Les tumeurs gliales et glioneuronales de l'adulte et de l'enfant : principales altérations génétiques et classification histomoléculaire

Les tumeurs gliales et glioneuronales de l'adulte et de l'enfant : principales altérations génétiques et classification histomoléculaire

Synthèse General review Volume 100 • N◦ 7-8 • juillet-août 2013 John Libbey Eurotext © Les tumeurs gliales et glioneuronales de l’adulte et de l’en...

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Synthèse General review

Volume 100 • N◦ 7-8 • juillet-août 2013 John Libbey Eurotext

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Les tumeurs gliales et glioneuronales de l’adulte et de l’enfant : principales altérations génétiques et classification histomoléculaire Glial and glioneuronal tumors in adults and children: main genetic alterations and towards a histomolecular classification Article rec¸u le 30 octobre 2012, accepté le 07 f´evrier 2013 Tirés à part : D. Figarella-Branger

Dominique Figarella-Branger1,2 , Céline Chappe1 , Laëtitia Padovani1,3 , Sandy Mercurio1 , Carole Colin1 , Fabien Forest2 , Corinne Bouvier1,2 1

Aix-Marseille Université, Inserm, CRO2 UMR_S 911, 13385 Marseille, France 2 APHM, Hôpital de la Timone, service d’anatomie pathologique et de neuropathologie, 13385 Marseille, France 3 APHM, Hôpital de la Timone, service de radiothérapie, 13385 Marseille, France

doi : 10.1684/bdc.2013.1789

Pour citer cet article : Figarella-Branger D, Chappe C, Padovani L, Mercurio S, Colin C, Forest F, Bouvier C. Les tumeurs gliales et glioneuronales de l’adulte et de l’enfant : principales altérations génétiques et classification histomoléculaire. Bull Cancer 2013 ; 100 : 715-26. doi : 10.1684/bdc.2013.1789.

Résumé. Les tumeurs gliales et glioneuronales de l’enfant et de l’adulte présentent des caractéristiques cliniques, neuroradiologiques et moléculaires différentes selon le sous-type tumoral et au sein d’une même catégorie entre l’adulte et l’enfant. Ainsi, les gliomes de l’enfant sont essentiellement infratentoriels, le plus souvent circonscrits et bénins à l’exception du gliome diffus du tronc cérébral et du thalamus. Le glioblastome est exceptionnel chez l’enfant. Les gliomes de l’adulte siègent préférentiellement au niveau des hémisphères cérébraux, sont infiltrants et plus souvent de haut grade, le plus fréquent étant le glioblastome. Les tumeurs glioneuronales sont essentiellement observées chez l’enfant et l’adulte jeune. Supratentorielles, elles prédominent dans le lobe temporal. Bien qu’appartenant à deux catégories distinctes dans la classification de l’OMS, les astrocytomes pilocytiques, les xanthoastrocytomes pléomorphes et les gangliogliomes présentent des aspects neuroradiologiques similaires : tumeurs souvent kystiques avec un nodule mural prenant le produit de contraste. Les avancées majeures de la caractérisation moléculaire de ces tumeurs ont montré des différences entre l’adulte et l’enfant en faveur de différentes voies de gliomagenèse selon l’âge. Ainsi chez l’adulte, une classification histomoléculaire des gliomes infiltrants peut être proposée en fonction de l’existence ou non de mutations dans les gènes IDH. On distingue la gliomagenèse IDH-dépendante qui regroupe la plupart des grades II et III (qui peuvent présenter également d’autres altérations moléculaires comme les mutations de TP53 ou la codélétion 1p19q) et les glioblastomes secondaires. En revanche, la Bull Cancer vol. 100 • N◦ 7-8 • juillet-août 2013

Abstract. Glial and glioneuronal tumors in children and adult demonstrate distinctive clinical, neuroradiological and molecular features depending on the pathological subtype and within a same subgroup according to the age. In children, gliomas are mainly located in the infratentorial part of the brain. They are most often benign and circumscribed but infiltrative tumors with dismal prognosis are recorded within the pons (DIGP) or the thalamus. Glioblastomas are very rare in children. In contrast, gliomas in adult mainly occur in the cerebral hemispheres and the most frequent subtype is glioblastoma. Glioneuronal tumors mainly occurred in children and young adults. In addition, although pilocytic astrocytomas, pleomorphic xanthoastrocytomas and gangliogliomas are classified into different subgroups according to the WHO 2007 classification, these tumors demonstrate similar neuroradiological findings: they are cystic with contrast enhancement of a mural nodule. Major advances have been made these last five years in the discovery of some master genes that are involved in gliomagenesis and point out differences between children and adults. In adults, infiltrative gliomas can be classified into two major subgroups depending on the existence or not of IDH mutations. IDH-dependent gliomagenesis encompasses diffuse grade II and grade III (they can also show additional molecular alterations such as TP53 mutation or 1p19q codeletion) and secondary glioblastomas. IDH-independent

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gliomagenèse IDH-indépendante regroupe des entités différentes comme les gliomes de grade II triples négatifs, les gliomatoses (grade III) et les glioblastomes de novo (grade IV). Chez l’enfant, on pourrait suggérer de distinguer pour les gliomes infiltrants ceux qui présentent la mutation K27M dans l’histone H3.3 ou H3.1, ceux qui ont la mutation G34R/V de l’histone H3.3 et ceux dépourvus de mutation dans les histones. Les astrocytomes pilocytiques, les xanthoastrocytomes pléomorphes et les gangliogliomes présentent des altérations récurrentes dans le gène BRAF et cela quel que soit l’âge : fusion KIAA1549-BRAF pour les astrocytomes pilocytiques et mutations V600E de BRAF pour les autres tumeurs.  Mots clés : gliomes, tumeurs glioneuronales, adulte, enfant, classification histomoléculaire

