rosion messinienne ou, dans la partie inf6rieure de la pente, les 6vaporites sup6rieures du bassin. Sous cette

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Fig.2. Plan de position des profils sismiqueset des sections publi~es. Bathym~trie d'apr~s Gennesseaux et Vanney (1979). Fig.2. Location of the seismic lines and published sections. Bathymetryafter Gennesseauxand Vanney (1979). couverture dont l'~paisseur maximale ne d~passe pas 2500-3000 m, le socle acoustique, d~coup~ en gradins, est tr~s probablement Pal~ozo~que, de type sarde, et a ~t~ reconnu comme tel, au sud, par le forage Joides (puits 133 et 134) (Hs(i et al., 1973), situ~s sur le sommet d'un bloc, et par dragage, sur les monts sous-marins de base de pente (Curzi et al., 1982). Deux grandes familles d'accidents s t r u c t u r e n t cette pente continentale (Fig.3): celle des failles N W - S E qui s'apparentent aux failles transformantes d'ouverture du bassin et celle des accidents N E - S W dont l'orientation est plus comparable ~ celle des rifts c o n t i n e n t a u x oligoc~nes pr~c~dant l'ouverture (Golfe du Lion et Golfe de Valence par exemple). On remarque ~galement que le r~seau est sensiblement analogue ~ celui qui

affecte la terminaison septentrionale du graben continental sarde dans le Golfe d'Asinara (Thomas et Gennesseaux, 1986), mais il diff~re l~g~rement en direction des grands accidents hercyniens du socle sarde. De plus, le prolongement en mer sous la plate-forme et la pente continentales des accidents majeurs du socle continental n'appara~t pas sur les enregistrements sismiques, en particulier le prolongement vers le nord, sous la plate-forme d'Oristano, du graben du Campidano. La r~gion d'Oristano est donc marquee par une disposition structurale originale h~rit~e de la f r a c t u r a t i o n oligoc~ne qui forme la liaison entre les fractures de la pente continentale et celles du domaine ~merg~. La sismique r~flexion indique clairement que la pente continentale peut se diviser en deux unit~s nettement diff~renci~es de part et d'autre du parall~le du Golfe d'Oristano. (1) Au nord, les fractures majeures NW-SE d~limitent de larges panneaux d~coup~s euxm~mes en blocs bascul~s par un syst~me NE-SW. Cette structuration caract~ristique appara~t nettement dans la carte d'isochrones du toit du socle et dans le trac~ en ba~onnette du rebord du plateau (Fig.3). (2) Dans la partie m~ridionale, les r~seaux crois~s sont ~galement presents. Cependant, les directions NE-SW s'estompent progressivement au profit des axes NW-SE. Au sud de 39°15'N, on n'observe plus qu'un grand faisceau d'accidents transformants mat~rialisant la rotation anti-horaire de la Sardaigne. Une division identique peut s'observer dans la r~partition des anomalies magn~tiques: au sud, de fortes anomalies magn~tiques positives (Galdeano et Rossignol, 1977) marquent des mont~es magmatiques parfois observ~es en sismique. Ces anomalies correspondent vraisemblablement ~ des intrusions volcaniques de type calco-alcalin identiques aux ~panchements des ~les de San Pietro et San Antioco et sont certainement contemporaines du premier rifting oligoc~ne. Les anomalies s'interrom pent ~ la latitude du Golfe d'Oristano, soit ~ la limite des deux unit~s de socle d~finies. Dans la partie septentrionale de la pente, aucune

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Fig.3. Carte structurale et isochrones du socle acoustique (secondes temps double). Les pointill6s 6pais indiquent un alignement continu de fractures traversant la marge continentale depuis la plaine abyssale jusqu'au plateau et au graben du Campidano. /=anomalies magn6tiques positives reli6es ~ des pointements volcaniques. Fig.3. Structural geology map and isochrons (two-way travel time, s) of the acoustic basement. Heavy dots indicate the continuous alignment of fractures crossing the margin, from the abyssal plain to the shelf and to the Campidano Graben. 1= positive magnetic anomalies and associated volcanism.

