Les bryocénoses du chaos gréseux du Moulin-des-Roches (commune de Senlisse, Yvelines, Île-de-France)

Les bryocénoses du chaos gréseux du Moulin-des-Roches (commune de Senlisse, Yvelines, Île-de-France)

Cryptogamie, Bryol., 2000, 21 (3): 187-221 0 2000 Adackditions scientifiques et medicales Elsevier SAS. Tous droits reservts 187 S 1290-0796(00)0003...

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Cryptogamie, Bryol., 2000, 21 (3): 187-221 0 2000 Adackditions scientifiques et medicales Elsevier SAS. Tous droits reservts

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S 1290-0796(00)00037-7/A

Les bryocCnoses du chaos grkseux du AMoulin-des-Roches (commune de Senlisse, Yvelines, Ile-de-France) J. BARDAP*

& P BOUDIERb

a Museum national d’histoire naturelle, Institut d’ecologie et de gestion de la biodiversite, 57 rue Cuvier, 75321 Paris Cedex 05 b Museum des sciences naturelles et de prehistoire de Chartres, 5 bis, bd. de la Courtille, 28000 Chartres

(Regu le 18 octobre 1999, accept6 le 25 avril2000)

Abstract-The populations of bryophytes on a sandy boulder field at Moulin-des-Roches (Senlisse, Yvelines, Ile-de-France). The populations of bryophytes on a sandy boulder field on the slopes of RO-des-Vaux, Le Moulin-des-Roches, in the forest of Rambouillet (Ile-de-France) were analyzed. This site is already recognized as one of the most interesting for its bryoflora. The cartography and precise topology of more than six hundred stones throughout the entire boulder field were determined during summer. Then, two kinds of studies were undertaken. The first consisted of selecting 108 stones and analyzing the populations of bryophytes in terms of communities present and the position of species on the stones in relation to topology. All species were recorded, and the principle populations were mapped. Transects were used to describe the position of each species in relation to the others. The second kind of study involved enumerating all species present at the level of the sandy boulder field. The results show that two major topological situations occur : the colonization of saxicolous species on strong slopes lacking an organic deposit ; and a dominance of humicolous an lignicolous species on weak slopes lacking an accumulation. The mapped distribution of the 15 species makes it possible to determine areas of the high species richness and areas of conservation interest. Microtopography plays a major role in determining the distribution of species. The autecology of species and the various communities to which they belong are determined and linked to a sketch of bryosociologic dynamics. Recommendations for conservation management are proposed. It is important to maintain the light-reducing canopy of Quercus, Carpinus and Fagus because the bryophyte communities depend this for survival. Simple means, are recommended to limit excess frequenting of the most remarkable sectors. 0 2000 Adac / Editions scientifiques et medicales Elsevier SAS bryophyte I ecology I phytosociology

I chorology I conservation

I Rambouillet

R&urn6 - Les peuplements bryophytiques du chaos greseux localise sur lespentes du Rti-desVaux, au lieu dit le Moulin-des-Roches, en foret domaniale de Rambouillet (Ile-de-France) sont analyses. Au sein de ce massif forestier, ce site est deja reconnu comme l’un des plus interessants pour sa bryoflore. L’ensemble du chaos a fait I’objet d’une cartographic et d’une typologie precise a Cte r&Wee a partir de l’analyse de plus de six cent blocs. Puis deux types d’approches ont Cte men&es : la premiere consiste a selectionner un contingent de 108 blocs pour une analyse de leur population de bryophytes (etude des communautes, position des esptces sur les blocs en relation avec la typologie). Sur ces blocs toutes les especes ont CtC notees et leurs populations principales localisees au travers d’un schema. Pour l’etude dynamique de nombreux transects decrivant la * Correspondance et tin% B part : [email protected]

188

J. Bardat & P. Boudier

position relative des especes les une par rapport aux autres ont CtCrCalisCs. La seconde approche tente de recenser l’ensemble des especes presentes au niveau du chaos. La distribution de quinze d’entre elles est analyste. Les resultats montrent que la typologie des blocs initialement adopt&e permet de mettre en evidence deux situations majeures. Sur pente forte, l’absence de depot organique avec colonisation par des saxicoles ou sur pente faible sans accumulation, avec dominante d’especes d’humicoles et de sapro-lignicoles. La cartographic en reseau de 15 especes test sur l’ensemble du chaos permet de mettre en evidence les secteurs riches en especes ou d’interet patrimonial. La micro-topographie joue un role majeur darts le distribution des espbces remarquables. L’auto-Ccologie des especes et des diverses communautes auxquelles elles participent sont precisees, couplees a une esquisse de la dynamique bryosociologique. Des recommandations de gestion conservatoire sont propos6es : maintient de la futaie pour tviter de tree des zones de mise en defend ou le sous-&age arbustive sera favor% limitant de la lumiere au depend des communautes bryophytiques. Des moyens simples sent preconises pour limiter la surfrequentation des secteurs les plus remarquables. 0 2000 Adac / Editions scientifiques et medicales Elsevier SAS bryophytes I kologie

I phytosociologie

I chorologie I conservation

I Rambouillet

INTRODUCTION Le massif forestier de Rambouillet se situe dans le dkpartement des Yvelines, ?t une quarantaine de kilomktres au sud-ouest de Paris. Le chaos du Moulin-des-Roches est localise dans le vallon du Rfi-des-Vaux, situ6 dans la partie nord-est du massif (Fig. 1). Ce vallon rtsulte de la capture du tours superieur de la Predecelle par un affluent de 1’Yvette au droit des Vaux-de-Cemay (Pomerol & Feugueur, 1974). Sur le plan geologique, l’importante couche de sable stampienne (60 m environ) affleurant sur les trois quarts du coteau est recouverte d’une carapace greseuse de 2 a 3 m d’epaisseur, elle m&me surmontCe par des argiles de meulibre. L’Ctude Porte sur un territoire situ6 sur la commune de Senlisse, en contexte forestier domanial, localise au niveau de la XVIII” division et inclus dans les parcelle forestiere no 9 et no 35. La surface prospectee couvre 2,5 ha en rive gauche du RO-des-Vaux, sur le versant orient6 est de la vallee des Vaux, entre les cascades du Moulin des Vaux-de-Cemay au sud, et un vallon secondaire au nord imrnediat du Moulin-desRoches. L’aire Ctudite s’etend sur une longueur de plus de 450 m et une largeur moyenne d’une centaine de m&es. L’altitude varie de 105 m au droit du ruisseau du Ru-des-Vaux jusqu’a 135-140 m en partie sommitale du chaos (Fig. 1). Schematiquement, ce site particulibrement pentu est occupt par un ensemble forestier en futaie continue. Les unites phytoecologiques presentes sont : - la ch&naie acidiphile (alliance du Quercion robori-petraeae Ttixen 1931) dans la partie haute et moyenne, la chenaie-charmaie mesotrophe a jacinthe des bois (sous-ordre des Carpino-Fagenalia Rameau (1981) 1998 ; ordre des Fagetalia sylvaticae Pawlowski in Pawlowski et al., 1928), dans la partie inferieure, localement avec quelques taches sur la pente mais de manibre plus importante dans la partie nord, - le long du ruisseau, la saulaie-aulnaie est peu developpee, lirnitee a quelques individus formant de petits ilots au sein de la chenaie-charmaie enrichie en frEne a leur contact. Signalons enfin une petite zone de lande a Calluna vulgaris et Erica cinerea 2 l’extreme sud de la zone d’dtude entre la tote + 125 m et + 135 m. Le choix de la dClimitation de la zone B CtC guidCe par plusieurs criteres lies B la presence : - d’un chaos rocheux sous couvert sylvatique continu et peu exploit6 sur le plan sylvicole ;

189

Les bryocenoses du chaos greseux du Moulin-des-Roches

Fig. 1. Topographie gCnCrale du chaos gr&eux du Moulin-des-Roches Fig. 1. General topography

(Yvelines).

of the sandy boulder field of Moulin-des-Roches

(Yvelines).

- de peuplements bryophytiques suffisamment condquents en terme de recouvrement et de diversite specifique ; - d’especes offrant un degre d’originalite ou de rarete significatif a l’echelle de la region (Bardat, 1997 ; Bardat et Boudier, 1997) ; - d’une pression touristique importante mais localisee. En outre la surface retenue devait rester d’une taille operationnelle raisonnable, limitant les variations Ccologiques stationnelles a l’echelle de la sylvocenose.

