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Le Praticien en anesthésie réanimation (2015) xxx, xxx—xxx
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MISE AU POINT
Mise en place échoguidée des cathéters veineux centraux Ultrasound guidance for central venous catheterization Pierre-Olivier Ludes a,b, Étienne Gayat a,∗,b,c a
Département d’anesthésie—réanimation—SMUR, hôpitaux universitaires Saint-Louis—Lariboisière—Fernand-Widal, 2, rue Ambroise-Paré, 75010 Paris, France b Université Paris-Diderot, 75205 Paris 13, France c Inserm, UMR-S 942, 75475 Paris 10, France
MOTS CLÉS Échographie ; Cathéter veineux central ; Ponction ; Grand axe ; Guidage ; Complication
KEYWORDS Ultrasound; Central venous catheter; ∗
Résumé La mise en place des cathéters veineux centraux s’accompagne parfois d’échecs lors des ponctions, voire de complications qui entraînent une morbidité qui peut être réduite par l’emploi de l’échographie. En effet, le développement et la plus large diffusion des appareils d’échographie permettent de sécuriser le geste et d’améliorer le confort des patients. On a pu noter une diminution des complications mécaniques à type de d’hémo-pneumothorax ou d’hématome, ainsi qu’une réduction des échecs de ponction et des infections liées aux cathéters centraux. La durée de mise en œuvre de la technique d’échoguidage ne semble pas supérieure à celle n’utilisant que les repères anatomiques. La technique repose sur des règles strictes d’asepsie, l’emploi d’une sonde linéaire à fréquence élevée, sur une ponction en grand axe avec une visualisation constante de l’extrémité de l’aiguille et enfin sur un contrôle radiographique final. La mise en place échoguidée des cathéters veineux centraux doit s’imposer à tous les anesthésistes-réanimateurs tant elle apporte efficacité et sécurité. © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Summary Central venous catheters placement may lead to complications such as haemopneumothorax, haematomas, with an incidence increasing with the number of attempts which however may be unsuccessful. Ultrasound devices are used more and more frequently to improve the safety of the procedure and the comfort of the patients. The mechanical complications and the infection rate related to the central venous catheter placement are reduced by ultrasound
Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (É. Gayat).
http://dx.doi.org/10.1016/j.pratan.2015.06.006 1279-7960/© 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Pour citer cet article : Ludes P-O, Gayat É. Mise en place échoguidée des cathéters veineux centraux. Le Praticien en anesthésie réanimation (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.pratan.2015.06.006
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P.-O. Ludes, É. Gayat Puncture; Long axis; Dynamic method; Complication
guidance. The technique is no more time consuming than the traditional approach using anatomic landmarks. Ultrasound guidance requires a high frequencies linear probe and strict hygienic principles. The needle puncture should be in the long axis with permanent visualization of the needle tip; a chest X-ray is still required to check the position of the tip of the catheter. The ultrasound technique should be the gold standard for central venous catheter placement because it provides greater safety and better comfort to the patients. © 2015 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Introduction Les cathéters veineux centraux intéressent tout particulièrement les médecins anesthésistes-réanimateur. Ils en décident les indications, ils en assurent la mise en place, ils les utilisent et enfin, ils prennent en charge les éventuelles complications. Le cathétérisme veineux central permet le monitorage de la pression veineuse centrale, du débit cardiaque par le cathéter de Swan-Ganz et le recueil des gaz du sang veineux central. Les voies veineuses centrales sont un véhicule obligatoire pour l’administration de catécholamines, de médicaments veinotoxiques, ou pour l’alimentation parentérale. Il s’agit également d’un moyen de recours en cas d’abord veineux superficiel impossible. La mise en place des cathéters veineux centraux, qu’ils soient destinés à un usage au long cours ou plus limité dans le temps, peut s’accompagner de complications sérieuses (pneumothorax, hémothorax, fausses routes). La pose des cathéters veineux centraux s’appuyait depuis longtemps sur des repères anatomiques de surface. Elle bénéficie aujourd’hui de l’échoguidage grâce à l’usage des appareils « au chevet du patient ». Des recommandations anglaises du National Institute for Clinical Excellence existent depuis 2002 préconisant l’utilisation systématique de l’échographie pour la mise en place de cathéters veineux centraux [1]. Le suivi de ces recommandations était d’environ 25 % en 2008 [2]. D’autres recommandations internationales et américaines parues dans Intensive Care Medicine [3] et Anesthesiology [4] existent depuis 2012. Enfin, la Société franc ¸aise d’anesthésie-réanimation a édité, en décembre 2014, une recommandation préconisant une technique de pose échoguidée des accès vasculaires [5].
