Le rhumatologue face à une myopathie cortisonique

Le rhumatologue face à une myopathie cortisonique

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Revue du Rhumatisme 75 (2008) 157–161

Le rhumatologue face à une myopathie cortisonique Corticosteroid-induced myopathy Anne Tournadre ∗ , Martin Soubrier Service de rhumatologie, CHU de Clermont-Ferrand, hôpital G.-Montpied, place H.-Dunant, B.P. 69, 63003 Clermont-Ferrand, France Rec¸u le 31 aoˆut 2007 ; accepté le 22 septembre 2007 Disponible sur Internet le 8 novembre 2007

Mots clés : Myopathie cortisonique ; Corticoïdes ; Myopathie Keywords: Corticosteroid-induced myopathy

1. Introduction Les myopathies, affections du muscle squelettique caractérisées par un déficit musculaire parfois associé à des douleurs musculaires et à une élévation des enzymes musculaires, peuvent être classées selon leur mécanisme physiopathologique. On peut ainsi individualiser les affections musculaires acquises, parmi lesquelles les myopathies inflammatoires, endocriniennes ou toxiques, des myopathies congénitales, dystrophiques ou métaboliques. Parmi les causes toxiques, la myopathie cortisonique occupe une place importante liée à l’utilisation large des glucocorticoïdes dans les pathologies allergiques, inflammatoires, néoplasiques ou auto-immunes et reste un des effets secondaires majeurs de la corticothérapie. C’est probablement la plus commune des myopathies médicamenteuses. Bien que l’effet délétère des glucocorticoïdes sur le muscle squelettique ait été initialement décrit par Cushing [1], les mécanismes physiopathologiques restent incomplètement élucidés et sont probablement plus complexes que la seule augmentation du catabolisme protéique. Surtout, la myopathie cortisonique peut poser un problème de diagnostic différentiel avec la pathologie sous jacente en particulier quand elle survient chez un patient traité par corticoïde pour une polymyosite ou une dermatomyosite. Rappels sur la cellule musculaire normale Chaque fibre musculaire squelettique est constituée d’un ensemble de cellules dont les cytoplasmes sont confondus. Le ∗

Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (A. Tournadre).

1169-8330/$ – see front matter © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.rhum.2007.09.005

cytoplasme d’une fibre musculaire contient plusieurs milliers de myofibrilles (80 % de la masse musculaire striée) qui génèrent la contraction musculaire grâce à l’interaction des protéines (myosine, ␣-actine, troponine, tropomyosine) qui s’organisent en myofilaments. Un changement de conformation de ces protéines en particulier de l’actine et de la myosine après hydrolyse de l’ATP permet le déplacement des myofilaments. L’énergie est fournie sous forme d’ATP suivant différentes voies métaboliques, la principale voie productrice d’énergie est la voie aérobie mitochondriale, la créatine constitue le stock énergétique après sa phosphorylation par la créatine kinase. La réaction permettant la synthèse de l’ATP à partir de l’ADP est réversible. La régénération musculaire dépend de cellules quiescentes plaquées sous la membrane plasmique, les cellules satellites, véritables cellules souches musculaires dont le nombre décroît avec l’âge. Plusieurs types de myofibrilles peuvent être identifiés par des méthodes histœnzymologiques. Ainsi, les études enzymatiques distinguent les fibres de contraction lente (fibres de type I et fibres de type IIA) riches en mitochondries des fibres de type IIB de contraction rapide riches en glycogène. L’étude de l’activité ATPase différencie les différents types de fibres en fonction de la sensibilité à différents pH. 2. Diagnostic 2.1. Epidémiologie La fréquence de la myopathie cortisonique est difficile à évaluer compte tenu de l’hétérogénéité des populations traitées et des maladies associées. Deux études, l’une portant sur 15 patients atteints de cancer [2] et l’autre sur 60 patients