Morphologie

g&k-ale

du chaos

Le relief est constitue par une pente a exposition generale nord-est, presentant un leger arc de cercle cintre nord-ouest a sud-est, avec une s&e de quatre talwegs secondaires orient& perpendiculairement a l’axe general du vallon principal des Vaux-de-Cemay (Fig. 1 et 2). L’ensemble de la pente est occupt par un chaos greseux relativement dense issu de la dislocation de la carapace greseuse stampienne de 2 a 3 m d’epaisseur dont les affleurements en place apparaissent vers la tote + 130 m. Au-dela de cette matrice greseuse dominante, la dislocation et l’erosion ont entraint l’ecoulement gravitaire des formations de contact : meuliere dans sa matrice argileuse au-dessus et sables de Fontainebleau en dessous. Le colluvionnement m&lant meuliere, argile et sable, forme un amalgame s’inserant souvent entre les blocs de gres. Cette structure complexe est t&s irregulierement repartie, souvent plus visible sur les troupes, les bords superieurs des talwegs ou dans la partie inferieure du vallon. Le facies greseux se presente uniquement sous forme de plaques de 2 a 3 m d’epaisseur environ et au plus d’une dizaine de mbtres de longueur. 11 definit un chaos

190

J. Bardat & P. Boudier

Fig. 2. Axes des talwegs et localisation des replats (Moulin-des-Roches, Yvelines). Fig. 2. Axes of talwegs and localisation of gentle slopes (Moulin-des-Roches, Yvelines).

singulier en dalles offrant une position couchee ou dressee, parfois en empilement. De nombreuses dalles sont ponctuees de multiples depressions sur la face dorsale correspondant au toit de la carapace greseuse, simulant parfois des rides de courant fossiles. Cette dislocation quatemaire s’est exprimee de manibre tres heterogbne. 11existe des zones d’accumulation gravitaire correspondant globalement aux vallons alors que sur les replats les depots sont pratiquement inexistants (Fig. 2). En outre la partie nord de la zone analysee comporte un vallon encombre de blocs sur le versant nord. Ce vallon se trouve un peu isole du reste de la zone par un large espace presque exempt de blocs. Ce territoire a Cte exclu de l’analyse cartographique. Afin de faciliter notre etude, le Pam nature1 regional de la Haute VallCe de Chevreuse a mis a notre disposition des cartes au l/250” et au l/650” couvrant une grande partie du secteur avec le pointage geomttre des principaux blocs (234 points) ainsi que des photographies de certains blocs rep&es (29 blocs). Le vallon nord a fait l’objet d’un rep&age separe. Ce travail preliminaire a permis de dresser une cartographic assez fine par triangulation de la plupart des blocs depassant 50 cm de long. Au total 643 blocs ont Cte localises et cartographies au l/454”. Pour assurer une cartographic lisible a plus grande Cchelle, un mode de representation a tte retenu par maille carree en superposant un quadrillage en centimbtre a la carte au l/454”. Chaque maille correspond, sur le terrain a une surface de 20,7 m2 environ. Le fond quadrille compte 2 204 mailles dont 612 disposent d’au moins un bloc ou partie de bloc cartographit. Une carte (Fig. 3) de la densite des blocs par maille a CtCdresste en differenciant les mailles oti le recouvrement des blocs est suptrieur ou inferieur a 10 %. 11 n’a pas Cte tenu compte des blocs affleurants inferieurs a 50 cm de diambtre moyen.

Les bryocCnoses du chaos gkeux

Fig. 3. Repartition Fig. 3. Distribution Yvelines).

du chaos en fonction de la densit

du Moulin-des-Roches

des blocs (Moulin-des-Roches,

191

Yvelines).

of the boulder field as a function of density of stones (Moulin-des-Roches,

Fig. 4. Localisation

des blocs tests (Moulin-des-Roches,

Fig. 4. Localisation

of testing stones (Moulin-des-Roches,

Yvelines). Yvelines).

192

J. Bardat & P. Boudier

Pour aider ?I l’analyse, chacun par un cadre rectangulaire quatribme Ctant, pour les raisons premier constat permet d’observer planche 1 et 4. La densite relative, blocs, montre un confinement des

quatre sous-ensembles ont ttC distinguts, dklimitk nommC respectivement planche 1, 2, 3 et 4 (Fig. l), la tvoqukes (cf. supra), isolte des trois premibres. Un une perte notable de densitk absolue de blocs entre la qui ne prend en compte que les mailles disposant de blocs plus important dans les planches 1 et 4 (Tab. 1).

Tab. 1. Variation de la densit absolue et relative des blocs en&e le sud et le nord du chaos grtseux du Moulins-des-Roches. Tab. 1. Density variation of sandstones between south and north of the boulder field of Moulin-des-Roches. Planche 1

: nombre de mailles par planche : nombre de mailles disposant de blocs C : nombre de mailles disposant d’une

Planche 2

Planche 3

Planche 4

Cumul

A

544

580

540

540

B

224

205

96

87

612

128

104

41

47

320

96

101

55

40

292

Densitt absolue B/A

0,412

0,353

0,178

0,161

0,278

DensitC relative CID

1,333

1,029

0,745

1,175

1,096

2204

densitk de blocs > g 10 % D: nombre de mailles densitC de blocs < 10 %

disposant

d’une

Mkhode

d’ktude de la bryoflore

Deux types d’approches ont Ctk men&. - La premibre consiste 2 sklectionner un contingent suffisant de blocs pour une analyse assez prkise de leur populations muscinales (Ctudes des communautb, position sur les blocs_.). Le choix des blocs a CtC fait en tenant compte de l’importance du recouvrement bryophytique, des variations dans les groupes Ccologiques les colonisant et de l’int&Ct intrinskque des espkces prksentes (typiques ou rares). Sur ces crittkes, 108 blocs de grks ont Ctk retenus comme blocs tests, se rkpartissant surtout dans les planches 2, 3 et 4, le secteur le plus au sud (planche 1) se rkdlant bien plus pauvre et offrant de trks faible recouvrements (Fig. 4). Sur ces blocs tests, toutes les esp&ces ont ttk notCes et leur population principale 1ocalisCe au travers d’un schCma du bloc ou d’une partie de celui-ci. Pour 1’Ctude dynamique et Ccologique des communautks bryophytique, de nombreux transects dkcrivant la position relative des espkces les unes par rapport aux autres ont Ct6 r6alids complttk par des relevCs de type phytosociologique. - La seconde tente de recenser, de manikre plus gCnCrale, l’ensemble des espbces prksentes dans l’aire d’ktude. Ce pointage a Ctt r6alisC sur l’ensemble des blocs cartographiks ainsi que partiellement entre les blocs ou bien B la base de ceux-ci. Toutefois, n’ont pas CtC prises en compte les espkes en situation d’tpiphytes ou de sapro-lignicoles au demeurant rares.

Les bryocknoses

du chaos grtseux

Qpologie

du Moulin-des-Roches

193

des blocs grbeux

A partir de l’analyse de plus de 600 blocs, une typologie a Cte realide pour mieux cerner si, par leur forme, leur position au sol et les elements physiques les recouvrant (humus, lit&e...) avaient une incidence sur la presence et la repartition des bryophytes. Les dalles greseuses presentant des degres d’inclinaison varib, il convenait d’en dresser une typologie assez simple pour les regrouper selon un nombre de categories restreintes. Les critere pris en compte sont les suivants : a : face superieure a inclinaison tres faible, < 20” environ ; b : face superieure a inclinaison entre 20” et 80” ; c : inclinaison > SO”(y compris les surplombs) ; d : face superieure du bloc recouvert d’humus ; e : presence de depot gravitaire au pied des blocs ; f : revers de dalle inclinee (face inferieure visible) ; g : zone en s abris sous roche >>; h : petit bloc arrondi (cas tres peu frequent). A partir de ces diverses cinq grands types ont Ctt distingues (Fig. 5) : Type I : dalle couchee parfois semi enterree sur pente faible ; Qpe II : dalle inclinte peu enterree ; Qpe III : dalle couchee souvent sur pente moyenne et fortement recouverte de materiaux humiferes ; Type IV : dalle dressee verticalement a a&e ou replat sommital ; Type V : dalle inclide, sur pente moyenne g forte, offrant une face principale libre, l’autre restant dans le sol ou peu visible, les faces de fracture pouvant Ctre apparentes ou non. Pour les 108 blocs tests les cinq types se repartissent comme suit : - 20 blocs de type I ; - 22 blocs de type II ; - 28 blocs de type III ; - 20 blocs de type IV ; 18 blocs de type V.

BILAN

GtiNfiRAL

L’analyse de l’ensemble du chaos a permis d’identifier 49 taxons dont la repartition, la localisation stationnelle et l’importance des populations ont Cte ttudites en mettant l’accent sur leur liaison avec la morphologie des blocs, leur position par rapport a l’ensemble du chaos et leur frequence d’observation.

Repartition

des espkes

en fonction

de la position des blocs de g&s (Tabs 2 et 3)

Les 108 blocs tests accueillent 39 des 49 espbces observees dans l’inventaire soit 79,6 % alors qu’ils ne representent que 17,6 % de l’ensemble des blocs. Le choix effectut est done assez efficace. Neanmoins deux especes assez r-ares sur le site Cchappent a l’analyse fine : Lophozia ventricosa (Dicks.) Dum. et Plagiothecium succulenturn (Wils.) Lindb.

J. Bardat & P. Boudier

194

TYPE I

F

Fig. 5. Typologie des blocs greseux observCs au Moulin-des-Roches (Yvelines). Fig. 5. Typology of sandstones studied at Moulin-des-Roches (Yvelines).