a n o m a l i e ni p o i n t e m e n t v o l c a n i q u e n ' e s t donc visible, alors que d a n s le d o m a i n e c o n t i n e n t a l voisin les sources v o l c a n i q u e s a b o n d e n t ( C o w lon, 1977). La c a r t e s t r u c t u r a l e (Fig.3) indique que la zone de f r a c t u r e m 6 d i a n e N W - S E e n t r e ces deux unit6s c r u s t a l e s d6bute pr6s du r e b o r d de la p l a t e - f o r m e a u sud du Golfe d ' O r i s t a n o . Elle est d ' a i l l e u r s i n s c r i t e dans la t o p o g r a p h i e p a r un relief plus accus6 des c a n y o n s s o u s - m a r i n s ( G e n n e s s e a u x et V a n n e y , 1979). D a n s les profils de sismique r6flexion, c e t t e f r o n t i 6 r e est

c a r a c t 6 r i s 6 e p a r un a l i g n e m e n t i r r 6 g u l i e r d'accidents p r o f o n d s m e t t a n t en 6vidence une p h a s e de d i s t e n s i o n pr6coce. L a n a t u r e des a c c i d e n t s v a r i e de p o i n t en point, et les effets t e c t o n i q u e s et s 6 d i m e n t a i r e s p o s t 6 r i e u r s en a l t 6 r e n t s o u v e n t les c a r a c t 6 r e s . I1 s ' a g i t parfois d ' u n g r a b e n 6troit (Fig.4), parfois d ' u n e faille listrique, parfois e n c o r e de failles m u l t i p l e s a f f e c t a n t la s6rie s6dimentaire. Cette ligne d ' a c c i d e n t s se r a c c o r d e , sur la p l a t e - f o r m e , / i la t e r m i n a i s o n m 6 r i d i o n a l e d ' u n e n s e m b l e de g r a b e n s situ6s s u r la p l a t e - f o r m e d ' O r i s t a n o et d o n t les a x e s sont s e n s i b l e m e n t N N E - S S W . Ces foss6s, c o m p a r a b l e s ~ ceux observ6s d a n s le g r a b e n c o n t i n e n t a l (Cherchi et M o n t a d e r t , 1982), ou d a n s le Golfe d ' A s i n a r a ( T h o m a s et G e n n e s s e a u x , 1986), sont combl6s p a r 2000 3000 m de s6diments. Ils s o n t v r a i s e m b l a b l e m e n t d'~ge oligoc6ne, c o n t e m p o r a i n s de la p h a s e de rifting g6n6rale. Ils p 6 n ~ t r e n t au nord-est d a n s le Golfe d ' O r i s t a n o , se r e l i a n t ainsi a u g r a b e n central. On n o t e r a en p a r t i c u lier que ces g r a b e n s c o n s t i t u e n t le relais e n t r e l ' a c c i d e n t N W - S E qui borde au sud-ouest le g r a b e n du C a m p i d a n o , a c c i d e n t n o r m a l ou f a i b l e m e n t d 6 c r o c h a n t (Cocozza et al., 1974) (r6activ6 p e n d a n t la p h a s e d i s t e n s i v e plioq u a t e r n a i r e ) et la zone de f r a c t u r e m 6 d i a n e N W - S E qui t r a v e r s e la p e n t e c o n t i n e n t a l e . L ' 6 t u d e m o n t r e ainsi que les deux f r a c t u r e s d i s t e n s i v e s forment, p a r un t r a j e t en baionnette, u n e s 6 p a r a t i o n c o n t i n u e e n t r e les massifs de socle de la N u r r a a u n o r d et celui de l ' I g l e s i e n t e - S u l c i s a u sud. On m o n t r e aussi que la S a r d a i g n e s ' e s t f r a g m e n t 6 e en trois 616ments p r i n c i p a u x p e n d a n t la p6riode initiale de rifting. La qualit6 de la sismique et les d 6 f o r m a t i o n s t e c t o n i q u e s de la s6rie s 6 d i m e n t a i r e ne permett e n t pas de d6finir le d 6 p l a c e m e n t de ces unit6s les u n e s p a r r a p p o r t a u x autres. Le mouvement, p r i n c i p a l e m e n t distensif, c o r r e s p o n d bien ~ u n e e x t e n s i o n d'arc. Toutefois, un des e n r e g i s t r e m e n t s (Fig.5) m o n t r e u n e d6formation de f o r m e a n t i c l i n a l e ( " s t r u c t u r e en fleur") des s6diments p o u v a n t c o r r e s p o n d r e ~ u n e zone de c o u l i s s e m e n t d o n t le jeu, d ' a p r 6 s le c o n t e x t e c i n 6 m a t i q u e g6n6ral d ' o u v e r t u r e du

