Recherche Transports Sécurité 81 (2003) 190–202 www.elsevier.com/locate/rectra
Les erreurs des conducteurs âgés Elderly drivers errors Pierre Van Elslande INRETS-MA, chemin de la Croix-Blanche, 13300 Salon-de-Provence, France Reçu le 2 septembre 2002 ; accepté le 13 mars 2003
Résumé Parmi les questions d’actualité concernant les problèmes de sécurité routière, la population des personnes âgées représente un enjeu majoritairement reconnu. Ces personnes occupent en effet une place de plus en plus importante sur la route et soulèvent un certain nombre d’interrogations relatives à leur accidentalité. Ces questions portent notamment sur leurs capacités — voire leur aptitude — à la conduite, ainsi que sur les éventuelles mesures à mettre en œuvre pour les aider dans la réalisation de leur tâche. Mais, en dehors de données relativement générales sur les problèmes auxquels ces conducteurs sont confrontés, on sait encore peu de choses sur la nature particulière des difficultés qu’ils rencontrent, des erreurs qu’ils commettent sur la route, ainsi que sur la spécificité des scénarios d’accidents dans lesquels ils sont impliqués. Pour contribuer à la compréhension de cette problématique, une recherche en profondeur a été entreprise sur la base de données détaillées recueillies sur la scène des accidents par des équipes pluridisciplinaires. Le présent article rend compte de cette analyse détaillée d’accidents de la route, comparant les mécanismes d’accidents d’un échantillon de 57 conducteurs seniors, âgés de plus de 60 ans, à ceux d’un échantillon de 335 conducteurs plus jeunes. S’appuyant sur un modèle issu de recherches antérieures (Van Elslande et al., 1997), (Van Elslande, 2000), il présente une analyse comparative des défaillances fonctionnelles (ou erreurs), auxquelles ces différents conducteurs ont été confrontés, des éléments explicatifs de ces défaillances et des contextes dans lesquelles elles interviennent. Les principaux résultats attestent d’une part d’une certaine spécificité des erreurs caractérisant les conducteurs âgés par rapport à ceux qui le sont moins (e.g. défaillances de type perceptif, évaluatif, dépassement des capacités cognitives). Ils permettent d’autre part de souligner la complexité des phénomènes qui les sous-tendent. Ils conduisent enfin à questionner l’hypothétique homogénéité des mécanismes d’accidents caractérisant cette population. © 2003 Publié par Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS pour l’INRETS. Abstract In the area of road safety, the elderly population is widely recognised as being of topical concern. This group is increasingly present on the roads and a number of questions have been raised concerning their accident-proneness. The issues relate to their driving skills — or even their aptitude to drive — as well as possible measures which could be implemented to help them perform the driving task. But apart from relatively general data on the problems they face, little is known about the specific nature of their difficulties and driving errors, nor about the scenarios of the accidents they are involved in. We have undertaken in-depth research to improve our understanding in this area, using detailed data gathered by multidisciplinary teams at accident scenes. The present paper describes this analysis of road traffic accidents and compares the accident mechanisms for a sample of 57 senior drivers (aged over 60 years) to those for a sample of 335 younger drivers. Using a model developed in the course of earlier research (Van Elslande et al., 1997), (Van Elslande, 2000), it presents a comparative analysis of the functional breakdowns (or errors) that affect the different groups of drivers and describes the explanatory factors for these breakdowns and the contexts in which they occur. The main results demonstrate that certain types of error are more typical of elderly drivers than of younger drivers (e.g. failures in perception and assessment, exceeding of cognitive capacities). They also underline the complexity of the underlying phenomena. Lastly, they provide grounds for questioning the hypothesis that the accident mechanisms found among this population are homogeneous. © 2003 Publié par Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS pour l’INRETS. Mots clés : Personnes âgées ; Erreur humaine ; Conduite automobile ; Accident ; Perception ; Cognition Keywords: Elderly people; Human error; Car Driving; Accident; Perception; Cognition
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[email protected] (P. Van Elslande). © 2003 Publié par Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS pour l’INRETS. doi:10.1016/S0761-8980(03)00029-3
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1. Introduction Les sources démographiques nous alertent sur le vieillissement progressif de nos sociétés développées, qui se traduit par une augmentation de la proportion des conducteurs âgés. Les bilans de type épidémiologique en sécurité routière les présentent comme des usagers à risque. Ils constituent une cible et un enjeu reconnus dans le domaine de la prévention des accidents de la circulation. Mais pour aller plus avant dans la définition de mesures qui leur soient adaptées, il s’agit au préalable de mieux connaître les particularités de cette population du point de vue de l’accidentologie, ainsi que des multiples facteurs susceptibles d’y correspondre.
2. Problématique En général, pour plus de commodité, l’âge est mesuré chronologiquement, c’est-à-dire en nombre d’années après la naissance nous rappelle — non sans humour — un rapport de l’OCDE (1985). Il est toutefois difficile de définir de façon satisfaisante à partir de quand on devient un conducteur âgé. D’une part à cause de la grande variabilité interindividuelle inhérente à ce groupe d’âge, qui verra certains conducteurs atteindre ce seuil théorique en milieu de vie, alors que d’autres ne l’auront pas atteint à cent ans (HakamiesBlomquist, 1998). D’autre part en raison de l’évolution des frontières avec le temps, en termes d’espérance de vie, de santé, et en liaison avec les modes de vie, les activités pratiqués, etc. Au-delà du problème de définition d’un seuil caractérisant la population des personnes âgées, globalement lié au décalage entre l’âge biologique et l’âge fonctionnel, ces éléments soulèvent la question de l’homogénéité de cette population, du point de vue à la fois de ses caractéristiques spécifiques et de leurs conséquences sur son accidentabilité. Il s’agit en outre de se méfier de la tendance à opérer implicitement un glissement de sens entre la problématique de l’âge et celle de la pathologie ou du handicap1. Le surrisque des personnes âgées dans le domaine routier prête également à débat. Les études s’accordent à considérer qu’elles ont moins d’accidents per capita2, mais plus d’accidents au kilomètre parcouru que l’ensemble des conducteurs, même si ce risque tend à diminuer (voir (Fontaine, 2003) dans le premier tome de ce numéro spécial). Elles représentent en 2000 17 % de l’ensemble des personnes tuées sur les routes en France (ONISR, 2001). De nombreux auteurs soulignent toutefois certains biais potentiels dans les analyses statistiques, qu’ils fassent référence à un effet de cohorte, ou à un biais d’échantillonnage lié à la plus grande vulnérabilité physique de ces personnes qui les rend plus susceptibles d’être comptabilisées dans les bases de données, en cas d’accident. 1
Comme le rappelle avec beaucoup d’à-propos Hakamies-Blomqvist (1998), le vieillissement est somme toute un processus... normal. 2 Critère largement reconnu par les compagnies d’assurance.