La rtpartition des espkces prksente des diffkrences notables en fonction des divers types de blocs ident%%. Toutefois, il apparait assez nettement que le facteur prkpondtrant est la prksence plus ou moins importante de matkiaux humiferes sur

LASbryocknoses du chaos grkseux du Moulin-des-Roches

195

Tab. 2. Comparaison des frtquences de prtkence (%) de quelques espkces humicoles. Tab. 2. Frequency (%) comparaison of some humicolous species. TypeI

Type III

Mnium homum

65,OO

96,29

Dicranum scoparium

35,oo

85.18

Polytrichum formosum

30,oo

62,96

Leucobryum glaucum

10,oo

59.26

Lepidozia reptans

45.00

77,ll

certains types ce qui permet de &parer assez nettement les blocs oti dominent les communautis des humicoles et des sapro-lignicoles de ceux oti dominent plut& les saxicoles. C’est ainsi que sur les types I et III qui presentent les plus fortes accumulations en mat&e organique se rencontrent : Mnium homum Hedw., Lepidozia reptuns (L.) Dum., Polytrichum formosum Hedw., Barbilophozia attenuata (Mart.) Loeske, Leucobryum glaucum (Hedw.) Angstr., Pseudotaxiphyllum elegans (Brid.) Iwats., Dicranum scoparium Hedw., Dicranella heteromalla (Hedw.) Schimp., Tetraphis pellucida Hedw., Diplophyllum albicans (L.) Dum., Calypogeia j&a (L.) Raddi, Hypnum jutlandicum Holmen & Wamcke. Inversement mais en nombre beaucoup plus faible, quelques saxicoles s.1. sont nettement plus frtquentes sur les rochers tres pentus (types II, IV & V) ; Dicranum fulvum Hook., Jamesoniella autumnalis (DC.) Steph. et Dicranoweisia cirrata (Hedw.) Lindb. ex Milde. Mais plusieurs espbces comme Hypnum andoi A.J.E. Sm., Dicranum montanum Hedw., Zsothecium myosuroides Brid. ou CampylopusJlexuosus (Hedw.) Brid. presentent des frequences moins contrastees. En fait les blocs offrant des faces assez verticales ne sont pas exempts de microfissures et de petites depressions ou la matibre organique, m&me melee de materiaux sableux, reste accrochee et constitue des microbiotopes pour les especes humicoles. A contrario, les blocs couches peuvent presenter, sur une partie modeste de leur faces, des zones sans depots hum&es qui peuvent Ctre localement colonisees par des espbces saxicoles. Une approche un peu plus fine entre les types I et III montre une aflinite de certaines espbces plus marquee pour le type III oti l’humus est nettement plus Cpais. C’est le cas notamment pour Mnium homum, Dicranum scoparium, Polytrichum formosum, Leucobryum glaucum, Lepidozia reptans especes humicoles 51saprolignicoles, ne pouvant se contenter d’une fine pellicule humifere pour se developper (Tab. 2). Par contre deux espbces typiquement humicoles presentent des frequences de presence moins nuandes. - Barbilophozia attenuatu est rare sur le type II (4,45 %) et par contre bien represent6 sur les types III et V (48,15 % et 44,44 %) dont les caracteristiques sont assez contrastees. En fait cette hepatique investi les milieux neufs qu’ils soient mineraux ou organiques, les facteurs determinants paraissant &tre, sur gres nu pentu ; un Ctat de surface rugueux et la presence d’un voile d’algue ; ou bien au pied des blocs de gres ou sur des faces peu pentues d’une fine couche d’humus. Ces deux situations correspondent a deux ports differents de l’espece ; sur paroi elle offre un aspect plus l&he oti dominent les tiges et rameaux propaguliferes courts et sur pente moins forte et humifere les touffes plus robustes. - Le cas de Tetraphis pellucida est interessant car cette espece des humus bruts denudes est tres prolifique par multiplication vegetative (propagules). Elle supporte

J. Bardat & P. Boudier

196

Tab. 3. Distribution et frkquence des bryophytes sur Ies deux groupes de types de blocs grkseux du Moulins-des-Roches. Tab. 3. Distribution Moulin-des-Roches.

and frequency

of bryophytes

in two groups

of types of sandstones

of

46.3 39.81 37,96 34,X 31,48 24.07 20337 14,81 TO,18 9.26 8,33 6,48 6,48 555 5.55 4,63 4.63 3,7 I.85 1.85 I,85

.,__

1 Rd

re var. cap&w3 rvrrtym;murrr hians

1 1 1

2.08 2,08 2.08

1

1.67

1 1 1 1

1.85 I,85 1.85 0.93 0,93 0,93 0,93 0.93 0,93

LEGENDE : n:nombredeMocsoliletaxonestobseM %:lOOn/S Q=lOOntISt en gras : lestaxons B frbquence significative

des pentes fortes, voire des surplombs li oti l’humus, pousst par gravitk vers le bord de la dalle, peut former une sorte de bourrelet m&E de fines radicelles des vkgttaux sup&em-s (Deschampsiaflexuosa (L.) Trin. notamment). Soumis &une trosion mod&e, ce substrat humifere offre une structure t&s particulikre, C
Les bryocenoses du chaos greseux du Moulin-des-Roches

197

11convient d’evoquer l’omnipresence d’Hypnum andoi qui resulte du-caractere t&s acide du milieu, de son fort pouvoir de colonisation comme pionnier sur les gres nus mCme si la surface est assez lisse et de sa forte production de sporophytes a la fin de l’hivers. 11 affectionne particulierement les domes et les troupes sur lesquels la couche d’humus est quasi absente. Son mode de croissance vegetative a tiges et rameaux denses plaques sur le support nu, conduit souvent darts un premier temps a des peuplements presque monospecifiques. Pour Isothecium myosuroides on constate une presence assez soutenue sur tous les types de blocs avec neanmoins une preference sur les types I, IV et V. Cette espbce humicole supporte ma1 les humus trop acides se refugiant souvent en belles colonies sur les parties sommitales des blocs pentus ou de maniere plus discrete a la base des blocs couches. Dans cette etude l’option qui a CtC prise de realiser une typologie assez fine a permis de distinguer deux types de situations bien tranchees en relation avec l’absence de mat&e organique ou son accumulation, ce dernier cas &ant surtout rendu possible sur les parois a pentes faibles (type I et II) et tres rarement dans les autres cas ou seules les irregularit& des surfaces et la presence de fissures peuvent creer ici et la des zones de depots. Repartition

gCnCrale des espkes tests sClectionnCes dans l’ensemble du chaos gr&eux (Figs 6-20, Tabs 4, 5)

Parmi les 49 taxons observes, un contingent de 15 especes tests a CtC selectionne. Ce choix repose sur un &entail de divers statuts (chorologique, niveau de rarete regional et valeur patrimoniale). Ont ainsi CtC retenues quatre espbces eury-atlantiques, trois Oreo-atlantiques, six circumboreales orophiles, une circumboreale et une subatlantique. Ceci correspond au niveau regional a deux taxons tres rares, un rare, quatre assez rares, trois assez communs, quatre communs et un trbs comrnun. En outre, ce groupe d’especes retient l’ensemble des taxons de haute valeur patrimoniale regionale (Tab. 4). Le site d’etude comprenant 612 mailles oti des blocs ont Cte rep&es, il est possible d’apprkier de man&e assez precise la frequence de presence des populations sptcifiques par rapport au nombre total de mailles et ceci planche par planche (Tab. 4). Prenons l’exemple de Hypnum jutlundicum qui est observe dans 20 mailles de la planche 1 et dans seulement 2 a 6 mailles des autres planches. C’est a dire que la planche 1 dispose de plus de 60 % des mailles 06 l’espece est observte alors que l’on y compte moins de 37 % des mailles du chaos. L’espece est done proportionnellement plus presente dans cette zone que dans le reste du chaos (Fig. 18). On doit faire un constat different pour Lepidozia reptuns dont les densites plus fortes varient moins (D varie de 14,6 a 21,8 contre 2,l a 8,9 pour H. jutlundicum). En effet, si la frequence relative cumulee de cette espbce sur les planches 1 et 2 represente 69,4 % des mailles, les deux planches cumulent aussi 70,l % des mailles couvrant le chaos. Ce qui tend a montrer que l’espece est globalement bien &pat-tie sur l’ensemble du chaos (Fig. 14). L’analyse de la repartition des quinze espbces pet-met de distinguer trois groupes en fonction de leur frequence generale : - le groupe des especes presentes dans plus de 15 % des mailles du chaos (Dicrunum montunum, Tetruphis pellucidu, Isothecium myosuroides, Lepidoziu reptuns), la plus commune &ant Dicrunum montunum qui est observte dans pres du quart des mailles (Fig. 10) ; - le deuxieme groupe rassemble les especes de frequence g&&ale comprise entre 4 YO et 10 % (Hypnum jutlundicum, Pseudotaxiphyllum eleguns, L,ejeuneu ulicinu, Cumpylopus jlexuosus, Barbilophozia attenuuta et Leucobryum gluucum) ;

198

J. Bardat & P. Boudier

Tab. 4. Repartition Moulins-des-Roches.

globale

Tab. 4. General distribution

Planche no

et densite

dans

le chaos

Phnche 2

Planche 3

Planche 4

224

205

96

87

Dl

s@ifique (P)

tests

Planche I

Densite (D) lOON/

15 especes

greseux

du

and density for 15 species in the boulder field of Moulin-des-Roches.

