Actu Kiné Analyse critique
Kinesither Rev 2006;(53):4-14
L’arthrodèse est légèrement plus efficace que la rééducation intensive pour les lombalgies chroniques Cette analyse critique est produite par l’Australian Journal of Physiotherapy (AJP). Elle est co-publiée dans l’AJP et Kinésithérapie, la revue. R É S U M É D E FA I R B A N K S J , FROST H, WI LSON-MACDONALD J, YU L-M, BAR K E R K, C OLLI N S R E T L E S P I N E S TA B I L I S AT I O N T R I A L G R O U P. Randomised controlled trial to compare surgical stabilisation of the lumbar spine with an intensive rehabilitation programme for patients with chronic low back pain: The MRC spine stabilisation trial. BJM 2005 ; 330:1233-9. Préparé par Karen Grimmer, membre du comité de rédaction, Australian Journal of Physiotherapy. Questions : L’arthrodèse est-elle plus efficace qu’un programme de rééducation intensive en terme d’amélioration de la capacité fonctionnelle, la marche, la qualité de vie et la souffrance psychologique des patients atteints de lombalgies chronique ? Quelle est la fréquence des complications avec les deux types de traitements ? Protocole d’étude : Essai contrôlé randomisé multicentrique en simple insu avec analyse en intention à traiter et la participation de 15 centres britanniques de chirurgie orthopédique et de rééducation fonctionnelle.
C O M M E N TA I R E S Jennifer Klaber Moffett, Institute of Rehabilitation, University of Hull, UK Ce papier rapporte les résultats d’une étude remarquable. Une qui fera date. Il s’agit d’un essai contrôlé à grande envergure répondant à un vrai besoin. Dans cette étude, 349 patients présentant des lombalgies chroniques ét aient randomisés dans deux groupes de traitement : une chirurgie de st abilis ation rachidienne ou un programme de rééducation intensive (d’environ 75 heures) conduit par des kinésithérapeutes en collaboration avec des psychologues cliniques. Peu d’études existent sur l’efficacité de la fusion rachidienne. Une étude suédoise (n = 222) comparait trois types d’interventions chirurgicales et une approche de kinésithérapie. Cette étude (Fritzell, 2002) concluait que la chirurgie est plus efficace que la kinésithérapie mais n’a pas mis en œuvre un programme de rééducation intensive. Fairbank et al. (2005) ont suivi leurs patients pendant 24 mois avec une analyse en intention
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Patients : 349 patients âgés de 18 à 55 ans présentant une lombalgie chronique depuis au moins un an considérés comme candidats à une arthrodèse étaient randomisés dans deux groupes de traitement, le premier par arthrodèse (176 patients dont 139 ont effectivement eu une arthrodèse) et le second par un programme de rééducation intensive basée sur les principes de la thérapie cognitive comportementale (173 patients dont 151 ont effectivement participé au programme de rééducation). Interventions : La technique de fusion était laissée à la discrétion du chirurgien. Le programme de rééducation intensive comportait des exercices quotidiens cinq jours par semaine pendant trois semaines. Mesures : Ont été mesurés à 0, 6, 12 et 24 mois, l’indice d’Oswestry (échelle de 0-100), le périmètre de marche, la qualité de vie (SF36) et l’impact psychologique (DRAM). Les critères d’évaluation principaux étaient l’incapacité fonctionnelle et le périmètre de marche à deux ans. Résultats : Le suivi était de deux ans chez 81 % des patients. À deux ans, l’amélioration de l’in-
de traiter (perdus de vue 19 %). Cependant, au cours du suivi, 28 % des patients dans le groupe rééducation ont eu une intervention chirurgicale et 22 % des patients randomisés dans le groupe arthrodèse ont participé à un programme de rééducation. Il a fallu plus de six ans pour recruter suffisamment de patients traités dans 15 centres en Grande Bretagne. L’arthrodèse rachidienne est une intervention associée à un taux de complications élevé. D’autre part, il s’agit d’une opération coûteuse (Deyo 2004) dont les différences notables de techniques dépendent largement de préférences locales. Aux Etats-Unis, environ 20 % des patients consultant un chirurgien orthopédique ou un neurochirurgien auront une intervention chirurgicale, comparés à 3 % en Grande Bretagne. Le taux de chirurgie rachidienne aux Etats-Unis est au moins deux fois celui observé en Australie et cinq fois celui observé en Grande Bretagne. L’amélioration observée par Fairbank et al. (2005) en faveur du groupe chirurgical dépassait de peu le seuil de signification. Les auteurs
Nous reprenons les analyses co-publiées dans l’AJP et dans les revues « Fysioterapeuten » (journal norvégien de kinésithérapie) ou « Nederlands Tijdschrift voor Fysiotherapie » (journal hollandais de kinésithérapie). Traduit de l’anglais par Monsieur Gérald Pope, Masson, France.
capacité fonctionnelle était légèrement plus grande dans le groupe arthrodèse : moyenne et 95 % IC (4,1 [0,4-8,1]). Tous les autres paramètres montraient une amélioration clinique sans différences significatives entre les deux groupes. Dix-neuf complications peropératoires étaient notées dans le groupe arthrodèse et aucune complication dans le groupe de rééducation intensive. Conclusions : L’arthrodèse permet une amélioration légèrement plus importante qu’un programme de rééducation intensive en terme de capacité fonctionnelle chez les sujets souffrant de lombalgie chronique, candidats éventuels à une arthrodèse. Les complications sont observées chez 14 % des patients traités chirurgicalement tandis que le taux de complications dans le groupe de rééducation est de 0 %.
ont conclu avec prudence que la différence n’était pas suffisante et que les risques associés étaient trop élevés pour recommander une stabilisation chirurgicale chez les patients présentant une lombalgie chronique. C’est cette conclusion que retiennent les Recommandations Européennes pour le traitement des douleurs lombaires chroniques (European Guidelines 2004). RÉFÉRENCES – Cherkin DC, Deyo RA, Loeser JD, Bush T, Waddel G. An international comparison of back surgery rates. Spine 1994;19:1201-6. – COST B13 Action, European Guidelines for the Management of Chronic Low Back Pain (2004): www.backpaineurope.org – Deyo RA, Nachemson A, Mirza SK. Spinalfusion surgery – the case for restraint. N Engl J Med 2004;350:722-6. – Fritzell P, Hagg O, Wessbert P, Nordwall A. Chronic low back pain and fusion: a comparison of three surgical techniques: a prospective multicenter randomized study from the Swedish lumbar spine study group. Spine 2002;27:1131-41.