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asthmatiques [3], estiment cette fréquence, respectivement, à 60 et 64 %. La fréquence de l’atteinte musculaire au cours de la maladie de Cushing est évaluée entre 50 et 80 % [4]. La myopathie cortisonique peut survenir à tout âge et semble toucher en priorité la femme [4]. 2.2. Signes cliniques La symptomatologie musculaire est peu spécifique, se manifestant sous la forme d’une myopathie aiguë ou sous la forme d’un déficit musculaire progressif avec atrophie. Le caractère essentiel de la myopathie cortisonique est son caractère le plus souvent indolore. La forme aiguë de la myopathie cortisonique est rare. Elle survient après des cures courtes de corticoïdes à posologie élevée, généralement par voie intraveineuse. Il s’agit le plus souvent de patients traités pour des affections bronchopulmonaires (asthme, bronchite chronique) en phase d’exacerbation. Ces formes aiguës se manifestent par l’apparition rapide d’un déficit musculaire diffus à la fois proximal et distal avec atrophie musculaire qui peut toucher les muscles respiratoires. Elle est parfois associée à une rhabdomyolyse et peut donner lieu, à l’extrême, à un tableau de quadriplégie flasque avec insuffisance respiratoire [5–8]. Au cours de ces observations, plusieurs facteurs associés peuvent contribuer à la rapidité d’installation et à la sévérité du déficit musculaire : le terrain asthmatique ou bronchopathe sous-jacent, un sepsis associé, l’alitement prolongé, un séjour en réanimation ou en unité de soins intensifs, la ventilation assistée, les agents sédatifs et curares bloquant la jonction neuromusculaire. Les formes chroniques, de loin les plus fréquentes, surviennent après un traitement prolongé par corticostéroïdes, plus souvent avec les corticoïdes fluorés (déxaméthasone, bétaméthasone, triamcinolone) bien que tous les corticoïdes puissent être impliqués. Les autres signes d’imprégnation par les corticoïdes sont fréquemment retrouvés. Ces formes chroniques se caractérisent par l’apparition insidieuse d’une fatigabilité et d’un déficit musculaire proximal prédominant sur la ceinture pelvienne. Les muscles innervés par les nerfs crâniens et les sphincters sont habituellement épargnés. Des myalgies et une atteinte des muscles respiratoires peuvent s’associer [9–11]. Le délai d’apparition et la dose cumulée de corticoïdes rec¸ue sont très variables et aucune étude ne permet de définir de seuil de toxicité. Ainsi pour les huit patients (trois polymyosites, trois lupus systémiques, une polyarthrite rhumatoïde, une pseudopolyarthrite rhizomélique) rapportés par Askari et al. [9], le délai d’apparition du déficit musculaire proximal après mise en route de la corticothérapie varie de 30 à 240 jours et la dose cumulée de 400 mg à 15 g. C’est dans l’atteinte des muscles respiratoires que les données concernant le retentissement des corticoïdes sont les plus nombreuses. La dose de glucocorticoïde au delà de laquelle la fonction respiratoire est altérée reste discutée. Une posologie de 30 mg/j de prednisolone pendant deux semaines n’entraîne pas de dysfonction respiratoire chez des patients traités pour une bronchite chronique [12]. Pour les posologies plus élevées, une étude portant sur huit patients traités pour une pathologie non respiratoire (glomérulonéphrite, thyroïdite, purpura thrombopénique) par prednisone (1 à 1,5 mg/kg par jour pen-