Nombre de mailles (N)

Occurrence

des

D2

D3

Y

Frequence gb&ale fFC)

D4

36.6 %

33,5 %

15,7 %

14.2 %

Pl

P2

P3

P4

Hynum jutlandicum

20

8,9

6

2,9

2

2,l

4

4,6

32

5,23

Dicranum montanum

41

17,9

78

38,0

13

13.5

18

20,7

150

24,5 1

Tetraphis pellucida

36

16,l

34

16,6

12

12,5

13

14,9

95

15.52

Pseudotaxiphyllum elegans

8

3,6

24

13.2

9

9.4

3

3,4

47

7,68

Lejeunea ulicina

7

3,l

17

5

5,2

29

4,73

Dicranum majus

1

0,45

4

8,3

5

0,17

Catnpylopus jlexuosus

3

1.3

17

8,3

26

27,l

10

11.5

56

9,15

22

9.8

21

10,2

14

14,6

5

5.7

62

10,13

3

3,l

1

I,1

10

1,63

Isothecium myosuroides*

21

9,4

41

20.0

18

18,s

41

47,l

121

19,77

Lepidozia reptans

42

18,8

33

16,l

14

14,6

19

21.8

108

17,65

Leucobryum glaucum

17

7,6

11

5,4

9

9,4

15

17,2

52

8,50

3

1,5

1

1,0

2

2.3

6

0,98

1

1,O

2

2,3

3

0,49

2

0,98

1

1,l

3

0,49

Barbilophozia attenuata Dicranum fulvum

6

Jamesoniella autumnalis

1.95

2.90

Blepharostoma trichopyllum Plagiothecium laetum Cumul des maille concerttees Nombre d’espbces Legende

218

300

127

134

11

13

13

13

719

:

F’n= nombre de mailles de presence pour une esptce dans la planche de reference D = lOOPn!N (Densite relative de l’espbe dans la planche de reference) Y = nombre total de mailles oh l’espece est presente FG = lOOY/612 en gras : presence dominante d’une esptce *sent exclues les stations en base de tronc et celles situees hors des mailles de blocs identifiees

- enfin, le troisibme groupe contient les espbces a faible frequence genetale (inferieure a 2 %) et la quasi-totalitt des taxons tares ou trbs rares et de haute valeur patrimoniale : Dicranum majus Sm., Dicranum fulvum, Jamesoniella autumnalis, Blephorostoma trichophyllum (L.) Dum. et Plagiothecium laetum B., S. & G. Au-de12 de ce premier constat, l’interet est de montrer la repartition a l’indrieur meme du chaos. Un bilan r&lid planche par planche, permet d’exploiter de man&e simultanee, la densite et la frequence relative, espbce par espece (Tabs 4 et 5).

Les bryocenoses

Tab. 5. Repartition Moulins-des-Roches

et frequence

du chaos greseux du Moulin-des-Roches

relative

des

15 especes

tests

dans

199

le chaos

greseux

du

Tab. 5. Distribution and relative frequency for 15 species in the boulder field of Moulin-des-Roches. Planche no

Planche I

Planche 2

Planche 3

Planche 4

Pl

FR1

P2

P3

P4

FR4

Hypnum jutlandicum

20

62,5

6

Lepidozia reptans

42

38,9

33

30,6

Leucobryum glaucum

17

32,7

11

21,2

Barbilophozia attenuata

22

35,5

21

33,9

Tetraphis pellucida

36

31,9

34

35.8

Dicranum montanum

41

21.3

78

PR2 18,75

2

FR3

4

12,5

32

13,0

19

17,6

108

9

17.3

15

28,8

52

14

22,5

5

831

12

12.6

13

13,7

95

52,8

13

8,7

18

12.0

150

3

694

47

14

6,25

h’ombre de mailles (Y)

62

Pseudotaxiphyllum elegans

8

17,0

27

57.4

9

19,l

Lejeunea ulicina

I

24,l

17

58.6

5

17.2

Dicranum majus

1

20.0

4

80,O

Dicranum jidvum

6

60,O

3

30,o

1

10,o

10

Jamesoniella autumnalis

3

50,o

1

1697

2

33.3

6

Plagiothecium laetum

2

66,6

Isothecium myosuroides* Campylopus flexuosus Blepharostoma trichophyllum

29 5

33,3

3

21

17,4

41

33.9

18

14,9

41

33,9

121

3

5.4

17

30,3

26

46,4

10

17,8

56

33,3

2

66,6

3

1

* sont exclues les stations en base de tronc et celles situees hors des mailles de blocs identifites FR (Frequence relative) = lOOPA’ P

: nombre de pointages rkalis6s pour une espbce dans la planche de rCf&ence (occurrence sptcifique)

Si la planche 2 redle cinq especes tests a forte densite, elle dispose de sept especes a n-es forte frequence relative (plus de 50 % des pointages) alors que le nombre de mailles ne represente que 335 %. C’est incontestablement la zone la plus riche oii le maximum d’especes s’exprime. La planche 1 possbde encore un contingent d’espbces a bon niveau de frequence mais ne depassant que pour une espece le seuil des 40 % (Hypnumjutlundicum). Les deux autres planches (3 et 4), malgre un contingent sptcifique identique a celui de la planche 2, sont globalement plus pauvres en especes tests presentant une forte densite. Seules deux especes ont une frequence relative superieure a 35 % : Campylopus jlexuosus et Blepharostoma trichophyllum. Toutefois pour cette seconde espece le tres faible nombre de points d’observations (3) rend peu significatif le calcul de la densitt. Une analyse plus fine pet-met de constater que la distribution de ces espbces se concentre dans des zones de bas de pente du vallon principal, sur les flancs exposes au nord des vallons secondaires ou bien dans les parties plus tlevees du chaos, sur les faces nord des blocs. Ceci est particulierement significatif pour Dicrunum montunum (Fig. 10). On observe le m6me comportement pour Burbilophozia attenuata (Fig. 6) et Pseudotaxiphyllum elegans (Fig. 17). L’humidite atmospherique stationnelle est ici nettement plus persistante dans le fond du vallon et les vallons secondaires. Ceci est confirmt a la fois, par plusieurs bryophytes, mais aussi par une petite algue du genre Trentepohlia, taxon

J. Bardat & I? Boudier

200

Fig. 6. Distribution (Yvelines).

de Barbilophozia

attenuata

dam le chaos greseux

du Moulin-des-Roches

Fig. 6. Distribution (Yvelines).

of Barbilophozia

attenuata in the sandy boulder field of Moulin-des-Roches

Fig. 7. Distribution (Yvelines).

de Blepharostoma

trichophyllum dans le chaos greseux du Moulin-des-Roches

Fig. 7. Distribution Roches (Yvelines).

of Blepharostoma

trichophyllum

in the sandy boulder field of Moulin-des-

Les bryocenoses

Fig. 8. Distribution Fig. 8. Distribution (Yvelines).

Fig. 9. Distribution

du chaos greseux du Mouhn-des-Roches

de Dicranum fulvum dam le chaos greseux du Moulin-des-Roches of Dicranum jidvum

in the sandy

boulder

201

(Yvelines).

field of Moulin-des-Roches

de Dicranum mujus dam le chaos greseux du Moulin-des-Roches

(Yvelines).

Fig. 9. Distribution of Dicranum majus in the sandy boulder field of Moulin-des-Roches

(Yvelines).

202

J. Bardat & E Boudier

Fig. 10. Distribution de Dicranum montanum dans le chaos grrseux du Moulin-des-Roches (Yvelines). Fig. 10. Distribution of Dicranum montanum in the sandy boulder field of Moulin-des-Roches (Yvelines).

Fig. 11. Distribution de lsothecium myosuroides dans le chaos gr6seux du Moulin-des-Roches (Yvelines). Fig. 11. Distribution of Isothecium myosuroides in the sandy boulder field of Moulin-des-Roches (Yvelines).

Les bryocenoses

du chaos greseux du Moulin-des-Roches

Fig. 12. Distribution (Yvelines).

de Jamesioniella

Fig. 12. Distribution (Yvelines).

of Jamesionella

Fig. 13. Distribution

de Lejeunea ulicina dans le chaos greseux du Moulin-des-Roches

Fig. 13. Distribution (Yvelines).

of tijeuneu

autumnalis

203

dans le chaos greseux du Moulin-des-Roches

autumnalis in the sandy boulder field of Moulin-des-Roches

ulicina

in the sandy boulder

(Yvelines).

field of Moulin-des-Roches

204

J. Bardat & P. Boudier

Fig. 14. Distribution de Lepidozia reptans dans le chaos gr6seux du Moulin-des-Roches (Yvelines). Fig. 14. Distribution of Lepidozia reptans in the sandy boulder field of Moulin-des-Roches (Yvelines).