Bénéfices démontrés de l’échoguidage pour la pose des cathéters veineux centraux Malgré la bonne connaissance de l’anatomie des axes vasculaires des échecs de ponction sont fréquents et même en cas de succès, les tentatives sont souvent plurielles. La position de la veine jugulaire interne par rapport à l’artère carotide commune connaît des variations fréquentes [6], les variations des rapports de la veine sous-clavière sont moindres mais existent néanmoins.
L’utilisation de l’échographie pour la mise en place des cathéters veineux centraux fait encore débat. La perte du savoir-faire des praticiens en cas d’indisponibilité de l’appareil, le temps de la réalisation plus long, la présence des mêmes risques de complication pendant la phase d’apprentissage de la technique et la possible augmentation du risque de contamination des cathéters par du matériel supplémentaire sont des arguments avancés pour ne pas encourager l’utilisation systématique de l’échographie [7]. La littérature plaide en faveur du recours à l’échographie. En effet, après deux ponctions infructueuses, le risque d’échec augmente [8] ; le taux de complications mécaniques est multiplié par 6 après plus de trois échecs de ponction [9]. L’utilisation de l’échographie pour la mise place des cathéters centraux permet de réduire le taux d’échec de ponction [10]. L’utilisation de l’échographe permet de diminuer le nombre de complications immédiates à types de ponction artérielle, d’hématome, d’hémothorax et de pneumothorax [10,11]. Le diagnostic de thrombose des axes veineux, responsable d’échec de cathétérisation, est aisé et modifie rapidement le choix du site de ponction en limitant le nombre de tentatives. La limitation du nombre de ponctions est particulièrement importante en cas de désordre de l’hémostase. Une étude de Tercan et al. publiée en 2008 ne retrouvait aucune complication majeure ni de ponction artérielle accidentelle lors de la pose échoguidée de 133 voies centrales [12]. Un autre bénéfice de l’échoguidage est la réduction du nombre d’infections liées aux cathéters centraux, de 16 % à 10,4 % dans une série de 900 patients [13]. L’évaluation comparative du temps nécessaire à la mise en place des cathéters centraux avec échographie est difficile car les définitions varient selon les études et les différences rapportées ne sont pas toujours cliniquement significatives (quelques secondes pour l’étude de Stone et al. en 2010) [14]. Cependant, dans une étude de 2009, Serafimidis et al. ont montré que la procédure échoguidée était plus courte de presque 10 mins pour l’abord sousclavier[15]. Enfin, une analyse médicoéconomique réalisée par Calvert et al. en 2003 [16] montre un surcoût estimé à moins de 12 euros pour l’utilisation de l’échographie et l’analyse de coût semble favorable en prenant en compte l’achat, la maintenance et les ressources utilisées. Mais cette analyse reste dépendante du nombre de procédures réalisées. L’utilisation de l’échographie pour la pose de voie veineuse centrale ne permet pas de s’affranchir de toutes les complications. Elle améliore la sécurité du geste mais peut
Pour citer cet article : Ludes P-O, Gayat É. Mise en place échoguidée des cathéters veineux centraux. Le Praticien en anesthésie réanimation (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.pratan.2015.06.006
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Figure 1. Images échographiques lors de la mise en place d’une voie veineuse centrale jugulaire interne. A. Repérage en petit axe. D. Repérage en grand axe (SCM : muscle sternocléidomastodien ; VJI : veine jugulaire interne ; ACC : artère carotide commune). B. Visualisation de l’aiguille en petit axe et E en grand axe lors de la ponction. C. Visualisation du guide en petit axe et F en grand axe.
exposer à d’autres complications liées à la technique comme la double ponction de paroi (exemple : ponction de la paroi postérieure de la veine jugulaire interne en petit axe) [17].
Aspects techniques de la mise en place du cathéter
différent, en mode Doppler pulsé, le flux veineux est continu et non pulsatile. En cas de thrombose, l’axe veineux considéré n’est plus dépressible et on retrouve un signal échographique plutôt inhomogène dans sa lumière. L’examen en mode Doppler identifie avec certitude le flux artériel du vaisseau adjacent, modulé et pulsatile.
Asepsie
Échorepérage ou échoguidage ?
