Les experts doivent-ils révéler leurs conflits d’intérêts ?

Les experts doivent-ils révéler leurs conflits d’intérêts ?

Revue d’E´pide´miologie et de Sante´ Publique 59 (2011) 207–209 E´ditorial Les experts doivent-ils re´ve´ler leurs conflits d’inte´reˆts ? Should ex...

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Revue d’E´pide´miologie et de Sante´ Publique 59 (2011) 207–209

E´ditorial

Les experts doivent-ils re´ve´ler leurs conflits d’inte´reˆts ? Should experts disclose their conflicts of interest? M. Grignon Economics, McMaster University, 1280, Main Street West, Hamilton, L8S 4M4, Ontario, Canada Disponible sur Internet le 16 juillet 2011

Depuis la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et a` la qualite´ du syste`me de soins, les membres des commissions et conseils sie´geant aupre`s des ministres charge´s de la Sante´ et de la Se´curite´ sociale doivent de´clarer leurs liens directs et indirects avec les entreprises, e´tablissements ou organismes dont les dossiers pourraient eˆtre soumis a` l’instance dans laquelle ils sie`gent. En outre, cette de´claration est rendue publique (article 24). Les leaders d’opinion me´dicaux ou en lien avec les de´cisions de remboursement ont donc pour obligation de re´ve´ler leurs conflits d’inte´reˆts potentiels. Les journaux cliniques ou de sante´ publique (y compris en sciences sociales lie´es a` la me´decine ou la sante´ publique et y compris hors de France, donc sans lien avec la loi ci-dessus) exigent souvent de telles de´clarations de la part des auteurs soumettant leurs manuscrits : il s’agit non seulement de pre´ciser les commanditaires de l’e´tude de´crite dans l’article (industrie pharmaceutique, industrie du tabac, fonds publics), mais aussi les liens financiers existant entre les auteurs et ces payeurs en dehors du financement de l’e´tude particulie`re de´crite dans l’article. Cette obligation de de´claration syste´matique repose sur l’ide´e que le lecteur de la revue ou la cible du message e´mis par l’expert doit pouvoir attacher un degre´ de confiance au message e´mis, et que ce degre´ de confiance provient pour une part du positionnement de l’e´metteur du message par rapport a` des entite´s (laboratoires, industries diverses) ayant un impact potentiel sur la sante´ humaine. Un article re´cemment publie´ par la RESP (Chakroun et Milhabet, 2011) montre que cette transparence n’est pas sans effet : les patients, et plus encore les confre`res, sont sensibles a` la re´ve´lation des liens entre l’expert et ces entite´s, et le degre´ de confiance qu’ils placent dans les affirmations d’un expert diminue quand il est re´ve´le´ que celui-ci rec¸oit des re´mune´rations ponctuelles de laboratoires pharmaceutiques ou de´tient des actions de laboratoires pharmaceutiques. Ce re´sultat est

