Le vaccin contre le zona : vos questions et leurs réponses

Le vaccin contre le zona : vos questions et leurs réponses

NPG Neurologie - Psychiatrie - Gériatrie (2015) 15, 200—205 Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com CONDUITE THÉRAPEUTIQUE Le ...

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NPG Neurologie - Psychiatrie - Gériatrie (2015) 15, 200—205

Disponible en ligne sur

ScienceDirect www.sciencedirect.com

CONDUITE THÉRAPEUTIQUE

Le vaccin contre le zona : vos questions et leurs réponses The vaccine against shingles: Your questions and their answers P.-O. Lang a,∗,b, C. Trivalle c a

Service de gériatrie et de réadaptation gériatrique, CHU Vaudois (CHUV), Mont-Paisible 16 (MP16/04/414), 1011 Lausanne, Suisse b Health and Wellbeing Academy, Anglia Ruskin University, Cambridge, Royaume-Uni c Pôle de gériatrie, hôpital universitaire Paul-Brousse, AP—HP, 12-14, avenue Paul-Vaillant-Couturier, 94800 Villejuif, France Disponible sur Internet le 16 juillet 2015

MOTS CLÉS Zona ; Prévention ; Vaccin ; Douleurs post-zostériennes

KEYWORDS Herpes zoster; Prevention; Vaccine; Post-herpetic neuralgia



Résumé Depuis 2006, le vaccin vivant atténué contre le zona dispose d’une autorisation de mise sur le marché au niveau européen. Depuis le 15 juin 2015, il est enfin disponible en France au prix de 127,24 D et remboursé à 30 % par l’assurance maladie. Cet article répond à vos interrogations concernant son intérêt, son efficacité, sa tolérance et ses bénéfices pour la société, dans la prévention du zona et d’une de ses complications les plus fréquentes et la plus invalidante, les douleurs post-zostériennes. © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Summary Since 2006, the live attenuated vaccine against shingles has had market authorisation in the European Union. Since June 15th 2015, it is available in France for the price of 127.24 D and will be reimbursed by the National Health Insurance System. This article answers your questions about its interest, efficacy, tolerance and benefits to society in the prevention of shingles and one of its the most frequent and most disabling complications: post-herpetic neuralgia. © 2015 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (P.-O. Lang).

http://dx.doi.org/10.1016/j.npg.2015.05.004 1627-4830/© 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Le vaccin contre le zona : vos questions et leurs réponses Le virus de la varicelle et du zona (VZV) est un virus exclusivement humain de la famille des herpes viridae (human herpes virus de type 3). Il est responsable de deux entités cliniques distinctes : la varicelle et le zona. La varicelle, infection ubiquitaire extrêmement contagieuse, est dans la majorité des cas une maladie bénigne de l’enfant. Le zona est une maladie sporadique le plus souvent de l’adulte d’âge moyen ou âgé, caractérisée par une éruption cutanée vésiculeuse, douloureuse, localisée à un ou plusieurs dermatomes dont l’évolution est le plus souvent spontanément favorable [1]. L’aspect caractéristique des lésions cutanées suffit dans la grande majorité des cas au diagnostic ; le recours aux examens de laboratoire se limite exclusivement aux formes atypiques et aux patients immunodéprimés [1]. Parmi les multiples complications décrites, la plus fréquente et la plus invalidante, et ce quel que soit le statut immunitaire des patients, est la douleur. Aiguë, elle est secondaire à la névrite induite directement par la réactivation du VZV. Elle peut débuter avant l’apparition des vésicules caractéristiques (jusqu’à 15 jours) et perdurer jusqu’à un mois après leur disparition. Chronique, elle constitue un syndrome d’intensité variable persistant plus de 30 jours après l’éruption et pouvant durer des années [1]. Depuis 2006, le Zostavax® , un vaccin vivant atténué, dispose d’une autorisation de mise sur le marché au niveau européen (http://www.ema.europa.eu) pour la prévention du zona et des douleurs post-zostériennes, mais aussi pour diminuer l’intensité et la durée des douleurs chronique en cas de survenue d’un zona malgré la vaccination, et enfin améliorer la qualité de vie et préserver l’autonomie fonctionnelle dans la population des 50 ans ou plus [2]. Ce vaccin est enfin disponible en France depuis le 15 juin 2015, au prix de 127,24 D la dose. Le prix d’une dose de vaccin sera remboursé à 30 % par l’Assurance maladie. Dans son dernier rapport, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) recommande cette vaccination chez les adultes âgés de 65 à 74 ans révolus avec un schéma vaccinal d’une seule dose. Durant la première année suivant l’inscription du vaccin au calendrier vaccinal (soit jusqu’au 28 février 2017), les personnes âgées de 75 à 79 ans pourront être vaccinées dans le cadre d’un rattrapage (http://www.hcsp.fr/explore. cgi/avisrapportsdomaine?clefr=390). Ainsi, la population cible dans les indications remboursées est estimée à 690 000 personnes par an après la période de rattrapage. Bien que le vaccin apparaisse moins immunogénique après l’âge de 70 ans [3,4], pour le moment aucune dose de rappel n’a été préconisée. Une seule injection semble suffisante pour induire une protection de longue durée [1], bien que la durée exacte de protection induite par la vaccination ne soit pas formellement connue [5]. Cet article répond à vos interrogations concernant l’intérêt de cette vaccination, son efficacité, sa tolérance et ses bénéfices pour la société dans la promotion d’un vieillissement de qualité et en bonne santé.