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a classification de l’OMS [1] est la classification de référence des tumeurs du système nerveux central. Les gliomes, comme les tumeurs glioneuronales, appartiennent au groupe des tumeurs neuroépithéliales. En fonction de leur origine cellulaire présumée, les gliomes sont classés en différents sous-types : astrocytaire, oligodendroglial ou mixte. Les gliomes sont également classés selon leur grade qui repose sur la présence (ou l’absence) de critères histopronostiques (densité cellulaire, atypies nucléaires, mitoses, prolifération endothéliocapillaire et nécrose). De plus, en fonction de leur potentiel invasif, deux grands types de gliomes sont observés : les gliomes circonscrits, dont le chef de file est l’astrocytome pilocytique (grade I essentiellement) et les gliomes infiltrants qui peuvent être de grade II, III ou IV (glioblastomes). Les glioblastomes surviennent le plus souvent de novo mais également, dans 5 % des cas environ, résultent de la transformation maligne d’un gliome de plus bas grade et sont appelés glioblastomes secondaires. Ces dernières années, des altérations moléculaires récurrentes ont été mises en évidence dans certains sous-types de gliomes. Elles ouvrent de nouvelles perspectives concernant la gliomagenèse et incitent à la mise en place de classifications histomoléculaires. De plus, la mise en évidence d’altérations moléculaires différentes dans les gliomes de l’enfant par rapport à ceux de l’adulte, malgré des similitudes morphologiques, souligne la nécessité de mettre en place une classification histomoléculaire des gliomes en fonction de l’âge des patients. La mise en évidence d’altérations moléculaires communes entre certaines tumeurs glioneuronales et les astrocytomes pilocytiques souligne leur parenté et devrait conduire à une recomposition des différentes catégories de tumeurs gliales et glioneuronales. Enfin, l’intégration des données histomoléculaires, de l’âge, mais également des données neuroradiologiques

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gliomagenesis include triple negative grade II gliomas, gliomatosis cerebri (grade III) and de novo glioblastomas. Pilocytic astrocytomas, pleomorphic xanthoastrocytomas and gangliogliomas share in common BRAF alterations. However, KIAA1549BRAF fusion characterizes pilocytic astrocytomas whereas V600E BRAF mutation is mainly recorded in pleomorphic xanthoastrocytomas and gangliogliomas. 

Key words: gliomas, glioneuronal tumors, adult, children, histomolecular classification

devrait permettre une bien meilleure reproductibilité diagnostique, base de la prise en charge de ces tumeurs. Dans cette revue, nous aborderons successivement : – la classification de l’OMS des principales tumeurs gliales et glioneuronales ; – les principaux aspects clinicoradiologiques ; – les altérations génétiques récurrentes des tumeurs gliales et glioneuronales et leur intérêt diagnostique ; – la classification histomoléculaire des tumeurs gliales et glioneuronales en fonction de l’âge et les principales étapes de la gliomagenèse.

La classification de l’OMS des principales tumeurs gliales et glioneuronales : rappel et limites La classification de l’OMS [1] distingue pour les gliomes, les gliomes astrocytaires, oligodendrocytaires et les gliomes mixtes. Les différents sous-types sont rappelés dans le tableau 1. Cependant, cette classification pose des problèmes de reproductibilité qui résultent d’au moins trois facteurs principaux : – la difficulté de distinguer pour les gliomes infiltrants les cellules tumorales du parenchyme résiduel infiltré (en dehors des gliomes IDH1 R132H+ [cf. infra]) ; – la possible non-représentativité des prélèvements nécessitant une confrontation entre les données cliniques et l’imagerie ; – la difficulté de reconnaître le type précis de la cellule tumorale, astrocyte ou oligodendrocyte (sans doute en raison de leur histogenèse probable à partir de cellules neuroépithéliales progénitrices transformées). En effet, bien que la classification de l’OMS repose sur le postulat que les gliomes dériveraient de cellules gliales matures [1], les données récentes de la littérature suggèrent que les gliomes dériveraient plutôt de cellules précurseurs : précurseurs gliaux pour les gliomes infiltrants de grade II et III [2, 3] ou cellules Bull Cancer vol. 100 • N◦ 7-8 • juillet-août 2013

Classification histomoléculaire des tumeurs gliales et glioneuronales Tableau 1. La classification des gliomes et des tumeurs glioneuronales selon l’OMS. 1. Gliomes astrocytaires Astrocytome pilocytique Variant : astrocytome pilomyxoïde Astrocytome à cellules géantes sous épendymaire Xanthoastrocytome pléomorphe Astrocytome diffus (fibrillaire, protoplasmique, gémistocytique) Astrocytome anaplasique Glioblastome Variant : glioblastome à cellules géantes Gliosarcome Gliomatose cérébrale 2. Gliomes oligodendrogliaux Oligodendrogliome Oligodendrogliome anaplasique 3. Gliomes mixtes Oligoastrocytome Oligoastrocytome anaplasique Si nécrose 4. Tumeurs glioneuronales (elles sont classées dans le groupe « tumeurs neuronales et glioneuronales ») Gangliogliome Gangliogliome anaplasique Astrocytome/gangliogliome desmoplasique infantile Tumeur neuroépithéliale dysembryoplasique Tumeur glioneuronale papillaire Tumeur glioneuronale à rosettes du IVe ventricule

