Muscles respiratoires et périphériques dans la BPCO

Muscles respiratoires et périphériques dans la BPCO

BPCO : physiopathologie Muscles respiratoires et périphériques dans la BPCO C. Pinet Rapide état des lieux Muscles périphériques La BPCO est une ma...

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BPCO : physiopathologie

Muscles respiratoires et périphériques dans la BPCO

C. Pinet

Rapide état des lieux Muscles périphériques La BPCO est une maladie dyspnéïsante. La dyspnée, d’aggravation progressive entraîne une sédentarisation du patient. Cette sédentarisation amène à un déconditionnement musculaire périphérique qui lui-même aggrave l’intolérance à l’exercice. Si elle affecte clairement les muscles périphériques [1], on ne sait pas avec précision de quelle manière cette spirale du déconditionnement pourrait affecter les muscles respiratoires. On retrouve une atrophie musculaire périphérique chez environ 30 % des patients BPCO [2]. Cette fréquence augmente avec le degré d’obstruction bronchique. Si on compare ces patients à des sujets sains d’un groupe témoin du même âge, la section transversale des muscles de la cuisse des patients souffrants de BPCO est réduite d’environ 30 % (fig. 1) [3]. Chez les sujets BPCO, le nombre de capillaires et de fibres de type I et IIa est moindre que chez les sujets sains du même

Fédération des Maladies Respiratoires et Thoracique, Hôpital Sainte-Marguerite, 13274 Marseille Cedex 09. Correspondance : [email protected] Rev Mal Respir 2006 ; 23 : 15S15-15S19 Doi : 10.1019/20064181

Fig. 1.

Coupe scannographique horizontale d’une cuisse qui montre une atrophie musculaire significative chez les patients BPCO (à droite) si on les compare à des sujets contrôles (à gauche). D’après [3].

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groupe d’âge [4]. La réduction de la surface transversale des fibres de types I et IIa est proportionnelle à la réduction de la surface transversale à la mi-cuisse, ce qui permet de penser que la perte de la masse des muscles périphériques est probablement due à une atrophie spécifique aux fibres de type I et IIa. L’atrophie musculaire périphérique apparaît comme un facteur indépendant prédictif de mortalité (fig. 2) [5].

quadriceps est un déterminant important de la mauvaise tolérance à l’effort des patients BPCO [7]. La perte de la masse musculaire associée à la diminution de la force musculaire constitue en outre un facteur possible de mortalité indépendant de la fonction respiratoire [2]. Outre la force, l’endurance des muscles périphériques est également diminuée (fig. 4) [8]. Cette diminution de l’endurance serait peut-être en rapport avec une diminution de l’activité de certaines enzymes mitochondriales [9].

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COPD control

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Fig. 2.

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Courbe ROC de probabilité de survie en fonction du VEMS (FEV1) et de la surface de section du quadriceps (MTCSA) dans une population de patients BPCO. D'après [5].

500 500 Fig. 4.

Dans la population des patients BPCO modérés à sévères, la force du quadriceps diminue d’environ 30 % (fig. 3) [6]. Cette diminution de la force musculaire est la conséquence de l’atrophie évoquée dans le paragraphe précédent. La force du

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Mise en évidence de la diminution de l’endurance musculaire du vaste externe chez des patients BPCO (COPD). D’après [8].

Les causes de la dysfonction musculaire périphérique sont multi-factorielles. On peut ainsi citer le déconditionnement progressif suite à la sédentarisation, des troubles nutritionnels, l’inflammation systémique, l’hypoxémie, des troubles hydroélectrolytiques [1] ou plus récemment évoqué le stress oxydatif [10]. On ne sait pas actuellement faire la part respective de ces différents mécanismes dans la genèse de la dysfonction musculaire périphérique des BPCO.

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0 Fig. 3.

La force du quadriceps des patients BPCO est diminuée par rapport à des sujets contrôles de même âge. D'après [6].

