Les adénocarcinomes du col utérin ont-ils un plus mauvais pronostic que les carcinomes épidermoïdes ?

Les adénocarcinomes du col utérin ont-ils un plus mauvais pronostic que les carcinomes épidermoïdes ?

Gynécologie Obstétrique & Fertilité 32 (2004) 116–121 www.elsevier.com/locate/gyobfe Article original Les adénocarcinomes du col utérin ont-ils un p...

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Gynécologie Obstétrique & Fertilité 32 (2004) 116–121 www.elsevier.com/locate/gyobfe

Article original

Les adénocarcinomes du col utérin ont-ils un plus mauvais pronostic que les carcinomes épidermoïdes ? Does adenocarcinoma of uterine cervix have a worse prognosis than squamous carcinoma? A. Recoules-Arche a, R. Rouzier a,*, A. Rey b, V. Villefranque a, C. Haie-Meder c, P. Pautier d, C. Pomel a, C. Lhommé d, P. Duvillard e, D. Castaigne e, P. Morice a a

Service de chirurgie oncologique–gynécologique, institut Gustave-Roussy, 39, rue Camille-Desmoulins, 94805 Villejuif, France b Service de biostatistiques, institut Gustave-Roussy, 39, rue Camille-Desmoulins, 94805 Villejuif, France c Service de radiothérapie, institut Gustave-Roussy, 39, rue Camille-Desmoulins, 94805 Villejuif, France d Service d’oncologie gynécologique, institut Gustave-Roussy, 39, rue Camille-Desmoulins, 94805 Villejuif, France e Service d’anatomopathologie, institut Gustave-Roussy, 39, rue Camille-Desmoulins, 94805 Villejuif, France Reçu le 27 mai 2003 ; accepté le 23 octobre 2003

Résumé Objectif. – Le but de cette étude est d’apprécier l’influence du type histologique sur la survie des patientes ayant un cancer du col traité par radiothérapie puis chirurgie radicale. Patientes et méthodes. – Les données cliniques, histologiques, thérapeutiques et les données de survie de 360 patientes présentant un cancer du col utérin (45 adénocarcinomes et 315 carcinomes épidermoïdes) classé IB ou II (FIGO), et prises en charge entre 1985 et 1998 ont été extraites de la base de données de l’institut Gustave-Roussy. Résultats. – Il existait sur la période d’observation une augmentation progressive de la proportion d’adénocarcinome (p = 0,07). Le grade histologique était plus élevé pour les carcinomes épidermoïdes que pour les adénocarcinomes (p = 0,08). La taille des adénocarcinomes était plus petite que celle des carcinomes épidermoïdes (p = 0,06). Avec seulement 38 % de pièces d’hystérectomie stérilisées contre 52 % pour les carcinomes épidermoïdes (p = 0,07), les adénocarcinomes semblaient moins radio-sensibles. Avec un suivi médian de 67 mois, le type histologique n’avait pas d’influence sur la survie. Discussion et conclusions. – Notre étude démontre que les adénocarcinomes et les carcinomes épidermoïdes du col utérin présentent des différences en termes de radio-sensibilité et que la chirurgie permet probablement de compenser la moindre sensibilité à la radiothérapie des adénocarcinomes. © 2003 Publié par Elsevier SAS. Abstract Objective. – The objective of this study was to examine the influence of histology on the outcome of patients with cervix carcinoma, treated with radiotherapy and radical surgery. Patients and methods. – Clinical, histological, therapeutical and outcome data of 360 patients with stage IB-II cervix carcinoma patients (45 adenocarcinomas and 315 squamous cell carcinoma) managed between 1985 and 1998 were collected from the database of the Institut Gustave-Roussy. Results. – The incidence of adenocarcinomas slightly increased during the study period (P =0.07). Histological grade was higher for squamous cell carcinoma than for adenocarcinoma (P =0.08). Adenocarcinomas were smaller than squamous cell carcinoma (P =0.06). With only 38% of sterilized hysterectomy specimen vs 52% for squamous cell carcinomas (P =0.07), adenocarcinoma seemed to be less radiosensitive. With a median follow-up of 67 months, histological type did not influence survival.

* Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (R. Rouzier). © 2003 Publié par Elsevier SAS. doi:10.1016/j.gyobfe.2003.10.028

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Discussion and conclusions. – Our study demonstrates that radiosensitivity is different between adenocarcinoma and squamous cell carcinoma of the cervix and that surgery may compensate the low radiosensitivity of adenocarcinoma. © 2003 Publié par Elsevier SAS. Mots clés : Adénocarcinome ; Carcinome épidermoïde ; Cancer du col utérin ; Facteurs pronostiques Keywords: Adenocarcinoma; Squamous cell carcinoma; Cervical cancer; Prognosis factors

1. Introduction On observe actuellement une augmentation de la proportion d’adénocarcinomes dans le cancer du col utérin [1]. L’impact pronostique de la nature histologique est controversé. Pour certains auteurs, le type adénocarcinome grève le pronostic [2–4] tandis que pour d’autres le type histologiques ne constitue pas un facteur de risque [5–9]. Dans ces séries, les traitements étaient variés, correspondant aux modalités de traitement dans les différents pays : chirurgie exclusive ou radiothérapie exclusive principalement. Aucune de ces modalités n’a démontré sa supériorité et en France la plupart des équipes utilisent une association radio-chirurgicale. Afin de déterminer si la nature histologique (adénocarcinome–carcinome épidermoïde) du cancer du col utérin joue un rôle pronostique chez les patientes traitées par association radiochirurgicale, nous avons réalisé cette étude rétrospective portant sur les patientes traitées à l’institut Gustave-Roussy entre 1985 et 1998 pour un cancer du col utérin stade IB ou II.

cache médian était réalisée. En cas d’atteinte histologique des ganglions iliaques primitifs ou lombo-aortiques, une chimiothérapie adjuvante à base de cisplatine associée à une irradiation pelvienne externe à 40 Gy (sauf si celle-ci avait été réalisée en préopératoire) était réalisée. Aucune patiente n’a eu d’irradiation lombo-aortique. Depuis 1996, les patientes soignées pour un cancer du col utérin de taille supérieure ou égale à 4 cm sont traitées par radio-chimiothérapie première avec curiethérapie d’une hystérectomie élargie avec lymphadénectomie. Les proportions ont été comparées à l’aide du test du v2. Les survies ont été calculées selon la méthode de KaplanMeier. Les groupes ont été analysés dans un premier temps en univarié par un test de log-rank. Une analyse multivariée a été réalisée en utilisant le modèle de Cox. Une différence était considérée comme significative si p était inférieur ou égal à 0,05.

3. Résultats 2. Patientes et méthodes Entre janvier 1985 et décembre 1998, 360 patientes présentant un cancer du col utérin, classé IB ou II selon la classification de la FIGO (Fédération internationale de gynécologie-obstétrique) ont été traitées à l’institut GustaveRoussy, quelle que fût la nature histologique de la lésion selon un protocole d’association radio-chirurgicale identique. Les données cliniques, anatomopathologiques, et thérapeutiques ont été entrées de façon prospective dans une base de données. Les données de suivi ont été actualisées pour cette étude. Le traitement standard des tumeurs aux stades IB et II d’une taille inférieure à 4 cm consistait à réaliser une curiethérapie utérovaginale (60 Gy) suivie six semaines plus tard d’une intervention chirurgicale. Les patientes aux mêmes stades présentant une tumeur de plus de 4 cm étaient traitées par une irradiation pelvienne par radiothérapie externe (20 Gy) suivie d’une curiethérapie vaginale (45 grays) ; la chirurgie, réalisée six semaines après la fin de la radiothérapie, clôturait le traitement. Le traitement chirurgical comportait une hystérectomie élargie aux paramètres (Piver III) associée à une lymphadénectomie pelvienne et éventuellement lombo-aortique. En cas de curiethérapie exclusive préopératoire et d’atteinte histologique des ganglions pelviens, une irradiation externe pelvienne (40–45 Gy) avec

Les caractéristiques cliniques des patientes sont rapportées dans le Tableau 1. L’âge moyen des patientes était de 43 ans (22–78 ans) pour les carcinomes épidermoïdes, et de 45 ans (22–74 ans) pour les adénocarcinomes. Concernant le type histologique, 87,5 % des tumeurs étaient des carcinomes épidermoïdes (315 cas) et 12,5 % des adénocarcinomes (45 cas). Il existait sur la période d’observation une augmentation progressive de la proportion d’adénocarcinomes (p = 0,07). Le grade histologique était plus élevé pour les carcinomes épidermoïdes que pour les adénocarcinomes sans toutefois atteindre la significativité (p = 0,08) : 27 % des carcinomes épidermoïdes étaient de grade 3 contre 13 % des adénocarcinomes. La taille des adénocarcinomes était plus petite que celle des carcinomes épidermoïdes mais la différence n’était pas significative (p = 0,14) : 59 % des carcinomes épidermoïdes mesuraient plus de 4 cm contre 44 % des adénocarcinomes. Il n’y avait pas de différence entre adénocarcinomes et carcinomes épidermoïdes quant à la répartition des stades FIGO (p = 0,25). Les résultats histologiques des pièces opératoires sont présentés dans le Tableau 2. L’adénocarcinome semble moins radio-sensible que le carcinome épidermoïde (p = 0,07). Les envahissements ganglionnaires semblent plus fréquents en cas d’adénocarcinome mais la différence n’apparaît pas significative.

