Lymphomes non hodgkiniens et infection par le virus de l’hépatite C

Lymphomes non hodgkiniens et infection par le virus de l’hépatite C

La revue de médecine interne 24 (2003) 452–458 www.elsevier.com/locate/revmed Carrefour des spécialités Lymphomes non hodgkiniens et infection par l...

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La revue de médecine interne 24 (2003) 452–458 www.elsevier.com/locate/revmed

Carrefour des spécialités

Lymphomes non hodgkiniens et infection par le virus de l’hépatite C Non Hodgkin’s lymphoma and hepatitis C virus infection K. Ennibi a, D. Bechade b, M. Rabhi a, G. Coutant b, F. Toloune a, J. Desrame b, M.-I. Archane a, J.-P. Algayres b,* b

a Service de médecine interne A, hôpital militaire d’instruction Mohammed V, Rabat, Maroc Service de clinique médicale, hôpital d’instruction des armées du Val-de-Grâce, 74, boulevard de Port-Royal, 75005 Paris, France

Reçu le 21 septembre 2002 ; accepté le 26 septembre 2002

Résumé Propos. – Les auteurs rapportent quatre observations de lymphomes non hodgkiniens (LNH) chez des patients présentant une infection par le virus de l’hépatite C (VHC). Ils rappellent les données épidémiologiques, physiopathologiques et cliniques actuelles de cette association. Actualités et points forts. – La responsabilité du VHC dans la survenue de LNH de type B est probable mais l’association entre ceux-ci et l’infection par le VHC est variable selon les différentes études et en particulier les différents pays. Il s’agit le plus souvent de lymphomes de bas grade et l’atteinte extranodale est fréquente. Perspectives et projets. – De nouvelles études sont souhaitables pour mieux comprendre les mécanismes physiopathologiques susceptibles d’expliquer l’existence de LNH chez les patients présentant une infection par le VHC. La mise en évidence récente de l’efficacité du traitement antiviral dans les lymphomes spléniques à lymphocytes villeux incite à reconsidérer les liens entre le VHC et les LNH et à envisager de nouvelles possibilités thérapeutiques. © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract Introduction. – The authors report four cases of non Hodgkin’s lymphomas (NHL) among patients infected by the hepatitis C virus (HCV). They discuss the epidemiological, physiopathological and clinical features of this association. Current knowledge and key points. – The role of the HCV in the development of B-cell NHL is probable but the reported frequency of the association with HCV infection is variable especially in different countries. Most of the reported cases are low-grade NHL with frequent extranodal involvement. Future prospects and projects. – New studies will improve the understanding of the physiopathological mechanisms that might explain the occurrence of NHL in the course of HCV infection. The recent evidence that the antiviral treatment is effective in splenic lymphoma with villous lymphocytes leads to reconsider the relationship between HCV and NHL and to think about new therapeutic possibilities. © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Lymphome non hodgkinien ; Virus de l’hépatite C Keywords: Non Hodgkin’s lymphoma; Hepatitis C virus

Les manifestations extrahépatiques associées au virus de l’hépatite C (VHC) sont un sujet d’actualité [1]. Si la respon* Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (J.-P. Algayres). © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. DOI: 10.1016/S0248-8663(03)00106-1

sabilité du VHC est certaine en ce qui concerne les cryoglobulinémies mixtes (CG), la porphyrie cutanée tardive sporadique et le syndrome sec, elle est possible dans la survenue d’autres maladies, en particulier les hémopathies lymphoplasmocytaires.

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Fig. 2. Radiographie pulmonaire de face. Opacité tumorale parahilaire droite. Fig. 1. Scanner thoracique. Opacité tumorale du lobe inférieur droit.