dant huit semaines puis décroissance sur six semaines) a montré une diminution significative des débits inspiratoires au cours du traitement et cela, dès la deuxième semaine avec un retour à des valeurs normales six mois après l’arrêt des corticoïdes [13]. L’atteinte musculaire proximale et l’atteinte des muscles respiratoires sont réversibles à l’arrêt des corticoïdes dans un délai de trois à six mois [2,13]. 2.3. Biologie En dehors des rhabdomyolyses associées à la myopathie cortisonique aiguë des unités de soins intensifs [6], les enzymes musculaires sériques (CPK, LDH) sont le plus souvent normales, à la limite inférieure de la normale témoignant d’une masse musculaire faible. Plus rarement, une élévation modérée est rapportée [9,11,14]. Une élévation des CPK sans déficit musculaire objectif apparaissant après majoration des doses de corticoïde et régressant à la diminution est notée chez cinq enfants sur neuf traités pour une dermatomyosite juvénile [15]. Une augmentation de l’excrétion urinaire de créatine est souvent associée [9,14] mais n’est ni constante [3] ni spécifique puisqu’elle peut être retrouvée notamment dans les myopathies inflammatoires [16]. 2.4. Electromyogramme (EMG) Non spécifique et très variable, il peut montrer ou non un syndrome myogène caractérisé par des potentiels polyphasiques et une activité spontanée de fibrillation [14]. 2.5. Imagerie L’imagerie par résonance magnétique (IRM) a supplanté le scanner dans la caractérisation de la pathologie musculaire. Elle permet d’objectiver un processus inflammatoire musculaire responsable d’un œdème, le remplacement du tissu musculaire normal par un tissu graisseux ou une atrophie, et d’identifier un processus tumoral. Dans les myopathies inflammatoires, l’intérêt de l’IRM à visée diagnostique mais aussi dans la prise en charge de ces pathologies est bien établi [17,18]. L’œdème musculaire inflammatoire se traduit par un hypersignal en séquence T2 et peut être différencié d’une involution graisseuse présente dans 86 % des cas d’après Reimers et al. [17] sur des séquences avec suppression de graisse (STIR ou Fatsat). Ces anomalies de signal inflammatoire sont localisées à la ceinture pelvienne et aux cuisses et sont corrélées à l’activité de la maladie [18]. L’infiltration graisseuse, le plus souvent associée à l’atrophie, se caractérise elle par un hypersignal à la fois en séquence T1 et T2. Aux cours des myopathies cortisoniques, cette infiltration graisseuse est visible de fac¸on bilatérale et symétrique au niveau de la ceinture pelvienne ainsi que dans les tissus sous-cutanés [19]. Peu d’études cliniques avec des données d’imagerie sont disponibles dans la myopathie cortisonique. Une étude portant sur des lapins traités par triamcinolone par voie sous cutanée pendant dix jours permet de comparer données d’histopathologies et d’IRM réalisées avant et après la corticothérapie [20]. La mesure des temps de relaxation en T2 au niveau du muscle gastrocnémien riche en fibre de type II montre un allongement significatif