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Tableau 1 Caractéristiques des patientes n (%) ˆ ge moyen A 20–39 40–59 60–79 Taille tumorale ≤ 2 cm 2–4 cm ≥ 4 cm Stade FIGO IB1 IB2 IIA IIB Grade histologique 1 2 3 Période de traitement 85–89 90–94 95–98 Total

107 213 40

Adénocarcinome n (%) 45 ans 14 (31 %) 26 (58 %) 5 (11 %)

62(17 %) 91 (25 %) 207 (58 %)

9 (20 %) 16 (36 %) 20 (44 %)

53 (17 %) 75 (24 %) 187 (59 %)

}

31 (69 %)

189 (60 %)

}

14 (31 %)

126 (40 %)

0,25

154 (43 %) 114 (32 %) 92 (25 %)

25 (56 %) 14 (31 %) 6 (13 %)

129 (41 %) 100 (32 %) 86 (27 %)

0,08

168 117 75 360

17 (10 %) 16 (14 %) 12 (16 %) 45 (12,5 %)

151 (90 %) 101 (86 %) 63 (84 %) 315 (87,5 %)

117 (32 %) 103 (29 %) 38 (11 %) 102 (28 %)

Carcinome épidermoïde n (%) 43 ans 93 (30 %) 187 (59 %) 35 (11 %)

p

0,98

0,14

0,07

Tableau 2 Résultats histologiques Pièce d’hystérectomie absence de résidu tumoral résidu tumoral Statut ganglionnaire non envahis envahissement isolé des ganglions pelviens lombo-aortiques ± pelviens a

Adénocarcinome n (%)

Carcinome épidermoïde n (%)

p

17 (38 %) 28 (62 %)

165 (52 %) 150 (48 %)

0,07

30 (56 %) 9 (31 %)

230 (73%) 61 (19 %)

0,37 a

6 (13 %)

24 (8 %)

Ganglions non envahis vs envahis.

Le suivi médian était de 67 mois (1–206). Soixante dixsept pour cent des survivantes ont été suivies au moins cinq ans. La survie globale était de 74 % à cinq ans : 75 % pour les carcinomes épidermoïdes et 74 % pour les adénocarcinomes ; la survie globale à dix ans était de 68 % à dix ans : 69 % pour les carcinomes épidermoïdes et 61 % pour les adénocarcinomes (différence non significative). La survie sans événement à cinq ans était de 71 % (72 % pour les carcinomes épidermoïdes et 66 % pour les adénocarcinomes), et de 68 % à dix ans (70 % pour les carcinomes épidermoïdes vs 66 % pour les adénocarcinomes) également sans différence significative entre les deux types histologiques. Les analyses complètes univariées et multivariées sont rapportées dans les Tableaux 3 et 4. Les facteurs indépendants prédictifs de survie étaient le statut ganglionnaire, le stade FIGO et l’existence d’un reliquat sur la pièce d’hystérectomie.

4. Discussion L’adénocarcinome du col utérin est le type histologique le plus fréquent après le carcinome épidermoïde. L’intérêt s’explique par l’augmentation relative de son incidence probablement en rapport avec la moindre efficacité du dépistage des lésions précancéreuses endocervicales [10]. Nous rapportons dans cette étude une augmentation de l’incidence de l’adénocarcinome du col. Cette incidence augmente selon la période : on observe 10 % d’adénocarcinomes de 1985 à 1989, 14 % de 1990 à 1994 et 16 % de 1995 à 1998 (p = 0,07). Des résultats comparables sont retrouvés dans d’autres séries [1,2]. En 1995, Eiffel publie une étude à propos de 1538 cas de patientes suivies au stade IB ; il observait 13 % d’adénocarcinomes [2]. Look en 1996 [7], Hopkins et Morley en 1991 [11], Anton-Culver en 1992 [12] et Harrisson en 1993