Qu’est ce que le zona et quelles sont ces conséquences potentielles pour la santé ? Le zona et les douleurs induites confrontent les patients à des douleurs parfois intenses et potentiellement à des

201 complications tardives dont la plus éprouvante est la douleur post-zostérienne. Son impact sur l’indépendance fonctionnelle et la qualité de vie est une réalité et notamment dans la population âgée [6]. En France, les estimations de l’incidence annuelle sont issues d’études épidémiologiques réalisées auprès de médecins généralistes et des médecins du réseau « Sentinelles » [7,8]. Ainsi depuis 2004, un réseau Sentinelles (http://websenti.u707.jussieu.fr/ sentiweb/? page=maladies&mal=14) recueille le nombre de cas de zona vus en consultation de médecine générale. La définition de cas utilisée est la suivante : « Première consultation pour un zona en phase aiguë défini par une éruption aiguë érythémato-vésiculeuse douloureuse au niveau d’un territoire métamérique (territoire nerveux radiculaire), accompagnée éventuellement de nombreuses vésicules à distance du métamère concerné (zona disséminé) ». Les taux d’incidence de zona par classe d’âge sont extrapolés, à partir du nombre de notifications des médecins de ce réseau, redressés en fonction de la couverture du réseau et de la participation effective des médecins du réseau à la surveillance. On sait ainsi que les hommes apparaissent aussi touchés que les femmes et le taux d’incidence est relativement stable (≈ 400 cas pour 100 000 habitants). Ce taux augmente cependant avec l’âge et, après 60 ans, l’incidence du zona est multipliée par un facteur 8 à 10 en raison à la fois de : • l’immunosénescence ; • la diminution de l’immunité spécifique contre le VZV ; • l’augmentation de la susceptibilité à développer avec l’âge des maladies infectieuses, tumorales et autoimmunes ; • l’augmentation du recours aux thérapeutiques immunosuppressives [6]. En 2012, 1250 cas pour 100 000 habitants étaient enregistrés dans la population des 70 ans ou plus. Dans la plus grande étude observationnelle prospective franc ¸aise portant sur le zona chez les personnes vivant à domicile, Chidiac et al. [7] ont apporté une mesure objective de l’impact de la maladie sur la qualité de vie relative à la santé. Un total de 8103 patients vus en phase aiguë d’un zona et de 935 personnes présentant des douleurs post-zostériennes ont été examinés et interrogés sur une année par 5000 médecins généralistes et dermatologues. Les patients inclus ont été classés en trois groupes en fonction du motif de leur visite initiale : zona aigu ; douleurs post-zostériennes, définies comme la persistance de la douleur après la guérison des lésions cutanées et d’autres complications d’organes et/ou neurologiques. Chaque patient a rempli un questionnaire pour évaluer les douleurs et un questionnaire de qualité de vie (medical outcome study short form-36 [MOS SF-36]). Les 7595 questionnaires ont montré que le zona avait un impact très négatif dans toutes les dimensions du MOS SF 36, en comparaison aux questionnaires remplis par une population de référence, appariée pour l’âge et le sexe. Les valeurs les plus faibles ont été obtenues dans les scores de fonctionnement physique et des réactions émotionnelles. L’effet sur la qualité de vie s’est également traduit par un taux plus élevé d’approches médicales alternatives dans la prise en charge des douleurs. Ce constat souligne la grande détresse vécue à cause des douleurs associées au zona. D’une fac ¸on