souches neurales cancéreuses pour les glioblastomes de novo [4, 5]. De plus, les astrocytomes pilocytiques, en particulier ceux du chiasma optique et du troisième ventricule, pourraient dériver de cellules ayant des propriétés de glie radiaire [6]. Par ailleurs, les xanthoastrocytomes pléomorphes, bien que classés dans les tumeurs astrocytaires, partagent avec les tumeurs glioneuronales la coexpression de marqueurs gliaux et neuronaux [1]. Il est à noter que le groupe des tumeurs neuronales et glioneuronales renferme des entités très différentes rendant artificiel ce regroupement. Ainsi, font partie de ce sous-groupe des tumeurs neuronales pures dont certaines s’apparentent à des dysplasies (maladie de Lhermitte-Duclos) et des tumeurs mixtes gliales et neuronales qui comprennent essentiellement les gangliogliomes (dont les gangliogliomes desmoplasiques infantiles), les tumeurs neuroépithéliales dysembryoplasiques et des tumeurs exceptionnelles comme la tumeur glioneuronale à rosettes et la tumeur glioneuronale papillaire (tableau 1). Ces tumeurs glioneuronales partagent avec l’astrocytome pilocytique et le xanthoastrocytome pléomorphe un bon pronostic du fait de leur caractère circonscrit permettant une exérèse chirurgicale complète dans la plupart des cas.

Les principaux aspects clinicoradiologiques des tumeurs gliales et glioneuronales Les données présentées ci-dessous sont délibérément simplifiées et sans doute un peu caricaturales Bull Cancer vol. 100 • N◦ 7-8 • juillet-août 2013

Grade I Grade II Grade I Grade II Grade II Grade III Grade IV Grade III Grade II Grade III Grade II Grade III Grade IV Grade I Grade III Grade I Grade I Grade I Grade I

dans un souci de clarté. Cependant, elles soulignent l’importance majeure de l’âge, de la topographie et des caractéristiques neuroradiologiques principales (prise de contraste, nécrose, kyste, œdème périlésionnel) pour l’orientation diagnostique préopératoire. Elles soulignent les caractéristiques communes de certaines tumeurs en dépit de leur appartenance à des catégories différentes. Elles mettent également l’accent sur la topographie des lésions et leur lien éventuel avec certaines zones riches en cellules souches ou en progéniteurs gliaux.

Les tumeurs gliales et glioneuronales de l’enfant et de l’adulte jeune (figure 1) Les tumeurs infiltrantes Elles répondent à trois grandes entités anatomocliniques. Le gliome diffus du tronc cérébral Essentiellement localisé au niveau de la protubérance, il est responsable d’une augmentation diffuse de la taille du tronc cérébral avec peu ou pas de prise de contraste. Il est souvent de classement histopathologique difficile, le plus souvent de phénotype astrocytaire, de grade II ou III, rarement de grade IV. Le gliome du thalamus de localisation uni- ou bithalamique Il partage avec le gliome diffus du tronc les mêmes caractéristiques neuroradiologiques et souvent les

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Figure 1. Les tumeurs gliales et glioneuronales de l’adulte (A) et de l’enfant et de l’adulte jeune (B).

mêmes difficultés de classement. Il est, en revanche, plus souvent de phénotype oligodendroglial, de grade II ou III et plus rarement de grade IV [7]. Le gliome diffus du tronc cérébral et le gliome infiltrant du thalamus sont de très mauvais pronostic quel que soit leur grade.

Le gliome hémisphérique avec prise de contraste, nécrose et œdème périlésionnel Il répond le plus souvent à un glioblastome mais cette tumeur reste exceptionnelle chez l’enfant. Dans une topographie très corticale, il pourra s’agir d’un glioblastome à cellules géantes ou d’un xanthoastrocytome pléomorphe avec caractère anaplasique.

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Les tumeurs circonscrites Les tumeurs kystiques avec nodule mural rehaussé par le produit de contraste Le diagnostic histopathologique dépend souvent de la topographie. Dominé par l’astrocytome pilocytique quand la tumeur siège dans la fosse cérébrale postérieure, la région hypothalamo-chiasmatique ou la moelle épinière, il pourra s’agir soit d’un astrocytome pilocytique ou d’un gangliogliome au niveau du tronc cérébral. Dans cette topographie, les tumeurs sont volontiers postérieures et exophytiques. L’astrocytome pilocytique est rare au niveau des hémisphères cérébraux. Dans cette localisation, il s’agit le plus souvent d’un gangliogliome, d’un xanthoastrocytome pléomorphe ou exceptionnellement d’une tumeur Bull Cancer vol. 100 • N◦ 7-8 • juillet-août 2013

Classification histomoléculaire des tumeurs gliales et glioneuronales

glioneuronale papillaire. Quand la composante neuronale ganglionnaire est absente ou faiblement représentée (fragments biopsiques), le diagnostic différentiel entre astrocytome pilocytique et gangliogliome est difficile. Les tumeurs corticales non kystiques et dépourvues d’œdème Il s’agit essentiellement de tumeurs neuroépithéliales dysembryoplasiques. Elles surviennent chez le sujet jeune et se caractérisent par des crises comitiales ayant débuté avant 20 ans et une absence de déficit neurologique. À l’imagerie, une empreinte osseuse peut être observée. Ces tumeurs ont souvent un aspect triangulaire et renferment des travées [8]. La présence d’accidents hémorragiques qui peuvent survenir au cours de l’évolution modifie la séméiologie clinicoradiologique et conduit à des tableaux bruyants, souvent trompeurs (tumeurs hétérogènes prenant le produit de contraste avec œdème périlésionnel). Par ailleurs, certaines lésions partagent la même séméiologie clinicoradiologique mais une histologie simulant un gliome infiltrant de grade II, le plus souvent de phénotype oligodendroglial. Cela a conduit au concept controversé de DNT non spécifique par DaumasDuport et al. [9]. Quelle que soit leur appellation, ces tumeurs corticales qui simulent un gliome diffus partagent avec les DNT le même excellent pronostic et les mêmes altérations moléculaires [10, 11].