Des données épidémiologiques, physiopathologiques et plus récemment thérapeutiques sont en effet en faveur de la responsabilité, au moins partielle, du VHC dans la survenue de lymphomes non hodgkiniens (LNH) de type B : nous rapportons quatre observations de LNH survenus chez des patients présentant une infection par le VHC. Elles illustrent d’une part la fréquence des lymphomes extranodaux et, d’autre part, la prise en charge des LNH chez ces patients. Les données épidémiologiques et physiopathologiques actuelles de cette association sont étudiées. Les principaux aspects pratiques diagnostiques et thérapeutiques sont également analysés. 1. Observations 1.1. Observation 1 Une femme de 64 ans était hospitalisée en octobre 2000 pour une adénopathie sus-claviculaire droite isolée. En 1976, elle avait subi une hystérectomie au cours de laquelle elle avait reçu 3 culots globulaires. En 1995, une infection chronique par le VHC de génotype 1b avait été diagnostiquée et la normalité des aminotransférases avait conduit à ne pas réaliser de ponction–biopsie hépatique (PBH). La sérologie VIH était négative et il n’existait pas d’infection associée par le VHB. La recherche de cryoglobuline était négative. La radiographie pulmonaire montrait une opacité arrondie de la pyramide basale droite. L’examen tomodensitométrique confirmait cette image (Fig. 1) et montrait la présence d’adénopathies hilaires droites. L’hémogramme était normal et il n’existait pas de syndrome inflammatoire ; les LDH étaient normales à 270 UI/l, les ALAT à 35 UI/l, les ASAT à 25 UI/l, les phosphatases alcalines à 108 UI/l. La biopsie sous scanner de l’opacité pulmonaire montrait une prolifération de cellules lymphoïdes de petite taille mar-

quées par l’anticorps anti-CD 20. L’aspect était en faveur d’un lymphome lymphoplasmocytique de faible malignité du Malt. La biopsie de l’adénopathie sus-claviculaire droite montrait le même aspect. La biopsie médullaire ne montrait pas d’envahissement lymphomateux. La patiente était traitée par 6 cures de chimiothérapie selon le protocole mini-CHOP puis par une chimiothérapie d’entretien pendant 6 mois. Sept mois après la fin de cette dernière elle était en rémission. Aucune évolution de l’hépatite chronique n’a été observée au cours et au décours du traitement du LNH et en particulier les aminotransférases sont restées normales. 1.2. Observation 2 Une patiente de 55 ans présentait depuis 1998 une cytolyse hépatique importante rapportée à une infection chronique par le VHC. La sérologie VIH était négative et il n’existait pas d’infection associée par le VHB. La recherche d’une cryoglobulinémie était négative. La PBH montrait des signes d’hépatite chronique avec un score Metavir A2F3. Un traitement par interféron a2a était instauré (3 MU trois fois par semaine), mais interrompu en raison d’une importante leuconeutropénie et de l’absence de réponse biochimique après 3 mois de traitement. En avril 1999, la patiente présentait des polyadénopathies axillaires et inguinales bilatérales. L’examen histologique et l’analyse immunohistochimique montraient l’existence d’un LNH de phénotype B à moyennes et grandes cellules de haut grade de malignité. La radiographie thoracique montrait une opacité tumorale pulmonaire parahilaire droite (Fig. 2). L’examen tomodensitométrique thoracoabdominal confirmait cette image et révélait la présence de multiples adénopathies sus- et sous-diaphragmatiques. La biopsie ostéomédullaire ne montrait pas d’envahissement lymphomateux. La patiente recevait six cures de chimiothé-

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Fig. 3. IRM rachidienne. Masse tumorale médiastinale postérieure avec extension rachidienne.

