MBd Ma! Infect 2000 ; 30 Suppl 1 : 43-8 0 2000 Editions scientifiques et mddicales
Elsevier
SAS. Tous droits r6servCs
Aspects clinique et Cpidkmiologique
Co-infection par le virus de l’hkpatite C et le virus de l’immunod6ficience humaine : aspects actuels F. Bani-Sadr. C. Perronne Service des maladies infectieuses 104, boulevard Raymond-Poincark,
et tropicales, h6pital universitaire 92380 Garches, France
Raymond-Poincar.!,
faculte’ de mkdecine
Paris-Ouest,
R6sum6 Le traitement de la co-infection par le virus de I’hbpatite C (VHC) chez les sujets infect& par le virus de I’immunod6ficience humaine (VIH) 6tait rarement discut6 avant I’Bre des inhibiteurs de la protease du VIH, compte tenu d’une rirponse mediocre k~la monothkrapie par interfkron alpha (IFNa) et d’un pronostic de vie Ii6 au VIH estim6 en moyenne a dix ans. Dans le contexte actuel, la prise en charge est reconsid&e. L’immunod6pression li6e au VIH peut &re associee B une fausse n6gativit6 des tests s&ologiques du VHC. La co-infection VIH-VHC augmente le risque de transmission maternofcetale du VHC. Les 6tudes sur I’influence de la co-infection VIH sur I’histoire naturelle de I’infection par le VHC montrent un r6le de)k%re de celle-ci. La restauration immunitaire obtenue sous traitement anti-VIH hautement actif ne s’accompagne pas d’une baisse de la charge virale VHC. La co-infection VIH-VHC multiplie par pr&s de trois le risque de survenue de cytolyse hkpatique sous traitement antir&roviral. La restauration immunitaire obtenue sous traitement anti-VIH peut parfois r6v6ler I’infection par le VHC et peut favoriser, dans certains cas, une aggravation rapide de I’histologie hbpatique et une t%olution vers la cirrhose. Les complications liees au VHC risquent de devenir un facteur majeur de morbidit et de mortalit& nkessitant de proposer dorbnavant un traitement de I’hbpatite C chez les patients VIH’. L’association d’lFNa et de ribavirine semble &re le meilleur traitement. Son efficacitk doit 6tre &al&e chez les sujets VIH’, ainsi que sa tolkance. En effet, des interactions medicamenteuses sont possibles et I’IFNa comme la ribavirine peuvent favoriser une lymphopknie CD4. Une forme d’lFNa a demi-vie prolong6e (PEG-INFIX) semble prometteuse. 0 2000 Editions scientifiques et mkdicales Elsevier lSAS h6patite C I interfkon
I PEG-interfkron
/ ribavirine / traitement / VHC I VIH I sida
Summary - Coinfection with the hepatitis C virus and HIV: current aspects. The treatment of coinfection with the hepatitis C virus (HCV) in HIV-infected patients was rarely discussed before the era of the HlVprotease inhibitors, since the response to monofherapy with interferon alpha (INFoz) was poor, with a mean prognosis of the HIV disease estimated at around ten years. In the present context, monitoring is reconsidered. The HIV-associated immunosuppression may be responsible for a false negativity of some serologic tests for HCV. The HIV-HCVcoinfection increases the risk of maternofostal transmission of HCV. Studies evaluating the influence of the HIV coinfection on the natural history of the HCV infection show its deleterious role. The immune restoration obtained with the highly active antirefroviral therapies is not linked with a decrease of the HCV viral load. The HIV-HCV coinfection is responsible for a threefold increase of the risk of elevation of seric transaminases when an antiretroviral treatment is given. The immune restoration obtained with an antiretroviral treatment may reveal the HCV infection and favor a rapid aggravation of hepatic histology and evolution toward cirrhosis. ,HCV-associated complications may become a major factor of morbidity