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d’autant plus remarquable que le conflit d’inte´reˆt n’est pas ave´re´ dans le sce´nario de´crit dans l’article : on parle de re´mune´rations par ou d’actions dans des laboratoires pharmaceutiques, mais pas ne´cessairement le laboratoire de´veloppant le produit recommande´ par l’expert. Quelles sont les conse´quences normatives sur le fonctionnement du syste`me de sante´ de ces de´clarations de liens entre experts et acteurs du secteur ? Le syste`me de sante´ fonctionnerait-il moins bien sans, et pourrait-il fonctionner mieux avec plus de transparence ? En premier lieu, si la de´claration de liens de l’expert, meˆme sans rapport direct avec l’objet du message, diminue la cre´dibilite´ de son message, on peut craindre que le de´bat ne soit contraint a` se passer totalement d’experts. Il est en effet difficile d’imaginer que quelqu’un connaissant en profondeur un domaine n’ait absolument aucun lien d’aucune sorte avec les acteurs de ce domaine. Du coup, de´mone´tiser la parole des experts fait courir le risque d’un appauvrissement du de´bat. Pour donner un exemple personnel, j’ai participe´ au de´but des anne´es 2000 au groupe d’experts sur les e´tudes me´dicoe´conomiques aupre`s du comite´ e´conomique du me´dicament. Les experts de ce groupe avaient tous une compe´tence en e´conomie ou en statistique, mais nous avions aussi tous en commun de n’avoir jamais e´te´ finance´s par l’industrie pharmaceutique ou des dispositifs me´dicaux (notre groupe e´tait surnomme´ « le Chœur des Vierges »), ce qui voulait dire aussi qu’aucun d’entre nous n’avait jamais participe´ a` une e´valuation me´dicoe´conomique. Du coup, nos jugements e´taient syste´matiquement trop se´ve`res (nous chipotions sur des notions me´thodologiques abstraites sans mesurer vraiment les parame`tres re´alistes) et, ce qui est plus grave, sans doute variablement se´ve`res en fonction justement de notre ignorance de l’environnement local dans lequel chaque e´tude e´tait de´veloppe´e. Adjoindre un ou deux experts de´niaise´s (en s’assurant qu’ils restent une toute petite minorite´) aurait certainement contribue´ a` ame´liorer la qualite´ de nos de´libe´re´s. Un autre exemple aidera a` comprendre en quoi e´liminer ou

0398-7620/$ – see front matter # 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s. doi:10.1016/j.respe.2011.05.001

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diminuer la contribution des experts en conflit d’inte´reˆts peut eˆtre une fausse bonne ide´e : le conflit d’inte´reˆt premier du scientifique consiste non pas a` tenir compte de son inte´reˆt personnel pour rendre un avis, mais de profiter d’une information confidentielle pour agir en conformite´ avec ses inte´reˆts (sur la base d’un avantage informationnel par rapport a` ses concurrents). Dans le monde politique, ce type de conflit d’inte´reˆts consiste a` acheter pour rien le terrain dont on vient de de´cider la viabilisation. Dans le monde scientifique, cela consiste a` voler l’ide´e d’un article ou d’un projet de recherche qu’on expertise. Si on appliquait la logique selon laquelle l’existence de conflits d’inte´reˆts potentiels entraıˆne syste´matiquement celle de conflit d’inte´reˆts re´els (ce qui est la logique derrie`re la de´claration publique), on enverrait syste´matiquement les manuscrits ou les projets a` expertiser a` des gens ne travaillant pas du tout sur le sujet traite´ par l’article ou le projet de recherche : on sacrifierait donc la capacite´ a` dire quoi que ce soit d’inte´ressant au risque de conflit d’inte´reˆt. Paralle`lement, ne rendre public que le seul conflit d’inte´reˆt mate´riel et financier semble aussi re´ducteur. Comme l’exemple ci-dessus l’illustre, l’inte´reˆt personnel du scientifique n’est pas toujours lie´ a` des financements exte´rieurs ; il peut meˆme n’eˆtre pas du tout financier. Les fraudes scientifiques les plus ce´le`bres visaient a` prote´ger une re´putation plus qu’un compte en banque. Tre`s souvent, les scientifiques s’affranchissent de la rigueur scientifique absolue pour ne pas ruiner une the´orie qui a fait leur carrie`re (on peut penser ici a` la the´orie du lien entre vaccination des enfants et scle´rose en plaques, ou bien, de manie`re moins douloureuse, a` la the´orie liant nutrition et accidents cardiaques). On trouve encore bien plus souvent des conflits d’inte´reˆts plus de´sinte´resse´s : un scientifique adhe`re a` une valeur morale (qui ne lui rapporte rien, parfois meˆme des ennuis ou une carrie`re moins prestigieuse) et tend a` n’observer que des faits en conformite´ avec cette valeur morale. Le cas est e´videmment fre´quent parmi les e´conomistes, comme illustre´ par la re´cente re´cession brutale : les e´conomistes baigne´s a` l’eau douce (Chicago) n’y voient qu’un ajustement normal de l’offre de travail (e´ventuellement pre´cipite´ par une re´gulation envahissante), ceux trempant dans l’eau sale´e (Boston) y voyant plus de bulles et de spe´culation incontroˆle´e. Mais il n’est pas limite´ au cas des sciences sociales : la fameuse atte´nuation des re´sultats au cours des expe´riences (le fait que des re´sultats statistiquement significatifs lors d’une expe´rience se´minale tendent a` devenir de moins en moins significatifs a` mesure que l’expe´rience est re´plique´e par d’autres, jusqu’a` disparaıˆtre parfois pour de bon) est interpre´te´e par certains comme une indication du biais dans la conduite des observations empiriques, d’abord en faveur du re´sultat (excitation de la nouveaute´ et probabilite´ d’eˆtre publie´), puis contre le re´sultat (excitation de remettre en cause une pense´e e´tablie et probabilite´ d’eˆtre publie´). Il faudrait donc empiler les re´ve´lations au de´but de chaque article ou message et dire « d’ou` on parle » pour reprendre une formulation 68arde. Enfin, le conflit d’inte´reˆt n’est pas toujours lie´ a` l’individu : compte tenu de l’augmentation de financements prive´s des universite´s et de certains centres de recherche publics, il serait bon aussi que les experts re´ve`lent les liens entre leur employeur et les