A. Recoules-Arche et al. / Gynécologie Obstétrique & Fertilité 32 (2004) 116–121 Tableau 3 Facteurs prédictifs de survie

ˆ ge A 20–39 40–59 60–79 Type histologique carcinome épidermoïde adénocarcinome Grade histologique 1 2 3 Stade FIGO IB1 IB2 IB2 IIB Taille initiale ≤ 4 cm > 4 cm Reliquat sur la pièce d’hystérectomie Non Oui Statut ganglionnaire N– N+ pelvien N+ lombo-aortique Période de traitement 1985–1989 1990–1994 1995–1998

n

Survie globale à 5 ans (%)

IC (%) p

107 213 40

68 77 78

58 –77 70–83 62–88 0,64

315 45

75 74

69–80 58–85

0,51

154 114 92

77 75 71

68–83 65–83 60–80

0,21

117 103 38 102

86 77 65 60

78–91 66–85 46–80 49–71

0,002

153 207

86 65

79–91 57–72

0,002

182 178

86 62

80–91 54–70

< 0,001

260 70 30

86 55 24

81–90 42–68 12–43

< 0,001

168 117 75

75 75 72

68–82 66–83 59–82

0,74

[13] trouvaient respectivement dans leur série 21, 21, 22 et 25 % d’adénocarcinomes. En 2001, Grisaru et al. [6] rapportent 29 % d’adénocarcinomes, 9 % d’adénosquameux et 62 % de carcinomes épidermoïdes pris en charge à des stades IA et IB. Ainsi, on constate une augmentation dans les séries les plus récentes de la proportion d’adénocarcinome. Se pose alors le problème d’un traitement spécifique pour ce type de cancer du col qui, du fait de sa faible incidence et donc du Tableau 4 Facteurs prédictifs de survie : analyse multivariée Statut ganglionnaire N– N+ pelvien N+ lombo-aortique Stade FIGO IB II Reliquat histologique sur la pièce d’hystérectomie Non Oui

RR de décès

p

1 2,4 [1,4–4,0] 5,3 [3,1–9,0]

< 0,001 < 0 ,001

1 2,0 [1,3–3,1]

< 0,01

1 1,9 [1,2–3,1]

< 0,01

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faible intérêt qui y était porté, était traité comme les carcinomes épidermoïdes. Les modalités thérapeutiques du cancer du col utérin dépendent du stade et de la taille tumorale. Les traitements recommandés par les SOR (standards, options, recommandations) pour les stades IB1 inférieurs ou égaux à 4 cm du cancer du col peuvent être : soit une chirurgie première ; soit une irradiation première exclusive avec radiothérapie externe et curiethérapie ; soit enfin une association radiochirurgicale. Pour les stades IB2 ou II, le standard est de réaliser une radiothérapie externe (pelvienne en l’absence d’extension lombo-aortique) à la dose de 45 Gy, associée à une chimiothérapie concomitante (cisplastine 40 mg/m2 par semaine) suivie d’une curiethérapie utérovaginale de clôture (à la dose de 15 Gy) [14]. La chirurgie pelvienne de complément est discutée et est en cours d’évaluation dans une étude prospective randomisée multicentrique. Le type histologique est peu précisé et n’intervient pas dans l’arbre décisionnel thérapeutique des différentes études. Les résultats quant au pronostic lié à l’histologie divergent dans la littérature [2–9] et l’on peut émettre l’hypothèse que les différences observées dans les séries publiées sont liées à la différence de prise en charge thérapeutique. Notre étude suggère effectivement que l’adénocarcinome du col utérin est moins radio-sensible car un résidu est plus souvent retrouvé sur la pièce d’hystérectomie. Cependant, notre protocole thérapeutique inclut systématiquement une hystérectomie : ceci aboutit probablement à l’absence de différence significative en termes de survie globale et de survie sans récidive chez nos patientes, car la relative radiorésistance des adénocarcinomes est compensée par la chirurgie. Il est aussi possible que les adénocarcinomes ne soient pas moins radiosensibles que les autres types histologiques, mais que l’obtention d’une stérilisation complète du col soit plus longue que dans les autres types histologiques. Si la chirurgie était réalisée plus tardivement, le taux de stérilisation serait alors identique à celui observé en particulier dans les carcinomes épidermoïdes. Les trois facteurs pronostiques indépendants classiquement reconnus sont la taille de la tumeur [15,16], l’envahissement ganglionnaire [17–19] et le stade tumoral selon la classification de la FIGO [18,20]. Dans notre série, ces facteurs pronostiques sont comparables pour les deux types histologiques même si les adénocarcinomes sont de plus petite taille (p = 0,06). La différence de comportement entre les adénocarcinomes et les carcinomes épidermoïdes a été largement analysée, en termes d’envahissement ganglionnaire et autres facteurs pronostiques [21,22] et en termes de pronostic [2,3,5–9]. Dans ces études, la prise en charge thérapeutique du cancer du col est globalement uniforme à l’intérieur de chaque série mais varie entre les séries. Plusieurs arguments suggèrent que l’irradiation seule pourrait être inadéquate pour le traitement de l’adénocarcinome du col. En effet, lorsque les patientes étaient traitées principalement par radiothérapie seule, on observait une différence significative pour la survie en fonction du type histologique