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and mortality, leading to the need for an anti-hepatitis C treatment in HIV-infected patients. The combination of INFa and ribavirin seems to be the best treatment. Its efficacy and tolerability must be evaluatedin HIV-infectedpatients. Drug interactions are likely to occur, and INFa, like ribavirin, may favor CD4 lymphopenia. A new form of INFa with a prolonged half-life (PEG-INFa) seems to be promising. 0 2000 Editions scientifiques et medicales Elsevier SAS AIDS I hepatitis
C / interferon
I HCV I HIV / PEG-interferon
La prevalence de la co-infection par le virus de l’hepatite C (VHC) chez les patients infect& par le virus de l’immunodelicience humaine(VIH) est ClevCe.Elle atteint 33 % dans la cohorte Eurosida incluant 3 048 patients, dont plus de 70 % despatients toxicomanes et hemophiles sont co-infect& par le VIH et par le VHC [l]. L’introduction desinhibiteurs de protease(IP) dansla therapeutique antiretrovirale s’est accompagnee,en France, d’une diminution de plus de 30 % descas de sida et de la mortalite like au VIH [2]. Le maintien d’une charge virale VIH indetectable et la restaurationimmunitaire progressive obtenue avec les traitements antiviraux hautement actifs (HAART) ont permis d’augmenter la survie des patients infect& par le VIH. Le traitement de la co-infection VHC Ctait rarement discute avant l’ere des antiproteases, compte tenu d’une reponse mediocre a la monotherapie par interferon alpha (IFNa) et d’un pronostic de vie lie au VIH qui Ctait estime en moyenne a dix ans. Dans le contexte actuel, la prise en chargeest reconsideree. MODIFICATIONS
DES TESTS StiROLOGIQUES
L’immunodepressionlice au VIH peut &tre associeea une modification des testsserologiques,seroconversionretardee, absencede seroconversionou seroreversion. La recherche de I’ARN-VHC par amplification genique (PCR) doit done &tre considereeen casd’elevation destransaminasesassocieea une hepatite chronique. La restauration immunitaire sousHAART peut s’accompagnerd’une sereconversion VHC chez lespatients ayant comme unique marqueur biologique de l’infection VHC, une PCR VHC positive [3]. AUGMENTATION DU RISQUE DE TRANSMISSION VERTICALE DU VHC La co-infection VIH-VHC augmente le risque de transmission maternofcetale. Dans une etude realisee chez 155 meres co-infectees VIH-VHC, la transmission du VHC Ctait de 8,4 %. Ce risque Ctait correle a la charge virale VHC (ARN-VHC quantitatif) : 2.106 copies/ml chez les 13 meres d’enfants infect& par le VHC et 3,5.10’ copies/ml chez les 142 meres d’enfants non infect& par le VHC 0, < 0,001). Aucune transmission n’etait observee a partir de meres ayant une concentra-
I ribavirin
I treatment
tion d’ARN-VHC faible, inferieure a 10’ copies/ml. Le risque d’infection VHC Ctait 3,2 fois plus ClevCchez les enfants infect& par le VIH : 17,l % chez les 41 enfants VIH+ versus 5,4 % chez les 112 enfants VIH- 0, = 0,04) [4]. Ces resultats suggerent qu’un traitement diminuant I’ARN-VHC quantitatif chez les merespermettrait, comme pour l’infection par le VIH, de reduire le risque de transmissionverticale. En revanche, la co-infection VIH-VHC ne majorepasle risque de transmissionsexuelle qui demeure quasiment nul. Dansune etude men&echez 56 patientsavecun ARNVHC serique positif, dont 23 co-infect& par le VIH, I’ARN-VHC Ctait indetectable dans le sperme,en depit d’une chargevirale VHC plus Cleveechez les patientscoinfect& [5]. L’Ctudede la transmissiondu VHC dansune cohorte de 6 I couples, dont l’un des partenairesetait coinfect6 VIH-VHC, ne montrait aucun cas de transmission du VHC dansle groupe de 30 couplesn’ayant jamais partage de seringuesalors que 80 % des partenairesCtaient contaminespar le VHC dansle groupe pratiquant le partage de seringues.Dans les deux groupes, les couples avaient des rapports non proteges avec une transmission du VIH dans40 et 52 % descasrespectivement[6]. INTERACTIONS