entreprises, e´tablissements ou organismes dont parle la loi de 2002. On sait que certaines universite´s ont fait pression, parfois jusqu’a` refuser la titularisation, sur des chercheurs qui s’obstinaient a` publier des re´sultats peu appre´cie´s de gros donateurs. Faut-il donc arreˆter de de´clarer publiquement les liens des experts ou au contraire mettre totalement a` nu ces experts et exposer tous leurs biais potentiels ? La re´ponse de´pend en fait du type de message que l’expert produit. En gros, la re´ponse diffe`re fondamentalement selon qu’il s’agit d’un article scientifique rapportant les re´sultats d’une e´tude, d’un avis fonde´ sur une revue de la litte´rature, ou d’une recommandation en vue d’une de´cision politique. Dans le premier cas, il est difficile de voir ce qu’apportent ces de´clarations publiques, et il est facile de voir en quoi elles peuvent eˆtre nuisibles. L’histoire du de´veloppement de la pense´e scientifique est celle de la disparition de l’argument d’autorite´ au profit de l’argument de validite´. Un re´sultat doit eˆtre valide inde´pendamment de l’identite´ de l’auteur et uniquement en fonction de la qualite´ de la de´monstration. Si les articles et livres ne servaient pas a` baˆtir les carrie`res en s’accumulant sur les CV, l’aboutissement de la logique scientifique devrait eˆtre que tous les articles soient anonymes. Peu importe qui dit quoi, seule compte la qualite´ de la de´monstration. Prenons un exemple un peu extreˆme : imaginons qu’une e´tude extreˆmement bien conduite, mais finance´e par Monsanto, de´montre l’absence totale de conse´quences sur la sante´ a` 35 ans des consommateurs d’un OGM donne´. Si on publie l’e´tude anonymement, tout un chacun se concentrera sur la qualite´ me´thodologique de l’e´tude, trouvera peut-eˆtre des proble`mes ruinant finalement la conclusion ou bien n’en trouvera pas et devra admettre la conclusion, mais on pourra espe´rer trouver un consensus sur le re´sultat et sa signification, consensus fonde´ sur la robustesse de la me´thode. Si l’article est accompagne´ de la mention « finance´ par Monsanto », la discussion n’aura meˆme pas lieu, ce qui sera sans doute dommage. Inversement, si une agence charge´e de la protection de l’environnement finance une e´tude trouvant que les pesticides rejete´s dans la nature sont mauvais pour la sante´, on pourra rejeter cette conclusion au motif qu’elle arrange bien les affaires de l’agence qui accroıˆt ainsi son pe´rime`tre de controˆle et d’intervention. Je ne dis pas ici que l’origine des fonds est sans aucune incidence sur le jugement a` porter sur l’e´tude : je dis que l’incidence ne doit pas eˆtre sur le jugement public, mais en amont, lorsque les relecteurs et e´diteurs de la revue de´cident de la publier ou non. Le travail des relecteurs et de la revue est alors absolument crucial et porter a` leur connaissance les conflits d’inte´reˆts potentiels permettra un examen plus scrupuleux ou oriente´ des biais potentiels de l’e´tude : je ne trouve pas choquant que l’e´tude Monsanto ait plus de chances d’eˆtre rejete´e qu’une autre, plus neutre. Mais je trouve choquant qu’elle soit de´valorise´e sans autre forme d’examen (plus exactement, apre`s avoir passe´ une se´rie d’examens se´ve`res) sur la base d’un jugement a priori fonde´ sur l’autorite´. Ce qui doit eˆtre absolument public et transparent en revanche (et l’est rarement), ce sont les donne´es sur lesquelles l’e´tude est fonde´e, afin que tout un chacun puisse