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En ce qui concerne les pistes d’explication de ce risque en termes de facteurs humains, les travaux montrent une évolution, concomitante de l’évolution des modèles en psychologie. Centrées dans les années 1970 sur l’influence du fonctionnement sensoriel et moteur, les études s’attachent aujourd’hui plutôt à l’investigation du fonctionnement attentionnel et cognitif. Il est évident que les systèmes biologiques de réception et de traitement de l’information ne présentent pas un fonctionnement stable tout au long de la vie. L’âge est l’une des principales sources de variations structurelles qui modulent l’état fonctionnel de l’organisme et conditionnent sa capacité à agir et réagir (Quéinec et al., 1983). Conduire étant une activité complexe qui requiert des habiletés perceptives, cognitives et motrices, une baisse de ces capacités — notamment en ce qui concerne la vision, l’attention, la motricité — est considérée comme concomitante d’un accroissement du risque d’implication dans les accidents pour les conducteurs âgés (McGwin et al., 1998). Mais en matière de circulation routière, l’existence de phénomènes d’adaptation a été mise en évidence chez les personnes âgées, qui répondent à la déficience de certaines aptitudes en modifiant les caractéristiques de leur mobilité et en évitant de se placer dans des conditions critiques (Pauzié et Alauzet, 1991). La thématique des conducteurs seniors recouvre donc une problématique complexe qui fait appel à différents domaines de recherche, tant en gérontologie qu’en accidentologie. Différents articles de ce numéro spécial Conduite et vieillissement analysant d’une part l’accidentologie statistique de cette population et d’autre part les variables psychophysiologiques susceptibles d’y être liées, nous chercherons ici à apporter la contribution de l’Étude détaillée des accidents de la route (EDA) à la question de la spécificité des erreurs et des difficultés auxquelles ces conducteurs sont sujets, ainsi qu’à l’investigation des conditions qui expliquent de telles défaillances. Que l’on cherche à mettre en évidence un surrisque caractérisant les conducteurs plus âgés que les autres, ou bien un risque différent, il s’agit ainsi d’approfondir la connaissance sur les mécanismes des problèmes sécuritaires spécifiques qu’ils rencontrent en conduisant, notamment pour envisager de définir des solutions adaptées à ces problèmes. 3. La méthode de l’étude détaillée des accidents de la route (EDA) Les exploitations des fichiers d’accidents — classiquement issus des procès-verbaux de police et de gendarmerie — s’accordent à souligner une certaine spécificité des circonstances d’occurrence des accidents impliquant des conducteurs âgés (e.g. intersection, changement de direction, insertion). Cependant, ce type de données se prête mal à une analyse explicative des processus en jeu et ne rend compte que partiellement des facteurs en cause, au-delà d’une évaluation des risques relatifs et d’une définition d’enjeux. On sait encore peu de choses sur la nature particulière des difficultés que ces personnes rencontrent, sur les mécanismes
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responsables de l’inefficacité de leurs réponses à ces difficultés, ni sur la spécificité des scénarios d’accidents dans lesquels elles sont impliquées. De nombreuses études détaillées d’accidents ont cherché dans le passé à relier l’approche causale à une démarche plus explicative, centrée sur les mécanismes de l’accident (Fell, 1976), (Treat et al., 1979). Ces études sont intéressantes dans la mesure où elles sont fondées à la fois sur l’analyse des interactions entre les composantes du système et sur un modèle général de fonctionnement de l’opérateur (de type perception-décision-action). Une critique, soulignée par Saad (1987), qu’on peut toutefois leur adresser réfère au caractère encore trop général du niveau d’analyse adopté, sans référence précise aux situations de conduite et au type de tâche réalisée par le conducteur au moment de l’accident. Les EDA actuelles, comme celles qui sont réalisées à l’INRETS-MA, ont pour objectif le développement de la connaissance sur les mécanismes générateurs des accidents. Il s’agit, à partir d’un recueil de données de qualité, spécifiquement établi dans cet objectif, de reconstruire et de décrire le déroulement de l’accident, d’expliciter les enchaînements de causalités qui rendent compte de ce déroulement et d’identifier, parmi les caractéristiques des usagers, des véhicules et des infrastructures, les facteurs dont le contrôle permettrait l’action de prévention. Ceci est rendu possible par le recueil d’un maximum de données centrées sur le déroulement de l’accident, sur la scène même de l’accident, par une équipe pluridisciplinaire intervenant en urgence, en coordination avec les secours. Ce premier recueil porte sur le conducteur (entretiens menés par un psychologue), le véhicule et l’infrastructure (relevé de traces, photos de déformations, plans). Une première esquisse de reconstruction oriente une seconde phase d’approfondissement du recueil, qui porte sur l’itinéraire, les caractéristiques d’infrastructure et d’environnement, le contrôle technique du véhicule et sur une série de variables susceptibles d’expliciter le rôle du conducteur dans le déroulement de l’accident. En ce qui concerne le conducteur, le recueil standard porte sur un ensemble de variables relatives à son état civil, son état de santé, son expérience de conduite, les circonstances et la planification de son déplacement, sa perception du déroulement des événements, etc. Dans le cadre d’études thématiques, ce questionnement peut être adapté en fonction du problème ciblé. L’analyse de ces données recueillies s’appuie sur : • une approche système qui met l’accent sur les interactions entre l’impliqué, son véhicule et l’environnement ; • un modèle cinématique permettant la reconstruction et le paramétrage, dans le temps et l’espace, de la dynamique du phénomène ; • un modèle du fonctionnement humain qui exploite les formalismes de la psychologie cognitive ; • un découpage en phases — de conduite, de rupture, d’urgence, de choc — du déroulement de l’accident (Ferrandez et al., 1995).
Le résultat de cette démarche est une collection de cas d’accidents analysés cliniquement, intégrant un diagnostic sur les mécanismes et les facteurs concourant au déclenchement, au déroulement et aux conséquences de ces accidents. Un recoupement de ces monographies sur la base de différents critères de sélection permet la mise en place d’études thématiques comme celle qui est présentée ici.