Fig. 15. Distribution de Mnium hornum dans le chaos gr6seux du Moulin-des-Roches (Yvelines). Fig. 15. Distribution of Mnium hornum in the sandy boulder field of Moulin-des-Roches (Yvelines).

Les bryocenoses

du chaos greseux du Moulin-des-Roches

205

Fig. 16. Distribution (Yvelines).

de Plagiothecium laetum dans le chaos greseux

Fig. 16. Distribution (Yvelines).

of Plagiothecium laetum in the sandy boulder field of Moulin-des-Roches

Fig. 17. Distribution (Yvelines).

de Pseudotaxiphyllum elegans dans le chaos greseux du Moulin-des-Roches

du Moulin-des-Roches

Fig. 17. Distribution of Pseudotaxiphyllum elegans in the sandy boulder field of Moulin-des-Roches (Yvelines).

206

J. Bardat & P. Boudier

Hypnumjutlandicum

Campylopusflexuosus

Leucobryumglaucum

Fig. 18. Distribution de Hypnumjutlandicum, Campylopusflexuosus et Leucobryum glaucum dans le chaos gr6seux du Moulin-des-Roches (Yvelines). Fig. 18. Distribution of Hypnumjutlandicum, Campylopusflexuosus and Leucobryum glaucum in the sandy boulder field of Moulin-des-Roches (Yvelines).

Les bryocenoses du chaos grkseux du Moulin-des-Roches

Fig. 19. Distribution (Yvelines). Fig. 19. Distribution (Yvelines).

de Tetruphis

pellucida

of Tetruphis pellucida

dans

le chaos

greseux

in the sandy boulder

207

du Moulin-des-Roches

field of Moulin-des-Roches

tpilithique pionnier, qui affectionne les stations a forte tension de vapeur (ce genre est tres bien represent6 dans les zones Cquatoriales). Toutes les stations de cette algue que nous avons pu rencontrer, ont Cte pointtes (Fig. 20). Sa repartition corrobore celle des bryophytes hygrosciaphiles m&o-acidiphiles. L’ambiance plus fraiche est particulierement favorable aux espbces hygrosciaphiles comme Isothecium myosuroides ou Mnium hornum (espece hors test), leur gradient de densitt et de frequence sud-nord est totalement similaire dam ses variations (Tabs 6 et 7 et Figs 11 et 15).

DiversitC kologique

du cort&ge bryophytique

Afin d’apprecier globalement cette diversite, plusieurs parambtres ont CtC retenus pour preciser le profil tcologique sommaire des espbces : la sensibilitt a la lumiere, a l’humidite, a la reaction ionique du sol et la nature du substrat (Tab. 8). Ceci permet, de mar&e indirecte, de cadrer les conditions globales d’accueil au sein du chaos. Le croisement de ces donnees Ccologiques avec la repartition et le statut chorologique conduit a une vision assez fine du comportement des taxons et des communautes au travers desquelles ils s’expriment. Sur l’ensemble des 49 taxons inventories, une large majorite sont des sciaphiles strictes ou preferantes (63,27 %), alors que les heliophiles (s.1.) ne representent que 18,39 %. Cela va de pair avec la domination des hygrophiles (71,42 %), les xerophiles (s.1.) restant nettement secondaires (14,28 %). Dam le groupe des hygrophiles les especes les plus strictes representent 28,75 % parmi lesquelles on compte 11 sciaphiles (22,45 %) dont des espbces de haute valeur patrimoniale (Dicranum f&urn, Blepharostoma trichophyllum...). Le caractbre acide du sol et des rochers conduit a la presence d’un

208

J. Bardat & P. Boudier

de deux espkces hygrosciaphiles. Tab. 6. Comparative density for two hygrosciaphilous species. Tab. 6. Densitt% comparees

Planche

I

2

3

224

205

96

87

36,6 %

33,5 %

15,7 %

14,2 %

no

nb mailles /planche (N) lOON/

4

Nombre de mailles (Y)

Friquence g&!rale (FG)

Pl

Dl

P2

D2

P3

D3

P4

D4

Isothecium myosumides

21

9,4

41

20,O

18

18.8

41

47.1

121

19,77

Mnium homum

16

7,l

56

27.3

25

26,0

55

63,2

152

24.84

FG = lOOY/612

Tab. 7. Frkquences comparkes de deux espkes Tab. 7. Comparative

Planche

Occurrence

1

no

spkifique

Fr4uence

relative

Isothecium

myosuroides

Mnium homum FR = lOOPry P : nombre de pointages

hygrosciaphiles.

frequency for two hygrosciaphilous

species.

2

3

Nombre de milles (Y)

4

Pl

P2

P3

P4

FRl

FR2

FR3

FR4

21

17,4

41

33,9

18

14,9

41

33,9

121

16

10,5

56

36,8

25

16.5

55

36,2

152

r&Es& pour une esptce dans la planche de rifkrence

(occurrence

spkcifique)

contingent presque uniquement constituk d’acidiphiles strictes (87,76 %), les trois espbces acidiclines B neutro-calciclines demeurant accidentelles (Eurhynchium striatum (Hedw.) Schimp., Eurhynchium hiuns (Hedw.) Sande Lat. et Atrichum undulutum (Hedw.) I? Beauv. Leur prksence est like g des substrats terreux ma1 dtcalcifiCs lib&ant encore des cations. Le chaos, du fait m&me de sa configuration et de son orientation apparait done comme un systkme bien abritk, oti l’humiditi et l’ombrage du sol sont condquents, l’encaissement et la prksence d’un tour d’eau renforGant son confinement.

Approche chorologique

(Figs 21-24)

L’analyse chorologique est assurke selon deux modes : - Une approche comparative situant le cortkge bryologique du chaos du Moulin-des-Rpches dans le contexte sylvatique de la for& de Rambouillet et au niveau rkgional de l’Ile-de-France ; - Un constat sur le comportement des diverses espbces s’appuyant sur la rkpartition au sein mCme du chaos.

Les bryocknoses

Tab. 8. Statut Ccologique (Yvelines). Tab. 8. Ecological (Yvelines).

du chaos grkseux du Moulin-des-Roches

des taxons

status of bryophytes

observks

dam le chaos grtseux

209

du Moulin-des-Roches

species in the sandy boulder field of Moulin-des-Roches

La determination du statut chorologie fait appel a l’exploitation des travaux de Bardat & Boudier (1997), de Gaume (1948, 1949a et 1949b) et de Lecointe (1980, 1981, 1982 et 1988). Si la majorite des 49 taxons appartient aux groupes des acidiphiles, leur statut chorologique est plus diversifit. Le profil chorologique (Tab. 9) montre une tres forte presence des circumboreales (p&s de 47 %), ce qui constitue, au moins en zone sylvatique de plaine europeenne temptree, le groupe le plus important. Mais deux autres groupes sont significatifs : les especes montagnardes (circumboreales orophiles et oreoatlantiques) et les atlantiques (excluant les oreo-atlantiques) avec plus de 20 % chacun. Ce secteur appartit done bien marque par une double influence montagnarde et atlantique. A l’echelle du massif de Rambouillet, ce caractbre est plus modestement exprimt, puisque

J. Bardat & I? Boudier

210

Fig. 20. Distribution

de Z’rentepohlia dans le chaos greseux du Moulin-des-Roches

Fig. 20. Distribution

of Trentepohlia

Fig. 21. Repartition Moulins-des-Roches

du groupe des espkces circumboreales (Yvelines).

Fig. 21. Distribution Roches (Yvelines).

of circumboreal

in the sandy boulder field of Moulin-des-Roches

orophiles

(Yvelines). (Yvelines).

dans le chaos greseux du

orophilous species in the sandy boulder field of Moulin-des-

Les bryocenoses

du chaos greseux du Moulin-des-Roches

Fig. 22. Repartition du groupe des especes greseux du Moulins-des-Roches (Yvelines). Fig. 22. Distribution

atlantiques

exclues)

of Atlantic species in the sandy boulder field of Moulin-des-Roches

Fig. 23. Repartition du groupe des especes oreo-atlantiques Roches (Yvelines). Fig. 23. Distribution (Yvelines).