Les tumeurs gliales et glioneuronales de l’adulte (figure 1) Les tumeurs infiltrantes Les tumeurs avec un aspect en « cocarde » (hypodensité/nécrose centrale, paroi fine, prenant le produit de contraste et œdème périlésionnel) Il s’agit essentiellement du glioblastome qui est la tumeur gliale la plus fréquente de l’adulte de plus de 45 ans. Son incidence de l’ordre de 4/1 000 000 h par an est en augmentation. Les autres tumeurs gliales infiltrantes de l’adulte de grade II et III Elles ne s’accompagnent classiquement pas de nécrose. La prise de contraste, le plus souvent punctiforme, ou multinodulaire hétérogène, caractérise les grades III. Cependant, il n’existe pas de corrélation absolue entre la prise de contraste et le grading de l’OMS : certains grades III ne prennent pas le produit de contraste et inversement, bien que rare, une prise de contraste peut être observée dans des grades II. Par ailleurs, certains auteurs ont rapporté des corrélations entre les données moléculaires et les limites tumorales visibles sur les séquences T2 et flair (bords nets ou flous), mais les exceptions sont nombreuses [12]. Bull Cancer vol. 100 • N◦ 7-8 • juillet-août 2013

La gliomatose La définition est essentiellement neuroradiologique. Il s’agit d’une lésion très infiltrante ne prenant pas le produit de contraste atteignant au moins trois lobes, se caractérisant le plus souvent par une atteinte hémisphérique bilatérale, une extension aux noyaux gris centraux et/ou au tronc cérébral et au cervelet. Les aspects histopathologiques sont le plus souvent identiques à ceux observés dans les gliomes astrocytaires, oligodendrogliaux ou mixtes, de grade II ou III. Certains auteurs distinguent la gliomatose primaire de type I (qui correspond à la définition ci-dessus) de la gliomatose secondaire (type 2) qui résulterait de la diffusion secondaire d’un gliome de grade II ou III [1].

Les tumeurs circonscrites Les aspects neuroradiologiques sont identiques à ceux rapportés dans le chapitre « Les tumeurs circonscrites de l’enfant et de l’adulte jeune ». Cependant, l’astrocytome pilocytique est rare chez l’adulte. De plus, il convient d’être très prudent avant de porter un diagnostic de tumeur neuroépithéliale dysembryoplasique chez l’adulte si la comitialité est d’apparition récente. En effet, certains oligodendrogliomes peuvent, en infiltrant le cortex, simuler un aspect de composante glioneuronale spécifique classiquement observée dans les DNT [1].

Les altérations génétiques récurrentes des tumeurs gliales et glioneuronales et leurs intérêts diagnostiques Les mutations des gènes IDH (isocitrate dishydrogenase) Il existe deux isoformes principales pour les gènes IDH (IDH1 et IDH2) qui codent pour des enzymes permettant la décarboxylation dépendante du NADP+. IDH1 est cytosolique et IDH2 mitochondrial. Les mutations récurrentes rapportées dans les gliomes touchent les sites actifs des enzymes : R132 pour IDH1 et R172 pour IDH2 conduisant à l’accumulation de 2-hydroxyglutarate [13]. Les mutations de IDH1 et IDH2 affectent un seul allèle et sont mutuellement exclusives. Les mutations des gènes IDH sont l’apanage des gliomes infiltrants de l’adulte de grade II, III et des glioblastomes secondaires. La mutation R132H de IDH1 est la plus fréquente (près de 95 %) des mutations et peut être mise en évidence par technique immunohistochimique [14]. Plus rarement, d’autres mutations au site R132 de IDH1 ou des mutations de IDH2 sont observées [15]. Les mutations des gènes IDH sont exceptionnelles chez l’enfant [11, 15]. La présence d’une mutation dans les gènes IDH est un facteur de

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bon pronostic dans les gliomes de grade II, III et IV [16, 17] bien que non retrouvé par tous les auteurs [18].