VIH-VHC
Les interactions VIH et VHC sont complexes. Les etudessur l’influence de la co-infection VHC sur la progression clinique du VIH ne sont pas concordantes. Dans l’etude de Dorrucci et al., il n’existait aucune influence de la co-infection par le VHC sur l’evolution de l’infection VIH chez les 416 patientsVIH’ [7]. En revanthe, dansl’etude de Piroth et al. portant sur 238 patients, le risque de progressionclinique like au VIH Ctait multiplie par 1,64 0, = 0,04), et par 10,9 dansle sous-groupede patients ayant une concentration initiale de lymphocytes CD4 superieurea 600/mm3.Le risque de progressionimmunologique (baissede plus de 50 % des lymphocytes CD4) Ctait multiplie par 2,3 1 @ = 0,02) [8]. Les etudes sur l’influence de la co-infection VIH sur l’histoire naturelle de l’infection par le VHC sont en revanche concordanteset montrent un role deleterede celleci. La chargevirale VHC est plus ClevCechez les patients VIH’. Ainsi dansl’etude de Di Martin0 et al., comparant l’infection par le VHC chez lespatientsco-infect& ou non
Co-infection
par le virus de l’hkpatite
par le VIH, l’ARN-VHC Ctait de 9,3.106/mL chez les patients co-infect& versus 3,6.106/mL chez les patients VIH-(p < 0,Ol) [9]. Son elevation Ctait correlee a une concentration de lymphocytes CD4 < 400/mm3. Le score de Knodell Ctait Cgalement plus ClevC. En analyse multivarice, les trois facteurs independants predictifs de cirrhose Ctaient l’age, l’infection par le VIH et le score de Knodell initial. L’infection par le VIH et la consommation d’alcool Ctaient les deux facteurs independants predictifs de mortalit& Dans une cohorte prospective de 233 hemophiles VHC’, une insuffkance hepatocellulaire Ctait notee chez 9 % des patients co-infect& par le VIH, versus 0 % chez les patients VIH- (p = 0,034), dans les 10 a 20 ans suivant la contamination par le VHC. L’incidence (cumulee) de l’insuffisance hepatocellulaire Ctait de 17 k 4 %, 10 ans aprbs la contamination VIH [ 101. Dans la cohorte anglaise de 4 865 hemophiles, contamints par le VHC entre 1965 et 1985 et suivis jusqu’en 1993, le risque cumule de mortalite like a une insuffisance hepatocellulaire ou a un hepatocarcinome Ctait de 1,4 % a tout age, de O,l, 2,2 et 14,3 % respectivement pour les patients infect& avant 25 ans, 2544 ans et 45 ans et plus. Chez les patients co-infect& par le VIH, ce risque s’elevait a 6,5 % a tout age, a 3,8, 17,l et %18,7 % respectivement pour les memes tranches d’age [ 1I]. Le risque de morbidite et de mortalite lie au VHC survenait dix ans apres la contamination. La cohorte canadienne de 147 htmophiles infect& par le VIH et le VHC entre 1978 et 1958 confirme ces resultats. Vingt-deux patients (27 %) ont p&end une affection hepatique Cvolutive parmi les 8 1 patients co-infect& VIH-VHC compare a trois patients VHC’NIH(3/53) soit un risque de 7,4 en analyse multivariee, d’affection hepatique Cvolutive like au statut VIH+ [ 121. La restauration immunitaire obtenue sous HAART ne s’accompagne pas d’une baisse de la charge virale VHC [ 13- 151. Ainsi, dans une etude portant sur 19 patients, qui avant la mise sous HAART incluant un IP, avaient en moyenne une concentration d’ARN-VHC de 5,3 log/mL, d’ARN-VIH de 5 log/mL et des lymphocytes CD4 a 63/mm’, une elevation de l’ARN-VHC de 0,4+/-0,l log/mL et des ALAT (p <: 0,04) Ctait observ6e a la sixieme semaine, alors que l’ARN-VIH avait diminue de 2,l log/mL (p < 0,001) et les lymphocytes CD4 avaient augment6 en moyenne de plus de ‘73/mm’. L’ARN-VHC retournait a ses concentrations initiales a la dix septibme et a la trente deuxieme semaine du traitement [15]. IMPACT DU TRAITEMENT ANTI-VIH SUR L’INFECTION PAR LE VHC La co-infection VIH-VHC multiplie par pres de trois le risque de survenue de cytolyse hepatique sous traitement antiviral. L’incidence et les facteurs de risque de cytolyse