4. Cadre d’analyse : erreurs humaines et conditions de leur production L’exploitation de plus de quatre cents situations accidentelles extraites de cette base EDA a permis l’élaboration d’un cadre d’analyse et de classification des erreurs humaines (Van Elslande et al., 1997) au travers desquelles s’expriment les dysfonctionnements du système de circulation. Dans la logique des travaux psycho-ergonomiques, l’erreur — et notamment l’erreur non récupérée3 — est analysée comme le produit non désiré de la confrontation d’un opérateur à une tâche, qui fait interagir des déterminants internes, propres à l’opérateur, avec des déterminants externes correspondant au contexte de réalisation de son activité. Sous cet angle d’analyse, la composante humaine de l’erreur est appréhendée en tant que défaillance fonctionnelle, c’est-à-dire l’échec de l’une ou l’autre des fonctions (perceptive, cognitive, motrice) qui permettent habituellement à l’opérateur de réguler son activité de manière adaptative. Cet échec marque une rupture entre une situation en marche normale et une situation en marche dégradée. On verra ainsi l’accident globalement comme une conséquence non désirée d’une action (ou d’une non-action) réalisée par l’opérateur, relativement à l’environnement de sa tâche. La défaillance fonctionnelle ne sera pas envisagée en tant que cause de la dégradation de la situation, mais comme la manifestation d’un dépassement des capacités d’ajustement du conducteur aux dysfonctionnements plus ou moins latents du système de circulation. Ces dysfonctionnements résident dans les caractéristiques et les interactions multiples qui s’instaurent entre ses composants (conducteurs/véhicules/infrastructures), autant d’éléments dont les paramètres pourront dans certains cas obérer l’objectif adaptatif des fonctions mises en œuvre. Toutefois, pour dépasser le stade de la simple description factuelle, une fois identifiées, de telles défaillances de l’opérateur doivent être resituées par rapport aux mécanismes de leur production. Comme l’indique Rasmussen (1990), les erreurs ne doivent pas être étudiées comme des fragments séparés d’une catégorie de comportements, mais comme un ensemble de données contribuant à l’analyse plus globale du contrôle cognitif de l’opérateur dans les systèmes complexes. Dans cet objectif de recherche des fondements psychologiques qui en autorisent l’émergence, l’analyse des accidents de la route devrait tirer profit d’une intégration dans un cadre 3 L’erreur récupérée pouvant faire partie du mécanisme d’adaptation de l’opérateur à une tâche complexe (Amalberti, 2001).
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conceptuel. Un tel cadre a été construit sur la base d’une particularisation des modèles classiques d’analyse des erreurs issus de la psychologie ergonomique et cognitive (Rasmussen, 1986), (Reason, 1993), en les adaptant aux spécificités inhérentes à l’activité de conduite automobile et aux difficultés qui y correspondent (complexité, variabilité des situations, faible définition formelle des procédures, contraintes temporelles et dynamiques, rôle crucial de l’anticipation, etc.). Le modèle de classification établi permet ainsi de faire le lien entre les grandes étapes fonctionnelles de l’activité humaine telles qu’elles sont décrites dans la littérature et les types de défaillances spécifiques qui correspondent aux particularités des processus engagés dans la dégradation des situations de conduite (Van Elslande, 2000). Il rend compte d’une vingtaine de défaillances impliquées aux différentes étapes de la réalisation de l’activité. Ces défaillances fonctionnelles sont réparties en six catégories : les cinq premières réfèrent à l’une ou l’autre des différentes étapes de traitement mises en œuvre dans la logique d’un modèle séquentiel (perception, diagnostic, pronostic, décision, exécution de l’action4) ; la dernière correspond à une altération de l’ensemble de cette chaîne fonctionnelle, identifiée dans certains types d’accidents (pour une présentation détaillée, voir (Van Elslande et al., 1997)). Par ailleurs, une fois la classification réalisée sur cette base typologique, ce modèle permet de réintroduire les défaillances fonctionnelles identifiées pour chaque accident au sein de scénarios typiques de dysfonctionnements qui expliquent le mécanisme de leur production. Ces scénarios décrivent la genèse globale de l’erreur, selon un certain nombre de paramètres fédérateurs en amont et aval de la défaillance, tels que la tâche en cours au moment de la rencontre d’une perturbation, les caractéristiques des éléments permettant d’expliquer l’émergence de la défaillance fonctionnelle en cause, l’événement critique résultant de cette défaillance, décrivant la mise en œuvre (ou la poursuite) d’une stratégie de conduite incompatible avec les paramètres de l’interaction rencontrée. L’intérêt de la construction de ces scénarios types consiste à sortir du cadre de la simple monographie (difficilement généralisable) tout en conservant la logique des processus sous-tendant les accidents, ce que permet difficilement une analyse en termes de proximité statistique (Brenac et Mégherbi, 1996). Permettant d’agréger différents cas d’accidents qui s’élaborent selon un processus similaire, de tels scénarios types permettent ainsi de rendre compte de logiques plus ou moins génériques qui conduisent à l’erreur et notamment à l’accident. En effet, à être accidentel, un tel événement n’en comporte pas moins des régularités dans ses conditions de production et son déroulement, qu’une appro-
4 Il faut préciser que le caractère séquentiel de cette grille d’analyse des défaillances ne sous-entend en aucun cas un fonctionnement séquentiel du conducteur (Van Elslande, 2003). Il s’agit bien d’un modèle d’analyse des dysfonctionnements et non d’un modèle de fonctionnement de l’opérateur.
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che scientifique permet de repérer. Au-delà de la connaissance, le repérage de telles régularités constitue un atout pour la définition d’actions à la fois génériques et ciblées, qui soient adaptées aux problèmes posés et aux conditions dans lesquelles ils sont rencontrés. Par une comparaison des conditions et des mécanismes caractérisant les accidents de la base EDA impliquant ou non des conducteurs âgés, nous chercherons à montrer la spécificité des erreurs accidentogènes définissant ces derniers, des situations de conduite dans lesquelles elles surviennent et des facteurs qui les conditionnent. Par ailleurs, le regroupement des monographies d’accident sous forme de scénarios types devrait à terme permettre de contribuer à la définition d’orientations d’actions. La mise en évidence de tels scénarios de production des défaillances fonctionnelles des conducteurs âgés pourra ainsi constituer un apport important pour la recherche de contre-mesures adaptées à leurs difficultés, que ces actions correctrices portent sur le conducteur lui-même par le biais d’une formation adaptée, ou bien sur l’environnement de sa tâche, notamment par le développement d’aides embarquées qui tiendraient compte de la spécificité des problèmes rencontrés par cette population de conducteurs.
5. Résultats : les erreurs de conduite en fonction de l’âge Un échantillon de 57 dossiers d’accidents impliquant un conducteur de plus de 60 ans (moyenne = 69,2 ; écart type = 6,12) a donc été extrait de la base EDA. Les données correspondantes ont été analysées en termes de conditions d’occurrence, de défaillances fonctionnelles et d’éléments explicatifs, selon la logique définie plus haut. Il faut préciser que chacun de ces accidents a été étudié par (au moins) deux experts en accidentologie clinique et que tous l’ont été dans une logique d’analyse globale — c’est-à-dire sans thématique spécifique définie a priori — ce qui garantit une absence de biais quant à la façon d’appréhender différentiellement les défaillances des conducteurs âgés. La présente section rend compte des résultats de cette analyse, en confrontation avec les données caractérisant un échantillon de 335 conducteurs accidentés de moins de 60 ans. Quelques scénarios types, parmi les plus représentés dans l’échantillon des conducteurs seniors, seront exposés. 5.1. Tâches de dysfonctionnement La tâche de dysfonctionnement correspond à l’activité de conduite que l’usager cherchait à accomplir dans la situation de pré-accident (Malaterre, 1990), c’est-à-dire avant qu’un dysfonctionnement ne se concrétise, ainsi que les exigences liées à la réalisation de cette tâche actuelle du point de vue de la rencontre d’une interaction spécifique avec un autre composant du système (un autre usager de la route, un type de lieu spécifique, etc.).