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Fig.4. Profil interpr~t~ (M-S 43) parall~le &la marge ouest sarde. Le profil montre un graben ~troit qui repr~sente le passage travers la marge de la zone de fracture NW SE (pour position, voir Fig.2). P - Q - - Plio-Quaternaire; M e - - evaporites supbrieures du Messinien; O - M - Oligoc~ne sup~rieur et Miocene; B - - socle acoustique. Fig.4. Interpreted seismic profile (M-S 43) parallel to the western Sardinian margin, showing a narrow graben oriented along the major NW-SE fracture zone crossing the continental slope (for location, see Fig.2). P - Q - - Plio-Quaternary; M e - Upper Messinian evaporites; O - M - Upper Oligocene and Miocene; B - - acoustic basement.

bassin, s e r a i t s e n e s t r e . C e t t e f r a c t u r a t i o n du socle est pr~coce et p a r a i t c o n t e m p o r a i n e des a u t r e s d i s t e n s i o n s d'&ge oligo-mioc~ne inf~ri e u r de la S a r d a i g n e . U n e ~tude plus d~taill~e, u t i l i s a n t u n e s i s m i q u e r~flexion plus p~n~t r a n t e , p e r m e t t r a de pr~ciser le t r a c ~ de c e t t e pal~o-fracture. L a r ~ a c t i v a t i o n des fosses de la S a r d a i g n e m ~ r i d i o n a l e e n t r a i n a a u P l i o - Q u a t e r n a i r e la s u r i m p o s i t i o n d ' u n g r a b e n N W - S E d a n s la r~gion du C a m p i d a n o (Fig.6) ( V a r d a b a s s o , 1963; P o m e s a n o - C h e r c h i , 1971; Cocozza et al., 1974). Ce foss~ est a u j o u r d ' h u i combl~ p a r 600 m e n v i r o n de s~diments l a g u n o - c o n t i n e n taux. C e t t e derni~re t e c t o n i q u e p e u t ~tre consid~r~e c o m m e u n e c o n s e q u e n c e l o i n t a i n e

de l ' o u v e r t u r e du b a s s i n t y r r h ~ n i e n , m a i s elle c o r r e s p o n d ~ g a l e m e n t & u n e n o u v e l l e dislocat i o n du socle s a r d e (en r e l a t i o n a v e c le s e r r a g e A f r i q u e - E u r o p e ) le l o n g de lignes de f r a c t u r e s d~j& r~activ~es a u T e r t i a i r e . A u sud, les ~tudes de s i s m i q u e r~flexion m o n t r e n t que les fract u r e s n o r m a l e s b o r d a n t le g r a b e n du Campid a n o s ' i n t e r r o m p e n t en m e r s u r le m a s s i f sousm a r i n du socle de l ' I c h n u s a . L a t r a n s f o r m a t i o n du m o u v e m e n t d i s t e n s i f li~ ~ l ' o u v e r t u r e du foss~ p e u t s ' e f f e c t u e r le long de l ' a c c i d e n t N E - S W qui b o r d e ce relief. A l ' e x t r ~ m i t ~ n o r d du g r a b e n du C a m p i d a n o , Cocozza et ah (1974) s u g g ~ r e n t u n e t r a n s f o r m a t i o n le long d'ancie n n e s failles h e r c y n i e n n e s N E - S W d o n t l ' u n e d'elles, j o i g n a n t le C a p o C o m i n o a u Golfe