C et le VIH
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hepatique severe (transaminases a cinq fois la normale ou grade 3 ou 4) apres mise sous traitement antiretroviral chez des patients ayant initialement des transaminases de grade 0, 1 ou 2 ont CtC Ctudies dans la cohorte Aquitaine. Chez les patients trait& par HAART incluant un IP (n = 748), l’incidence moyenne de cytolyse hepatique grave Ctait de 7,3/100 personnes par an ; 5,5 % a 6 mois, 8 % a 1 an et 13,2 % a 2 ans de traitement. Le dtlai median de survenue d’une cytolyse hepatique grave Ctait de 164 jours. Les ALAT Ctaient superieures a 400 UI/L dans 39 % des cas. Chez les patients trait& par une bitherapie d’inhibiteurs nucleosidiques de la transcriptase inverse (NRTI) (n = 1 249), l’incidence moyenne des cytolyses hepatiques graves Ctait de 5,7/100 personnes par an ; 3 % a 6 mois, 4,8 % a 1 an et 12,7 % a 2 ans. Le delai median de survenue d’une cytolyse hepatique grave Ctait de 252 jours. Le traitement par IP augmentait significativement le risque de dtvelopper une cytolyse htpatique grave (p = 0,Ol). Chez les patients trait& par IP, les facteurs de risque de cytolyse htpatique severe Ctaient en analyse multivariee : antecedent de cytolyse hepatique (HR = 2,3), ALAT initiale > 50 UI/L (HR = 2,4 et 3,3 respectivement pour les grades 1 et 2), co-infection avec le virus de l’hepatite B (VHB) (HR = 3) et avec le VHC (HR = 3,2). Ce risque etait independant de 1’IP utilise, de la charge virale VIH et des lymphocytes CD4. Chez les patients ayant des ALAT initiales normales, les seuls facteurs de risque identifies Ctaient la co-infection VHB (HR = 14,9) et VHC (HR = 6,l). Chez les patients trait& par une bitherapie de NRTI, les facteurs de risque de cytolyse hepatique severe Ctaient : antecedent de cytolyse (HR = 14,8), co-infection VHB (HR = 2,6) et VHC (HR = 2,7). La nature du NRTI ne constituait pas un facteur de risque [16]. Une autre etude longitudinale sur 309 patients Cvaluant l’arret des IP pour intokance confirme ces resultats : 12 arrets pour hepatite (concernant neuf patients) ont CtC recenses - neuf episodes sur 162 prises chez les patients co-infect& VIH-VHC versus trois episodes sur 369 prises chez ceux non infect& par le VHC (OR = 7,18,p = 0,002) [17]. La restauration immunitaire obtenue sous HAART peut reveler l’infection par le VHC. Dans une cohorte australienne de 133 patients repondeurs a traitement antiviral incluant un IP, trois patients (2 %) ont presente une cytolyse htpatique symptomatique (ALAT > 5 fois la normale). Les trois patients avaient une co-infection VIH-VHC mais chez deux patients, la seroconversion VHC est survenue apres la restauration immunitaire, alors que 1’ ARN-VHC emit present sur l’analyse retrospective des s&urns avant le debut du traitement antiviral [3]. Enfin, la restauration immunitaire sous HAART est associee dans certains cas a une aggravation rapide de l’histologie hepatique et a une evolution vers la cirrhose [ 181. Un essai prospectif (TRIVIR- H. Zylberberg et al.), sous