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Fig. 1. Pourcentage des différentes catégories de tâches de dysfonctionnement pour les conducteurs âgés de plus de 60 ans et les autres conducteurs.
Une analyse globale de cette variable (Fig. 1) montre que dans l’échantillon étudié, les conducteurs âgés rencontrent, comparativement aux autres, beaucoup plus de problèmes dans les situations de cisaillement de flux en intersection non prioritaire et légèrement plus durant la réalisation de manœuvres particulières, notamment les changements de direction vers la gauche. Signalons que la rubrique circulation stabilisée recouvre l’ensemble des tâches de type conduite en file, négociation de virages, etc. qui rendent beaucoup moins compte des erreurs de ces conducteurs. Si un tel constat n’a rien de très novateur, il atteste néanmoins de la cohérence de cet échantillon avec les données statistiques relatives à l’accidentalité de cette population (Preusser et al., 1998). 5.2. Défaillances fonctionnelles La défaillance fonctionnelle caractérise l’incapacité momentanée d’une fonction — du point de vue des processus perceptifs, cognitifs et psychomoteurs impliqués — engagée dans la tâche de dysfonctionnement et qui va empêcher sa réalisation correcte. Du fait de l’intervention de cette défaillance, une situation de conduite préalablement stable va s’orienter vers une situation d’accident. Nous donnons la préférence à la notion de défaillance plutôt qu’à celle d’erreur, d’une part pour se démarquer des erreurs récupérées dont le caractère nuisible est loin d’être prouvé (Amalberti, 2001), d’autre part pour intégrer dans l’analyse les déficiences relatives aux capacités plus générales de l’individu (perte de conscience, altération ou dépassement des capacités sensori-motrices et cognitives) que vont recouvrir certaines dégradations fonctionnelles (défaillances globales). C’est donc une inadaptation momentanée d’une fonction engagée que recouvre la notion de défaillance telle qu’elle est ici utilisée, définie en tant que résultante d’une distorsion entre la situation concrète et le traitement (au sens large) qu’en a fait le conducteur à une certaine étape fonctionnelle. Ce paramètre caractérise donc le décalage entre l’issue de la séquence fonctionnelle engagée par l’individu et le déroulement concret des événements et ce, au moment de l’étape charnière de l’accident : la rupture entre une situation de conduite normale et une situation d’urgence, c’est-à-dire au
Fig. 2. Pourcentage des différentes catégories de défaillances pour les conducteurs âgés de plus de 60 ans et les autres conducteurs.
moment où une perturbation imprévue fait irruption dans la scène de conduite. Si l’on cherche à qualifier maintenant les catégories d’erreurs qui sont les plus fréquemment commises, l’examen de la Fig. 2 fait ressortir — toujours comparativement aux autres conducteurs de l’échantillon — une plus forte proportion de défaillances dans le domaine de la perception et du diagnostic, ainsi qu’un pourcentage beaucoup plus important de défaillances globales, défaillances qui correspondent à une perturbation de l’ensemble de la chaîne fonctionnelle impliquée dans l’activité de conduite (v2 = 11,47 ; p > 0,004). Une analyse plus détaillée de ces données en termes de types d’erreurs fait ressortir les points suivants (Fig. 3). 5.2.1. Les défaillances de perception Sur le plan perceptif 5, les défaillances les plus marquées concernent tout d’abord la saisie d’information focalisée sur une composante partielle de la situation (14 % de l’ensemble des erreurs). Cette défaillance, qui trouve son origine dans l’affectation des ressources attentionnelles aux différents paramètres de la situation, amène ces conducteurs à diriger toute leur attention vers un aspect limité de la scène (une recherche directionnelle, un problème potentiel identifié), au détriment d’une autre variable qu’ils vont négliger et qui va les amener dans une séquence accidentelle. Scénario type P2a : Focalisation sur un problème directionnel. En traversée d’intersection ou en manœuvre de bifurcation, le conducteur cherche une destination sur un itinéraire mal connu, que la signalisation directionnelle et la lisibilité des lieux ne lui permettent pas d’identifier aisément. Se focalisant sur son problème directionnel, il engage sa manœuvre sans plus prendre d’information sur le trafic environnant. Un second type d’erreur perceptive caractéristique de cette population correspond à la recherche sommaire/ 5
Au sens large de l’issue de la prise d’information.
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Fig. 3. Pourcentage des différents types de défaillances pour les conducteurs âgés de plus de 60 ans et les autres conducteurs
précipitée d’information (8,8 %) au moment de la réalisation d’une manœuvre, notamment dans les situations à forte contrainte telles que les traversées d’intersection rendues difficiles par la complexité des aménagements et l’intensité du trafic. Scénario type P3c : Recherche d’information précipitée. Le plus souvent en situation de traversée d’intersection difficile du fait de la configuration des lieux et de l’intensité du trafic, les conducteurs affectent une contrainte de temps à l’engagement de leur manœuvre de traversée (sentiment d’inconfort, de gêne pour autrui). Ils opèrent une recherche d’information précipitée qui ne correspond pas aux exigences de la tâche (contraintes environnementales) et ne leur permet donc pas d’identifier un obstacle potentiel. Les autres défaillances perceptives (non-détection par absence de visibilité ou suite à une interruption de la saisie d’information) se retrouvent dans des proportions similaires pour l’ensemble des conducteurs, indépendamment de l’âge. 5.2.2.. Les défaillances de diagnostic Au niveau du diagnostic porté sur la situation, les problèmes qui singularisent le plus les accidents des conducteurs seniors font en premier lieu référence à l’erreur d’évaluation d’un créneau d’insertion dans le trafic (10,5 %). Cette erreur d’estimation des paramètres distance/temps qui les séparent des autres véhicules intervient, soit en liaison avec une certaine précipitation de la manœuvre réalisée (difficulté d’ob-
tention d’un créneau, sentiment d’inconfort et de gêne pour autrui), soit en relation avec le caractère routinier de cette manœuvre qui les amène à ne pas adapter leur mode de fonctionnement habituel aux exigences de la situation présente (par exemple, un trafic plus intense). Scénario type T2b : Mauvaise évaluation d’un créneau liée à une faible attention portée à la manœuvre. Ce qui caractérise les conducteurs impliqués dans ce type d’accident, c’est la grande familiarité qu’ils ont de la manœuvre qu’ils cherchent à réaliser, notamment sur des trajets routiniers. Souvent combinée avec une faible vigilance liée à la fatigue, cette familiarité les amène à couper la trajectoire d’un véhicule faute d’avoir accordé assez d’attention à la vitesse de rapprochement de ce véhicule qu’ils ont pourtant détecté. Le second type de dysfonctionnement de diagnostic qui caractérise l’échantillon étudié correspond à une mauvaise compréhension du fonctionnement d’un site routier (8,8 %), notamment d’une intersection complexe, atypique et peu lisible. Soit qu’ils ne connaissent pas les lieux, soit qu’ils n’identifient pas un changement apporté à la configuration du carrefour depuis leur dernier passage, les conducteurs ne comprennent pas qu’ils perdent la priorité et s’engagent sur la trajectoire d’un usager prioritaire. Un dénominateur commun à ces deux circonstances pourrait correspondre à une certaine forme de rigidité dans l’analyse que les conducteurs opèrent sur les aménagements.