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Concernant les muscles inspiratoires, essentiellement le diaphragme, des études ont montré une adaptation cellulaire à la surcharge de travail imposée par l’obstruction bronchique chronique [11, 12]. Cette adaptation consiste, entre autre, en une augmentation du nombre de fibres musculaires lentes de type I, moins fatigables, dans le diaphragme et une majoration des capacités aérobies par augmentation de la capillarisation et

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du nombre de mitochondries. Ainsi, la force et l’endurance des muscles inspiratoires semblent conservées, voire augmentées, chez les patients soufrant de BPCO [13]. Concernant la structure macroscopique du diaphragme dans la BPCO, on ne dispose que d’un seul travail publié. Il s’agissait d’une étude autopsique qui montrait que la masse du diaphragme de patient BPCO était comparable à celles de sujets sans BPCO [14]. Récemment la masse du diaphragme in vivo a été évaluée dans un groupe de patients BPCO [15]. Les résultats sont concordants avec l’étude autopsique montrant même une hypertrophie relative du diaphragme chez les BPCO après normalisation par la masse maigre de l’organisme (fig. 5). Cette hypertrophie relative s’explique très probablement en partie par la charge imposée aux muscles inspiratoires par l’obstruction bronchique chronique. Cependant les patients les plus obstructifs n’avaient pas forcément le plus gros diaphragme. De plus, on notait une grande hétérogénéité d’un patient à l’autre, la relation étroite que l’on trouve chez les sujets sains entre masse diaphragmatique et masse maigre n’étant pas retrouvée. Pour une même charge respiratoire, des paramètres, à ce jour en partie inconnus, font donc varier la masse diaphragmatique dans la BPCO. Pour les muscles expiratoires, les données ne sont pas là encore très exhaustives. Des études, assez anciennes, menées chez le hamster avaient montré une adaptation cellulaire assez comparable à celle observée dans le diaphragme [16]. Les conséquences de cette adaptation étaient une augmentation de l’endurance de certains muscles abdominaux [17]. Chez l’homme, bien que la force des muscles abdominaux semble conservée [18], leur endurance est diminuée [19].

Réhabilitation respiratoire Le déconditionnement musculaire périphérique, ainsi que, dans une moindre mesure, une éventuelle dysfonction respira-

toire justifient la réhabilitation respiratoire et expliquent en grande partie son efficacité. La réhabilitation respiratoire se définit comme un ensemble de soins personnalisés, dispensés au malade atteint d’une pathologie respiratoire chronique par une équipe transdisciplinaire (conférence de consensus de la SPLF sur la réhabilitation respiratoire 2005). Elle comporte un programme qui associe : – un entraînement à l’exercice ; – une éducation thérapeutique ; – un sevrage tabagique ; – une prise en charge psychologique ; – un suivi nutritionnel ; – une prise en charge sociale. Depuis 20 ans, son efficacité a été prouvée qu’elle soit pratiquée en centre, en ambulatoire ou à domicile et elle fait partie des recommandations pour le traitement de la BPCO avec un grade A selon la Haute Autorité de Santé (HAS), soit le plus haut niveau de preuve.

Quelques actualités de l’ATS 2006 Ce chapitre reprend une sélection, forcément arbitraire, de travaux présentés à l’ATS dans ce domaine des muscles périphériques et respiratoires dans la BPCO.

Stress oxydatif Gea et coll. [20] ont étudié le profil de stress oxydatif histochimique du quadriceps et du diaphragme chez 14 sujets BPCO bénéficiant d’une chirurgie pour cancer pulmonaire. Outre les limites inhérentes à l’inclusion et à toutes ces études (la néoplasie est-elle sans effet sur le profil du stress oxydatif ), les auteurs ont montré que le quadriceps et le diaphragme se comportaient de façon très différente. En effet, si les

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Contrôles

Fig. 5.

Il existe une relative hypertrophie du diaphragme des patients BPCO lorsque l’on normalise la masse du diaphragme (Mdi) par la masse maigre de l’organisme (MM). D'après [15].

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résultats sur le quadriceps sont similaires aux données connues de la littérature (augmentation très importante de tous les paramètres histochimiques du stress oxydatif ), ceux sur le diaphragme sont étonnants puisque les auteurs ne retrouvaient que des traces minimes de stress oxydatif. Cette étude, observationnelle, montre combien les muscles respiratoires et périphériques se comportent de façon différente chez les sujets BPCO. Van Helvoort et coll. [21] ont étudié l’effet d’une oxygénothérapie de 4 litres/minute sur le stress oxydatif au repos et à l’effort chez 9 patients BPCO, de façon randomisée contre de l’air comprimé. Au repos, 1 heure d’oxygénothérapie ne modifie pas le stress oxydatif présent à l’état basal en air ambiant. À l’exercice, par contre, l’apport d’oxygène permet de diminuer significativement le stress oxydatif induit par l’exercice. Ce travail pourrait permettre d’envisager un début de justification à l’oxygénothérapie de déambulation chez des patients normoxiques au repos qui désaturent à l’exercice. Une équipe espagnole [22] a étudié l’effet de la corticothérapie inhalée (CSI) sur le stress oxydatif sanguin (dosage sérique de Malondialdehyde, MDA) et sur l’inflammation bronchique (NO exhalé et dosage de MDA sur une expectoration induite). Après 8 semaines de traitement par Budésonide 800 μg/jour, les auteurs ont noté une diminution significative du MDA sérique et bronchique, ainsi que du NO exhalé, concluant à un effet des CSI sur le stress oxydatif des BPCO. Enfin, Ilumets et coll. [23] ont montré que des paramètres de stress oxydatif pouvaient être trouvés chez des patients fumeurs et présentant une bronchite chronique, soit des stades 0 de la classification de GOLD.