rapie de type CHOP entraînant une rémission complète qui persistait 18 mois après la fin du traitement. Un traitement (association ribavirine interféron) de l’infection par le VHC était prévu prochainement. 1.3. Observation 3 Un patient de 52 ans présentait depuis février 2000 des douleurs de l’hypochondre droit avec altération de l’état général. Ses antécédents étaient marqués par un ulcère gastroduodénal opéré en 1968. L’examen clinique était sans particularité. L’échographie abdominale et l’examen tomodensitométrique thoracoabdominal montraient des adénopathies sus- et sous-diaphragmatiques. Il existait une élévation des ALAT à une fois et demi la normale, sans cholestase associée. La sérologie de l’hépatite C et la PCR du VHC étaient positives. La sérologie VIH était négative et il n’existait pas d’infection associée par le VHB ; la recherche d’une cryoglobulinémie était négative. La biopsie d’une adénopathie abdominale était réalisée et l’examen anatomopathologique révélait un aspect morphologique et immunohistochimique de LNH anaplasique de phénotype B. La biopsie hépatique réalisée en peropératoire montrait une hépatite chronique cotée A2F3. La biopsie ostéomédullaire ne montrait pas d’envahissement lymphomateux. Dix jours après son hospitalisation, le patient présentait brutalement un tableau de compression médullaire avec paraparésie spastique et troubles sphinctériens ; il existait un niveau sensitif en D8. L’IRM dorsale objectivait une masse médiastinale postérieure, avec atteinte osseuse de contiguïté envahissant le canal rachidien (Fig. 3). Le patient bénéficiait d’une chirurgie de décompression ; l’examen anatomopathologique confirmait la localisation vertébrale du lymphome.

Fig. 4. Scanner pelvien (fenêtre osseuse). Volumineuse lésion tumorale ostéolytique de l’os iliaque gauche.

Le patient était traité par 8 cures de chimiothérapie de type CHOP-bléomycine et par 4 cures de consolidation selon le protocole ESHAP. L’IRM de contrôle montrait un hyposignal rachidien suspect, justifiant une radiothérapie complémentaire de 40 grays. Vingt mois plus tard, le patient était en rémission complète clinique et radiologique mais gardait une paraparésie séquellaire. Un traitement antiviral (association ribavirine interféron) a été récemment débuté. 1.4. Observation 4 Un homme de 57 ans était hospitalisé en octobre 1999 pour des douleurs invalidantes de l’hémi-bassin gauche apparues 4 mois plus tôt avec amaigrissement de 6 kg. L’examen clinique retrouvait une hépatomégalie modérée. La radiographie du bassin montrait un aspect hétérogène de l’aile iliaque gauche. L’examen tomodensitométrique objectivait une lésion lytique de même siège (Fig. 4). Au niveau du foie on notait plusieurs plages hypodenses des segments IV, V, VII, VIII sans adénopathies sous-diaphragmatiques. En IRM, les lésions étaient en hyposignal en pondération T1 et en hypersignal en pondération T2. L’examen tomodensitométrique thoracique était normal. Les examens biologiques objectivaient un syndrome inflammatoire (CRP = 43 mg/l) et une discrète cytolyse (ASAT = 1,2 × N, ALAT = 1,6 × N) sans augmentation des phosphatases alcalines ; l’alphafœtoprotéine était normale. La sérologie de l’hépatite C était positive, le virus était de génotype 2b, et la charge virale de 5 800 copies/ml. La sérologie VIH était négative et il n’existait pas d’infection associée par le VHB. La recherche de cryoglobuline était négative. La biopsie de la lésion osseuse montrait une prolifération de cellules de grande taille au noyau irrégulier avec plusieurs