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Scénario type T3a : Mauvaise compréhension du site entraînant un non-arrêt en intersection. Circulant à l’approche d’une intersection complexe, peu lisible et dont la présignalisation ne rend pas bien compte, les conducteurs ne comprennent pas où ils doivent s’arrêter et traversent dans la foulée une première voie sur laquelle un véhicule prioritaire les percute. La surreprésentation des conducteurs seniors dans le domaine des problèmes de détection et d’estimation, constatée dans cette analyse à partir de données issues des EDA, est congruente avec les résultats issus de l’analyse d’un échantillon de procès-verbaux représentatif sur le plan national (Malaterre et al., 1991), (Fontaine, 2003, dans le premier tome de ce numéro spécial). 5.2.3. Les défaillances généralisées Mais c’est dans le domaine des défaillances globales que ces conducteurs se démarquent le plus du reste de notre échantillon, avec 19,3 % des défaillances renvoyant à un dépassement des capacités cognitives qui se manifeste par une désorganisation générale de l’activité au moment de la rencontre d’une difficulté au cours du trajet. Les circonstances des accidents mettent en scène des usagers au comportement hésitant, qui vont réaliser des manœuvres surprenantes sur la trajectoire d’un autre véhicule, voire des manœuvres aberrantes telles que s’arrêter en section courante ou au milieu d’une intersection pour lire un panneau de signalisation, ou prendre une route ou une autoroute à contresens suite à une erreur de trajet inexplicable... C’est un type de défaillance qui tend à se retrouver chez les conducteurs les plus âgés de l’échantillon. Scénario type G3a : Dépassement des capacités de traitement en situation d’interaction avec le trafic. S’ils sont arrivés sans encombre jusqu’au point de l’accident, les conducteurs semblent avoir été complètement dépassés au moment de la rencontre d’une interaction avec d’autres véhicules en intersection. Ces conducteurs n’ont pas été à même d’effectuer un séquençage correct des opérations à mettre en œuvre. Toutes les phases nécessaires à la réalisation d’une telle manœuvre étant affectées, les conducteurs engagent en fin de compte leur manœuvre sur la trajectoire d’un usager prioritaire, de façon peu explicable. On notera enfin la faible contribution des défaillances de type violation6, qui va dans le sens des résultats de Reason (1993) montrant que si le taux d’erreurs reste plus ou moins stable au long de l’existence, les violations tendent à diminuer à mesure que l’âge augmente. 5.3. Éléments explicatifs Les éléments explicatifs correspondent aux différentes variables caractérisant les différents composants (homme, véhicule, environnement) du système qui ont favorisé l’émergence d’une défaillance fonctionnelle. Il faut préciser 6 Au sens de la transgression délibérée d’une règle de sécurité au moment de la prise de décision d’engagement d’une manœuvre.
Fig. 4. Pourcentage des catégories d’éléments explicatifs des défaillances pour les conducteurs âgés de plus de 60 ans et les autres conducteurs.
que la liste de ces éléments ne constitue pas une nomenclature de l’ensemble des facteurs accidentogènes identifiables dans les études d’accidents. Elle concerne spécifiquement l’explication de l’échec d’une étape fonctionnelle au moment de la rencontre d’un incident qui fait basculer le conducteur d’une situation où tout se déroule normalement vers une situation où il est confronté à événement imprévu. Ne figurent notamment pas les éléments qui interviennent en situation d’urgence et qui auront pour effet de limiter l’efficacité de la manœuvre d’évitement entreprise. Ces éléments explicatifs des défaillances peuvent se répertorier selon qu’ils dépendent du conducteur lui-même et de l’activité qu’il développe (éléments endogènes) ou bien de l’environnement de la tâche qu’il cherchait à réaliser (éléments exogènes). Précisons qu’un tel découpage ne sous-tend ni une analyse de type monocausale7, ni une attribution causale dichotomique cherchant à renvoyer la faute à l’homme ou à une composante externe. On verra que c’est majoritairement l’interaction de ces deux ordres d’éléments qui conditionne l’émergence d’une défaillance (Fig. 6). Les éléments endogènes se répartissent selon qu’ils caractérisent : un état psychologique ou physiologique plus ou moins stable, lié notamment à une dégradation de la vigilance (endormissement, sous influence de psychotropes, etc.) ou de l’attention (distraction, préoccupation, etc.) ; une variable liée à l’expérience de la conduite, du trajet, du véhicule ; ou qu’ils renvoient à un paramètre particulier caractérisant les conditions de réalisation du déplacement (contrainte de temps, problème directionnel, etc.). Les éléments exogènes sont essentiellement répartis en deux rubriques. La première renvoie aux conditions spécifiques de circulation : problèmes d’interaction avec l’environnement et le trafic (difficulté d’obtention d’un créneau, manœuvre d’autrui atypique, etc.). La seconde rend compte des problèmes relatifs aux infrastructures routières : aménagement et signalisation (visibilité, lisibilité, praticabilité).
7 On relève en moyenne l’intervention de trois à cinq éléments pour expliquer une défaillance.
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.Fig. 5. Types d’éléments explicatifs les plus représentés (88 %) chez les conducteurs âgés et part que prennent ces éléments chez les autres conducteurs (45 %)
Une analyse comparative de l’implication de ces éléments (Fig. 4) fait ressortir le poids des variables liées à l’état psychophysiologique du conducteur, ainsi que des variables liées à l’expérience de conduite dans la genèse des erreurs chez les plus de 60 ans (v2 = 11,70 ; p > 0,02). Un examen plus détaillé de l’influence des types de facteurs les plus contributifs des défaillances fonctionnelles des personnes âgées (Fig. 5) fait tout d’abord ressortir, au titre des variables d’état, les problèmes de vigilance, d’attention et de distraction (11 %), ainsi que la lenteur de réaction (9,8 %), variable qui démarque tout particulièrement ces conducteurs des autres. Pour ce qui concerne les variables liées à l’expérience, ressortent des éléments tels que la pratique épisodique de la conduite (8,6 %) et la méconnaissance des lieux (8 %). Pour les variables liées aux conditions internes de réalisation de la tâche, l’exécution d’une manœuvre routinière en mode automatique8 (6,7 %), ainsi que les
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Ce qui les amène notamment à développer des attentes trop fortement orientées vers une certaine évolution des situations (Van Elslande et Alberton, 1997).