La technique de guidage échographique repose sur les mêmes règles d’asepsie stricte (préparation cutanée, conditionnement du matériel et hygiène des tenues). Plus précisément, il convient d’utiliser une housse de protection stérile recouvrant la sonde et largement le câble de raccordement à l’échographe ainsi que du gel d’échographie stérile.
Le repérage échographique de la veine jugulaire interne a été décrit dès 1978 par Ullman et Stoelting [18]. Il est possible d’effectuer un repérage échographique simple du vaisseau à ponctionner avec un marquage de surface (méthode statique) ou un guidage échographique de l’aiguille en temps réel depuis la superficie jusqu’à la ponction veineuse (méthode dynamique) (Fig. 1). L’échoguidage est la technique de référence car elle permet logiquement de confirmer la bonne position de l’aiguille dans le vaisseau lors de la ponction. La méthode dynamique permet d’augmenter le nombre de succès de canulation à la première ponction et le taux de succès global de la procédure. De plus, l’échoguidage est la méthode de secours lors d’échec de la technique statique [19].
Type de sonde et identification des structures vasculaires Une sonde linéaire avec des fréquences d’émission des ultrasons élevées, pour une faible pénétration et une bonne résolution de l’image, est conseillée pour une bonne visualisation des axes vasculaires. Il convient d’identifier clairement les structures vasculaires au site de ponction. La veine est dépressible lors de pressions douces exercées avec la sonde d’échographie alors que le calibre de l’artère reste inchangé. Chez les patients hypovolémiques, le calibre peut être très réduit et la lumière quasiment nulle lors de l’application de la sonde sur la peau. L’échographie Doppler couleur constitue un bon moyen de différencier les deux types de vaisseaux. Les deux flux circulent en sens opposé et ont un signal Doppler
Petit ou grand axe ? Le petit axe (sonde perpendiculaire à l’axe des vaisseaux) permet de bien visualiser et d’identifier la veine et l’artère. En revanche, il ne permet qu’un guidage très limité de l’aiguille avec un suivi très difficile de son extrémité distale. Le petit axe expose au risque de ponction de la paroi postérieure de la veine et d’une éventuelle ponction artérielle en cas de superposition des vaisseaux [17].
Pour citer cet article : Ludes P-O, Gayat É. Mise en place échoguidée des cathéters veineux centraux. Le Praticien en anesthésie réanimation (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.pratan.2015.06.006
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Le grand axe (sonde parallèle à l’axe vasculaire) nécessite un premier repérage plus aisé en petit axe de la veine. Il permet un excellent guidage de l’aiguille mais ne permet pas de visualiser les rapports immédiats de la veine avec l’artère. Les résultats de cette technique sont supérieurs à celle en petit axe concernant la visibilité de l’extrémité distale de l’aiguille (62 % contre 23 %) [14] et concernant le succès de la première ponction [20]. Un axe oblique décrit par Phelan et Hagerty en 2009 [21] permet de visualiser à la fois l’artère, la veine et l’ensemble de l’aiguille qui reste dans le grand axe de la sonde. Il permettrait de conjuguer les atouts du grand et du petit axe, il reste débattu et à évaluer plus complètement.
Particularités en fonction du site de cathétérisme La veine jugulaire interne La mise en place échoguidée de cathéters veineux centraux jugulaires internes est la plus étudiée et a fait l’objet des premières recommandations en 2002 [1]. La réduction du nombre des complications est sans ambigüité dans cette région où les rapports anatomiques entre les différentes structures sont très variables. La position théorique antérolatérale de la veine jugulaire interne par rapport à l’artère carotide commune n’est pas toujours confirmée par l’échographie. Même avec l’aide de l’échographie la veine jugulaire n’est pas cathéterisable dans 3 à 18 % des cas car elle est non visible ou thrombosée [6].
La veine sous-clavière La veine sous-clavière a des rapports anatomiques avec l’artère sous-clavière moins variables avec des positions allant de apicale à antérieure. L’apport de l’échographie est important et permet encore une fois d’identifier avec précision les vaisseaux, de guider l’aiguille de ponction et de rester bien à distance de la plèvre. Pour des raisons anatomiques évidentes de superposition des structures osseuses et vasculaires, on retrouve un décalage latéral du point de ponction par rapport à la technique utilisant les repères anatomiques seuls [22].