202 similaire, mais au Canada [9], entre octobre 2005 et juillet 2006, 261 patients ambulatoires âgés de 50 ans ou plus avec un zona ont été recrutés dans les cabinets de 83 médecins dans les 14 jours suivant le début de l’éruption cutanée. La douleur et l’inconfort liés au zona et la qualité de vie ont été évalués par le Zoster Brief Pain Inventory (ZBPI) et la EuroQol EQ-5D respectivement au moment de l’inclusion, chaque semaine pendant le premier mois et tous les mois durant 5 mois. Le zona à la phase aiguë interférait avec tous les domaines de la santé mais principalement le sommeil (64 %), la jouissance de la vie (58 %) et les activités générales (53 %). La durée médiane d’interférence des douleurs sur les activités de la vie quotidienne variait entre 27 et 30 jours. Dans l’ensemble, 24 % des participants présentaient des douleurs chroniques. L’anxiété et la dépression, la jouissance de la vie, l’humeur et le sommeil étaient également les domaines les plus fréquemment touchés au cours de la période douloureuse. Le score moyen de l’EQ-5D était de 0,59 lors de l’inclusion et est resté en moyenne à 0,67 à tous les points du suivi chez tous les participants qui avaient déclaré ressentir une douleur et ce aussi longtemps que la douleur persistait. De plus, même lorsque les médicaments antiviraux étaient initiés selon les recommandations (72 premières heures de l’éruption), à la fois leurs effets antalgiques et préventifs sur les douleurs aiguës et chroniques restaient modestes. Ainsi, la plupart du temps, il est nécessaire pour tenter de contrôler les douleurs de combiner à la phase aiguë le traitement antiviral avec des médicaments analgésiques et de combiner les antalgiques entre eux pour maîtriser les douleurs chroniques [10]. Non seulement la sélection de médicaments et la dose prescrite doivent être examinées avec soin, mais au final le contrôle complet de la douleur avec les médicaments analgésiques actuellement disponibles reste un défi à la fois pour les patients et le médecin [11]. Cela a été illustré en Australie par l’analyse des données de consultations de médecine générale entre 2000 et 2006 dans la population âgée de 50 ans ou plus [12]. L’incidence des zonas était de d’environ 10/10 000 et 1,45/1000 personnes pour les douleurs post-zostériennes. Il a été également clairement montré que 11,2, 14,2, 16,2 et 20 % des zonas étaient associés à des douleurs postzostériennes chez les 50—59, 60—69, 70—79 ans et au-delà de 80 ans. Toujours en Australie, mais à partir de données rétrospectives (1998—2005) des services des urgences et des dossiers hospitaliers, les auteurs ont évalué l’impact du zona sur l’utilisation des ressources de soins de santé [12]. Le taux annuel d’hospitalisations chez les sujets âgés de 50 ans ou plus était de 28/100 000 lorsque le diagnostic principal était un zona simple, et de 39/100 000 lorsqu’un autre diagnostic était associé. La durée moyenne de séjour était de 6,8 jours (6,0 si zona sans complications, et > 14 jours pour une encéphalite zostérienne). Les hospitalisations, les douleurs sévères et les séquelles neurologiques étaient plus fréquentes dans la population la plus âgée, bien que les deux tiers des cas de zona se soient produits chez les moins de 65 ans. Mais bien que la gravité était plus faible dans ce groupe d’âge, les coûts pour la société tendaient à y être bien plus élevés en raison des arrêts de travail principalement [13,14]. Si la douleur est la complication la plus redoutée et la plus étudiée, d’autres complications neurologiques sont possibles. Elles comprennent des monoparésies voire des