Les mutations de p53 et la codélétion 1p19q Ces altérations connues depuis de longues années ont conforté la distinction entre astrocytomes et oligodendrogliomes. En effet, les mutations de TP53 caractérisent les astrocytomes diffus de grade II et III et certains glioblastomes alors que la codélétion 1p19q, conséquence de la translocation t(1;19)(q10;p10) [19], caractérise les oligodendrogliomes [20]. De plus, ces altérations sont mutuellement exclusives [18, 21]. Par ailleurs, tous les gliomes codélétés présentent une mutation dans les gènes IDH [22]. Plus récemment, il a été rapporté des mutations récurrentes des gènes CIC (situé sur le chromosome 19q) et FUBP1 (localisé en 1p) au sein des oligodendrogliomes [23]. D’autres auteurs ont montré dans une série plus large d’oligodendrogliomes et d’oligoastrocytomes que les mutations de CIC étaient toujours associées à la codélétion 1p19q et que les mutations de FUPB1, moins fréquentes que celles de CIC, survenaient toujours en association avec ces dernières. Enfin, les mutations de CIC et FUBP1 étaient toujours associées à des mutations des gènes IDH [24]. La valeur pronostique de ces altérations n’est pas connue à ce jour. La codélétion 1p19q est exceptionnelle dans les oligodendrogliomes de l’enfant [11, 25], mais les mutations de TP53 sont fréquemment retrouvées dans les gliomes de haut grade chez les enfants de moins de trois ans [26]. Elles sont particulièrement fréquentes dans les gliomes diffus du tronc cérébral [27, 28] où elles sont fréquemment associées à la mutation K27M de l’histone H3.3 [29]. La présence d’une mutation dans le gène TP53 conduit à la production d’une protéine anormale, détectable en immunohistochimie. Dans une série de 149 gliomes de grade II, Peraud et al. [30] ont rapporté une sensibilité de 90 % et une spécificité de 100 % de l’expression de la protéine pour prédire les mutations de TP53. Ainsi, en pratique diagnostique courante, l’immunohistochimie peut remplacer dans une certaine mesure la mise en évidence des mutations de TP53 [31, 32], et cela d’autant que la recherche de mutation de TP53 nécessite le séquenc¸age complet de la séquence codante (exons 2-11) et de la jonction intron-exon [33]. De plus, chez l’enfant, la présence d’une expression de p53 dans les gliomes de haut grade est un facteur indépendant de mauvais pronostic [34]. L’expression de p53 est également un facteur de mauvais pronostic dans les gliomes diffus de grade II de l’adulte [21]. Au contraire, la présence d’une codélétion 1p19q est un élément de bon pronostic.

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Les mutations des histones H3 Comme pour la mise en évidence des mutations dans les gènes IDH [13], c’est le séquenc¸age complet du génome qui a permis la mise en évidence de mutations récurrentes dans les gènes H3F3A et HIST1H3B codant respectivement pour l’histone H3.3 et l’histone H3.1 dans les gliomes diffus du tronc et les glioblastomes de l’enfant [27, 35]. Il s’agit de la mutation K27M responsable de la substitution d’une lysine en méthionine dans l’histone H3.3 retrouvée dans 60 % de ces tumeurs. La même mutation dans l’histone H3.1 a été également retrouvée, mais à une fréquence moindre (18 %), dans les gliomes diffus du tronc de l’enfant alors qu’une autre mutation dans l’histone H3.3, la mutation G34V/R, responsable du remplacement d’une glycine par une valine ou une arginine, a été mise en évidence dans les glioblastomes de l’enfant et de l’adulte jeune [27, 35]. Une étude plus récente a rapporté la mutation K27M de l’histone H3.3 dans 71 % des gliomes diffus du tronc de l’enfant analysés (30/42 cas) [29]. Aucun cas de mutation de l’histone H3.1 et aucune mutation G34V/R de l’histone H3.3 n’ont été retrouvés dans cette série de gliomes diffus du tronc confirmant que cette mutation est l’apanage des glioblastomes de l’enfant et que la mutation K27M-H3.1 est beaucoup plus rare que K27M-H3.3 [29]. Par ailleurs, il existe une association forte entre les mutations de H3.3 et la présence de mutation de TP53 ou encore de ATRX (alpha-thalassemic ou syndrome de retard mental lié à l’X) qui code pour une sous-unité d’un complexe chromatinien nécessaire à la fonction de H3.3 [36]. Cette association a été observée dans 13/13 glioblastomes. Tous les glioblastomes G34V/R-H3.3 présentaient également une mutation de TP53 et de ATRX [27]. Dans les gliomes diffus du tronc, seuls 2/30 cas avec la mutation K27M-H3.3 avaient également une mutation de ATRX et de TP53 [29]. Par ailleurs, dans les gliomes diffus du tronc, la présence d’une mutation K27M-H3.3 est un élément de mauvais pronostic [29].

Les altérations de la voie des MAP kinases Deux altérations principales ont été rapportées : la fusion KIAA1549-BRAF qui résulte d’une duplication en tandem en 7q34 [37, 38] et la mutation V600E de BRAF. La fusion KIAA1549-BRAF est l’apanage des astrocytomes pilocytiques, surtout dans leur localisation infratentorielle et au niveau des voies optiques [3941]. Elle est cependant beaucoup plus fréquente chez l’enfant que chez l’adulte [42]. En revanche, la mutation V600E de BRAF est l’apanage des xanthoastrocytomes pléomorphes et des gangliogliomes retrouvée respectivement dans 60 et 40 % des cas [43-45]. De plus, la mutation V600E de BRAF a également été rapportée dans des astrocytomes pilocytiques extracérébelleux [45]. Dans une étude récente, nous Bull Cancer vol. 100 • N◦ 7-8 • juillet-août 2013

Classification histomoléculaire des tumeurs gliales et glioneuronales

l’avons également observée dans des DNT et dans des gliomes corticaux de grade II de l’enfant (Chappe et al., données non publiées). La mutation V600E de BRAF est également retrouvée dans 10 % des gliomes de haut grade de l’enfant et, dans ce contexte, est associée à une délétion de CDKN2A/B [46]. Au moins, cinq types de fusions différentes ont été mis en évidence par technique de RT-PCR, les plus fréquentes étant les fusions KIAA1549 exon 16 -BRAF exon 9 , KIAA1549 exon 15 -BRAF exon 9 et KIAA1549 exon 16 BRAF exon 11 [47]. La fusion KIAA1549-BRAF est l’apanage des astrocytomes pilocytiques à l’exception des cas localisés dans les hémisphères cérébraux. La présence de la fusion KIAA1549-BRAF est un élément de bon pronostic dans les gliomes de bas grade de l’enfant [48]. Cependant, cette valeur pronostique n’est plus retrouvée dans une population plus homogène, comportant exclusivement des astrocytomes pilocytiques de grade I et II [41].