La veine fémorale La veine fémorale est médiale par rapport à l’artère fémorale au niveau du ligament inguinal. Souvent, la coupe d’échographie retrouve l’abouchement de la veine grande saphène encore plus interne formant une « tête de Mickey ». Le doppler aide à identifier correctement les différents vaisseaux. Les rapports se modifient en fonction du niveau de coupe ; ainsi dès le tiers moyen de la cuisse, la veine fémorale se retrouve en arrière de l’artère. Les recommandations de SFAR sont de choisir préférentiellement la ponction échoguidée par rapport à une technique utilisant le repérage anatomique lors de la mise en place des cathéters veineux centraux [5].
Contrôle post-ponction Le contrôle post-ponction du cathéter est indispensable, il a deux objectifs : vérifier la bonne position du cathéter et l’absence de complication.
Le contrôle radiographique La radiographie du thorax de face remplie ces objectifs. Elle permet la visualisation de l’extrémité du cathéter à droite de la ligne médiane en position intramédiastinale à la jonction atriocave de la silhouette cardiaque. Elle permet également d’éliminer une complication pleurale ou un trajet aberrant du cathéter.
Le contrôle échographique Le guidage échographique permet l’observation de la ponction correcte du vaisseau et la confirmation de la position adéquate du guide métallique dans sa lumière. D’autres méthodes sont proposées pour évaluer l’absence de complication. L’échographie pleurale a montré une bonne sensibilité pour diagnostiquer les pneumothorax, notamment antérieurs [23] qui sont peu visibles lorsque le contrôle radiographique est fait rapidement après la mise en place du cathéter. L’examen des axes vasculaires sous-claviers et jugulaires permet d’éliminer une fausse route du cathéter et enfin, une échocardiographie transthoracique peut apprécier la position de l’extrémité distale du cathéter. Un test aux bulles décrit par Vezzani et al. [24] a été proposé pour confirmer la position correcte de l’extrémité distale du cathéter à la jonction atriocave. Un protocole « CVP » pour Complication, veines et position a été décrit par Matsushima et Frankel en 2010 [25] visant à se substituer au contrôle radiographique. Enfin, une méthode originale de contrôle per-procédure de la position intracardiaque du guide par échographie et de mesure de la longueur nécessaire pour une position correcte a été proposée par Bedel et al. en 2013 [26]. Il s’agissait d’insérer le cathéter de la longueur exacte mesurée sur le guide lorsque la bonne position de l’extrémité distale de ce même guide était confirmée par l’échographie transthoracique. Ces méthodes de vérification échographique peuvent être utiles au lit du patient, limiter l’irradiation et les coûts mais il faut poursuivre leur évaluation. La formation des opérateurs au contrôle échographique devrait s’ajouter à celle de la ponction échoguidée elle-même. Il existe une variabilité des examens échographiques qui est opérateur dépendant et qui peut limiter la standardisation du contrôle ultrasonore. Les vérifications en temps réel sont très pertinentes pour corriger le geste. Néanmoins, un contrôle radiographique post-procédure reste recommandé [27] pour objectiver a posteriori l’absence de complication et la bonne position du cathéter.
Conclusion Le bénéfice apporté par l’échographie pour la mise en place des cathéters centraux par rapport aux techniques utilisant les repères anatomiques est très important. Le succès de
Pour citer cet article : Ludes P-O, Gayat É. Mise en place échoguidée des cathéters veineux centraux. Le Praticien en anesthésie réanimation (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.pratan.2015.06.006
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Mise en place échoguidée des cathéters veineux centraux la première ponction est bien supérieur ; les complications infectieuses et mécaniques sont réduites. Le coût global de l’utilisation de l’échographie bien que difficile à évaluer pourrait être moindre en raison de la réduction du nombre de complication et de la décroissance des coûts d’utilisation avec l’augmentation du nombre de procédures. En plus de l’amélioration de la sécurité du geste, la technique ultrasonore apporte un meilleur confort aux malades (d’autant plus s’ils ne sont pas sédatés) par la diminution du nombre d’échec de ponction. Avec un équipement adapté et une formation des opérateurs appropriée, l’utilisation de l’échographie est recommandée pour tous les patients qui nécessitent un abord veineux central [5]. La mise en place échoguidée de cathéters centraux doit être préférée par les médecins juniors et par les praticiens séniors en première intention et plus particulièrement dans les cas d’obésité, de repères anatomiques douteux, d’œdème, de trouble de la coagulation. . . Devant l’amélioration claire de la prise en charge du patient en termes de sécurité et de confort, il devient difficilement justifiable de ne pas recourir à l’échographie pour la mise en place des voies veineuses centrales.
Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.
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