problèmes d’orientation directionnelle (6,7 %) apparaissent au premier plan. Parmi les éléments exogènes auxquels cette population est plus sensible, on relève le poids des caractéristiques d’infrastructure telles que les problèmes liés à la complexité du site, à la lisibilité, à la signalisation (8 %) et les problèmes de visibilité (6,7 %). Ces derniers n’ont toutefois pas plus de poids pour ces conducteurs que pour les autres. Pour les éléments relatifs au trafic environnant ressortent, mais toujours en proportion égale à celles des autres, le caractère atypique du comportement d’un autre conducteur — signaux émis, manœuvre engagée (8 %) — et, de façon plus spécifique, la pression du trafic ou l’effet d’entraînement (4,3 %), ainsi que la difficulté d’obtenir un créneau de traversée (4,3 %). Cette décomposition montre globalement que les facteurs de défaillance des conducteurs âgés ne sont pas ceux qui expliquent le plus les défaillances des autres conducteurs. Mais comme indiqué plus haut, plusieurs éléments de différents ordres se combinent le plus souvent pour expliquer la genèse d’une défaillance fonctionnelle. On notera toutefois
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Fig. 6. Contribution relative des éléments aux défaillances selon leur caractère endogène et/ou exogène.
que, comparativement aux autres, les conducteurs âgés de notre échantillon — et notamment les plus âgés d’entre eux — montrent une légère tendance à produire plus d’erreurs dont les origines sont uniquement endogènes et moins d’erreurs dont les origines sont seulement exogènes (Fig. 6). Cette tendance est notamment à relier avec les défaillances de type dépassement des capacités, qui s’expliquent le plus souvent de façon tautologique par des variables liées au conducteur. La différence observée ne permet toutefois pas de conclure à une significativité statistique (v2 = 2,47 ; non significatif). Une analyse sur un échantillon plus vaste devra être réalisée pour mieux appréhender cet aspect. 6. Discussion Une analyse globale de la genèse des défaillances fonctionnelles qui spécifient les accidents d’un échantillon de 57 conducteurs de plus de 60 ans étudiés à partir de données EDA fait émerger une pluralité dans les mécanismes qui les déterminent, pluralité qui questionne l’homogénéité supposée de cette population de référence. Nous apporterons ainsi un distinguo entre deux grands ordres de mécanismes accidentologiques caractérisant cette population, l’un faisant référence à des défaillances qui renvoient au domaine des capacités de l’individu, l’autre à des défaillances qui se posent en termes de fonctions. Un premier ensemble fait ainsi intervenir un dépassement des capacités cognitives face à une difficulté rencontrée, conduisant à une désorganisation de l’activité, qui se diffuse sur l’ensemble de la chaîne fonctionnelle impliquée dans la conduite et qui amène notamment la réalisation de manœuvres aberrantes. Ce type de défaillance correspond à près de 20 % des problèmes accidentogènes identifiés chez les personnes (les plus) âgées, contre moins de 2 % chez les autres. Le cadre explicatif permettant de rendre compte de ce premier sous-groupe d’accidents des conducteurs seniors pourrait majoritairement faire référence à une problématique de type dégradation mentale, correspondant à une certaine forme de pathologie caractéristique d’une partie de cette sous-population (Hakamies-Blomquist, 1998). Et, de fait, c’est en majeure partie vers ce sous-groupe que s’orientent la plupart des travaux réalisés sur le sujet des conducteurs âgés.
Cependant, un second ensemble de mécanismes accidentogènes — plus complexes — émerge de l’analyse des cas. Les défaillances des fonctions de prise d’information et des fonctions liées au diagnostic porté sur la situation, qui spécifient ce groupe de conducteurs, soulèvent ainsi les questions suivantes. • À la base des erreurs perceptives de type saisie d’information focalisée sur une composante partielle de la situation (14 %), on peut dénoter en premier lieu une difficulté à intégrer différentes sources d’information en concurrence. La littérature fait ainsi état d’un déclin de la capacité à traiter plusieurs données simultanément, en liaison avec le vieillissement cérébral et la baisse de capacité du canal de traitement de l’information qu’il engendre (OCDE, 1985). Mais on pourra également relever, en amont de cette défaillance, un problème de jugement sur l’importance relative à accorder à ces différentes sources. La question du diagnostic (au sens des fonctions d’évaluation et de compréhension) semble ainsi globalement constituer un problème-clé pour cette population. • Les erreurs de type recherche précipitée d’information (8,8 %) et une partie des erreurs d’évaluation de créneau d’insertion dans le trafic (qui totalisent 10,5 % des accidents) se rejoignent sur le plan des facteurs explicatifs liés au sentiment d’inconfort (pour eux-mêmes) et de gêne (pour autrui). Les variables cognitives n’entrent donc pas seules en ligne de compte au titre des éléments qui expliquent la spécificité des difficultés des personnes âgées. • Une seconde fraction des erreurs d’estimation de créneau repose, de la même façon que les erreurs de compréhension des aménagements (8,8 %), sur une certaine forme de rigidité des représentations mentales, s’appuyant sur l’expérience acquise. Ce mécanisme intervient soit dans le cadre de la réalisation d’une manœuvre routinière sur un mode plus ou moins automatique, soit au contraire vis-à-vis d’un lieu inconnu, mais trop fortement analysé sur le mode de l’analogie. L’absence d’instanciation des représentations aux caractéristiques de la situation actuelle, explique majoritairement l’inadaptation des traitements opérés dans ces situations. • La lenteur de prise de décision et d’action est une variable qui surdétermine une grande partie des dysfonctionnements survenant en intersection. Un point intéressant tient à ce que cette variable intervient dans les situations où le conducteur perd, outre la priorité, la possibilité d’exercer un contrôle sur les paramètres de son environnement, notamment sur la capacité de réguler la vitesse de déroulement des processus et des interactions rencontrées. De nombreux travaux ont mis en évidence les comportements adaptatifs développés par les conducteurs âgés, qui tentent notamment de compenser les faiblesses dont ils ont conscience par une prudence accrue (Rimmö & Hakamies-Blomquist, 2002). Parmi les conduites d’adaptation mises en œuvre pour pallier les difficultés qu’ils ressentent, la modification la plus flagrante est la réduction de la vitesse de déplacement choisie (OCDE, 1985). Cependant, leur adaptation comportementale, pour efficiente qu’elle soit dans certaines circonstances,