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re´pliquer les analyses1. Mais, encore une fois, ponde´rer le re´sultat par un degre´ de soupc¸on place´ sur l’auteur ne fait qu’appauvrir le de´bat. Il en va e´videmment diffe´remment lorsqu’il ne s’agit pas d’une e´tude scientifique, mais d’une synthe`se de re´sultats scientifiques reposant sur une me´ta-analyse (agre´gation de plusieurs e´tudes et recherche d’un re´sultat central : tel me´dicament est-il bon pour le diabe`te, que sait-on sur la question ?). La raison en est simplement que le degre´ de subjectivite´, donc d’autorite´, devient plus important. Bien suˆr, on attribue des poids aux e´tudes recense´es dans la litte´rature et on multiplie les garde-fous me´thodologiques pour limiter les effets de subjectivite´ individuelle (en faisant attribuer les poids inde´pendamment par plusieurs chercheurs, par exemple), mais on ne peut tout a` fait e´liminer les biais subjectifs collectifs : une e´quipe fermement anti-OGM aura de fortes chances de sousponde´rer l’e´tude Monsanto meˆme si sa qualite´ intrinse`que est bonne. Les efforts pour rendre les revues syste´matiques plus objectives les rendent aussi plus proches d’articles scientifiques : par exemple, au lieu de chercher une re´ponse moyenne sur la base de la somme ponde´re´e des re´sultats des e´tudes recense´es, on re´gresse le re´sultat sur les caracte´ristiques des e´tudes et on peut re´pondre a` des questions inte´ressantes telles que : quel est l’effet de la me´thode choisie sur le re´sultat obtenu ? Force est de constater que c¸a n’est pas exactement ce que cherche le de´cideur (politique ou me´decin) qui lit cette litte´rature de litte´rature. Il pre´fe`re la me´ta-re´ponse de type « la litte´rature nous dit que. . . », re´ponse e´videmment plus subjective. Pour ce type d’e´tudes et de re´ponses, il me semble que la protection contre la subjectivite´ et les biais d’inte´reˆts repose plus sur la multiplicite´ des experts, la qualite´ de leur se´lection pour refle´ter une varie´te´ de points de vue et la re´ve´lation aux autres experts et a` l’organisateur de la me´taanalyse (ou confe´rence de consensus) des biais potentiels de chacun. Choisir un organisateur naı¨f (ayant une grande compe´tence ge´ne´rique sur les me´thodes, mais aucune connaissance locale du sujet) pour faire re´ve´ler biais involontaires autant que mate´riels et e´vidents semble une bonne ide´e. Mais, la` encore, donner au public une information sur la composition du groupe appauvrirait le de´bat. On arrive enfin au cas des recommandations pour l’action partant en ge´ne´ral d’une me´ta-analyse, il s’agit alors de dire a` un de´cideur ce qu’il devrait faire. On ajoute ici a` la subjectivite´ la complexite´ inhe´rente aux e´tudes multidisciplinaires et aux mode´lisations ne´cessaires pour passer du monde de la science a` celui de la de´cision. En effet, la de´cision fait jouer simultane´ment plusieurs mondes, qui peuvent eˆtre appre´hende´s chacun par une approche scientifique, mais rarement par une seule grande e´tude scientifique. Par exemple, prendre une de´cision sur les volumes d’arsenic admissibles dans l’eau 1 De ce point de vue, le financement de l’innovation pharmaceutique par la rente de monopole temporaire que constitue le brevet pose un proble`me plus profond que les conflits d’inte´reˆts des scientifiques : le brevet supposant le secret, les donne´es de l’industrie pharmaceutique sont en ge´ne´ral inaccessibles, ce qui interdit les exercices de validation des e´tudes. Une industrie finance´e par des aides a` la R&D aurait au contraire tout inte´reˆt a` partager ses donne´es.