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l’egide de 1’Agence nationale de recherche sur le sida (ANRS), est en tours afin d’etudier les modifications de l’anatomopathologie hepatique, apres instauration d’un traitement par HAART chez les patients co-infect&. L’ensemble de ces elements plaident en faveur de l’aggravation de l’hepatite C lice a la restauration immunitaire plutot qu’a une toxicite directe des antiviraux. L’augmentation de l’activite des lymphocytes T cytotoxiques, pourrait &tre a l’origine d’une destruction des hepatocytes infect& par le VHC. Neanmoins, si la toxicite des NRTI est majorte en cas de co-infection VHC, ceux-ci peuvent avoir une toxicite hepatique directe, secondaire a une toxicite mitochondriale, qui se manifeste par une steatose hepatique et une acidose lactique. Celle-ci a CtC d&rite avec la zidovudine, la didanosine et la stavudine. Les nucleotides form& apres triphosphorylation intracellulaire des NRTI ont une forte affinite pour I’ADN polymerase y, qui est la seule enzyme permettant la replication de I’ADN mitochondrial. La depletion de I’ADN mitochondrial se manifeste par des symptomes varies : pancreatite, hepatite steatosique, neuropathie, myopathie. Cette depletion mitochondriale s’accompagne d’une accumulation intracellulaire des triglycerides et des acides gras libres, avec notamment au niveau hepatique, une steatose macrovesiculaire. L’incidence de cette toxicite hepatique est estimee a 1,3/l 000 personnes par an [ 191. Les complications likes au VHC risquent de devenir un facteur majeur de morbidite et de mortalite, necessitant de proposer dorenavant un traitement de l’hepatite C chez les patients VIH’. TRAITEMENT DE L’Hd’ATITE CHRONIQUE VHC CHEZ LES PATIENTS VIH’ Au tours de l’hepatite chronique C, la replication virale VHC est stable tout le long de I’evolution. Sous traitement par IFNa, on assiste soit a une reduction rapide de la charge virale VHC conduisant a une reponse prolongee ou a une rechute tardive, soit a une reduction lente conduisant a une rechute. La persistance d’une charge virale VHC elevee s’accompagne de l’emergence de variants VHC, de moindre sensibilite a I’IFNa. 11est montre que les sujets rechuteurs a un premier traitement par IFNa, repondent moins bien a un deuxieme traitement prescrit a la meme posologie. Dans une etude portant sur 349 patients rechuteurs, trait& une seconde fois par IFNa a la dose de 3 millions (M) d’unites internationales (UI) trois fois par semaine, le taux de reponse biologique et virologique n’etait plus que de 60 % a la fin du traitement [20]. L’augmentation de la posologie de 1’IFNa permet d’obtenir une meilleure reponse virologique. Ainsi, chez des patients infect& par le genotype 1b, I’administration quotidienne de 1’IFNo a la posologie de 3 MUI, 5 MU1 et 10 MU1 permet
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respectivement une reduction de la charge virale VHC de -25, -3,1 et -35 log cornparke a -1,l log a la posologie de 3 MU1 x 3/semaine a 1 mois [21]. On ignore actuellement si cet effet initial superieur des fortes doses d’INFa se prolonge au-de18 de quelques semaines. La ribavirine (1 -beta-D-ribofuranosile1,2,4-triasolecarboxamide) est un analogue nucleosidique de la guanosine qui, en association avec l’IFNa, s’est rCvClCe superieure B la monotherapie par IFNo. Des etudes de cinetique de replication et de clairance du VHC sous IFNa en administration quotidienne ou intermittente + ribavirine, montrent que 1’IFNa administre trois fois par semaine reduit la replication virale apres 24 heures. mais un rebond survient des 48 heures apres la premiere injection ; lorsque la ribavirine est associee a 1’IFNa en administration intermittente, elle semble prevenir ce rebond