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pourrait en contrepartie les pénaliser dans d’autres situations, celles notamment où ils ne sont plus en mesure d’exercer une régulation sur le décours temporel des événements (traversée d’axes rapides, à forte intensité de trafic)9. La mise en œuvre d’une conduite précautionneuse leur permet d’avoir moins d’accidents de type perte de contrôle et de type choc arrière que les autres conducteurs (OCDE, 1985), (Barham & Oxley, 1992). Mais elle s’actualiserait en excès de prudence, lorsque la personne âgée n’a pas la possibilité d’exercer un contrôle sur les paramètres cinétiques de son environnement, ce qui contribuerait à expliquer — en complément des paramètres déjà évoqués — le surcroît de chocs en situation de cisaillement de flux avec perte de priorité. 7. Conclusion La littérature sur le vieillissement cognitif nous apprend qu’il se caractérise notamment par une plus grande diffıculté à gérer la complexité et l’inattendu, d’autant plus qu’il existe une contrainte temporelle. L’analyse des données détaillées d’accidents le conforte. La tâche de traversée ou de changement de direction sur une intersection réunit ces conditions. Il n’est donc pas étonnant que les conducteurs âgés y soient surreprésentés dans les accidents dont ils sont victimes. Mais au-delà du repérage de leurs difficultés propres, il faut s’interroger sur les mécanismes qui sous-tendent ce type d’accidents. L’approche système souligne que l’accident sur carrefour se construit à deux, ce que confirme l’analyse clinique des cas en montrant comment le prioritaire participe par son comportement à la genèse de ces accidents. Son comportement traduit en effet souvent un gaspillage de l’espace-temps disponible pour mettre en œuvre une régulation, alors qu’il est souvent le seul à même de résoudre le conflit généré involontairement par l’autre, dans la mesure où lui l’a détecté (Girard, 1987). Ainsi, non seulement les configurations d’aménagements et les interactions avec le trafic environnant imposent une contrainte de rapidité qui met en défaut les modes de régulation des seniors, mais encore le comportement des autres ne leur laisse pas droit à l’erreur (Girard, 2002). En contrepartie, on pourra noter que les conducteurs âgés se retrouvent moins souvent que les autres accidentés en intersection en tant que prioritaire. On peut ainsi faire l’hypothèse que cette attitude de conduite, lente, prudente, qui est à l’origine de leurs défaillances en tant que non-prioritaire10 pourrait en contrepartie les amener à compenser les défaillances des autres lorsqu’ils sont en situation de prioritaire, dans la mesure où ils ont le contrôle des paramètres cinétiques, la possibilité de réguler l’interaction à leur rythme et d’adopter une conduite préventive efficace dans le cas de la 9
C’est ainsi que le ratio d’implication des plus de 65 ans en tant que responsable dans les situations de bifurcation à gauche augmente avec le volume du trafic (Barham & Oxley, 1992). 10 Les amenant d’ailleurs à être plus souvent présumés responsables dans les accidents dont ils sont victimes...
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survenue d’une manœuvre inadaptée d’un non-prioritaire (Hakamies-Blomquist, 1998), (Girard, 2002). Une part conséquente des difficultés que les personnes âgées rencontrent sur la route pourrait ainsi correspondre à une perturbation née d’un décalage entre deux types d’attitudes (précautionneuse versus intrépide, lente versus rapide). Plutôt que d’une déficience en soi dans la conduite des personnes âgées, une grande partie des problèmes auxquels ils sont confrontés pourrait ainsi provenir d’une variation, d’un différentiel introduit dans le système, par une opposition entre deux styles de conduite, qui pourrait se ramener en fin de compte à un... conflit de génération. Comme l’indique Hakamies-Blomquist (1998), on peut envisager que l’augmentation de la proportion de personnes âgées dans le système routier pourra à terme forcer ce système à s’adapter à leurs besoins. Il s’agira pour cela que les aménagements et les routes — plus conçus pour satisfaire les besoins et capacités des plus jeunes — évoluent dans un sens qui leur soit favorable ; il s’agira également que les modes d’interaction entre tous les participants évoluent, en réponse à la plus grande probabilité d’une confrontation à une personne âgée. Cet ensemble de données est, en effet, à prendre en compte dans une optique de définition de mesures de sécurité susceptibles de répondre aux (diverses) spécificités de cette catégorie de conducteurs. De telles mesures doivent se démarquer de l’ostracisme qui tend à se développer à l’encontre des personnes âgées (OCDE, 1985), s’appuyant d’une part sur une discrimination par défaut d’équipements adéquats, d’autre part sur une éviction des conducteurs qui ne sont pas adaptés au système. Si, pour une partie bien ciblée de cette population, la question de la capacité à conduire se pose — telles que peuvent en faire état certaines défaillances globales identifiées dans les accidents et qui renvoient à un phénomène d’ordre pathologique — des actions appropriées en termes d’aménagement, de formation11, voire d’aides à la conduite adaptées (Pauzié, 1995), pourraient amener à résoudre une grande partie des problèmes rencontrés par les personnes âgées sur la route. Les résultats décrits dans cet article sont issus de l’analyse de données détaillées recueillies sur les accidents. Les EDA présentent un intérêt heuristique indéniable du fait de l’approfondissement du questionnement sur les mécanismes. La richesse des données, combinée à la complexité/diversité des circonstances d’accidents caractérisant les conducteurs seniors plaide en faveur d’un approfondissement du questionnement sur les différences observées, à partir de l’échantillon étudié, entre conducteurs âgés de plus ou de moins de 60 ans, dans l’objectif de caractériser les spécificités de ces premiers. L’exploitation d’un plus grand nombre de cas devrait permettre à la fois d’affiner et de consolider ces tendances. Une mise en perspective de cette analyse par d’autres approches, recourrant notamment à l’analyse des comportements hors 11 Celle des autres également, rappelant notamment que le statut de prioritaire n’accorde pas tous les droits.