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nucléoles. L’étude immunohistochimique montrait une positivité de l’anticorps anti-CD20. Le diagnostic était celui de lymphome B centroblastique diffus. La biopsie de la lésion tumorale hépatique montrait le même aspect. Une chimiothérapie selon le protocole ACBVP était réalisée, relayée par deux cures de méthotrexate à forte posologie puis par quatre cures associant ifosfamide et étoposide. Ce traitement permettait la mise en rémission complète de ce lymphome extranodal bifocal. Le patient était toujours en rémission complète 21 mois après la fin de la chimiothérapie. L’évolution favorable de ce lymphome de haut grade permettait d’envisager prochainement un traitement antiviral. 2. Discussion 2.1. Données épidémiologiques Depuis la première description de Ferri [2], de nombreuses études ont précisé la fréquence de l’infection par le VHC au cours des LNH. Celle-ci est très variable selon les pays : elle est comprise entre 10 et 30 % en Italie [3,4] au Japon et en Californie du sud [5], mais seulement comprise entre 1 et 2 % dans les autres états des États-Unis [6], les pays d’Europe du Nord, l’Écosse [7] et la France [8]. Cette augmentation de la fréquence des LNH au cours de l’infection par le VHC n’intéresse que les LNH de type B [3,4,9] et dans certaines études, la maladie de Waldenström [4,9] ; elle n’est pas retrouvée pour les lymphomes T et la maladie de Hodgkin. Les lymphomes de bas grade sont les plus fréquents [9,10] : lymphomes folliculaires, immunocytomes et lymphomes de la zone marginale (lymphomes du Malt, lymphomes spléniques avec lymphocytes villeux). Des lymphomes de haut grade sont cependant possibles (lymphomes diffus à grandes cellules ou lymphome de Burckitt [11] plus rarement) : ils sont retrouvés dans 3 de nos 4 observations. Dans la plupart des études [10,12], on observe une fréquence particulière des lymphomes extranodaux en particulier hépatiques, spléniques ou développés à partir des glandes salivaires : dans les 4 observations rapportées, une correspond à un LNH extranodal exclusif hépatique et osseux (observation 4) et une autre à un LNH pulmonaire avec atteinte nodale de voisinage (observation 1). La différence de fréquence de l’infection par le VHC que l’on observe chez les patients présentant un LNH dans les différentes études reste encore incomplètement expliquée. Elle est plus importante dans les pays, comme l’Italie, où l’infection par le VHC a une prévalence élevée. D’autres facteurs sont liés au VHC et certaines données ont suggéré une association plus forte avec les génotypes 2a et 2b qu’avec le génotype 1 [10,13] ; ceci pourrait expliquer la fréquence de l’association VHC et LNH en Italie, pays où la proportion de patients infectés par un génotype 2 est de 35 %, alors qu’elle n’est que de 5 à 15 % dans les autres pays [14]. Cette différence de fréquence selon le génotype n’est cependant pas retrouvée dans toutes les études et son rôle n’est pas

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admis par tous les auteurs. Par ailleurs, l’importance de la charge virale et la sévérité de l’hépatopathie n’augmentent pas le risque de survenue d’un LNH au cours de l’infection par le VHC [1]. Les cryoglobulinémies peuvent être considérées comme un véritable syndrome lymphoprolifératif bénin ; cependant, la présence ou l’absence de CG mixte ne semble pas être un élément déterminant dans la survenue d’un LNH. Si le risque de LNH peut aller jusqu’à 35 % chez des patients porteurs d’une CG suivis pendant 10 ans dans l’étude de Pozzato et al. [15], Luppi et al. [16] ne retrouvent aucun cas de CG dans une série de 13 LNH de bas grade chez des malades infectés par le VHC. Dans l’importante étude de Silvestri et al. [17], une CG n’est retrouvée que chez 50 % des patients infectés par le VHC présentant un LNH ; cette fréquence est la même que celle avec laquelle on retrouve une CG au cours de l’infection chronique par le VHC. Il faut cependant noter qu’une CG mixte à faible taux et asymptomatique est retrouvée chez la grande majorité des patients présentant un LNH infecté par le VHC [10]. 2.2. Mécanismes physiopathologiques Le rôle du VHC dans la lymphomagenèse est mal connu ; le tropisme lymphocytaire du VHC est par contre bien établi [1,14] et sa présence dans les cellules mononucléées périphériques est bien connue [18]. Ce tropisme est mieux compris depuis la découverte du récepteur cellulaire du VHC, le CD 81 : cette protéine de surface est présente sur de très nombreux types cellulaires, en particulier les lymphocytes B et représente le site de liaison de la protéine d’enveloppe E2 du VHC [19]. Des protéines de structure du VHC et l’ARN viral ont été par ailleurs identifiés dans les ganglions et la moelle de patients infectés par le VHC présentant une CG mixte, une prolifération lymphoïde réactionnelle non maligne ou un véritable LNH [20,21]. Un important travail canadien a retrouvé, chez des sujets infectés par le VHC présentant une CG, des anomalies de la moelle osseuse dans 57 % des cas et dans 13 % un véritable LNH totalement asymptomatique, confirmé par les recherches de monoclonalité [22]. Plusieurs mécanismes peuvent expliquer la responsabilité, au moins partielle, du VHC dans la survenue des LNH. 2.2.1. Mécanismes directs Un rôle oncogène direct du VHC est improbable. Le VHC est en effet un virus à ARN qui ne possède pas de reverse transcriptase ; son génome ne peut donc pas s’intégrer dans celui de la cellule hôte, à l’opposé de celui des virus à ADN et des rétrovirus. Cependant, certaines protéines virales pourraient jouer un rôle coopératif avec d’autres oncogènes cellulaires [14]. La protéine de capside ou la protéine NS3 pourraient en particulier participer à l’oncogenèse : la NS3 possède en particulier un domaine de fixation à l’ADN, ce qui pourrait induire la prolifération cellulaire par stimulation en trans de certains proto-oncogènes. De nouveaux travaux sont cependant né-

