Les implications médico-légales des infections sur les systèmes de fermeture percutanée artérielle

Les implications médico-légales des infections sur les systèmes de fermeture percutanée artérielle

Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com Annales de Cardiologie et d’Angéiologie 63 (2014) 442–444 Revue de la littérature Les i...

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ScienceDirect www.sciencedirect.com Annales de Cardiologie et d’Angéiologie 63 (2014) 442–444

Revue de la littérature

Les implications médico-légales des infections sur les systèmes de fermeture percutanée artérielle Artery infections associated with percutaneous arterial closure devices: Medico-legal issues C.J. Gaultier a,b,∗ , T. Houselstein a a

b

Comité médical du Sou Médical/MACSF, 10, cours du Triangle-de-l’Arche, 92191 La Défense, France Service de cardiologie interventionnelle (ICVGVM), hôpital La Roseraie/groupe Villa Maria, 120, avenue de la République, 93300 Aubervilliers, France Disponible sur Internet le 1 octobre 2014

Résumé Si les systèmes de fermeture percutanée ont permis de réduire le temps de compression de l’artère fémorale et la durée d’hospitalisation, plusieurs méta-analyses font ressortir qu’ils pourraient être à l’origine de complications vasculaires plus graves que lors de compressions manuelles. Il est rapporté deux cas d’infections à partir de système de fermeture percutanée, ayant fait l’objet de plaintes médico-légales. Au-delà de la dimension purement médicale, les griefs émis par les plaignants ainsi que la manière dont ces cas ont été analysés par les avocats et les experts judiciaires, aboutissant à des condamnations contre les médecins et les établissements de soins, sont rapportés. Sans vouloir stigmatiser l’utilisation de ces systèmes, il est surtout rappelé aux cardiologues de ne pas sous-estimer ou méconnaître ce risque grave. Avant de les utiliser, il convient de toujours évaluer le rapport bénéfices/risques, de respecter toutes les mesures de prévention et surtout d’être à l’affût des premiers signes d’infection, afin de les dépister à un stade précoce et donc en réduire la sévérité par un traitement consistant en une antibiothérapie ciblée, prolongée ainsi que le concours d’un chirurgien vasculaire. © 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Système de fermeture percutanée ; Infection ; Responsabilité

Abstract Percutaneous suture closure devices have reduced the time needed for manual compression and hospital stays, but several meta-analysis emphasized a higher risk of vascular damages compared to manual compression. Two cases of infections on percutaneous suture closure devices were analyzed; which had medico-legal issues. Beyond the medical point of view, the patient’s complaints, the way lawyers and medical experts have examined the cases were analyzed and resulted in physicians and hospitals being sentenced. Rather than stigmatizing those devices, we just want to invite cardiologists not to underestimate this serious risk. Before using those devices, physicians should balance the risk-benefit ratio, follow prevention guidelines, and most of all, be aware of any single signs of emerging infection to detect and treat them early, and thus reduce the severity of infections thanks to a targeted antibiotic treatment adapted to the antibiogram and an active role of vascular surgeons. © 2014 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Keywords: Percutaneous suture closure device; Liability; Infection

1. Introduction



Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (C.J. Gaultier).

http://dx.doi.org/10.1016/j.ancard.2014.09.028 0003-3928/© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Parmi les plaintes pour infections sur systèmes de fermeture percutanée, deux accidents graves expertisés sont rapportés. Des mesures sont proposées pour tenter de réduire la fréquence et la gravité de ces accidents, ainsi que le risque de condamnation.

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2. Cas no 1 Il s’agit d’un patient de 76 ans, diabétique, obèse, tabagique. Il est porteur d’une prothèse totale de hanche droite. Lors d’un syndrome coronarien aigu, il sera mis en évidence une lésion de l’IVA proximale et de la marginale, justifiant d’une double angioplastie coronaire effectuée avec succès. L’artère fémorale droite sera fermée avec un système de suture (Starclose). Dès le lendemain, le patient est fébrile avec douleur du scarpa, motivant la réalisation d’hémocultures revenant positives à Staphylococcus aureus. Sur un malentendu téléphonique concernant l’antibiogramme, un traitement antibiotique inadapté sera prescrit pendant 3 semaines. Deux mois plus tard, le patient sera hospitalisé dans un tableau d’infection de prothèse de hanche (même germe que les hémocultures) nécessitant son explantation et une antibiothérapie par vancomycine. La réimplantation d’une prothèse de hanche sera effectuée deux mois plus tard. Les suites opératoires seront compliquées d’une fibrillation auriculaire traitée par héparine de bas poids moléculaire, d’une déglobulisation puis d’un choc cardiogénique en rapport avec un syndrome coronarien aigu sur probable thrombose de stents. Lors d’une procédure devant la Commission de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux, plusieurs griefs ont été formulés. Les experts ont retenu plusieurs manquements, à savoir l’absence de trac¸abilité de la préparation cutanée (douche et badigeons d’antiseptique avant l’angioplastie coronaire), mais aussi une mauvaise gestion de l’infection initiale en cardiologie (antibiothérapie non adaptée au germe). Enfin, lors de réimplantation de la prothèse, les experts vont critiquer l’arrêt prolongé des antiagrégants qui a favorisé la thrombose de stents, de même que l’utilisation d’HBPM à une dose non adaptée chez ce patient (clearance basse de la créatinine), favorisant la déglobulisation. Une responsabilité partagée sera retenue à l’encontre des deux équipes. 3. Cas no 2 Un patient de 66 ans, obèse et suivi pour une bronchopneumopathie, va bénéficier d’une coronarographie dans un contexte de dyspnée avec une scintigraphie positive, mettant en évidence une atteinte de l’interventriculaire antérieure et de la circonflexe. Après concertation, il sera programmé une angioplastie des deux artères, par voie fémorale droite, fermée par un tampon de collagène (Angioseal). Cinq jours après, il sera réhospitalisé dans un autre établissement pour une septicémie à S. aureus et un faux anévrysme. Un geste chirurgical consistera à l’évacuation d’une collection suppurée et d’une suture de l’artère fémorale. Deux semaines plus tard, devant une récidive locale, il sera repris au bloc, se compliquant d’une rupture artérielle peropératoire, rapidement jugulée. En raison d’une perte de substance trop importante, il sera nécessaire de procéder à une allogreffe artérielle. Devant le tribunal, même en l’absence de manquement dans les mesures de prévention, il s’applique le principe d’une responsabilité de plein droit des établissements en cas d’infection associée aux soins lorsque le taux d’invalidité (AIPP) est inférieur à 25 %. Pour autant, les experts ont ana-