Les autres altérations moléculaires et les principales signatures transcriptomiques des gliomes de haut grade Les principales altérations génomiques des gliomes de haut grade Les glioblastomes et les gliomes de haut grade de l’enfant et de l’adulte jeune présentent des altérations génomiques radicalement différentes de celles observées dans les glioblastomes de novo de l’adulte. En effet, les glioblastomes de l’adulte présentent des altérations génomiques complexes et deux altérations récurrentes représentées par la perte du 10q et le gain du 7 sont observés respectivement dans 80 et 74 % des cas alors qu’elles sont exceptionnelles chez l’enfant [49]. En revanche, le caryotype des gliomes de haut grade de l’enfant révèle le plus souvent peu d’anomalies, la principale étant représentée par le gain du 1q, la perte du 16q et du 4q mais ces altérations qui sont exceptionnelles chez l’adulte (moins de 10 %) restent également relativement rares chez l’enfant, n’excédant pas 20 % [49].

L’amplification de facteurs de croissance et les signatures moléculaires Amplification du REGF et PDGFR␣ L’amplification du REGF est une altération récurrente des glioblastomes de l’adulte, observée dans plus de 40 % des cas [13, 50], mais reste rare dans les glioblastomes de l’enfant (au maximum 11 %) et la fréquence dépend des études et des technologies utilisées [49]. L’amplification du REGF n’est pas observée dans les gliomes de grade II de l’adulte et dans les grades III, elle est mutuellement exclusive de la codélétion 1p19q. En revanche, l’amplification du PDGFR␣ est Bull Cancer vol. 100 • N◦ 7-8 • juillet-août 2013

rarement observée dans les glioblastomes de l’adulte à l’exception du sous-groupe proneural décrit par Verhaak et al. [51] (cf. infra), où elle peut être observée jusqu’à 35 % des cas. L’amplification du PDGFR␣ est en revanche une altération récurrente, bien que peu fréquente des glioblastomes de l’enfant (14 % des cas) [26, 52] en accord avec l’amplification du 4q12 où est localisé le gène. Les signatures moléculaires des glioblastomes Chez l’adulte, les travaux du TAGC ont permis de distinguer quatre grands sous-groupes moléculaires de glioblastomes sur la base d’altérations génomiques récurrentes et de signatures transcriptomiques [51]. Le groupe proneural (et à un moindre degré le groupe neural) se caractérise par l’existence de mutations dans les gènes IDH et TP53 et une amplification du PDGFR␣ associées à une expression préférentielle de gènes du lignage oligodendroglial tels que DLL3, NKX22, SOX2 ou OLIG2. Le groupe des glioblastomes mésenchymateux présente des altérations récurrentes de NF1 et une expression des marqueurs mésenchymateux tels que YKL40 et MET. Le groupe des glioblastomes classiques dont les principales altérations sont l’amplification du REGF, et la délétion homozygote en 9p21.3 (CDKN2A/CDKN2B) et une expression des gènes de cellules souches neurales tels que les gènes de la voie Notch ou Sonic Hedgehog. Par ailleurs, comme indiqué dans le paragraphe précédent, la délétion du 10q (PTEN) est une altération caractéristique des glioblastomes, retrouvée dans 69 à 100 % des cas en fonction des sous-types [51]. De fac¸on intéressante, des résultats préliminaires ont montré que les glioblastomes mésenchymateux sont plus fréquemment observés dans la zone sousventriculaire alors que les glioblastomes corticaux sont le plus souvent de phénotype proneural ou classiques [53]. En revanche, l’analyse des signatures transcriptomiques dans les gliomes de haut grade de l’enfant [52] montre trois principaux sous-types qui présentent des parentés avec la signature décrite par Phillips et al. [54] qui avait intéressé des gliomes de grade III et IV de l’adulte. Ainsi, trois sous-groupes de gliomes de haut grade ont été identifiés chez l’enfant : les groupes proneuraux prolifératifs et mésenchymateux. Cependant, contrairement à ce qui est rapporté chez l’adulte, l’amplification du PDGFR␣ caractérise le sous-groupe proliférant. L’ensemble de ces résultats mérite d’être confirmé d’autant que le profil moléculaire des gliomes de l’enfant dépend également de leur âge [49].