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cessaires pour mieux comprendre le rôle éventuel de ces protéines dans l’oncogenèse [14]. Un autre mécanisme possible a été récemment mis en évidence [23,24] : on observe chez les patients ayant une infection chronique par le VHC avec présence d’une CG en particulier de type 2, avec ou sans lymphome, une prévalence augmentée du réarrangement génique bcl-2 (translocation t [14–18]) ; la disparition de cette translocation dans des cellules du sang périphérique a été observée chez deux patients après traitement antiviral [23]. Ces éléments suggèrent que cette translocation est associée à la fonction antiapoptotique de bcl-2 et que l’infection par le VHC est associée à l’inhibition de l’apoptose des cellules B. 2.2.2. Mécanismes indirects Ces derniers apparaissent plus probables. Ils reposent sur la stimulation antigénique chronique. La protéine E2 du VHC pourrait en particulier être retenue comme un antigène candidat à cette stimulation antigénique chronique [14]. La variabilité génomique du VHC pourrait également permettre un échappement au système immunitaire et faciliter la chronicité de l’infection [14]. La séquence suivante pourrait ainsi être suggérée [25] : • présence de VHC pendant de nombreuses années dans l’organisme hôte, en particulier dans les cellules mononucléées, responsable d’une stimulation lymphocytaire prolongée et d’une sécrétion d’IgG polyclonales ; • un second événement pourrait conduire à une production monoclonale d’anticorps, responsable en particulier de l’IgM monoclonale des CG de type 2 ; L’évolution pourrait se faire enfin vers une prolifération lymphoïde maligne B, soit par l’accumulation de mutations et/ou d’anomalies chromosomiques éventuellement facilitées par la stimulation antigénique chronique [14], soit sous l’effet d’un second facteur oncogène environnemental ou génétique [26]. L’éventuelle responsabilité d’autres virus reste à ce jour hypothétique : dans une étude roumaine où l’infection par le VHB ou le VHC est fréquente au cours des LNH, la co-infection par les deux virus est rare [27]. Le VHG ne semble pas non plus devoir être incriminé [28]. Au cours de l’infection par le VIH, la co-infection VIH-VHC n’augmente pas le risque de lymphome [29], mais le risque lié au VHC, s’il existe, peut être masqué par le facteur majeur de lymphome que représente l’infection par le VIH [14].

3. Aspects pratiques 3.1. Diagnostic L’incidence des LNH est faible dans la population générale et le reste chez les patients porteurs d’une infection par le VHC. Ohsawa et al. [30] n’ont observé que 4 LNH dans une population de 2162 patients suivis entre 1957 et 1997, survenant en moyenne 13 ans (extrêmes : 6–36 ans) après le début de l’infection par le VHC.

