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Les marronniers sont de retour ?
Éditorial
Kinesither Rev 2006;(58):1
Les marronniers sont de retour ?
C
ela fait maintenant un peu moins de 4 mois que les jeunes diplômés de juin 2006 sont entrés dans la vie active, et déjà quelques-uns viennent me voir pour un avis. Certains sont surpris par le manque de variétés des pratiques (« vous vous rendez compte, dans ce cabinet, tous les lombalgiques ont 15 minutes de chaleur et 10 minutes de massage, point ») ; d’autres pensent à ce qu’ils pourraient étudier (« est-ce que l’école des cadres c’est bien ? » ; « vous connaissez une bonne école d’ostéo ? » ; « qu’est-ce qu’on peut étudier d’autres ? ») ; enfin une petite partie trouvent une voie plus ou moins rationnelle ou ésotérique (« j’utilise la méthode…, vous ne connaissez pas, mais c’est super ! J’ai un patient qui souffrait depuis 1 an que j’ai guéri en 2 séances ! »). Je ne parle pas de ceux qui ont travaillé dans des cabinets en rétrocédant 50 % des honoraires et qui me demandent si c’est normal ; ni de ceux qui ont pu s’installer là où ils le voulaient et qui étaient satisfaits. En moi-même, je me dis que dans 3 ou 4 ans, les mêmes reviendront en se plaignant des honoraires et des conflits avec les médecins conseils, des contraventions, du fait que leur revenu ne variera pas beaucoup jusqu’à la retraite ou de la concurrence déloyale de « confrères » pratiquant des honoraires absurdes ou faisant du copinage avec les médecins du quartier. Plus tard encore, ils me diront qu’ils ne trouvent pas de remplaçant ou que les postes salariés ne sont pas pourvus… Nous pouvons souhaiter bonne chance à l’ordre des kinésithérapeutes pour essayer d‘améliorer certains points. En revanche, nous pouvons nous interroger sur ces sujets « marronniers ». Un « marronnier » en journalisme est un événement récurrent et prévisible qui donne lieu à un article d’information incontournable. Tout comme le marronnier qui invariablement, tous les ans, produit ses fruits, le marronnier journalistique reproduit les mêmes sujets avec plus ou moins d’originalité. La qualité première du marronnier est qu’il n’est jamais rédigé dans l’urgence, puisque sa parution est programmée…, d’une année sur l’autre. Regardez le journal télévisé lorsqu’il parlera
de l’heure d’hiver (est-ce différent de l’année dernière ? Est-ce le même sujet rediffusé ?). Une profession vivante doit faire le point régulièrement sur ses pratiques, ses connaissances, ses publications pour essayer de trouver des solutions et mettre en place une stratégie dans le temps pour les appliquer. Si les articles publiés ne sont pas originaux, si les conférences n’apportent rien de nouveau, si les enseignants enseignent toujours le même cours, cela veut dire que nous réinventons la roue. Si nous avançons en corrigeant nos points faibles, en nous appuyant sur des connaissances actualisées, nous obtenons un développement professionnel régulier et reconnu. Cela nécessite pour les kinésithérapeutes de rester accroché au train de l’actualité, d’avoir un regard critique et de chercher des informations extérieures. Les pays anglosaxons ont des associations professionnelles qui déterminent périodiquement un « agenda » pour les 5 ans à venir et aident les praticiens de terrain. Des objectifs précis sont définis pour faire avancer la profession, des bases de données sont produites, des documents de synthèse font le point. Ces actions viennent s’empiler sur les actions précédentes comme des strates sédimentaires. « Je suis juché sur des épaules de géant » disait Isaac Newton pour nous rappeler que nous avançons grâce aux anciens que nous finissons par dépasser. Est-ce que la kinésithérapie francophone est prête pour se regrouper autour d’une association scientifique commune ? Je l’ignore. Est-ce que vous pensez que cet éditorial pourrait être à nouveau publié dans 10 ans ? Je ne le souhaite pas. Pierre Trudelle [email protected] Réagissez sur le blog de la revue http://revuekine.hautetfort.com Inscrivez-vous pour le congrès de la revue http://www.kinesitherapielecongres.com
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Kinesither Rev 2006;(58):1
Les marronniers sont de retour ?