Les altérations de la méthylation des gènes dans les glioblastomes Il n’est pas possible dans cette courte revue de faire une révision extensive de la littérature sur le sujet. De fac¸on

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D. Figarella-Branger, et al.

générale, deux altérations principales caractérisent les glioblastomes de novo de l’adulte [55] : – une hypométhylation globale de l’ADN observée dans près de 85 % des glioblastomes et conduisant à une instabilité génomique ; – une hyperméthylation au niveau des îlots CpG du promoteur de nombreux gènes conduisant à leur inactivation. Il en est ainsi de gènes codant pour des protéines impliquées dans la régulation du cycle cellulaire telles que p16 INK4 , p15 INK4b , Rb, p14ARF ou encore de gènes codant pour des protéines impliquées dans l’adhésion cellulaire, l’invasion, l’apoptose, la réponse hormonale, la transduction du signal et enfin la réparation de l’ADN. Ainsi, MGMT (O6-methylguanine-DNA methyl-transferase) est une enzyme impliquée dans la réparation de l’ADN après action des agents alkylants. La méthylation de son promoteur, observée dans environ 40 % des glioblastomes [20], est responsable d’une inactivation de l’enzyme. Celle-ci est associée à une meilleure réponse aux traitements par agents alkylants et tout spécialement le témozolomide. Ainsi, dans une étude princeps (essai EORTC/NCTC 22981/26981), il a été montré que chez des patients adultes de moins de 70 ans porteurs d’un glioblastome et présentant une méthylation du promoteur MGMT, la survie était plus

longue que ceux traités par radiochimiothérapie concomitante que pour ceux traités par radiothérapie seule (24 % de survie à deux ans contre 15 % [56]). Par la suite, de nombreux travaux ont confirmé ces résultats même s’il n’existe toujours pas de consensus quant à la meilleure méthode permettant d’analyser le statut de méthylation de MGMT [57]. En revanche, la méthylation de MGMT est un évènement rare dans les glioblastomes de l’enfant dont la signification pronostique n’a pas été formellement rapportée [58, 59].

La classification histomoléculaire des tumeurs gliales et glioneuronales en fonction de l’âge et les principales étapes de la gliomagenèse Les principales altérations génétiques des gliomes et des tumeurs glioneuronales de l’adulte et de l’enfant décrites dans le chapitre « Les altérations génétiques récurrentes des tumeurs gliales et glioneuronales et leurs intérêts diagnostiques » et rapportées dans le tableau 2 permettent de proposer une classification

Tableau 2. Les principales altérations génétiques des gliomes et des tumeurs glioneuronales de l’adulte et de l’enfant. Gliomes infiltrants de l’adulte Grades II et III Phénotype astrocytaire IDH1 et IDH2 (R132X et R172X) Mutation (expression) p53 Codélétion 1p19q Histones (H3.3 et H3.1) H3F3A K 27 M H3F3A G 34 R/V HIST1H3BK27M BRAF Fusion KIAA1549-BRAF Mutation V600E Amplification de facteurs de croissance REGF PDGFR␣ Autres Gain du 1p Perte du 10q Altérations génomiques complexes

+

Tumeurs gliales et glioneuronales de l’enfant et adulte jeune

GBM secondaire Grade IV Circonscrits Phénotype GBM de Astrocytome Gangliogliome oligodendronovo pilocytique PXA cytaire + -

Infiltrants DIPG

Glioblastome

-

-

+

-

+

-

-

+

+

-

+ -

-

-

-

+

+/-

-

-

-

-

-

+

+ -

-

-

-

+a +/-b

+

-

+c

-

- (sauf GBM) -

+++ +

-

-

+/+++

+ +

-

-

+++ +

-

-

+ +

+ + -

PXA : xanthoastrocytome pléomorphique ; DIPG : gliome infiltrant diffus. a Localisation cérébelleuse et voies optiques. b Localisation hémisphérique. c Associé à une délétion de CDKN2.

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Classification histomoléculaire des tumeurs gliales et glioneuronales

histomoléculaire. Cette dernière, associée aux données clinicoradiologiques devrait permettre à terme une bien meilleure reproductibilité du diagnostic.

La classification histomoléculaire des gliomes infiltrants de l’adulte Elle se fonde sur la présence ou l’absence de mutation dans les gènes IDH.

La gliomagenèse IDH-dépendante Elle est à l’origine de près de 90 % des gliomes infiltrants de grade II. La cible pourrait être un précurseur glial NG2 positif pour les oligodendrogliomes [60]. De plus, en fonction de la présence d’altérations surajoutées (mutation/expression de p53 ou codélétion 1p19q), on distingue pour les grades II : – les gliomes IDH mutés (IDH+), p53 non mutés et/ou non exprimés (p53-) et non codélétés (codélétion 1p19q-), soit IDH+ p53-, codélétion 1p19q- ; – les gliomes IDH+ p53+, codélétion 1p19q-, le plus souvent de phénotype astrocytaire ; – les gliomes IDH+ p53-, codélétion 1p19q+, le plus souvent de phénotype oligodendroglial. Les gliomes IDH+ p53-, codélétion 1p19q-, sont rares et peuvent récidiver sous une même forme moléculaire ou acquérir soit des mutations de TP53 soit la codélétion 1p19q [61]. De fac¸on intéressante, ces gliomes ont un pronostic intermédiaire entre les gliomes IDH+ p53-, codélétion 1p19q+, et les gliomes IDH+ p53+, codélétion 1p19q- [21]. La gliomagenèse IDH-dépendante est aussi à l’origine des gliomes infiltrants de grade III, mais la classification histomoléculaire des grades II ne peut pas totalement s’appliquer aux grades III. En effet, lors de l’évolution maligne certains gliomes de grade III IDH+, codélétion 1p19q+, peuvent acquérir des altérations de p53 (Figarella-Branger et al., données non publiées). Ainsi, pour les grades III, il serait préférable de distinguer les groupes IDH+, codélétion 1p19q+, et IDH+, codélétion 1p19q-.