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au détriment des adénocarcinomes [2,3]. En revanche, les résultats des séries où la chirurgie était incluse dans le schéma thérapeutique ne montraient pas de différence significative entre les types histologiques. Dans l’étude de Nakanishi et al. [8], le pronostic est plus mauvais dans le groupe des adénocarcinomes en présence d’un envahissement ganglionnaire mais le pronostic des stades IB est le même pour les deux groupes en l’absence d’atteinte ganglionnaire. Dans cette étude, toutes les patientes ont reçu une radiothérapie postopératoire. Les auteurs émettent l’hypothèse que les adénocarcinomes sont moins radio-sensibles que les carcinomes épidermoïdes : ainsi, la radiothérapie serait moins efficace sur la maladie résiduelle d’un adénocarcinome que sur celle d’un épidermoïde. Dans l’étude de Chen et al. [3], les stades précoces de cancer du col utérin (stades I et II) avec une composante glandulaire avaient un taux de survie à cinq ans inférieur à celui des carcinomes épidermoïdes lorsque la radiothérapie était réalisée en première ligne. Dans notre étude, où toutes les patientes ont été opérées, la survie globale et la survie sans récidive sont comparables tout comme dans les études où les patientes sont opérées d’emblée. Notre étude permet d’évaluer la radio-sensibilité des tumeurs en fonction de leur type histologique par l’examen du reliquat tumoral ; on observe la présence d’un reliquat tumoral plus fréquemment avec les adénocarcinomes : 62 % pour les adénocarcinomes vs 48 % pour les carcinomes épidermoïdes (p = 0,07). Ce résultat est d’autant plus marquant que, dans notre étude, les adénocarcinomes sont de plus petite taille (56 vs 41 % de lésion ≤ 4 cm ; p = 0,06) et semblent de plus faible grade (p = 0,08). Certes, du fait de la faible proportion des adénocarcinomes, notre étude manque de puissance pour affirmer que l’adénocarcinome est moins radio-sensible que le carcinome épidermoïde, mais elle soulève le problème de l’attitude thérapeutique optimale étant donné la possibilité d’adapter le traitement ou la séquence thérapeutique aux caractéristiques de la maladie. Depuis ces dernières années, les protocoles de traitement des cancers du col de stade avancé (≥ IB2) ont été modifiés par l’arrivée de la radiochimiothérapie concomitante qui s’est imposée comme le standard. L’étude de l’efficacité de ce traitement en fonction du type histologique est probablement un élément important pour déterminer si le taux de reliquat est dépendant du type histologique, ce qui pourrait être un argument en faveur d’une chirurgie pelvienne de complément. Ce point sera en particulier étudié lors de l’analyse des résultats de l’étude prospective randomisée en cours (Gyneco 02-108 de la FNCLCC), évaluant l’impact de l’hystérectomie de complément chez les patientes en réponse macroscopique après radio-chimiothérapie concomitante dans les cancers du col utérin de stade IB2 ou II.

5. Conclusions Notre étude suggère que les adénocarcinomes et les carcinomes épidermoïdes du col utérin présentent des différences

en termes de radio-sensibilité. La chirurgie pelvienne de complément permet peut-être de compenser la moindre sensibilité à la radiothérapie des adénocarcinomes et d’expliquer ainsi l’absence de différence sur la survie entre les deux types histologiques. Il est aussi possible que les adénocarcinomes ne soient pas moins radio-sensibles que les carcinomes épidermoïdes, mais qu’ils mettent simplement plus de temps à se « stériliser » à l’issue de la radiothérapie.

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