(oreo-atlantiques

of Oreo-Atlantic

211

dam le chaos (Yvelines).

dam le chaos greseux du Moulins-des-

species in the sandy boulder field of Moulin-des-Roches

212

J. Bardat & P. Boudier

Fig. 24. RBpartition du groupe des especes montagnardes Moulins-des-Roches (Yvelines). Fig. 24. Distribution (Yvelines).

of rare mountainous

rares dans le chaos greseux du

species in the sandy boulder field of Moulin-des-Roches

l’on compte seulement 15 % environ d’esp@es montagnardes et moins de 10 % d’atlantiques. Dans le contexte plus large de l’Ile-de-France, le vallon du Moulin-desRoches apparait toujours marque par une empreinte atlantique soutenue (&art positif de + 9,80 %) mais oti la presence d’elements montagnards est peu differente (&art positif de + 1,Ol %). Toutefois le cortege mediterraneen (s.1.) qui represente 20 % au niveau regional, est ici totalement absent, ce qui conforte le caractere biogeographique original du chaos du Moulin-des-Roches. La repartition de certains groupes chorologiques montre une large distribution au sein du chaos, qu’il s’agisse des circumboreales orophiles (Fig. 21) ou des atlantiques (Fig. 22). Toutefois les montagnardes paraissent plus rares dans les secteurs recoupant les hauts de pente dans la partie nord. Les quatre espbces Oreo-atlantiques offrent des densites nettement plus faibles que les six circumboreales orophiles et se concentrent nettement dans la partie moyenne du chaos (Fig. 23), la oti se conjuguent une couverture humifere, une humidite atmospherique suffisante et une concentration plus forte des dalles greseuses. Parmi les circumboreales orophiles frequentes, Etraphis pellucida est moins exigeant, un humus brut suffit, ce qui explique sa plus large repartition (Fig. 19) et une variation moderee des densids (D. varie de 12,5 a 16,6) (cf. Tab. 4). De m&me, Dicrunum montanum, avec un statut tcologique de saprolignicole a saxicole offre une repartition similaire (Fig. 10). Par contre, si l’on selectionne les cinq taxons montagnards rares, appartenant aux groupes chorologiques circumboreal et atlantique (Blepharostoma trichophyllum, Dicranum jidvum, Dicranum majus, Jamesoniella autumnalis et Plagiothecium laetum) leur distribution (Figs 7, 8,9, 12, 16,24), presente une localisation tres precise au sein des trois vallons, sur leur versant nord, entre des totes altimetriques variant de 112 m a 118 m

Les bryocenoses du chaos grkseux du Moulin-des-Roches

213

Tab. 9. Situation chorologique du Moulin-des-Roches cornparke 21la fori de Rambouillet et ?I l’ile-de-France. Tab. 9. Chorological state of Moulin-des-Roches compared to Rambouillet woodland and Ile-de-France. secteur

de rt!fkrence

Groupe chorologique

Chaos du Moulin-des-Roches nombre de taxons

%

23

46,94

Fort3 de Rambouillet nombre de

ile-de-France

%

nombre de taxons

%

124

44,77

210

31,70

6

12,224

24

8,66

85

15,26

Oreo-atlantique

4

8,16

14

5,05

19

3.41

eury-atlantique

6

12J4

12

4,33

20

3,59

15

5,42

32

5,75

2

0.72

45

16.25

5-l

lo,23

circumboreal circumboreal

orophile

sub-atlantique eu-atlantique

8,16 4

cosmopolitelsubcosmopolite oceanique-montagnard

6

1224

1,26

0,36

2

0,36

montagnard

2

0,72

2

0,36

oceanique-europeen

2

0,72

9

1,62

17

6,14

60

10,77

2,53

13

2,33

3.61

41

mediterranto-atlantique sub-mediterranCen eury-mtditerranten cumul

10 49

100,oo

*depuis la synthese r&Me par Bardat (1997) un nombre decouverts dans le massif de Rambouillet.

277* non negligeable

100,OO

7,36

557

de nouveaux

100,OO taxons

ont Cte

dans le talweg no 2, de 105 m a 115 m dans les talwegs no 3 et 4. Cette position stationnelle est remarquable et souligne, dans un contexte planitiaire, malgre les faibles variations du relief, l’impact de l’effet d’ubac-adret pour l’accueil d’espbces montagnardes. Bien que leur Ccologie soit assez differente, ces cinq espbces (humicoles strictes a epilithiques) recherchent globalement des conditions climatiques stationnelles similaires. Ceci n’est pas le cas pour trois espbces atlantiques (Cumpylopus jlexuosus, Hypnum jutlandicum et Leucobryum glaucum) qui, malgre des caracteristiques Ccologiques plus proches (humicoles acidiphiles mesophiles) presentent une repartition assez differente dans le chaos (Fig. 18). Dans ce cas, ce sont les conditions Cdaphiques et climatiques qui apparaissent comme dCterminantes. Hynum jutlandicum est heliophile et persiste 8 la base et sur les blocs de faible couverture humifere darts la partie sud du chaos, oti les dalles sont largement dtnudees et en exposition meridionale. Campylopus jlexuosus, espece humicole stricte des humus tpais ne se developpe vraiment que sur les blocs largement recouverts de materiaux organiques qui sont particulierement abondants dans la partie moyenne et inferieure du chaos. Enfin, Leucobryum glaucum, est une humicole ayant la particularite d’exploiter deux biotopes assez differents sur le site d’une part, les humus bruts tpais en stations peu pentues et, d’autre part, les parois greseuses parfois verticales ou en surplomb sur une fine pellicule humifere. Ce double statut conduit a une repartition plus &endue que les deux autres taxons.

214

J. Bardat & l? Boudier

Diversit6 phytosociologique et esquisse de dynamique bryologique Si la grande majoritt des espbces observees appartiennent au cortege des acidiphiles, on peut distinguer deux grands groupes. Celles qui se developpent directement sur les rochers en pionnieres Cpilithiques et celles sur substrats plus complexes form& de materiaux meubles a fraction ruin&ale et organique variable, qualifiees d’humo-epilithiques, d’humicoles et de terricoles. Mais le statut Cdaphique n’est pas aussi tranche et certaines espbces presentent un comportement assez different comme Bar& lophozia attenuata ou Dicranum montanum. La premiere occupe aussi bien des sols terreux plus ou moins charges d’humus que des parois greseuses t&s pentues, voire verticales la oti il n’y a pas de sol au sens pedologique du terme. La seconde est aussi bien Cpilithique que sapro-lignicole. Cette relative plasticite conduit a s’interesser aux communautes au sein desquelles l’espbce s’exprime le mieux et d’envisager comment elles s’insbrent dans la dynamique des complexes bryophytiques du chaos greseux. Pour cela, plus d’une centaine de releves ont CtC realist% et regroup& en unites phytosociologiques (Tab. 10). Cette analyse permet d’identifier plusieurs groupements et associations bryophytiques et de les positionner dans un processus d’tvolution dynamique. Le Barbilophozietum attenuatae Bardat 1993 : association d&rite en HauteNormandie (Bardat, 1993) qui investit les substrats acides humiferes parfois de manibre t&rue sur paroi (Tab. 10, colonne 8). Le Leucobryo-Tetraphidetum pellucidae Barkman 1958 : association hyperacidiphile des humus bruts denudes supportant une certaine secheresse temporaire (Tab. 10, colonne 9). Le Lepidozio reptantis-Mnium horni Bardat 1993 : association surtout saprolignicole mais aussi sur humus acides en contexte stationnel frais a sub-humide (Tab. 10, colonne 7). L’lsothecietum myosuroidis (Allorge 1922) Herzog 1943 : association souvent humo-Cpilithique sur mattriaux acides en station bien ombragte (Tab. 10, colonne 10). Le Cephaiozielletum divaricatae Bardat 1993 : association plutot humoterricole a terricole a arenicole supportant une secheresse prolongte (t&s rare sur le site). Le Mnietum horni N&r 1969 : association sciaphile sur humus acide tvolue (moder a mor) (Tab. 10, colonne 12). Le Lophozietum ventricosae Neumayr 197 1, association terrico-humicole en station ombragte et fraiche (fragmentaire et tres rare dans le chaos). Le Bartramietum pomiformis (v. Krusenstjema 1945) v. Htibschmann 1967 : association acidicline plutbt semi-heliophile sur sol filtrant a forte charge limono-sableuse (tres fragmentaire sur le site). Le groupement a Hypnum andoi : communautt pionnibre Cpilithique sur gres, affectionnant les rochers bien degages (Tab. 10, colonne 4). Le Jamesonielletum autumnalis Barkman ex. Mamczarz 1978 : association considtree comme sapro-lignicole par Marstaller (1993) mais dont le comportement ici est uniquement humo-Cpilithique (Tab. 10, colonne 6). 11 est possible que notre groupement constitue une association differente. L’AuZacomnietum androgynae v. Krusenstjema 1945 : association humicole ou humo-terricole supportant des p&odes de stcheresse mais souvent presente en station sub-humide dans les boulaies mouillees ou les aulnaies, au pied des arbres (t&s fragmentaire, mal exprimee sur le site). Le groupement a Pseudotaxiphyllum elegans souvent en station terricohumicole tres ombragee (Tab. 10, colonne ll),

Les bryoctnoses

Tab. 10. Tableau synthktique Moulin-des-Roches (Yvelines). Tab. 10. Summary (Yvelines).