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après corticothérapie corrélé au degré d’atrophie et à la diminution de taille des fibres musculaires de type II mais pas au degré d’infiltration graisseuse. Cet allongement des temps de relaxation en T2 qui correspond à un hypersignal T2 est confirmé chez trois patientes présentant un tableau de myopathie cortisonique chronique. 2.6. Histologie L’examen de la biopsie musculaire trouve une atteinte myopathique non inflammatoire comprenant des irrégularités de taille des fibres, des noyaux centraux, plus rarement des signes de nécrose des fibres musculaires. Il existe une atrophie sélective des fibres rapides de type II surtout type IIB qui sont le siége d’une accumulation de glycogène. Les études en microscopie électronique montrent une agrégation des mitochondries et une vacuolisation qui témoignent du dysfonctionnement de la chaîne énergétique [11,14,21]. 3. Physiopathologie de la myopathie cortisonique La combinaison d’un effet à la fois antianabolique et catabolique peut expliquer la rapidité et l’importance de la perte musculaire sous traitement par glucocorticoïdes. La liaison du glucocorticoïde à son récepteur entraîne une altération de la transcription de l’ARN et une diminution de la synthèse des protéines contractiles [22,23]. Des données plus récentes révèlent que l’effet antianabolique des glucocorticoïdes passe par une surexpression d’une protéine régulatrice, la myostatine qui inhibe la prolifération et la différenciation des cellules satellites responsables de la régénération musculaire [24]. L’augmentation du transport des acides aminés hors de la fibre musculaire participe à la perte de la masse protéique. L’activation de la voie ubiquitine–protéasome augmente la dégradation des protéines contractiles essentielles dont la myosine, l’␣-actinine ou la troponine [24]. Il s’ensuit dans le tissu musculaire une perte en myofilaments et les fibres musculaires rapides (IIB) sont les plus touchées [8,25]. Une diminution de l’activité des phosphorylases pourrait expliquer une accumulation de glycogène principalement dans les fibres de type II qui s’associe le plus souvent à l’atrophie [26]. Bien que cela reste encore controversé, la corticothérapie au long cours semble entraîner une dysfonction de la chaîne énergétique mitochondriale par diminution des capacités oxydatives de la mitochondrie ce qui aboutit à une production accrue d’acide lactique et cliniquement à un déficit musculaire. Ainsi, une étude portant sur 60 patients traités par prednisolone (dose moyenne 12 mg/j pendant 16 mois) pour des pathologies diverses (lupus, PR, polymyosite, dermatomyosite, périartérite noueuse, sarcoïdose, etc.) compare les capacités musculaires et les taux de lactates à l’exercice avant et après la corticothérapie [21]. Les taux de lactates significativement plus élevés après la corticothérapie sont corrélés à la dose totale de corticoïdes rec¸us et s’associent à une diminution des capacités musculaires et à une progression du déficit musculaire. Cette dysfonction de la chaîne respiratoire mitochondriale est confirmée sur les biopsies musculaires et pourrait s’associer à une surproduction de radicaux libres.

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4. Différencier myopathie cortisonique et myopathie inflammatoire évolutive Il est souvent difficile devant une diminution des capacités fonctionnelles musculaires chez un patient atteint d’une myosite et traité au long cours par corticoïde de distinguer la part de l’atteinte liée à la maladie inflammatoire de la part liée à l’excès de corticoïdes. Rien ne permet d’écarter une myopathie cortisonique associée dont le délai de survenue et le degré de sévérité sont très variables. C’est plus la confirmation d’une poussée évolutive de la maladie inflammatoire que doit rechercher le clinicien. L’aggravation du déficit dans le premier mois de la corticothérapie, l’absence d’autres signes en rapport avec l’excès de corticoïdes, une élévation franche des enzymes musculaires sont des arguments en faveur d’une poussée inflammatoire de la myosite. L’EMG n’apporte aucun argument pour l’un ou l’autre des deux diagnostics. L’excrétion urinaire de créatine est augmentée dans les deux types de myopathies. L’IRM peut être un examen clé en identifiant des anomalies de signal inflammatoires pour affirmer une évolutivité de la myosite. Les techniques ultrasonographiques, grâce à l’utilisation d’agents de contraste, microbulles injectées par voie intraveineuse rehaussant le signal doppler et donc la détection d’une perfusion, semblent également intéressantes pour diagnostiquer une activité inflammatoire musculaire et pour le suivi évolutif des myosites [27]. Dans les myopathies inflammatoires, nous avons retrouvé que le dosage du récepteur soluble à l’IL-2, marqueur de prolifération des lymphocytes T, pourrait être un test diagnostic et un marqueur évolutif fiable [28]. 5. Myopathie cortisonique et ostéoporose fracturaire Les glucocorticoïdes par un effet délétère à la fois sur le tissu musculaire et sur le tissu osseux augmentent le risque de fracture de hanche et de fracture vertébrale. Une étude rétrospective de près de 250 000 sujets sous corticoïdes comparés à des sujets témoins rapporte un taux relatif de fractures vertébrales par rapport aux témoins de 2,6 (IC : 2,31–2,92) et pour la hanche de 1,61 (IC : 1,47–1,76) [29]. La pathophysiologie des fractures cortico-induites est multifactorielle mais dépend principalement de la masse osseuse et du risque de chute [30,31]. La corticothérapie est responsable d’une diminution de la masse osseuse mais également d’une altération de la qualité de l’os. Son effet sur la perte osseuse est temps et dose-dépendant [32]. L’atteinte neuromusculaire en augmentant le risque de chute et en altérant les capacités d’adaptation et d’évitement face à la chute (vitesse de réaction, coordination et protection lors la chute) est avec l’atteinte de la fonction visuelle un facteur de risque majeur de fracture de hanche [33]. Différents tests peuvent être utilisés pour évaluer la mobilité et l’équilibre statique et dynamique [33–35]. L’incapacité à tenir la position debout 30 secondes en appui monopodal est associée au risque de chute et de fracture ostéoporotique (Odds ratio = 2,49, IC : 1,19–5,1) et pourrait ainsi être un outil simple d’évaluation du risque fracturaire [34].

