Annales de chirurgie plastique esthétique 48 (2003) 143–151 www.elsevier.com/locate/annpla
Article original
Optimisation du rajeunissement frontal. Combinaison chirurgie endoscopique–peeling-toxine botulique Optimal forehead rejuvenation. Combining endoscopy–peel-botulinum toxin B. Môle * 15, avenue de Tourville, 75007 Paris, France Reçu le 22 mai 2002 ; accepté le 23 janvier 2003
Résumé L’adjonction d’une technique de surfaçage ancienne, mais évolutive — le peeling — à un apport chirurgical récent — l’endoscopie — combinée à un traitement médical particulièrement très précis et performant — la toxine botulique — permet d’obtenir au niveau du front des résultats dont la qualité paraît inversement proportionnelle à la discrétion des séquelles cicatricielles. Les risques inhérents à chacune de ces techniques sont discutés, mais il est certain que l’utilisation judicieuse de leurs effets permet de diminuer nettement leur agression respective et mieux contrôler des incidents qui restent exceptionnels. Enfin, peeling et toxine botulique sont 2 excellents moyens d’entretenir avec peu de contraintes les résultats initialement obtenus. © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract The combining of a traditional resurfacing technique (trichloracetic or phenol peel) with 2 recent technological advances (endoscopic forehead plasty, botulinum toxin) may enhance the forehead rejuvenation in a more natural way. The desapointing results of some of our earlier results on a serie of 70 concecutive foreheadplasties can probably be attributed to the weakness of the suspension through percutaneous sutures. This has been remedied since 1998 by the systematic use of transosseous suspensions. The growing success of botulinum toxin explains the noticable decrease of endoscopic surgery. This type of procedure is now used to correct significant frontal ptosis requiring an uplifting of no more than 1,5 cm, thereby avoiding the unnatural results encountered in many publications. Some benefits can be obtained by the way of a transpalpebral approach without using the endoscope; nowadays, upper blepharoplasties are almost systematically done in the majority of our cases in order to obtain the most natural result. Light peels and botulinum toxin injections can maintain this result relatively easily. © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Endoscopie frontale ; Peeling ; Toxine botulique Keywords: Forehead endoscopy; Peeling; Botulinum toxin
1. Introduction La demande de rajeunissement facial en augmentation constante, intéresse une population de plus en plus jeune et * Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (B. Môle). © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. DOI: 10.1016/S0294-1260(03)00046-3
exigeante du fait des contraintes socioprofessionnelles auxquelles elle se heurte. Si l’intervention « pour la vie » autrefois pratiquée à un âge déjà avancé n’est plus de mise, l’espérance actuelle est celle d’une technique efficace qui puisse s’entretenir pendant de longues années avant le franchissement d’une nouvelle étape chirurgicale plus décisive mais parfois grevée de séquelles cicatricielles qui peuvent
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rendre sa répétition problématique. Parmi les très nombreuses propositions thérapeutiques envisageables, nous avons sélectionné celles qui nous paraissaient donner le meilleur rapport résultats/contraintes, l’importance de ces dernières constituant un élément de choix décisif dans une population par définition active, tout en intéressant les 3 étages tégumentaires concernés par les aléas du vieillissement : la contracture musculaire, la ptôse et ses marques séquellaires, et la détérioration de la surface (taches, rides et ridules). Bien entendu, toutes les associations sont non seulement possibles entre elles et avec d’autres techniques, mais hautement recommandées dans l’entretien à long terme du résultat. 