du chaos grkseux du Moulin-des-Roches

des

table of bryophytic

groupements communities

bryophytiques

du

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chaos

grkseux

of the boulder field of Moulin-des-Roches

du

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Le groupement a Dicranum montanum : communaute sapro-lignicole, humoCpilithique voire corticole. Dans le chaos, ce groupement est essentiellement humoCpilithique (Tab. 10, colonne 5). Une phase pionmbre a Lejeunea ulicina est identifiable sur les parois tres ombragees et fraiches des bas de pentes au fond du vallon principal (Tab. 10, colonne 2). Le groupement a Dicranum fulvum : communaute post pionnibre epilithique, acidiphile, ltgerement humicole, sur dalle inclinee ou verticale (Tab. 10, colonne 3). Le groupement a Dicranum majus : communaute humicole stricte sur humus Cpais (Tab. 10, colonne 1). Le Plagiothecietum nemorali (Scholz 1964) v. Htibschmann 1974, s’ttabli sur humus acide en station tres ombragee et fraiche, developpant, en particulier, des draperies sur quelques blocs du vallon nord (Tab. 10, colonnel3). On peut ajouter trois groupements terricoles pionniers ou post pionniers a la base des blocs mais tres peu developpes : le Diplophyllo albicantis-Scapanietum nemorosae Smarda 1947 (Tab. 10, colonne 14), le Calypogeietum jissae Schumacher 1944 (Tab. 10, colonne 15), et le Pogonatetum aloidis (Herzog 1943) v. Krusenstjema 1945 (Tab. 10, colonne 16). Ce bilan bryosociologique bien que non exhaustif reflbte bien la richesse Ccosystemique de la bryoflore locale. A partir de ces elements on peut proposer succintement quelques processus de succession en fonction des biotopes observes. A - Sur les dalles tres inclinees, la colonisation peut s’effectuer selon deux trajectoires dynamiques. En contexte meso-xerocline : envahissement depuis le haut vers le bas par le groupement a Hynum andoi ; puis colonisation secondaire sur cette population par des elements appartenant au stade climacique bryophytique, c’est a dire : Dicranum scoparium, Mnium hornum, Hypnum cupressiforme dtpendant de l’ordre des Dicranetalia scoparii Barkman 1958. Des phases post-pionnieres a Dicranumfulvum s’observent dam les stations les plus ombragees. Dam des conditions plus fraiches, l’lsothecietum myosuroidis peut recouvrir le sommet des blocs ou une partie de leurs flaws. La persistance de ce groupement peut Ctre importante, surtout dam la pat-tie nord du chaos. Rappelons que la plupart des blocs nus de bas de pente ou des vallons secondaires, en situation de forte humidite relative sont plus ou moins envahis par Trentepohlia sp. Ces colonies precedent le developpement des phases pionnibres a Zsothecium. A la faveur d’une pente plus faible, la oti l’humus s’epaissit, se m&lam a une fraction limono-sableuse, le Mnietum horni s’installe. Sur les flancs, les communautes post-pionnibres sur voile d’algue et film humifere s’imbriquent souvent (Barbilophozietum attenuatae, et Lepidozio reptantisMnietum horni). Dans les secteurs les plus frais s’exprime le Jamesonielletum autumnalis. Ces unites peuvent Ctre parfois precedees par des colonies pionnibres Cpilithiques de Zejeunea ulicina. B - Sur les dalles couchtes ou faiblement d&lives, la presence d’une accumulation progressive de materiaux humiferes (substrat h fraction sableuse dominante), permet le dtveloppement d’une serie de groupements humicoles. En premier le Lepidozio reptantis-Mnietum homi puis le Leucobryo-Tetraphidetum pellucidae, enfin les communautes climaciques stationnelles des Dicranetalia scoparii avec dans les phases tres humiferes un facibs a Dicranum majus dans les zones les plus fraiches. Afin de mieux situer les diverses associations et groupements mentionnes, nous indiquons ci-apt-es leur position synsystematique selon une synomenclature adaptee des travaux de Von Htibschmann (1986) et de Marstaller (1993).

Les bryocenoses du chaos greseux du Moulin-des-Roches

Architecture synomenclaturale chaos du

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unit& bryosociologiques

Classe : Ceratodonto-Polytrichetea pilgeri Mohan 1978 Communautes pionnibres meso-xeroclines a xerophiles sur substrats sablo-limoneux sets. m : Polytrichetalia piliferi v. Hiibschmann 1975 Alliance : Ceratodonto-Polytrichion piliferi (Waldheim 1947) v. Htibschmann 1967 Association : Cephalozielletum divaricatae Bardat 1993 Classe : Pogonato-Dicranelletea heteromallae v. Hiibschmann 1975, Communautes pionnieres et post-pionnibres mesophiles sur sol limoneux peu humifere. m : Diplophylletalia albicantis Philippi 1963 Alliance : Dicranellion heteromallae (Philippi 1956) Philippi 1963 Association : Bartramietum pomiformis (v. Krusenstjerna 1945) v. Htibschmann 1967 Plagiothecietum nemorali (Scholz 1964) v. Htibschmann 1974, Lophozietum ventricosae Neumayr 197 1, Diplophyllo albicantis-Scapanietum nemorosae Smarda 1947, Calypogeietum jissae Schumacher 1944, Pogonatetum aloidis (Herzog 1943) Krusenstjerna 1945, groupement basal a Pseudotaxiphyllum elegans,

Classe : Lepidozio-Lophocoletea heterophyllae v. Hiibschmann 1976 Communautes pionnieres et post-pionnieres sapro-lignicoles a saxico-humicoles. m : Cladonio-Zepidozietalia reptantis Jezek et Vondracek 1962 Alliance : Nowellion curvifoliae Philippi 1965 Associations : Jamesonielletum autumnalis Barkman ex Mamczarz Barbilophozietum attenuatae Bardat 1993, Alliance : Tetraphidion pellucidae v. Krusenstjerna 1945 Association : Aulacomnietum androgynae v ; krusenstjema 1945 Leucobryo-Tetraphidetum pellucidae Barkman 1958

1978

Classe : Hypnetea cupressiformis Jezek et Vondrhcek 1962 Communautes post-pionnibres a climaciques stationnelles humicoles. m : Dicranetalia scoparii Barkman 1958 Alliance : Dicrano scoparii-Hypnion filiformis Barkman 1958 Association : Mnietum horni N&r 1969 Dicrano scoparii-Hypnetum filiformis Barkman 1958 (englobe provisoirement les groupements a Dicranum majus, B Hypnum andoi et a Dicranum fulvum). Orthodicranetum montani-Hypnetum jiliformis Wisniewski 1930 (englobe provisoirement les groupements humotpilithiques et Cpilithiques a Dicranum montanum et L.ejeunea ulicina).

Alliance : Zsothecion myosuroidis Barkman 1958 Association : Isothecietum myosuroidis (Allorge

1922) Herzog 1943.

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Les secteurs de haute valeur patrimoniale Sur les 49 taxons observCs dans l’aire d’Ctude, cinq peuvent Ctre considCr& comme de haute valeur patrimoniale parce qu’il s’agit d’espbces rares ou tr?s rares au niveau francilien et d’une man&e plus gCnCrale dans les plaines franc;aises atlantiques. Ces esptces, pour la plupart, ont un statut chorologique d’afEnit6 montagnarde soit comme circumborCale orophile (Blepharostoma trichophyllum, Dicranum fulvum, Jamesoniella autumnalis, Plagiothecium laetum) soit comme orto-atlantique (Dicranum majus).

Si, dans le secteur CtudiC, le cort&ge d’espbces rares ou tr6s rares ne reprksente que 10 % de l’effectif alors qu’il atteint 18 % dans le massif de Rambouillet (Bardat 1997), quatre de ces cinq espbces ne sont connues, pour cette for& de plus de 22 000 ha, qu’au niveau du chaos du Moulin-des-Roches. Leur localisation (Fig. 24) permet de constater un regroupement des groupes de blocs qui les accueillent, dans les parties nord et centrale du coteau correspondant B la zone la plus ombragte et la plus fraiche. Mais afin de mieux intCgrer l’ensemble de la bryoflore dans ce diagnostic, il convient de prendre aussi en compte d’autres taxons, un peu plus rkpandus, mais dont l’int&&t floristique et Ccologique est important. C’est en particulier le cas pour des espkces tests assez rares telles que : Barbilophozia attenuata, (or6o_atlantique), Lejeunea ulicina (em-y-atlantique), Lophozia ventricosa (circumbor6ale) ou Plagiothecium succulentum (circumbor6ale). On peut ainsi identifier quatre secteurs d’int6rCt bryologique, qui couvrent tout ou partie des vallons secondaires et leurs flancs. Le premier, le plus au sud, s’il n’est pas le plus remarquable, possbde de nombreuses populations de Barbilophozia attenuata principalement au pied des blocs et entre les dalles sur les substrats terreux ainsi que l’unique station de Lophozia ventricosa du chaos. Le second et le troisikme, dans la partie centrale, disposent d’une partie des stations de Dicranum majus, Dicranum fulvum, Jamesoniella autumnalis et Lejeunea ulicina. et le quatritme, au nord, accueillent les stations les plus importantes de Dicranumfilvum et Jamesoniella autumnalis, ainsi que celles de Plagiothecium laetum et de Blepharostoma trichophyllum. A noter que dans ces deux demiers secteurs, Barbilophozia attenuata est pr&ent non plus au sol mais sur les parois en position de saxico-humicole. 11 s’Ctablit done bien un gradient climatique et Cdaphique entre le sud et le nord de la zone d’Ctude. La pat-tie sud-est encore relativement s&he et CclairCe 1atCralement (en p&ode hivemale) alors que la partie nord est sensiblement plus fraiche et moins Cclairke latiralement. Le recouvrement bryophytique est d’ailleurs particulibrement faible sur le haut du flanc du vallon sud et son adret.