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Fig.5. Profil sismique interpret6 (SARD 20), parall~le ~ la marge ouest sarde, et traversant la fracture majeure NW--SE. On note une zone de d6formation affectant la s~rie s~dimentaire ("structure en fleur") qui peut representer un indice du mouvement d~crochant (pour position, voir Fig.2; pour abr~viations, voir Fig.4). Fig.5. Interpreted seismic profile (SARD 20) parallel to the western Sardinian margin and crossing the major NW SE fracture. The tectonic deformation of the sedimentary cover can be interpreted as a flower structure and suggests a possible strike-slip movement (for location see Fig.2; for abbreviations, see Fig.4).

d'Oristano, a d~j~ rejou~ en compression durant les phases pyr~n~o-alpines (du Cr~tac~ sup~rieur ~ l'Eoc~ne (Chabrier, 1970), puis probablement au Burdigalien (Letouzey et al.,

WSW

1982). Un volcanisme effusif basique plioquaternaire souligne cet accident et t~moigne d'une activit~ tectonique r6cente (Fig.7). Cette fracturation constitue donc une nouvelle ~tape

OLIGOCENE-MIOCENE RIFT

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Fig.6. Section g~ologique sch~matique ~ travers le graben oligo-mioc~ne sarde montrant la surimposition du foss~ du Campidano au Plio-Quaternaire (d'apr~s Cherchi et Montadert, 1982). V - - volcanisme; P Q - - Plio-Quaternaire; O M - Oligo-Mioc~ne; B socle cristallin. Fig.6. Schematic cross section across the Oligo-Miocene Sardinian graben with the superimposed Plio-Quaternary Campidano Graben (after Cherchi and Montadert, 1982). V - - volcanics; P Q - - Plio-Quaternary; O- M Oligo-Miocene; B - - crystalline basement.

39 de la f r a g m e n t a t i o n du b~ti h e r c y n i e n sarde, par d~solidarisation de la partie m~ridionale du massif oriental. A u c u n v o l c a n i s m e n ' a f f e c t e a p p a r e m m e n t la f r a c t u r e m~diane mise en ~vidence sur la m a r g e occidentale. De m~me, l ' e x a m e n des foss~s de la plate-forme d ' O r i s t a n o ne r~v~le visiblement pas de r e j e u t e c t o n i q u e distensif r~cent. L ' a p p r o f o n d i s s e m e n t des c a n y o n s et l'instabilit~ s~dimentaire qui en d~coule sont sur la pente c o n t i n e n t a l e o c c i d e n t a l e les seules m a n i f e s t a t i o n s (peut-~tre distensives) contemp o r a i n e s de l ' o u v e r t u r e du Campidano.

Conclusions

Fig.7. Carte structurale sch~matique de la Sardaigne, montrant la fragmentation du socle hercynien en plusieurs blocs: La Nurra (N), l'Iglesiente-Sulcis (IS) et le massif oriental lui-m~me divis~ en deux parties par une faille hercynienne r~activ~e au Plio-Quaternaire lors de l'ouverture du Campidano. Les fractures majeures affectant le socle sarde durant les phases de rifting et de drifting sont indiqu~es en traits forts. I c - - Mont Ichnusa; B a - - Monts Baronies; A G - - Golfe d'Asinara; C G - - Golfe de Cagliari; OG -Golfe d'Oristano; W M F Z - zone de fracture de la marge ouest-sarde, l=foss~s oligo-mioc~nes; 2=graben plio-quaternaire du Campidano; 3=volcanisme plio-quaternaire; 4=rides volcaniques du d~troit corso-sarde; 5=limite approximative des domaines continentaux et oc~aniques; 6 = structures compressives de la marge nordtunisienne.