Aucune mesure de dépistage des LNH n’apparaît donc nécessaire au cours de l’infection par le VHC en l’absence de signes fonctionnels ou généraux. Par contre, la survenue d’adénopathies, d’une tumeur hépatique ne présentant pas un aspect évocateur de carcinome hépatocellulaire, d’un syndrome tumoral pulmonaire ou des glandes salivaires, ou même d’une splénomégalie non expliquée par une hypertension portale doivent faire évoquer, parmi d’autres hypothèses, la possibilité d’un LNH : les prélèvements biopsiques devront être adressés au laboratoire en précisant la notion de l’infection par le VHC et la possibilité de LNH, afin que toutes les techniques de diagnostic, en particulier immunohistochimiques et cytogénétiques puissent être mises en œuvre. 3.2. Traitement Un rôle direct antiprolifératif de l’interféron, indépendant de son action antivirale, a été rapporté [31], mais l’intérêt de ce traitement reste secondaire en pratique clinique : la place de l’interféron dans le traitement des LNH associés au VHC est donc la même que dans celui des LNH en général et donc à discuter en pratique dans le traitement de certains LNH folliculaires. Les LNH de haut grade associés au VHC doivent être traités comme les lymphomes de même grade en général. En cas d’atteinte hépatique avec ictère important, les doses d’anthracyclines doivent être adaptées et les substances hépatotoxiques comme le méthotrexate évitées ; la place de l’interféron comme traitement adjuvant ou dans la prévention de la rechute de ces lymphomes n’a pas été étudiée [14]. Le lymphome splénique à lymphocytes villeux représente un cas particulier : l’efficacité du traitement antiviral a été récemment rapportée chez 9 patients infectés par le VHC présentant ce lymphome de la zone marginale traité par interféron, dont 2 par l’association interféron et ribavirine [32]. Ce traitement était inefficace chez les patients non infectés par le VHC présentant le même lymphome ; il s’agit d’une efficacité originale, identique à celle du traitement des lymphomes du Malt gastrique par l’éradication d’Helicobacter pylori. Ce modèle particulier incite bien évidemment à reposer la question des liens entre le VHC et les LNH et à reconsidérer la place du traitement antiviral dans la prise en charge thérapeutique de certains de ces lymphomes. Un autre problème est celui de la possibilité d’une aggravation de l’hépatopathie liée au VHC au cours ou au décours du traitement du LNH. En effet, l’hépatotoxicité du VHC met en jeu des mécanismes immunologiques reposant en particulier sur les lymphocytes T cytotoxiques. L’interruption d’un traitement immunosuppresseur ou d’une chimiothérapie peut donc en théorie entraîner une réactivation immunitaire responsable de la survenue d’une hépatite aiguë grave. Ceci est bien établi au cours de l’infection par le VHB et pouvait être a priori redouté chez les patients infectés par le VHC au cours du traitement des LNH. L’étude de Zuckermann et al. [33] est donc particulièrement intéressante : ces auteurs n’ont ob-

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servé aucune aggravation de l’atteinte hépatique chez 33 patients (dont 26 présentaient un LNH) traités par chimiothérapie ; deux observations d’hépatite fulminante après traitement d’une leucémie aiguë et d’une maladie de Hodgkin ont cependant été rapportées [34]. Le risque d’aggravation de l’hépatopathie liée au VHC apparaît ainsi très faible, comme ceci a été souligné dans une revue générale récente [35] ; en pratique, sauf en cas de cirrhose sévère, l’existence d’une infection par le VHC ne doit donc pas entraîner de modification des protocoles conventionnels utilisés dans le traitement des hémopathies malignes en général et des LNH en particulier. L’infection par le VHC joue donc un rôle probable dans la survenue des LNH de type B, au moins dans certains pays. Les mécanismes physiopathologiques expliquant cette expansion clonale des lymphocytes B sont mieux appréhendés. De nouvelles études apparaissent cependant nécessaires pour mieux élucider les inconnues qui persistent encore dans la connaissance et la compréhension de cette association et pour mieux préciser l’éventuel intérêt thérapeutique du traitement de l’infection par le VHC dans certains de ces lymphomes. Références [1]

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