Les secteurs altCrCs Le vallon du Moulin-des-Roches est fortement fr6quentC depuis le XIX” Sibcle. Les chaos grCseux, les petites cascades et 1’Ctang de Cemay, crC6 par les moines de 1’Abbaye toute proche, attirent de nombreux promeneurs mais aussi des artistes dont le peintre Pelouse auquel on a ClevC un petit monument non loin de 1’Ctang. L’installation de plusieurs buvettes le long de la route dtpartementale no91 cr6e un point d’encrage important du public durant le week-end. Le sentier de grande randonnte (G.R. Cl) emprunte, au sud, le fond du vallon et remonte, au nord, sur le plateau, au droit du petit-Moulin en laissant sur sa droite l’ensemble des pentes qui fait en partie l’objet de nos

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travaux. Mais un sentier existe aussi dans le fond du vallon plus au nord en rive gauche du RQ. I1 passe au pied d’une concentration de dalles accumulees presque en bordure du ruisseau. La pente est ici t&s forte et de nombreux couloir d’erosion se sont form&, creant des debuts de surplombs et des dechaussements partiels des gros blocs. Ce processus est accent& par la frequentation de ces couloirs. La vegetation acidiphile, sous couvert forestier dense, ne colonise que difficilement ces espaces. Dans la partie sud, au niveau des groupes de blocs les plus proches du fond de vallon, le pittinement souvent intense des dalles les plus couchees, est si important que la couverture bryophytique y est totalement absente. Seules ne subsistent ici et la que des populations de Trentepohlia. Ce constat est aussi valable sur l’ensemble de la rive droite. La partie sud, sur l’adret du vallon oii les conditions stationnelles sont deja defavorables (stcheresse et fort Cclairement), ne comporte pratiquement plus de bryophytes sur au moins une dizaine de groupes de blocs. Cette zone a CtCexclue d’office de notre etude. M&me les especes habituellement infeodees aux g&s Cclairt% sont absentes (Grimmia, Schistidium, Hedwigia, Racomitrium). L’absence quasi absolue de bryophytes tpilithiques meme sur le dessus des blocs, souvent peu accessibles, est difficilement explicable. Ii existait au debut du siecle une pdture a l’endroit meme oti aujourd’hui s’etend le petit etang du Moulin-des-Roches (ceci est confirme par un document iconographique de l’epoque), dont la digue de retenue est empruntee par la route departementale no91 en direction de Dampierre-en-Yvelines. 11est done possible que la plupart des dalles, proches de l’etang actuel, aient CtCmalmentes par le b&ail sous un couvert forestier tres reduit.

Mesures de gestion conservatoire

Dans l’etat actuel des connaissances relatives au site, il est dtlicat d’envisager des mesures fortes de gestion pour la bryflore. 11parait plus souhaitable de rester discret quant a l’existence de ces espbces dans la mesure oti elles n’attirent pas particulierement l’attention du public. Compte tenu de leur petitesse et des difficult& de determination sur le terrain pour certaines d’entre elles, elles ne representent pas une curiosite Cvidente pour le promeneur. L’important est de maintenir les potentialites d’accueil. Creer des enclos de protection, comme cela a CtC fait en rive droite pour suivre l’evolution de la vegetation phanerogamique, ne constitue pas une solution adaptte car cela signale un espace interdit artificiellement et qui fixe l’attention. En outre, darts ces enclos, on assiste 9 une modification sensible de la structure forestiere qui s’enrichit en sous &age arbustif et en especes herbacees. Ce processus, a ce stade, n’est pas tres favorable au developpement des bryophytes epilithiques et humo-Cpilithiques. La mise en place de tels enclos sur des pentes est en outre loin d’etre tvidente. Ceci ne pourrait s’envisager que sur des groupes de blocs nus pour une reconquete par la bryoflore ou pour Cviter le dechaussement des dalles tant par le pietinement que par l’accentuation de l’erosion qui peut s’ensuivre. Pour limiter l’acds a certains secteurs tres sensibles, la mise en place, dans les couloirs instables de branchages bien visibles ou de troncs difficiles a deplacer, pourrait constituer un obstacle nature1 de manibre a detoumer le marcheur ou le promeneur en le dirigeant vers des zones moins fragiles. 11 convient de deployer cette strategic dam des lieux parfaitement cibles. Une experience pourrait &tre menee en ce sens en m&me temps qu’une etude de comportement du public.

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J. Bardat & E Boudier CONCLUSION

L'inventaire bryologique du chaos grEseux du Moulin-des-Roches a permis de recenser sur 2,5 ha, 49 esp~ces dont cinq de grand inter& patrimonial ce qui, compte tenu de la relative homogEnEitE des stations foresti~res reprEsentEes, constitue un ensemble assez important pour la diversitE bryologique rEgionale. Cette Etude a conduit ~ l'Elaboration d'une cartographie du chaos ~ une Echelle convenable sur la base de laquelle une rEpartition gEnErale de l'ensemble du cortege bryophytique a pu Etre rEalisEe. Une analyse plus precise de la bryoflore sur plus d'une centaines de dalles a permis de prEciser l'autoEcologie des esp~ces et les processus dynamiques des communautEs auxquelles elles participent. Si, dans le contexte local, les moyens de gestion conservatoire restent limitEs, il importe de dEvelopper des moyens de suivi de l'Evolution des principaux groupements d'accueil des taxons les plus remarquables. Notre approche reprEsente h la fois un bilan global de la situation actuelle et un Etat zero de rEfErence puisque aucune Etude similaire n'avait EtE rEalisEe auparavant sur ce site avec ce niveau de precision. Des travaux rEcents rEalisEs en Suede (SjSgren, 1995) sur des bryophytes foresti~res Epiphytiques et Epilithiques, ont permis de montrer que sur une pEriode de trente ans, la composition, le recouvrement et la distribution des esp~ces, au sein d'un milieu forestier demeurE relativement stable, avaient subi des modifications tr~s significatives. Les modifications de la qualitE de l'air (pollution accrue) semblent avoir jouE un rEle determinant dans le changement de composition bryologique de ces for&s suEdoises. Compte tenu de l'augmentation du niveau pollution atmosphErique atteint en Europe occidentale et enclenchEe depuis 40 ans, on peut supposer que le stade d'Evolution des populations bryophytiques du chaos du Moulin-des-Roches correspond dEj~t ~ une phase de modification importante et qui doit se poursuivre. Pour mieux apprEhender cette Evolution en cours, il serait possible de mettre en place un protocole simple de suivi sur quelques blocs parfaitement identifies et localisEs ofa sont actuellement prEsentes la plupart des esp~ces intEressantes. I1 s'agirait de cartographier ~ une Echelle convenable les divers faces des blocs et d'y porter le contours des principales populations des esp~ces prEsentes. Si le nombre d'esp~ces est trop important pour une cartographie individuelle, des relevEs phytosociologiques pourraient ~tre envisages sur des portions restreintes des dalles (placettes permanentes). Ceci exige de limiter les prEl~vements m~me ~ des fins de determinations dans la mesure ofa l'on ne doit pas altErer le dEveloppement des population in situ. En outre, serait assure un recueil de donnEes stationnelles tr~s precis touchant au couvert forestier (structure et composition) au droit de chaque bloc faisant l'objet d'un suivi. L'intEr& d'une telle mEthode est de pouvoir rEpEter dans le temps, des mesures touchant au dEveloppement spatial relatif des diverses espbces et d'identifier les variations s'y rapportant. Le pas de temps entre deux series de mesures est plus difficile ~ fixer, mais il pourrait ~tre de l'ordre de 4 ~ 5 ans. Dans l'expErience suEdoise, le pas de temps Etait d'une trentaine d'annEes. I1 ne permet que de fixer deux Etats sans pouvoir en expliquer le processus d'expression inductif. Dans le cas d'un pas de temps plus court, diverses phases dynamiques pourraient &re observEes couplEes ~ des donnEes bioclimatiques plus prEcises. Remereiements. Cette Etude a pu ~tre rEalisEe grace ~ l'aide financi~re du Parc naturel regional de la haute vallEe de Chevreuse. Nous tenons h remercier Monsieur Pascal Dubreuil, charge de mission au Parc naturel r6gional de la haute vall6e de Chevreuse pour son aide technique. Nos remerciements vont aussi au personnel de l'Office national des For&s de la division de Rambouillet qui nous a permis de mener ~ bien cette recherche.

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du chaos greseux du Moulin-des-Roches

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