Les anti-leucotriènes dans la prise en charge de l’asthme selon l’âge

Les anti-leucotriènes dans la prise en charge de l’asthme selon l’âge

Table ronde Indications et efficacité des médicaments de l’asthme selon l’âge Les anti-leucotriènes dans la prise en charge de l’asthme selon l’âge S...

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Table ronde Indications et efficacité des médicaments de l’asthme selon l’âge

Les anti-leucotriènes dans la prise en charge de l’asthme selon l’âge S. Debelleix Pneumologie pédiatrique, Hôpital des Enfants du CHU de Bordeaux, Place Amélie Raba Léon, 33076 Bordeaux, France

L

’asthme est une maladie chronique variable dans le temps, marquée par des épisodes réversibles de dyspnée aiguë. Il est défini par une obstruction des voies aériennes réversible, une inflammation des voies aériennes, et une hyperréactivité bronchique. Il existe 2 tranches d’âge pour le clinicien  : l’enfant préscolaire, et l’enfant de plus de 6 ans. Deux grandes classes de médicaments anti-inflammatoires sont disponibles : les corticostéroïdes inhalés (CSI) et les anti-leucotriènes (ALT). Ces derniers agissent en bloquant les récepteurs des leucotriènes cystéinés, nommés CysLT1. Les leucotriènes cystéinés sont de puissants bronchoconstricteurs et provoquent un œdème de la paroi bronchique, un afflux d’éosinophiles, une stimulation de la sécrétion de mucus et ils augmentent la perméabilité vasculaire. La place des ALT dans le traitement de l’asthme peut s’envisager en fonction de l’âge des patients, de la sévérité de l’asthme, ou de son phénotype. Le débat porte principalement sur la place des ALT en monothérapie chez le jeune asthmatique de moins de 6 ans.

1. Chez l’enfant d’âge préscolaire Les recommandations françaises sur la prise en charge de l’asthme de l’enfant de moins de 36 mois ont été publiées en mars  2009 par l’HAS/Sp²A  [1]. A celles-ci s’ajoute l’avis de la commission de transparence sur le seul ALT disponible en France : le montelukast (Singulair®) [2]. Il est indiqué chez l’enfant de 6 mois à 5 ans à la posologie de 4 mg : • de 6 mois à 5 ans, en traitement additif dans l’asthme persistant léger à modéré, insuffisamment contrôlé par la corticothérapie inhalée et la prise à la demande de bêta-2 mimétiques de courte durée d’action ; • de 2 à 5 ans, en alternative à la corticothérapie inhalée à faible dose dans l’asthme persistant léger, en l’absence d’antécédent récent de crise d’asthme sévère ayant justifié une corticothérapie orale et si l’incapacité de l’enfant à adhérer à un traitement par corticoïdes inhalés est démontrée ; • au-delà de 2 ans, en traitement préventif de l’asthme d’effort. Chez le jeune enfant, un groupe d’experts européens [3] a proposé des schémas thérapeutiques en fonction des 2 phénotypes

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262 © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Archives de Pédiatrie 2012;19:262-263

individualisés comme suit : soit les sifflements sont induits par des facteurs multiples (multiple trigger wheeze), soit ils sont viro-induits (episodic viral induced wheeze), les nourrissons étant asymptomatiques entre les épisodes. Ces formes sont considérées comme sévères quand ils font plus de 4 crises par an.

1.1. Traitement de fond des enfants de moins de 36 mois avec un asthme persistant Les CSI sont le traitement de première intention, pendant une durée minimale de 3 mois. Cependant, la discussion est ouverte en Europe, selon l’appréhension vis-à-vis des CSI et les pratiques cliniques. Ainsi, les experts européens ont souligné le peu de données chez le nourrisson de moins de 12 mois, en rappelant les critères de surveillance en particulier la croissance. La nécessité d’évaluer la réponse au traitement reste essentielle. Le bénéfice du montelukast versus placebo a été montré chez les jeunes enfants siffleurs  [4-6], proposant un traitement en monothérapie dans les formes légères. Cette indication n’a pas été retenue dans l’AMM en France. Cependant les études de Bisgaard, de Hakim et de Knorr et al.  [4-6], concernaient des enfants essentiellement de plus de 3  ans, les données chez le nourrisson restant partielles. Bisgaard et al.  [7] ont évalué l’effet préventif du montelukast sur la survenue de symptômes respiratoires récurrents après une bronchiolite à VRS, chez 916 enfants âgés de 3 à 24 mois avec un suivi de 24 semaines. Les auteurs ont conclu à l’absence d’efficacité de montelukast dans cette indication.