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ela fait maintenant un peu moins de 4 mois que les jeunes diplômés de juin 2006 sont entrés dans la vie active, et déjà quelques-uns viennent me voir pour un avis. Certains sont surpris par le manque de variétés des pratiques (« vous vous rendez compte, dans ce cabinet, tous les lombalgiques ont 15 minutes de chaleur et 10 minutes de massage, point ») ; d’autres pensent à ce qu’ils pourraient étudier (« est-ce que l’école des cadres c’est bien ? » ; « vous connaissez une bonne école d’ostéo ? » ; « qu’est-ce qu’on peut étudier d’autres ? ») ; enfin une petite partie trouvent une voie plus ou moins rationnelle ou ésotérique (« j’utilise la méthode…, vous ne connaissez pas, mais c’est super ! J’ai un patient qui souffrait depuis 1 an que j’ai guéri en 2 séances ! »). Je ne parle pas de ceux qui ont travaillé dans des cabinets en rétrocédant 50 % des honoraires et qui me demandent si c’est normal ; ni de ceux qui ont pu s’installer là où ils le voulaient et qui étaient satisfaits. En moi-même, je me dis que dans 3 ou 4 ans, les mêmes reviendront en se plaignant des honoraires et des conflits avec les médecins conseils, des contraventions, du fait que leur revenu ne variera pas beaucoup jusqu’à la retraite ou de la concurrence déloyale de « confrères » pratiquant des honoraires absurdes ou faisant du copinage avec les médecins du quartier. Plus tard encore, ils me diront qu’ils ne trouvent pas de remplaçant ou que les postes salariés ne sont pas pourvus… Nous pouvons souhaiter bonne chance à l’ordre des kinésithérapeutes pour essayer d‘améliorer certains points. En revanche, nous pouvons nous interroger sur ces sujets « marronniers ». Un « marronnier » en journalisme est un événement récurrent et prévisible qui donne lieu à un article d’information incontournable. Tout comme le marronnier qui invariablement, tous les ans, produit ses fruits, le marronnier journalistique reproduit les mêmes sujets avec plus ou moins d’originalité. La qualité première du marronnier est qu’il n’est jamais rédigé dans l’urgence, puisque sa parution est programmée…, d’une année sur l’autre. Regardez le journal télévisé lorsqu’il parlera
de l’heure d’hiver (est-ce différent de l’année dernière ? Est-ce le même sujet rediffusé ?). Une profession vivante doit faire le point régulièrement sur ses pratiques, ses connaissances, ses publications pour essayer de trouver des solutions et mettre en place une stratégie dans le temps pour les appliquer. Si les articles publiés ne sont pas originaux, si les conférences n’apportent rien de nouveau, si les enseignants enseignent toujours le même cours, cela veut dire que nous réinventons la roue. Si nous avançons en corrigeant nos points faibles, en nous appuyant sur des connaissances actualisées, nous obtenons un développement professionnel régulier et reconnu. Cela nécessite pour les kinésithérapeutes de rester accroché au train de l’actualité, d’avoir un regard critique et de chercher des informations extérieures. Les pays anglosaxons ont des associations professionnelles qui déterminent périodiquement un « agenda » pour les 5 ans à venir et aident les praticiens de terrain. Des objectifs précis sont définis pour faire avancer la profession, des bases de données sont produites, des documents de synthèse font le point. Ces actions viennent s’empiler sur les actions précédentes comme des strates sédimentaires. « Je suis juché sur des épaules de géant » disait Isaac Newton pour nous rappeler que nous avançons grâce aux anciens que nous finissons par dépasser. Est-ce que la kinésithérapie francophone est prête pour se regrouper autour d’une association scientifique commune ? Je l’ignore. Est-ce que vous pensez que cet éditorial pourrait être à nouveau publié dans 10 ans ? Je ne le souhaite pas. Pierre Trudelle [email protected] Réagissez sur le blog de la revue http://revuekine.hautetfort.com Inscrivez-vous pour le congrès de la revue http://www.kinesitherapielecongres.com
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