et elle ameliore le taux de clairance virale. L’administration quotidienne d’IFNa induit une reduction biphasique de la replication virale et est associee a des taux Cleves de clairance virale precoce [22]. Chez des patients non repondeurs randomists en trois bras, IFNa 5 MU1 x 3/semaine, IFNa 5 MU1 x 3/semaine + ribavirine et IFNa 5 MUT/j + ribavirine, la baisse de la charge virale VHC Ctait respectivement de -0,57 log/mL, -I,57 log/mL et -2.08 log/mL a 1 mois [23]. Chez les patients VIH-, 1’IFNcx a la posologie de 3 MUI x 3kemaine pendant 12 mois permet d’obtenir 1.5 a 20 % de reponse prolongee. Les essais de 1’IFNa chez les patients co-infect& VIH-VHC sont peu nombreux. Dans l’etude de Causse et al., comparant la reponse a 1’IFNa 3 MU1 x 3kemaine chez des patients VIH’ (n = 19) et VIH- (n = 29). la negativation de la PCR VHC au sixieme mois Ctait obtenue respectivement dans 16 et 45 % des cas (241. Dans l’etude de Soriano et al. portant sur 119 patients trait& par IFNa 5 MU1 x 3kemaine pendant 3 mois puis, en cas de reponse (PCR VHC negative), par 3 MU1 x 3kemaine pendant les 9 mois suivants, une reponse biologique et virologique prolongee Ctait notee dans 22,5 % des cas (n = 80) chez les patients VIH’ et 25,9 % (n = 27) chez les patients VIH-. Deux facteurs independants Ctaient predictifs d’une reponse a 1’IFNa : une concentration de lymphocytes CD4 > 500/m& et une charge virale VHC < IO’ copies/ml [25]. Chez les patients non infect& par le VIH, les etudes cliniques comparant I’IFNa 3 MU1 x 3/semaine a l’association IFNa + ribavirine montrent toutes la superiorite de l’association IFNa + ribavirine. avec une reponse a long terme (PCR VHC negative 6 mois apres l’arret du traitement), tous genotypes confondus, superieure a 30 % (versus 11 % avec 1’INFa seul) [26]. Le genotype et l’ARNVHC quantitatif sont les deux principaux facteurs pronostiques de reponse. Cette association a CtC Cvaluee chez un petit nombre de patients co-infect&s VIH-VHC. Chez 20 patients trait& par IFNa 3 MUI x 3kemaine + ribaviri-
Co-infection
par le virus de l’hepatite
ne 1 000 a 1 200 mg/j, une reponse virologique VHC Ctait obtenue dans 50 % des cas au sixieme mois saris moditication notable de la charge virale VIH ; sept patients avaient un ARN-VHC indetectable d&s le troisieme mois [27]. Une forme d’IFNa a demi-vie prolongte (PEG-INFa), par modification covalente de la molecule d’IFNc! par polyethylene glycol (pegylation) est actuellement en tours d’evaluation clinique. 11peut &tre administre une fois par semaine et permet d’obtenir des concentrations ;sCriques d’IFNa plus Clevees. Des etudes preliminaires comparant respectivement le PEG-IFNa et 1’IFNa 3 MU1 x Ysemaine chez les patients VIH-, montrent dans tous les cas une reponse virologique suptrieure a la quarante huitieme semaine avec le PEG-IFNa. L’abstinence d’alcool constitue un aspect fondamental du traitement de l’hepatite chronique C et doit &tre encouragee. L’alcool augmente la multiplication virale du VHC avec une relation dtmontree entre la consommation, meme mod&e d’alcool (deux verres par jour) et la charge virale VHC. L’alcool aggrave les lesions hepatiques assocites au virus de l’htpatite C. La quantitt totale d’alcool consommte est un facteur independant associe a la presence de cirrhose [28]. L’alcool semble &tre aussi un facteur independant de mauvaise reponse au traitement par 1’IFNrx. TOLfiRANCE DES TRAITEMENTS CHEZ LES PATIENTS INFECThS
ANTI-VHC PAR LE VIH