2. Matériel et méthode 2.1. Pourquoi l’endoscopie ? Depuis son introduction comme technique courante dans les années 1995 [1,2], nous n’avons plus jamais pratiqué de voie coronale — à l’exception d’un cas présentant une implantation capillaire antérieure exceptionnellement basse et demandant expressément son recul — estimant celle-ci particulièrement délabrante par la perte chevelue définitive et l’insensibilité postérieure même transitoire qu’elle entraîne. Il a été largement démontré que l’endoscopie pouvait obtenir les mêmes résultats [3] à la condition toutefois que la ptose ne confine pas à l’effondrement de l’étage frontal (relèvement nécessaire inférieur ou égal à 1,5 cm à sa partie médiane [4]) et qu’une technique rigoureuse notamment dans sa fixation soit employée. Ce dernier point paraît important et explique sans doute les déceptions connues par ceux de nos collègues exprimant des réserves certaines pour l’endoscopie ; néanmoins des résultats durables peuvent être également obtenus par des fixations transitoires par accollement– plicature du cuir chevelu (Figs. 1, 2) ou remise en tension sur agrafes [5]. La technique que nous pratiquons reste banale, nous n’avons pas de préférence marquée pour un plan sus- ou sous-périosté, même si ce dernier paraît assez évident pour être pratiqué quasi complètement sans endoscope d’autant que l’abord premier latéral temporal profond y conduit tout naturellement dès le franchissement de la crête temporale ; la myotomie paraît préférable à la myectomie car laissant moins de dépressions sous les peaux fines ; l’efficacité du relèvement suppose évidemment une rupture périostée complète d’une apophyse orbitaire externe à l’autre. L’intérêt de l’endoscope à ce stade est celui d’un instrument de contrôle plus que de dissection : contrôle de cette rupture périostée, contrôle de l’hémostase. La fixation est dorénavant systématiquement assurée par suspension au travers d’un canal cortical externe dans lequel sont passés généralement 1 à 2 points par côté de PDS® 3/0 (Ethnor France) dont le sens de traction diverge d’environ 30°. En effet, nous avons eu à déplorer un certain nombre de dégradation rapide de résultats initialement corrects en recourant à des artifices de fixation temporaires faisant essentiellement appel à des plicatures du cuir chevelu ; non seulement cette sensation de vague cutanée
Fig. 1. A : relèvement endoscopique maintenu par plicature transitoire du cuir chevelu ; B : résultat à 7 ans.
est désagréable pour le patient, mais elle peut induire des alopécies, qui pour être transitoires n’en sont pas moins sources de récriminations... Il semble acquis qu’un délai de 6 à 12 semaines est en moyenne nécessaire chez l’animal pour obtenir un accollement périosté solide [6,7] et il nous paraît que cette fixation transcorticale est le moyen le plus simple, le plus efficace et le moins onéreux de parvenir à ces fins. Bien que ces techniques semblent tout autant performantes entre les mains de leurs auteurs, nous n’avons ni l’expérience des vis résorbables [6,7] ni celle de la colle biologique [8]. Bien que le geste de perforation soit simple et facilement contrôlable, nous utilisons pour gagner du temps un « perforateur cortical » (Pouret, 21b rue Mederic, 92110 Clichy France — Fig. 3), qui se compose d’un petit socle d’acier comportant 2 tunnels divergeant à 45° disposés de telle façon que leur point de rencontre virtuel se situe à 3 mm de profondeur, soit à distance raisonnable de la corticale interne ; un mandrin amovible permet à la fois d’immobiliser le perforateur après forage du premier trou et de servir de butée à la mèche ou à la fraise lors de la perforation du second trou.
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La blépharoplastie supérieure, quand elle est associée (dans une grande majorité des cas actuellement) permet également de contrôler si nécessaire directement la myotomie médiane et l’efficacité du décollement frontal qui peut se faire directement par cette voie, complétée par l’incision temporopariétale. Ce geste permet surtout de ne pas demander au relèvement frontal d’effacer à lui seul l’excédent cutané supéro-externe de la paupière supérieure et d’obtenir un résultat plus naturel. 2.2. Pourquoi le peeling et quel peeling ?
Fig. 2. A : relèvement endoscopique maintenu par fixation transosseuse ; B : résultat à 6 ans.
Enfin pour tous ceux qui ont connu l’exaspération du temps parfois perdu à récupérer le fil à travers le tunnel — nous parlons d’expérience... — signalons l’artifice du trocart de 18 G qui, glissé par l’une des orifices, permet la récupération instantanée du fil passé par l’autre. Nous concédons ne pas faire appel à de savants calculs pour la mesure du relèvement frontal, estimant que la simple pesanteur place la peau frontale libérée de ses connexions profondes en bonne position et qu’elle sera donc bloquée in situ, sans exagération. Un drainage par drain de Redon pour une nuit est systématique, permettant de réduire tout l’espace mort du décollement dans les premières heures. Aucun pansement compressif n’est nécessaire.