P.-O. Lang, C. Trivalle monoplégies, le syndrome de Ramsay Hunt, la paralysie de Bell, la myélite transverse, les accidents ischémiques transitoires, et les accidents vasculaires [15]. Par ailleurs existent les complications ophtalmologiques de zona lorsque la racine V1 du nerf trijumeau est atteinte avec un risque de kératite, de sclérite, d’uvéite et/ou, la plus grave, de nécrose rétinienne aiguë [16]. Chez les sujets immunodéprimés et ce quels que soient l’âge et la cause (infection par le VIH, traitement(s) immunosuppresseur(s), chimiothérapie, radiothérapie), des complications supplémentaires et plus graves ont été observées [17]. Des formes cutanées, des nécroses rétiniennes aiguës ou progressives, des zonas chroniques avec des lésions verruqueuses de la peau, et des formes résistantes à l’acyclovir sont décrites. De plus, la maladie infectieuse peut toucher d’autres organes (par exemple, les poumons, le foie, le cerveau et au niveau gastro-intestinal) provoquant des complications spécifiques avant ou après l’éruption [15]. Finalement, en se basant sur les taux et les coûts annuels d’hospitalisations, les visites dans les services des urgences, les consultations auprès des médecins de famille, les prescriptions de médicaments (antiviraux et antalgiques), la consommation des médicaments en vente libre et les prises en charges d’acupuncture et/ou de physiothérapie (orientation à la demande du médecin généraliste), le coût annuel du zona chez les personnes âgées de 50 ans ou plus était estimé en Australie à 32,8 millions de dollars ($) pour le système de santé [12]. Cela se traduit par des coûts par cas de zona entre 537 $ et 561 $ en se basant sur un nombre de cas annuels de zona estimés à partir des prescriptions d’antiviraux ou de visites chez les médecins traitants [12]. En France, les études menées pour l’élaboration du rapport du HCSP (http://www.hcsp.fr/explore.cgi/ avisrapportsdomaine?clefr=390) ont permis l’estimation des coûts du zona et de douleurs post-zostériennes pour chaque classe d’âge. Un coût moyen d’un épisode de zona, correspondant à la moyenne pondérée des coûts en ambulatoire et hospitaliers par tranche d’âge, a été estimé. Les coûts ont été estimés selon la perspective de la société. Les coûts liés aux arrêts de travail n’ont pas été pris en compte, y compris dans l’analyse de sensibilité, s’agissant d’une population âgée de plus de 60 ans. Ainsi, un cas de zona coûte en moyenne 179 D entre 60 et 64 ans pour s’élever à 214 D à 70—74 ans, à 256 D à 75—79 ans, 314 D à 80—84 ans et 429 D au-delà. D’une fac ¸on similaire, le coût moyen des douleurs post-zostériennes varie de 313 D (60—64 ans) à 344 D (70—74 ans) pour atteindre 539 D chez les 85 ans ou plus.

Pourquoi un vaccin alors qu’il existe des antiviraux ? Les difficultés à traiter efficacement le zona et/ou à en prévenir les complications ont conduit à la recherche et au développement d’un programme de vaccination efficace [1,18]. Le vaccin actuellement disponible est un vaccin à virus vivant atténué et se compose d’une dose unique de 0,65 mL ne contenant pas moins de 19 400 pfu (plaqueforming units) de la souche virale Oka/Merck. Il s’agit de la même souche contenu dans le vaccin contre la varicelle mais qui lui contient 1350 pfu du virus de la varicelle et

Le vaccin contre le zona : vos questions et leurs réponses du zona et qui est utilisée chez l’enfant et éventuellement l’adulte jeune non encore immunisé [1]. Son efficacité protectrice, l’immunogénicité induite et la tolérance ont été récemment évaluées à partir d’une revue systématique des essais contrôlés randomisés ou quasi randomisés comparant vaccin contre le zona à un placebo ou à la non-vaccination chez des adultes âgés (âge moyen > 60 ans) [19]. Huit essais randomisés incluant un total de 52 269 participants ont été identifiés et publiés dans 13 articles différents [3,20—31]. Six études ont été exclues de la sélection, parce qu’elles étaient sans résultats cliniques [32—34], testaient une autre intervention et non le vaccin [35], ou un vaccin contre le zona y était administré simultanément à celui de la grippe [36] ou incluaient des participants en dehors de la catégorie d’âge d’intérêt [37]. Les cas confirmés de zona ont été moins fréquents chez les patients vaccinés que chez ceux des groupes placebo avec un risque relatif (RR) de 0,49 (intervalle de confiance [IC] 95 % : 0,43—0,56). Le nombre de sujets à vacciner pour éviter 1 cas était calculé à 50 et les analyses selon les groupes d’âge ont montré un plus grand avantage chez les participants de 60 ans à 69 ans (RR = 0,36 [IC 95 % : 0,30—0,45]) que chez les participants de 70 ans ou plus (RR = 0,63 [IC 95 % : 0,53—0,75]). Les effets indésirables systémiques liés au vaccin ont été plus fréquents dans le groupe vacciné (RR = 1,29 [IC 95 % : 1,05—1,57]). Le RR de survenu d’un ou plusieurs effets indésirables au site d’injection était de 4,51 (IC 95 %: 2,35—8,68). Les effets indésirables étaient plus fréquents chez les personnes de 60 à 69 ans. En conclusion les auteurs [19] considéraient que ce vaccin était efficace dans la prévention du zona. Bien que les avantages de la vaccination étaient plus importants dans le groupe d’âge le plus jeune (60 à 69 ans), ce groupe d’âge présentait également les événements indésirables les plus défavorables. En général, le vaccin est bien toléré ; il induit peu d’effets indésirables systémiques et les effets indésirables observés au site d’injection sont d’intensité légère à modérée. Plus récemment, la short-term persistence study (STPS) [38] a fourni des données concernant la persistance de l’immunogénicité du vaccin étudiée dans un souséchantillon de personnes incluses dans l’étude Shingles prevention study (SPS) publiée par Oxman et al. en 2005 [27]. Ainsi, par rapport aux données initiales de la SPS, l’efficacité du vaccin sur la réduction du fardeau de la maladie a diminué de 61,1 à 50,1 %, et l’effet sur l’incidence des douleurs chroniques a diminué de 66,5 à 60,1 %. L’efficacité du vaccin sur l’incidence du zona a également été réduite passant 51,3 à 39,6 %. Bien que les différences ne fussent pas statistiquement significatives, l’analyse de l’efficacité du vaccin chaque année après la vaccination pour tous les trois résultats a montré une diminution de l’efficacité du vaccin dès la première année. La proportion de réduction additionnelle des douleurs post-zostériennes chez les personnes âgées de 70 ans ou plus vaccinés avec le Zostavax® passait de 58 % la première année post-vaccinale à 45 % la seconde, 38 % les troisième et 48 % la quatrième année. En moyenne, les auteurs concluaient à une réduction moyenne de 49 % des douleurs chroniques sur quatre ans chez les patients avec un zona âgés de 70 ans ou plus [38]. Si l’efficacité du vaccin a été également statistiquement significative pour la réduction de l’incidence du zona et du fardeau de la maladie à 5 ans, elle demeure encore incertaine au-delà.