1.2. Traitement de fond des nourrissons ayant des « sifflements épisodiques viro-induits » Les CSI sont le traitement recommandé en France dans les formes sévères. Les quelques études qui se sont focalisées sur ce phénotype ont essentiellement évalué les traitements intermittents par CSI. Dans cette forme, la monothérapie du montelukast est discutée mais non autorisée en France. En effet, l’étude PREVIA  [8], avec ce phénotype, a comparé le montelukast 4 mg ou 5 mg vs placebo réalisée chez des enfants asthmatiques intermittents âgés de 2 à 5 ans ; le taux moyen d’épisodes d’exacerbation sur 1 an passait de 2,34  [IC 95  %  : 1,97-2,79] sous placebo à 1,60 [IC 95 % : 1,35-1,88] sous montelukast, soit une diminution de 31,9 % (p ≤ 0,001). La tolérance était excellente.

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2. Pour les enfants d’âge scolaire Les indications du montelukast (AMM) sont les suivantes à la posologie de 5 mg jusqu’à 12 ans, et 10 mg au-delà : • en association aux corticostéroïdes inhalés en cas d’asthme persistant léger à modéré insuffisamment contrôlé ; • en monothérapie en cas d’asthme persistant léger en cas d’incapacité à adhérer à un traitement corticostéroïdes inhalés, • asthme induit par l’exercice. Dans cette tranche d’âge, la supériorité des CSI au montelukast est bien établie. Dans une étude comparant la fluticasone au montelukast chez des enfants de 6-17  ans asthmatiques persistants légers à modérés, l’amélioration des critères étudiés étaient plus marquée avec les corticoïdes inhalés, même si les facteurs prédictifs étaient difficilement identifiables  : l’élévation du NO exhalé était prédictive d’une meilleure réponse aux CSI [9] et les taux de leucotriène E4 urinaire (examen de recherche) ceux d’une meilleure réponse au montelukast [10]. Il pourrait exister néanmoins un «  effet âge  » des antileucotriènes avec une efficacité qui serait d’autant plus grande que l’enfant est jeune [10]. En tant que traitement additionnel, en 2011, une revue systématique comparant CSI +  bronchodilatateurs de longue durée d’action (BDLA) vs. CSI+ ALT, conclut à la supériorité du premier schéma aussi bien chez l’adulte que chez l’enfant [11]. Une étude chez l’enfant de 6 à 17 ans retrouve ces résultats, la sévérité de l’asthme et l’origine indo-européenne comme facteurs associés à l’infériorité de la combinaison CSI+ ALT vs CSI + BDLA [12].

3. Conclusion Les anti-leucotriènes offrent la possibilité d’un traitement additif dès l’âge de 6 mois, les BDLA n’étant autorisés qu’à partir de 4 ans. Bien qu’efficaces, les données chez le jeune enfant restent partielles. Leur intérêt dans l’asthme viro-induit non sévère en monothérapie mériterait en effet des études plus poussées.

Références [1] http://www.has- sante.fr/portail/upload/docs/application/ pdf/2009-05/asthme_de_lenfant_de_moins_de_36_mois_-_recommandations.pdf. [2] http://www.has- sante.fr/portail/upload/docs/application/ pdf/2010-02/synthese_davis_singulair_-_ct-6895.pdf. Haute autorité de Santé. [3] Brand PL, Baraldi E, Bisgaard H, et al. Definition, assessment and treatment of wheezing disorders in preschool children: an evidence-based approach. Eur Respir J 2008;32:1096-110. [4] Knorr B, Franchi LM, Bisgaard H, et al. Montelukast, a leukotriene receptor antagonist, for the treatment of persistent asthma in children aged 2 to 5 years. Pediatrics 2001;108:E48. [5] Bisgaard H, Nielsen KG. Bronchoprotection with a leukotriene receptor antagonist in asthmatic preschool children. Am J Respir Crit Care Med 2000;162:187-90. [6] Hakim F, Vilozni D, Adler A, et al. The effect of montelukast on bronchial hyperreactivity in preschool children. Chest 2007;131:180-6. [7] Bisgaard H, Flores-Nunez A, Goh A, et al. Study of montelukast for the treatment of respiratory symptoms of post-respiratory syncytial virus bronchiolitis in children. Am J Respir Crit Care Med 2008;178:854-60. [8] Bisgaard H, Zielen S, Garcia-Garcia ML, et al. Montelukast reduces asthma exacerbations in 2 – to 5-year-old children with intermittent asthma. Am J Respir Crit Care Med 2005;171:315-22. [9] Zeiger RS, Szefler SJ, Phillips BR, et al. Response profiles to fluticasone and montelukast in mild-to-moderate persistent childhood asthma. J Allergy Clin Immunol 2006;117:45-52. [10] Rabinovitch N, Graber NJ, Chinchilli VM, et al. Urinary leukotriene E4/exhaled nitric oxide ratio and montelukast response in childhood asthma. J Allergy Clin Immunol 2010;126:545-51.e1-4. [11] Ducharme FM, Lasserson TJ, Cates CJ. Addition to inhaled corticosteroids of long-acting beta2-agonists versus anti-leukotrienes for chronic asthma. Cochrane Database Syst Rev 2011;CD003137. [12] Lemanske RF Jr, Mauger DT, Sorkness CA, et al. Step-up therapy for children with uncontrolled asthma receiving inhaled corticosteroids. N Engl J Med 2010;362:975-85.

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