Le cancer du col utérin associé au VIH chez la jeune femme congolaise. Étude préliminaire

Le cancer du col utérin associé au VIH chez la jeune femme congolaise. Étude préliminaire

Cancer/Radiothérapie 8 (2004) 277–278 www.elsevier.com/locate/canrad Lettre à la rédaction Le cancer du col utérin associé au VIH chez la jeune femme...

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Cancer/Radiothérapie 8 (2004) 277–278 www.elsevier.com/locate/canrad

Lettre à la rédaction Le cancer du col utérin associé au VIH chez la jeune femme congolaise. Étude préliminaire

Il est aujourd’hui établi que l’infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) est associée à une prévalence élevée de dysplasie et de cancer invasif du col de l’utérus [3]. Il est donc raisonnable de penser que, dans les années à venir, le cancer du col de l’utérus deviendra un problème de santé publique chez la jeune femme africaine, étant donné la séroprévalence du VIH observé dans cette tranche d’âge [2]. Nous avons cherché à identifier les particularités épidémiologiques et anatomocliniques de cette affection néoplasique chez la femme jeune à Brazzaville. Une étude prospective préliminaire a été réalisée du 1er janvier au 31 décembre 2001 (12 mois) dans le service de médecine et carcinologie du centre hospitalier universitaire de Brazzaville chez 20 patientes âgées de 40 ans ou moins, atteintes d’un cancer du col utérin confirmé par l’examen histologique. Pour toutes ces malades, les renseignements suivants ont été recueillis : délai de la consultation, facteurs de risque (rapports sexuels avant 15 ans, premier accouchement avant 18 ans, parité supérieure ou égale à 3, rapports sexuels non protégés), examen clinique et colposcopique, bilan d’extension comprenant une radiographie du thorax, une échographie abdominopelvienne, une urographie intraveineuse, une cystoscopie et rectoscopie, stade selon la Fédération internationale de gynécologie obstétrique (FIGO), sérologie VIH par la méthode Elisa, confirmée par le western blot, comptage des lymphocytes CD4. La sérologie du virus du papillome humain (HPV) n’a pas été réalisée par manque des tests d’identification de ce virus. Durant la période d’étude, 307 dossiers de cancers ont été colligés dans le service. Cent cinquante cancers gynécologiques (49,8 %), dont 73 cas de cancers du col utérin ont été enregistrés. Parmi ces derniers, 22 cas ont concerné les patientes de 40 ans ou moins. Vingt malades ont été retenus pour cette étude ; les deux autres en ont été exclues pour insuffisance de renseignements. Dans 11 cas, la sérologie VIH était positive (groupe A) et dans les neuf autres, elle était négative (groupe B). L’âge moyen des patientes était de 26 ans avec des extrêmes de 18 et 40 ans. Quatorze patientes sur 20 avaient un âge compris entre 31 et 40 ans. Le délai de consultation était inférieur ou égal à trois mois, quelle que soit la population observée. Le saignement génital et les douleurs pelviennes

ont été observés respectivement dans 11 et 7 cas du groupe A. Dans ce même groupe, les lymphocytes CD4 étaient en nombre supérieur à 500/mm chez quatre patientes et inférieur à 200/mm3 chez sept. D’autres signes constitutionnels de l’infection par le VIH, tels que la fièvre au long cours et la diarrhée, ont été notés respectivement dans six et quatre cas chez ces malades. Selon la classification CDC (Center of disease control) de 1993, sept cas sont classés C3 et 4 C1. Les facteurs de risque tels que la précocité des rapports sexuels, la multiplicité des partenaires et l’absence de protection des rapports sexuels ont été observés chez toutes les malades du groupe A. Sur le plan macroscopique, l’aspect du col utérin était atypique dans trois cas du groupe B, bourgeonnant, ulcéré et ulcérobourgeonant chez les autres patientes. Neuf des 11 cancers du groupe A étaient de stade III alors que dans le groupe B, il y avait trois cas de stade 0, cinq de stade T1a et un de stade T1b. Il s’agissait d’un carcinome épidermoïde chez toutes les patientes du groupe A et chez celles du groupe B, dans lequel deux cas d’adénocarcinome ont été relevés. Le cancer du col de la femme jeune est essentiellement observé entre 30 et 40 ans [4]. Dans notre étude, six patientes étaient âgées de moins de 30 ans. Les observations de cas de patientes beaucoup plus jeunes ont été aussi rapportées dans la littérature [1]. L’identification de ces formes précoces de la maladie au Congo pourrait s’expliquer par la précocité des rapports sexuels associés aux maladies sexuellement transmissibles. Malgré le court délai de la consultation, toutes les tumeurs du groupe A étaient inopérables alors que celles du groupe B étaient opérables. Même si notre échantillon est petit, cette observation nous laisse interrogateurs. En effet, si le rôle causal de l’immunodépression dans la progression d’une néoplasie intra-épithéliale vers un cancer invasif n’est pas définitivement établi, il est en revanche difficile de ne pas s’interroger sur le caractère évolutif rapide du cancer du col de l’utérus chez ces femmes infectées par le VIH. N’y a-t-il donc pas une corrélation entre le stade avancé du cancer et l’infection par le VIH, comme l’ont dit Hawes et al. [5] La réponse à nos interrogations nous permettra de mieux comprendre cette pathologie afin de définir les meilleures stratégies thérapeutiques chez ces malades. Quoi qu’il en soit, la lutte contre le cancer du col de l’utérus, surtout chez les femmes jeunes infectées par le VIH, ne sera effective en Afrique Noire que si nous nous investissons dans la prévention du sida, mais aussi par la mise en place, à l’instar des pays occidentaux, des programmes de dépistage de cette affection.

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Lettre à la rédaction / Cancer/Radiothérapie 8 (2004) 277–278

Références [1]

Barillot I, Horiot JC, Pigneux J, Schraub S, Rozan R, Daly N, et al. Carcinomes du col utérin de la femme jeune : étude du groupe coopérateur français. Bull cancer / Radiother 1994;81:432–6.

[2]

Campion MJ, Mc Cance DD, Cuzick J, Singer A. Progressive potential of mild cervical atypia: prospective cytological, colposcopic and virological study. Lancet 1986;2:237–40.

[3]

Delaporte E. Actualités sur l’infection à VIH en Afrique Subsaharienne. Méd Tropi 1999;59:57–9.

[4]

Gerbaulet A, Maylin C. Le cancer du coL utérin de la femme jeune. Bull cancer/radiother 1994;81:409–12.

[5]

Hawes SE, Critchlow CW, Faye Niang MA, Diouf MB, Diop A, Touré P, Kassé AA, et al. Increased risk of high-grade cervical squamous intraepithelial lesions and invasive cervical cancer among African women with human immunodeficiency virus type 1 and 2 infectious. J Infect Dis 2003;15:555–63.

J.B. Nkoua-Mbon* I. Kocko Service de médecine et carcinologie, CHU de Brazzaville, BP 32, Brazzaville, Congo Adresse e-mail : [email protected] (J.B. Nkoua-Mbon). E.E. Ampion Service de radiothérapie, CHU de Brazzaville, BP 32, Brazzaville, Congo Reçu le 18 février 2004 ; accepté le 12 mars 2004 * Auteur correspondant. BP 4131, Brazzaville, Congo. Disponible sur internet le 25 mai 2004 © 2004 Publié par Elsevier SAS. doi:10.1016/j.canrad.2004.03.002