203 Plus récemment encore, un nouveau vaccin sous-unité contre le zona contenant un système composé de la glycoprotéine E du VZV et de l’adjuvant AS01B (appelé HZ/su) a été testé dans un essai randomisé de phase III [39]. Plus de 15 411 personnes âgées de 50 ans ou plus et stratifiées selon la catégorie d’âge (50—59 ; 60—69 ; ≥ 70 ans) ont participé dans 18 pays européens. Le groupe vaccin (n = 7698) a rec ¸u deux injections intramusculaires à 1 ou 2 mois d’intervalle, tandis que l’autre recevait un placebo (n = 7713). Parmi les personnes du groupe vaccin, seules 6 ont développé un zona contre 210 dans le groupe contrôle après un suivi moyen de 3,2 années (taux d’incidence : 0,3 vs 9,1 pour 1000 personnes-année). L’efficacité globale du vaccin était de 97,2 % (IC 95 % : 93,7—99,0 % ; p < 0,001) et estimée entre 96,6 et 97,9 % quel que soit l’âge des sujets vaccinés, y compris après 70 ans et 80 ans. S’il n’y a pas eu plus d’effets indésirables graves de déclarés dans le groupe vaccin, il y avait 17,0 % de réactions de grade 3 (par exemple, fièvre ≥ 39,0 ◦ C ou gonflement au point d’injection > 50 mm) dans le groupe vaccin contre 3,2 % dans le groupe contrôle.

La vaccination contre le zona est-elle coût/bénéfique ? De nombreuses études, menées en Angleterre et au Paysde-Galles [40], aux États-Unis [41—43], au Canada [44,45], au Pays-Bas [46] et en Suisse [47] ont permis d’analyser si la vaccination contre le zona était une stratégie rentable [1]. En France, afin de déterminer la place de ce vaccin dans le cadre des stratégies actuelles de vaccination de l’adulte, le Haut Conseil de la santé publique a pris en considération les données épidémiologiques du zona et des douleurs post-zostériennes, les données d’efficacité et de tolérance concernant le vaccin, et a réalisé une estimation du ratio coût-efficacité de la vaccination contre le zona (http://www.hcsp.fr/explore.cgi/ avisrapportsdomaine?clefr=390). Elles ont toutes utilisé les données d’efficacité de l’étude SPS [27] pour déterminer le rapport coût/utilité du vaccin. Les estimations de coût/efficacité varient considérablement en fonction des paramètres d’efficacité du vaccin, de l’incidence du zona et du nombre d’années de vie ajustées par leur qualité (QALY) et bien entendu les systèmes de santé considérés. Toutes les études de coût/efficacité ont examiné ce que la société était prête à payer pour une QALY [40,46—49]. Cependant toutes ces études pharmaco-économiques souffrent des mêmes limitations telles que le manque de données sur l’efficacité du vaccin à long terme (c.à.d épuisement de la protection induite par le vaccin et diminution de l’efficacité du vaccin sur l’incidence du zona et des douleurs), un manque d’information sur les soins de santé en rapport avec la survenue d’un zona et les coûts induits pour la société (c.à.d le prix unitaire du vaccin; l’incidence et la gravité des zonas et des douleurs), les bénéfices et les difficultés à extrapoler les résultats obtenus à d’autres pays avec des systèmes de soins et des cadres budgétaires différents [5,50]. En outre, ces études intègrent le postulat qu’une dose unique du vaccin confère une protection à vie. Or, plusieurs études montrent que l’immunité induite par