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6. Prise en charge thérapeutique

7. Conclusion

Une des premières mesures thérapeutiques et préventives est l’épargne cortisonique qui peut être associée à un changement de molécule en évitant les corticoïdes fluorés. Les règles diététiques indiquent qu’il faut éviter les carences protéiques et les situations de dénutrition. Dans les myopathies cortisoniques, la supplémentation en créatine n’a pas été évaluée chez l’homme. Chez le rat, la créatine réduit la perte musculaire et l’atrophie induites par la déxaméthasone mais a peu d’effet sur la fonction respiratoire [36]. Chez les sujets sains, la supplémentation en créatine améliore la force d’environ 10 % et la masse maigre d’un kilogramme [37]. Dans les dystrophies musculaires au contraire des myopathies métaboliques, la force est augmentée de fac¸on modeste mais significative [37]. En dehors d’une augmentation des douleurs musculaires chez les patients présentant une glycogénose de type V (Maladie de Mc Ardle), aucun effet secondaire n’est rapporté [37]. Cependant, la durée de la supplémentation ne dépasse pas six mois dans les différentes études et ne permet donc pas de conclure sur l’innocuité du traitement à long terme. L’apport de glutamine, acide aminé essentiel, pourrait être également intéressant mais aucune étude n’est actuellement disponible chez l’homme. Chez le rat, l’administration de glutamine prévient l’atrophie induite par la déxaméthasone en inhibant l’expression de la myostatine qui régule négativement la prolifération musculaire [24]. L’activité physique modérée et adaptée doit être conseillée aux patients car elle prévient et améliore la perte musculaire [38]. L’effet bénéfique de l’exercice musculaire peut être expliqué par une augmentation dans les fibres musculaires du nombre de capillaires et de mitochondries [25]. L’inactivité, en augmentant la concentration en récepteurs aux glucocorticoïdes, pourrait aggraver les effets musculaires de la corticothérapie [39]. Les stéroïdes anabolisants et les facteurs de croissance (hormone de croissance (GH) et insulin-like growth factor-I (IGF-1)) semblent prometteurs dans les études animales mais peu d’études chez l’homme confirment leur intérêt. Les androgènes en raison de leur action anabolique ont été essayés en prévention de la perte musculaire cortico-induite sans véritable succès peut-être en raison d’une diminution des récepteurs aux androgènes dans le muscle par les glucocorticoïdes [40]. La supplémentation en déhydroépiandrostérone (DHEA), androgène adrénalien dont la sécrétion est diminuée par les glucocorticoïdes, améliore la fonction musculaire chez le rat et augmente la masse musculaire chez l’adulte [41]. L’administration de GH et d’IGF-1 est efficace sur l’anabolisme protéique musculaire mais n’est pas dénuée d’effets secondaires [42,43]. Le traitement par glucocorticoïdes au long cours et le risque fracturaire associé impliquent une évaluation et une prévention du risque de chute incluant des mesures éducatives, une prise en charge de l’environnement, des aides, un programme de reconditionnement physique adapté [30,35]. La supplémentation vitaminocalcique et les agents antiostéoclastiques (bisphosphonates) sont des mesures pharmacologiques efficaces dans la prévention et le traitement de l’ostéoporose cortico-induite [32].