La gliomagenèse IDH-indépendante Il s’agit d’un groupe hétérogène regroupant différentes entités qu’il sera nécessaire dans le futur de démembrer. En effet, on retrouve dans ce sous-groupe : – les gliomes de grade II triples négatifs (IDH-p53-, codélétion 1p19q-). Ce sous-groupe se caractérise par un pronostic plus péjoratif que les autres grades II, un caractère très infiltrant, un âge plus élevé et une topographie fronto-temporo-insulaire sans atteinte du tronc cérébral ou des noyaux gris centraux [17, 21] ; – les gliomatoses primaires, qui sont classées en grade III selon l’OMS et dont la définition est essentiellement neuroradiologique (cf. chapitres « La classification de l’OMS des principales tumeurs gliales et glioneuroBull Cancer vol. 100 • N◦ 7-8 • juillet-août 2013

nales : rappel et limites » et « Les principaux aspects clinicoradiologiques des tumeurs gliales et glioneuronales ») ; – les glioblastomes de novo qui résulteraient de la transformation maligne d’une cellule souche neurale [4]. Ils se distinguent des glioblastomes secondaires IDH+ résultant de la transformation maligne d’un gliome de grade II ou III. Au vu des données ci-dessus, on peut s’interroger sur l’éventuelle parenté entre les gliomes de grade II triples négatifs et les gliomatoses qui pourraient dériver de la transformation maligne d’un précurseur glial distinct de celui à l’origine des gliomes IDH+. Par ailleurs, une autre question non résolue est représentée par l’existence réelle de gliomes de grade III IDH-. En effet, ces gliomes ont un mauvais pronostic [16] et il pourrait peut-être s’agir d’authentiques glioblastomes dont les prélèvements n’ont pas été représentatifs (d’où l’intérêt des confrontations historadiologiques) ou encore d’un glioblastome à un stade précoce pré-angiogénique. Au vu des données ci-dessus, un modèle hypothétique de la gliomagenèse chez l’adulte est donné sur la figure 2. Ce modèle complète, sur des bases moléculaires, celui que nous avions déjà proposé il y a quelques années [3].

La classification histomoléculaire des gliomes de l’enfant et de l’adulte jeune Compte tenu de la mise en évidence très récente des mutations dans les gènes des histones et du faible nombre de publications à ce jour, il convient d’être prudent dans l’établissement d’une classification histomoléculaire. Néanmoins, une proposition pourrait être la suivante.

La gliomagenèse histone-dépendante Elle comprendrait les gliomes diffus du tronc cérébral (H3F3AK27M+ ou HIS1H3BK27M+) et les glioblastomes de l’enfant et de l’adulte jeune (H3F3AG34R/V) dont le diagnostic différentiel se pose bien souvent avec des tumeurs très hétérogènes telles que les xanthoastrocytomes pléomorphes avec caractère anaplasique, les épendymomes anaplasiques ou encore, dans certains cas, avec des tumeurs neuroectodermales primitives (PNET) à différenciation gliale.

La gliomagenèse histone-indépendante Groupe hétérogène pouvant comprendre des tumeurs circonscrites avec altérations de BRAF (cf. chapitre « Les altérations de la voie des MAP kinases »), ou des gliomes infiltrants s’apparentant à ceux de l’adulte, IDH mutés, qui bien qu’exceptionnels ont été rapportés, en particulier chez les adolescents [26].

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GBM primaire ou de novo

GBM secondaire GBMO Phénotype oligodendroglial

GBM

GBM Phénotype astrocytaire

?

? Cellules souches neurales CD133, A2B5, L1

Précurseur glial de type 1

Gliome de grade III Phénotype oligodendroglial

Gliome de grade III Phénotype astrocytaire

?

Gliome de grade II « triple négatif » et gliomatose cérébrale

Mutation IDH1/2

t(1;19)(q10;p10)

Mutation p53 Précurseur O-2A Précurseur glial de type 2 Gliome de grade II IDH+/p53-/1p19q-

Gliome de grade II IDH+/p53-/1p19q+ Phénotype oligodendroglial

Précurseur O-2A Gliome de grade II IDH+/p53+/1p19qPhénotype astrocytaire

Figure 2. Modèle hypothétique de la gliomagenèse chez l’adulte.

Conclusion La mise en évidence d’altérations moléculaires récurrentes dans les gliomes et les tumeurs glioneuronales a bouleversé les données acquises jusqu’alors concernant la gliomagenèse et vont nécessiter des modifications profondes de la classification de l’OMS 2007, qui reste à ce jour le standard. C’est toujours sur cette base que les pathologistes doivent continuer à classer les tumeurs tout en intégrant progressivement les données moléculaires. En effet, trop d’inconnues demeurent à ce jour et seules les confrontations cliniques, radiologiques, morphologiques et moléculaires sur de larges séries, bien documentées et sans a priori permettront à terme l’établissement d’une classification histomoléculaire plus reproductible mais accessible à tous. Cette classification devra s’aider d’un nombre réduit de marqueurs dont la mise en évidence nécessitera une validation et une reproductibilité inter-laboratoires. Dans ce contexte, il est possible que des sous-groupes particulièrement peu

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reproductibles comme les gliomes mixtes (non détaillés ici) disparaissent et on peut s’interroger sur l’intérêt réel de classer les gliomes selon leur origine présumée astrocytaire ou oligodendrogliale dans la mesure où ces tumeurs sont constituées d’un mélange de cellules progénitrices et de leur dérivés [2] en proportion variable d’une tumeur à l’autre et d’un territoire à l’autre.  Conflits d’intérêts :

aucun.

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Bull Cancer vol. 100 • N◦ 7-8 • juillet-août 2013