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lysé les modalités techniques. En raison de l’échec d’utilisation de l’artère radiale, le choix de la voie fémorale ne sera pas contesté. Il en est de même concernant l’utilisation d’un système de fermeture en raison du contexte (angioplastie en 6F, obésité morbide). En revanche, la gestion de l’infection par le premier hôpital a été critiquée par l’expert, en raison d’un geste partiel par le chirurgien (alors que tout invitait à une exérèse large : infection sur un corps étranger), et d’une mono-antibiothérapie trop courte. 4. Discussion Les infections en cardiologie interventionnelle sont si rares, que les cardiologues n’y pensent pas, ou bien trop tardivement. La littérature rapporte une incidence faible de 0,2 % lors d’une compression manuelle. Il est aujourd’hui admis que les systèmes de fermeture augmenteraient ce risque [1], le faisant passer à 0,6 % [2]. L’AHA [1] rappelle que les systèmes de fermeture, comparativement aux compressions manuelles, occasionnent surtout des infections plus sévères qui nécessitent plus souvent un traitement chirurgical. Le diabète, l’obésité et l’implantation d’une fermeture dans les 6 mois précédents augmenteraient ce risque infectieux [3]. De nombreuses complications infectieuses ont fait l’objet de plaintes auprès des médecins assurés auprès du Sou Médical/MACSF, que ce soit localement (endartérites, faux anévrysmes, ruptures vasculaires, thromboses, ischémies aiguës, amputations, infections des articulations de hanches natives ou prothétiques [imposant l’ablation du matériel comme dans le cas clinique]), que par diffusion hématogène (endocardites, spondylodiscites et arthrites à distance). Baddour et al. [1] conseillent d’éviter de ponctionner une fémorale lorsqu’il existe une prothèse de hanche homolatérale. En cas de ponction itérative, il est préférable de ponctionner la fémorale controlatérale. En cas de plainte, les experts infectiologues sont particulièrement attentifs à la lecture des protocoles de préparation cutanée (rasage proscrit, tonte au plus proche de l’heure de la procédure. . .). La douche, la détersion et les 2 badigeons d’antiseptiques doivent être tracés (feuille de liaison service/bloc, cahier de bloc de coronarographie). Un nouveau badigeon et le changement des gants lors de l’implantation du système de fermeture sont habituellement effectués. La place de l’antibioprophylaxie reste discutable, car, outre le risque allergique, son utilisation favoriserait l’émergence de germes résistants. Devant la gravité de ces infections, les experts se montrent exigeants sur la réactivité des médecins dans la précocité du diagnostic (biologie, hémocultures, prélèvements bactériologiques) et la mise en route du traitement. Le délabrement de la paroi artérielle sur corps étranger rend nécessaire le recours à un chirurgien vasculaire [3]. Les infectiologues sont plus pertinents pour choisir une antibiothérapie ciblée selon l’antibiogramme mais également dans la recherche de foyers infectieux à distance.

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5. Conclusions

Références

L’utilisation de système de fermeture percutané augmente le risque d’infections graves, dont il convient d’avoir conscience avant leur utilisation. Elle nécessite de suivre des mesures préventives simples, complétées d’une trac¸abilité rigoureuse. Au décours de l’acte, les praticiens doivent se montrer réactifs pour dépister et traiter précocement ces infections et doivent s’adjoindre le concours d’infectiologues et de chirurgiens vasculaires.

[1] Baddour LM, Bettmann MA, Bolger AF, Epstein AE, Ferrieri P, Gerber MA, et al. AHA statements. Nonvalvular cardiovascular device-related infections. Circulation 2003;108(16):2015–31. [2] Biancari F, D’andrea V, Di Marco C, Savino G, Tiozzo V, Catania A. Metaanalysis of randomized trials on the efficacy of vascular closure devices after diagnostic angiography and angioplasty. Am Heart J 2010;159(4):518–31. [3] Whitton Hollis H, Rehring TF. Femoral endarteritis associated with percutaneous suture closure: new technology, challenging complications. J Vasc Surg 2003;38(1):83–7.

Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.