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accidents, serait également fructueuse. De nombreuses pistes restent ainsi à investiguer afin de mieux comprendre les difficultés caractérisant cette population de conducteurs, ainsi que les paramètres qui sont à l’origine de ces difficultés. On insistera à ce titre sur la nécessité de ne pas se cantonner dans des analyses de type monocausales se limitant à une attribution de responsabilité qui, de façon un peu tautologique, aboutirait à identifier l’âge en tant que facteur d’accident. Il serait plus pertinent de chercher à définir des profils de facteurs rendant compte des problèmes que ces personnes rencontrent. Il s’agira également d’approfondir la question des interactions dans la genèse des scénarios d’erreurs, en référence à la question de l’hétérogénéité des styles de conduite entre les conducteurs âgés et les autres conducteurs. Abridged version This paper describes research based on detailed road traffic accident statistics in which the accident mechanisms for a sample of 57 senior drivers (aged over 60 years) have been to those for a sample of 335 younger drivers. Using a model developed in the course of earlier research (Van Elslande et al., 1997), (Van Elslande, 2000), it presents a comparative analysis of the functional breakdowns (or errors) that affect the different groups of drivers, and describes the explanatory factors for these breakdowns and the contexts in which they occur. A comprehensive analysis of the origins of the functional failures that characterize the accidents in which drivers of over 60 years of age are involved reveals a number of underlying mechanisms which casts doubt on the assumption that this reference population is uniform. We thus distinguish between two major types of accident mechanisms that characterize this population, one of which involves failures as regards skills and the other which involves failures as regards functions. A first set of failures thus occurs when a difficulty is such that the driver’s cognitive capacities are exceeded, leading to a disorganization of the activity which spreads throughout the functional chain involved in driving, resulting in, most importantly, false manoeuvres. About 20% of the problems that cause accidents among (the most) elderly drivers fall into this category, as opposed to 2% among other drivers. An explanatory framework for this first subgroup of accidents in which older drivers are involved could principally adopt the mental deterioration approach, as this pathology is characteristic of part of the subpopulation in question (HakamiesBlomquist, 1998). Consequently, this is the subgroup targeted by most research on older drivers. However, a second, more complex, set of accident causation processes emerges from case studies. Failures affecting information collection functions and functions involved in diagnosing the situation, which characterize this group of drivers, can raise the following problems. • The most important factor at the origin of perception errors associated with the collection of information which
relates to one component of the situation (14%), is the difficulty of dealing with a number of competing sources of information. The literature describes a decline in the ability to process several items of information simultaneously, which is linked to a reduction in the capacity of the information processing channel caused by cerebral ageing (OCDE, 1985). But at an earlier stage to this we can also identify a problem of judgment with regard to the relative importance to be ascribed to the different sources in question. The issue of diagnosis (with regard to the functions of evaluation and comprehension) also seems, generally speaking, to be a key problem for this population. • Errors of the rapid information search type (8.8%) and some gap evaluation errors (which are, in all, involved in 10.5% of accidents) are both explanatory factors that are linked with the feeling of discomfort (for the older driver) and disturbance (to others). Cognitive variables are not the only factors that explain the specific nature of the difficulties experienced by seniors. • A second group of gap estimation errors, like errors in understanding road design features (8.8%), is caused by a form of rigidity that affects mental representations which are based on experience. This mechanism comes into play either when a routine manoeuvre is conducted more or less automatically, or in an unfamiliar location which is analyzed by the subject in a way that relies too much on analogy. The failure to instantiate representations on the basis of the characteristics of the situation at the time explains the inappropriate nature of processing in most of these situations. • The slowness of decision-making and action is a variable that overdetermines a large proportion of the malfunctions that occur at intersections. It is interesting that this variable comes into play in situations where the driver loses not only priority, but also the ability to control the parameters in his or her environment, in particular the speed at which the processes and interactions encountered occur. A considerable body of research has revealed the adaptative behaviours developed by older drivers in an attempt, in particular, to compensate for the weaknesses that they are aware of, by being more cautious (Rimmö & Hakamies-Blomquist, 2002). The most marked of the adaptation behaviours they adopt in order to overcome their difficulties is to reduce their speed (OCDE, 1985). However, their behavioural adaptation, which may be highly effective in certain situations may work to their disadvantage in others, in particular when they are unable to exert any control on the time course of events (for example crossing fast roads in high traffic levels)12. Driving cautiously enables them to be involved in fewer loss of control and rear collision accidents than other drivers (OCDE, 1985), (Barham & Oxley, 1992). But cautious driving tends to actualize excessive caution when the elderly person is unable to control the kinematic parameters of the environ12
This is why the percentage of over 65 year-olds who are responsible for accidents in left turn situations increases with the volume of traffic (Barham & Oxley, 1992).
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ment. In combination with the parameters we have already mentioned, this may partly explain the increase in the number of collisions when two traffic streams merge with one of them losing priority. The literature shows that cognitive ageing is characterized in particular by a greater difficulty in dealing with complexity and the unexpected, in particular when there is a time constraint. An analysis of detailed accident data supports this view. The task of crossing a road or changing direction at an intersection involves both of these factors. It is therefore not surprising that these are overrepresented among the accidents in which elderly drivers are involved. But apart from identifying their specific difficulties we need to examine the tendencies that underlie accidents of this type. The system approach highlights the fact that two parties are involved in creating an accident at an intersection, which is confirmed by a clinical analysis of cases which shows how the behaviour of the priority vehicle plays a role in the genesis of these accidents. Frequently the behaviour of the priority vehicle wastes both the time and the space that are available to take action to control the situation when this vehicle is frequently the only one that is able to resolve the conflict (insofar as it has detected it) which the other vehicle has generated unintentionally (Girard, 1987). Thus, not only do design features and interactions with surrounding traffic impose a rapidity constraint which their modes of control are unable to meet, but also the behaviour of other drivers gives them no room for error (Girard, 2002). On the other hand, it is noteworthy that older drivers are less often involved than other drivers in accidents at intersections when they have priority. We can make the hypothesis that their slow and cautious attitude towards driving which is the origin of their shortcomings when they do not have priority,13 could lead them to compensate for the failures of others when they have priority because they are in control of kinematic parameters and are able to control the interaction at their own rate and engage in effective preventive driving when a non-priority vehicle makes an inappropriate manoeuvre (Hakamies-Blomquist, 1998), (Girard, 2002).A considerable proportion of the difficulties which seniors encounter on the road could therefore be due to a disturbance which originates in the difference between two types of attitude (cautious versus daring). Rather than being the result of a deficiency per se in the driving of elderly persons, many of the problems they face could result from the introduction of variation in the system due to the juxtaposition of two styles of driving which could, ultimately, come down to a generational conflict... As has been stated by Hakamies-Blomquist (1998), it is possible that in increase in the proportion of older drivers on the roads could ultimately force the road system to adapt to their needs. This would involve geometric design, which would no longer suit the needs of the young, changing in a
way that would be to their advantage. In addition, it would involve a change in the patterns of interaction between all participants as a result of the greater probability of encountering an elderly person on the road. The above considerations should all be taken into account when developing safety measures to meet the (varied) characteristics of this category of drivers. Such measures should be free of the ostracism which is tending to develop with regard to the elderly (OCDE, 1985), which is in part based on discrimination through a lack of appropriate facilities and in part on the removal of drivers who are not suited to the system. While for a proportion of this population the question of the aptitude to drive is raised (for example the type of general failures that are identified in accidents and which involve pathological conditions), appropriate facilities, training 14, or even driving aids could solve a large proportion of the problems encountered by elderly persons on the road. The findings set out in this paper are the outcome of an analysis of detailed accident data. Detailed accident studies are of undeniable heuristic interest because they result in a more thorough analysis of accident mechanisms. The wealth of the data, combined with the complexity and diversity of the accident situations which characterize senior drivers encourage a more thorough investigation of the differences we have observed in the studied sample between drivers of over and under 60 years of age, with a view to characterizing the specific characteristics of the former. By investigating a larger number of cases it should be possible to gain a clearer and better substantiated picture of these tendencies. Placing this analysis in perspective by considering other approaches (in particular an analysis of behaviours when no accident takes place) would also be fruitful. There therefore remain a considerable number of ways in which this population of drivers could be investigated in order to understand their difficulties better. In this regard we should emphasize that it is essential not to restrict analysis to monocausal explanations which aim solely to assign responsibility, which, somewhat tautologically, end up by identifying age as an accident factor. It would be more useful to attempt to identify patterns of factors which provide a picture of the problems encountered by these persons. It would also be more useful to analyze more closely the interactions which occur in the genesis of error scenarios, with reference to the differences between the driving styles of elderly drivers and those of other drivers.
13 This also leads to their being more frequently assumed responsible for the accidents they are involved in...
14 That of other drivers too — a priority vehicle does not have the right to behave as it likes.
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