204 le vaccin décroît avec le temps et suggèrent qu’un rappel pourrait être nécessaire [5]. Par exemple dans l’étude réalisée en Suisse, où le vaccin n’est pas encore inscrit dans le plan de vaccination [51], Szucs et al. [47] avaient pour objectif d’évaluer le rapport coût-bénéfice d’une stratégie de vaccination universelle contre le VZV chez les adultes suisses âgés de 70 à 79 ans. Les auteurs ont adapté à la population suisse un modèle initialement développé pour l’Angleterre qui, brièvement, simule l’histoire naturelle du zona et des douleurs post-zostériennes ainsi que les effets de la vaccination. Les auteurs ont distingué différents états de santé : la pleine santé, le zona, les douleurs chroniques et le décès ; la douleur étant elle-même sous catégorisée en douleur légère, modérée et sévère. En prenant en considération le vieillissement de la population et en vaccinant 20 % de la population suisse âgée de 70 à 79 ans, ce modèle prédisait une réduction du nombre de cas de zona de 3412, et des douleurs chroniques de 1460 pour 885 QALY additionnels sur la vie de la population suisse. Il avait été calculé qu’il fallait vacciner entre 31 et 73 personnes pour prévenir un cas de zona et un cas de douleurs chroniques, respectivement. Comme toutes les autres études [40—46], l’étude suisse [47] suggère que le rapport coût-bénéfice d’une telle stratégie de vaccination serait favorable. En France, l’étude menée pour l’élaboration du rapport du HCSP (http://www.hcsp.fr/ explore.cgi/avisrapportsdomaine?clefr=390) a permis de montrer que la stratégie de vaccination la plus coût-efficace est la vaccination des sujets âgés de 70 ans. L’analyse de sensibilité probabiliste pour le modèle utilisant les données de l’étude LTPS montre que 100 % des simulations sont sous le seuil de 50 000 D /QALY gagnée et 30 % sous le seuil de 30 000 D /QALY gagnée. La vaccination à 65 ans ou 75 ans présente des résultats très proches. Les paramètres qui influencent le plus les résultats sont essentiellement la durée de protection vaccinale ainsi que, dans une moindre mesure, le prix du vaccin et l’incidence du zona. Les résultats de l’étude franc ¸aise sont comparables à ceux d’autres études européennes et américaines. Dans cette analyse, le coût de la vaccination a été estimé à 137,5 D . Elle correspond à un prix du vaccin de 125 D (127,24 D en France, remboursé à 30 %) et à une hypothèse d’une demi-consultation en moyenne de médecin généraliste pour l’administration du vaccin (considérant que 50 % des patients iront consulter uniquement pour la vaccination).

Conclusion Le vaccin vivant atténué contre le zona (Zostavax® ) est depuis le 15 juin 2015 à votre disposition et celle de vos patients tout comme dans de nombreux autres pays européens et aux États-Unis (disponible depuis 2008) [5]. Malgré les controverses et quelques incertitudes, ce vaccin diminue, chez la personne âgée de 60 ans ou plus, l’incidence des zonas ainsi que certaines de ses complications dont la plus redoutée, les douleurs post zostériennes. Plus important encore, en termes de santé publique, cette vaccination semble diminuer le fardeau lié à cette maladie et avoir un impact pharmaco-économique positif [2,51]. Cette vaccination devrait ainsi permettre de contribuer à favoriser un vieillissement actif et en bonne santé.

P.-O. Lang, C. Trivalle

Déclaration d’intérêts Le Dr Trivalle a fait des conférences sur la vaccination zona pour le laboratoire Sanofi-Pasteur-MSD. Pr Lang déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

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