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suppose une connaissance e´pide´miologique approfondie du risque, mais aussi une information sur les conditions locales d’utilisation de l’eau. Il s’agit d’un exemple ce´le`bre, une e´tude e´pide´miologique compe´tente ayant montre´ que l’arsenic dans les nappes phre´atiques tuait a` Taı¨wan, mais aucune e´tude, pourtant aussi compe´tente, n’ayant jamais rien montre´ de tel aux E´tats-Unis. La raison en est simplement que la dose maximale observe´e a` Taı¨wan, couple´e aux modalite´s d’utilisation de l’eau, pouvait tuer, mais que la combinaison dose– utilisation n’atteignait jamais un niveau suffisant aux E´tatsUnis. Cet avis est donc affaire de donne´es e´pide´miologiques, de mode`les d’estimation de l’effet dose–re´ponse et d’hypothe`ses de sciences sociales sur les pratiques et comportements puis de mode`les des effets de la de´cision sur les couˆts et les comportements : imposer tel ou tel niveau d’arsenic dans l’eau aura des conse´quences sur le prix de l’eau, ce qui pourra affecter la croissance e´conomique, voire les disparite´s e´conomiques entre me´nages. L’ide´e, pour re´pondre a` cette complexite´, est de compartimenter et rendre le plus e´tanche possible les deux aspects de la de´cision : la recommandation, qui donne la distribution du risque et des conse´quences lie´es a` chaque de´cision et la de´cision, qui tranche en fonction de cette distribution du risque. C’est ce qui avait motive´ la cre´ation des agences sanitaires dans les anne´es 1990, produisant de la recommandation a` distance respectable des de´cideurs politiques. Faut-il alors que les experts consulte´s sur la recommandation (par exemple ceux sie´geant a` l’Afssaps) re´ve`lent leurs liens avec les acteurs du domaine ? Sans doute, mais, la` encore, il me semble plus important qu’ils les re´ve`lent a` ceux qui organisent le comite´ de recommandation plutoˆt qu’au public lui-meˆme. Ce que le public a le droit de connaıˆtre en revanche, ce sont les liens, finalement jamais coupe´s comple`tement, entre la sphe`re de la recommandation et celle de la de´cision. Si les membres permanents de l’Afssaps, ceux qui organisent les comite´s de recommandation sont eux-meˆmes en fait des fonctionnaires, re´percutant et inte´grant les impe´ratifs de l’E´tat, leur capacite´ a` administrer sereinement les conflits d’inte´reˆts potentiels des experts qu’ils convoquent sera affaiblie. De meˆme s’ils sont proches des inte´reˆts industriels ou militants du domaine. D’ou` ma proposition finale, cohe´rente avec ce que j’ai formule´ pour les confe´rences de consensus : plutoˆt que de confier la direction de ces agences a` de grands commis de l’E´tat y faisant une partie de leur carrie`re ou a` de grands spe´cialistes scientifiques du domaine y acque´rant une forme de reconnaissance et de conse´cration, pourquoi ne pas s’appuyer sur des scientifiques me´thodologues reconnus mais venant d’autres horizons (des physiciens, mathe´maticiens, sociologues, psychologues) et donc sans liens ni connivences d’aucune sorte avec les acteurs du milieu ? Ils auront alors cette capacite´ a` reconnaıˆtre les biais des experts qu’ils re´uniront pour de´terminer la distribution des risques, la distribution des couˆts, et la distribution des be´ne´fices aux de´cideurs politiques. De´claration d’inte´reˆts L’auteur de´clare ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article.