Quadriceps, mortalité et exacerbation Le quadriceps est le muscle périphérique le plus étudié dans la BPCO, tant en terme de structure que de force. Quelques travaux originaux ont été présentés cette année à San Diego. Comme cela a été précisé dans le premier paragraphe, l’atrophie musculaire périphérique est un facteur prédictif de mortalité dans la BPCO [5]. L’équipe anglaise de Polkey [24] a cherché à évaluer l’effet prédictif de la force musculaire périphérique, considérant que celle-ci est plus facilement mesurable en routine que la trophicité musculaire périphérique. Ils ont suivi 185 patients BPCO pendant 5 ans et déterminé un modèle de Cox prédictif de mortalité dans cette (petite) cohorte. Seuls le BMI, l’âge et la force du quadriceps sont revenus significatifs dans leur modèle, sans que soient indiqués avec précision les paramètres fonctionnels étudiés ! Ces résultats, aussi intéressants qu’ils soient, étaient prévisibles. En effet, il existe une corrélation très étroite entre force et trophicité d’un muscle, et notamment du quadriceps. L’intérêt de ce travail est donc de confirmer que l’on peut indifféremment considérer la force ou la trophicité du quadriceps comme index pronostique dans la BPCO. 15S18

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Les exacerbations de BPCO sont responsables d’une détérioration de la qualité de vie de ces patients. Maury et coll. [25] ont étudié prospectivement une cohorte de BPCO pendant 1 an. Ils en ont tiré deux groupes de patients BPCO ayant présenté au moins une exacerbation de leur maladie dans l’année. Le premier était constitué d’exacerbations modérées, n’ayant pas justifié d’hospitalisation. Le deuxième, était constitué d’exacerbations plus sévères, ayant justifié une hospitalisation, en moyenne de 7 jours. Les deux groupes étaient comparables en terme de fonction respiratoire, mais les patients du groupe des exacerbateurs sévères avaient une force du quadriceps significativement réduite au bout de 1 an. Les exacerbations sévères et les hospitalisations sont donc responsables d’une aggravation du déconditionnement périphérique. Forte de ces résultats, la même équipe belge a proposé une approche originale de la réhabilitation respiratoire et surtout du versant concernant le ré-entraînement à l’effort [26]. L’idée de cette étude est originale : débuter un ré-entraînement à l’effort dès l’hospitalisation du patient pour exacerbation afin de lutter précocement contre le déconditionnement précédemment décrit. Ils ont ainsi étudié 39 patients, 19 ont eu une prise en charge classique, et 20 ont bénéficié d’un travail spécifique en résistance dès le premier jour de l’hospitalisation puis pendant les 7 jours suivants. Outre sa faisabilité et son innocuité pour les patients, les auteurs ont montré que ce protocole permettait d’augmenter la force du quadriceps dans le groupe ré-entraîné, alors que cette dernière diminuait dans le groupe contrôle. Ces résultats bénéfiques se maintenaient 1 mois après l’hospitalisation. On peut donc peut-être imaginer que des programmes de ré-entraînement à l’effort très précoces pourront être proposés à l’avenir lors d’une exacerbation de BPCO. Des études de plus grande envergure, sur différents groupes musculaires, devront auparavant confirmer cette originale approche.

Inflammation et muscles respiratoires et périphériques L’inflammation systémique joue probablement un rôle dans le déconditionnement périphérique des BPCO, son impact sur les muscles respiratoires restant très discuté. Janssen et coll. [27] ont étudié l’effet de perfusion d’interleukine 8 sur la trophicité et la contractilité du diaphragme et du muscle gastrocnémien de rats. Aucun effet notable n’a au final été observé, l’Interleukine 8 n’étant donc pas le premier responsable de la myopathie du BPCO.

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