Malgré l’évolution de son arsenal thérapeutique, le rhumatologue reste confronté aux effets secondaires de la corticothérapie. La fréquence de la myopathie cortisonique en pratique quotidienne contraste avec le peu de données et d’études disponibles dans la littérature. La myopathie cortisonique revêt un spectre clinique très large tant par son degré de sévérité que par le délai d’apparition ou la dose toxique. Son retentissement sur la fonction musculaire mais aussi sur la fonction respiratoire ne doit pas être sous-estimé. Aucun signe clinique, aucune exploration n’est spécifique. Chez les patients traités pour une myopathie inflammatoire, elle pose le problème du diagnostic différentiel avec l’affection causale et par là même de l’orientation thérapeutique. C’est plus la présence d’arguments en faveur d’une poussée inflammatoire musculaire qui va permettre de trancher et qui va orienter le clinicien vers l’augmentation de la corticothérapie. L’épargne cortisonique reste le traitement de première intention de la myopathie cortisonique. L’exercice physique doit être préconisé ce d’autant qu’une étude récente confirme les effets bénéfiques d’un programme de réentraînement à l’effort chez des patients atteints de polymyosite et dermatomyosite sans augmentation des signes inflammatoires musculaires [44]. Les carences nutritionnelles doivent être corrigée et des mesures de prévention du risque de chute et de l’ostéoporose cortico-induite doivent être associées. Les supplémentations protéiques et les traitements hormonaux semblent intéressants dans les autres myopathies et dans les modèles animaux mais restent à évaluer au cours d’essais thérapeutiques. Références [1] Cushing H. The basophil adenomas of the pituitary body and their clinical manifestations. Johns Hopkins Med J 1932;50:137–95. [2] Batchelor TT, Taylor LP, Thaler HT, et al. Steroid myopathy in cancer patients. Neurology 1997;48:1234–8. [3] Bowyer SL, LaMothe MP, Hollister JR. Steroid myopathy : incidence and detection in a population with asthma. J Allergy Clin Immunol 1985;76:234–42. [4] Kaminski HJ, Ruff RL. Endocrine myopathies (Hyper- and hypofunction of adrenal, thyroid, pituitary and parathyroid glands and iatrogenic corticosteroid myopathy). In: Engel AG, Franzini-Armstrong C, editors. Myology : Basic and Clinical, II, 2nd ed New-York: McGraw-Hill, Inc.; 1994. p. 1726–53. [5] Dekhuijzen PN, Decramer M. Steroid-induced myopathy and its significance to respiratory disease : a known disease rediscovered. Eur Respir J 1992;5:997–1003. [6] Hanson P, Dive A, Brucher JM, et al. Acute corticosteroid myopathy in intensive care patients. Muscle Nerve 1997;20:1371–80. [7] Kumar S. Steroid-induced myopathy following a single oral dose of prednisolone. Neurol India 2003;51:554–6. [8] Owczarek J, Jasinska M, Orszulak-Michalak D. Drug-induced myopathies. An overview of the possible mechanisms. Pharmacol Rep 2005;57:23–34. [9] Askari A, Vignos Jr PJ, Moskowitz RW. Steroid myopathy in connective tissue disease. Am J Med 1976;61:485–92. [10] Janssens S, Decramer M. Corticosteroid-induced myopathy and the respiratory muscles. Report of two cases. Chest 1989;95:1160–2. [11] Decramer M, de Bock V, Dom R. Functional and histologic picture of steroid-induced myopathy in chronic obstructive pulmonary disease. Am J Respir Crit Care Med 1996;153:1958–64.

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