L'~tude par sismique r~flexion c o n t i n u e de la m a r g e o c c i d e n t a l e de la S a r d a i g n e a montr~ l ' e x i s t e n c e probable d ' u n e g r a n d e f r a c t u r e c r u s t a l e qui a s~par~, ~ l'Oligoc~ne, la partie o c c i d e n t a l e de l ' a r c sarde en deux ~l~ments. La d i s t e n s i o n et la subsidence t h e r m i q u e a u Miocene o n t c r ~ p o u r c h a c u n d ' e u x u n r~seau de failles ind~pendant, q u a s i - o r t h o g o n a l . L a fronti~re e n t r e les deux unit~s de socle est d~finie, depuis la c r o ~ t e oc~anique du bassin occidental j u s q u ' a u m o n t s o u s - m a r i n I c h n u s a au sud de l'ile. Son t r a j e t en ~chelon est relay~ p a r les g r a b e n s du p l a t e a u d ' O r i s t a n o et le foss~ du Campidano. L'~tude m o n t r e de plus qu'~ l ' e x c e p t i o n de deux c o u r t s ~v~nements compressifs qui o n t affect~ l'ile au M i o c e n e inf~rieur et t e r m i n a l (Letouzey et Tr~moli~res, 1980), la d i s l o c a t i o n du b~ti sarde en u n e mosai'que de blocs c r u s t a u x repr~sente l'essentiel de l'activit~ t e c t o n i u e , de l'Oligoc~ne ~ r A c t u e l (Fig.7). Cette s t r u c t u r a t i o n particuli~re de File et l ' a b s e n c e d'indice de c o m p r e s s i o n au n o r d du p l a t e a u c o n t i n e n t a l tunisien, dans la vall~e

Fig.7. Schematic structural geology map of Sardinia, showing division of the basement into several blocks: the Nurra (N), the Iglesiente-Sulcis (IS) and the eastern massif subdivided into two parts by a Hercynian fault reactivated during the Plio-Quaternary formation of the Campidano Graben. Thick dashed lines indicate major faults cutting the Sardinian basement during the rifting and drifting phases. I c - - Ichnusa Seamount; B a - Baronies Seamount; A G - - Gulf of Asinara; C G - - Gulf of Cagliari; O G - - Gulf of Oristano; W M F Z - - Western

Sardinian margin fracture zone. 1= Oligo-Miocene rifts; 2=Plio-Quaternary Campidano Graben; 3=Plio-Quaternary volcanics; 4=Corso-Sardinian Strait volcanics; 5=approximate oceanic-continental boundary; 6=compressive structures of the northern Tunisian margin.

40 m~diane et sur la marge sud de la Sardaigne ( G e n n e s s e a u x e t S t a n l e y , 1983; T h o m a s , 1986), semble indiquer que la Sardaigne n'est pas directement affect~e par le rapprochement des lithosph~res africaine et europ~enne depuis le M i o c e n e m o y e n ( M a r i n i e t M u r r u , 1980; M a u f f r e t e t al., 1981). E l l e n e s e m b l e p a s n o n p l u s jouer un rSle tr~s actif dans la transmission de pouss~es de la plaque africaine vers l'Europe suppos~e stable.

Remerciements Les auteurs

remercient

vivement

l'~quipage

d u N . O . Catherine Laurence p o u r l e u r e f f i c a c i t ~ et leur serviabilit~. Contribution U A 718, C N R S - U n i v e r s i t ~ P i e r r e e t M a r i e C u r i e N ° 418.

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