Peu d’etudes ont CvaluC l’influence de 1’IFNa sur la charge virale VIH. Dans une etude portant sur 25 patients VIH’ trait& par IFNa 18 a 36 MUVj pour un w-come de Kaposi, la charge virale VIH diminuait dans 17 cas, de -1,91 log a la qua&me semaine (S4) et de -1,78 log a S8. En revanthe, elle augmentait dans huit cas (+1,91 log/rnL a S4 et +1,5 log a SS) [29]. La baisse de la charge virale VIH semblait etre dose-dependante [30]. L’association de la ribavirine a 6tC Cvalute, in vitro, avec certains analogues nucleosidiques de la transcriptase inverse. L’association de la ribavirine avec la zidovudine, la stavudine et dans une moindre mesure la zalcitabine serait a priori antagoniste, par inhibition de leur phosphorylation et reduction des formes triphosphate, prealable indispensable a leur activite [31-331. Un antagonisme in vivo n’a pas CtC demontre. Un protocole sous l’egide de 1’ANRS (CORIST, D. Salmon et al.) se propose d’tvaluer les Cventuelles interactions entre la ribavirine et la stavudine chez les patients co-infect& VIH-VHC. En revanche, l’association ribavirine-didanosine est synergique [34,35]. Cassociation avec les analogues non nucleosidiques et les inhibiteurs de protease n’a pas CtC &al&e mais compte tenu d’un mecanisme d’action et d’un metabolisme different (absence de metabolisation par le cytochrome P450 de la ribavirine), il ne devrait pas exister d’interactions medicamenteuses majeures.
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C et le VIH
L’IFNa et la ribavirine ont tous deux comme effet secondaire une aggravation de la lymphopenie CD4. Elle a CtC rapportee avec l’IFNa, dans 12 % des cas, avec une diminution de l’ordre de 50 % de la concentration des lymphocytes CD4, survenant entre la sixieme et la quatorzieme semaine. La lymphoptnie Ctait le plus souvent transitoire [25]. Neanmoins, des observations d’infections opportunistes secondaires a une lymphopenie CD4 apparue sous IFNa ont CtC d&rites chez des patients VIH- et VIH’ [36, 371. La ribavirine a la posologie de 1 000 a 1 200 mg/j, entraine une leucopenie avec une baisse moyenne de 1 000/mm3 leucocytes portant essentiellement sur les lymphocytes (diminution de 600/mm3) [38]. Chez les patients VIH+, la ribavirine dtlivree a la posologie de 1 200 mg/j, au tours d’une etude de phase I, entrainait une diminution mediane de 92/mm” des lymphocytes CD4, a la douzieme semaine [39]. CONCLUSION Par analogie avec l’infection par le VIH, le traitement de premiere intention de l’hepatite chronique C doit &tre le plus optimal possible. 11apparait ntcessaire de traiter fort en associant les traitements disponibles afin d’obtenir la charge virale VHC la plus basse possible et de prevenir la selection de resistance. L’association ribavirine et IFNa est superieure a la monotherapie par IFNa chez les patients non infect& par le VIH. Par ailleurs, une posologie quotidienne d’IFNa permet une reduction de la charge virale VHC superieure a celle obtenue lors d’un traitement a 3 MU1 x 3/semaine, mais la tolerance risque d’etre mauvaise chez les sujets co-infect& saris que le benefice a long terme de cette strattgie n’ait CtC tvald. Le PEGIFNa en permettant une administration hebdomadaire et l’obtention de concentrations d’IFNa plasmatiques Clevtes saris majoration notable des effets secondaires constitue un traitement d’avenir. L’association optimale serait done actuellement PEG-IFNa + ribavirine. Un protocole therapeutique, multicentrique, debutera en 2000, sous l’egide de I’ANRS (RIBAVIC, C. Perronne et al.). 11 comparera l’effcacite et la tolerance de l’association PEG-IFNa plus ribavirine pendant 48 semaines versus IFNa 3 MU1 x 3kemaine plus ribavirine pendant 48 semaines, chez les patients co-infectes VIH-VHC. RkFlhENCES 1
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