Si le resurfacing au laser CO2 paraît une technique extrêmement efficace pour le front, son caractère agressif n’est pas toujours facile à contrôler sur une peau déjà décollée, et les risques d’érythème prolongés nous paraissent trop fréquents pour accepter tous les risques cumulés du laser. Le peeling entre nos mains permet d’obtenir rapidement une épidermolyse homogène tout en insistant sur les taches souvent importantes présentées par les patientes au niveau du front à partir d’un certain âge (Fig. 4). Nous avons utilisé exclusivement pendant de nombreuses années l’acide trichloracétique à une concentration de 35 à 40 % afin d’obtenir un stade 30–3 ou 40–1 selon Obagi, que l’on atteint en quelques minutes à cette concentration (Fig. 5). L’adjonction de « facteurs » aussi dispendieux que mystérieux ne nous apparaît pas fondamentale, non plus que le bleu de méthylène qui n’a d’utilité que pour un praticien non averti des subtilités colorimétriques de la profondeur atteinte. En revanche, l’acide trichloracétique « chélaté » (Mene et Moy, 15, rue Mesnil, 75116 Paris) permet une application d’emblée très homogène (la solution se présente comme une boue liquide qui s’étale au pinceau) et d’action très progressive qui s’adapte très bien aux besoins des débutants et des plus confirmés, minimisant cet aspect en mosaïque témoin d’une juxtaposition de profondeurs différentes que l’on peut observer avec la plupart des peelings profonds. Depuis une année nous avons adopté dans certains cas le peeling au phénol atténué selon Hetter [9] préparé à différentes concentrations suivant l’atteinte cutanée et la partie du visage à traiter ; il semble clairement établi que la concentration en huile de croton (extraite d’une graine abandonnée par la pharmacopée française et qu’il faut donc se procurer à l’étranger) fait la différence de l’efficacité de la méthode à la goutte prés ; le givrage caractéristique est beaucoup plus rapidement obtenu, mais la solution — qui n’est en fait
Fig. 3. Le perforateur cortical. A : vue latérale, mandrin en place ; B : vue supérieure, mandrin ôté ; C : vue peropératoire.
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Fig. 4. A : femme de 75 ans présentant de nombreuses élastoses solaires ; B : résultat à 6 mois après endoscopie frontale et peeling TCL.
qu’une émulsion — doit être agitée en permanence sous peine d’obtenir un résultat à nouveau peu homogène (Fig. 6). La préparation cutanée longtemps préconisée paraît moins à la mode aujourd’hui, mais sur les phototypes 3 et 4 il semble plus prudent qu’un traitement à visée stabilisatrice sur la pigmentation soit entrepris au moins 15 j avant l’intervention, associé à une légère desquamation induite par la vitamine A acide ou un acide de fruit selon la tolérance cutanée. Ce même type de traitement sera repris 2 à 3 semaines après l’intervention afin d’en entretenir l’effet. Le traitement anti-herpétique n’est préconisé de façon systématique qu’en cas d’antécédent avéré ou simplement douteux d’herpès (Acyclovir®, 800 mg/j 3 j avant et 5 j après l’intervention). Nous préférons terminer l’intervention par le peeling, généralement poursuivi sur l’ensemble du visage et souvent du cou (très léger) afin d’obtenir une meilleure homogénéité. Certains préconisent de pratiquer le peeling en début d’inter-
Fig. 5. A : femme de 61 ans ; B : résultat à 8 mois (peeling TCL 35 %, 4 paupières, lipofilling pommettes et menton, lifting avec relèvement temporal).
vention, ce qui permet sans doute de mieux en contrôler les effets et le compléter en fin de programme sur les rides les plus profondes et les tâches persistantes. Cependant la manipulation d’une peau frontale très fragilisée par des gants naturellement agressifs (caoutchouc + talc) peut entraîner des marques de rubéfaction à la limite du saignement dermique érosif qui alourdissent sensiblement les suites immédiates, même si elles n’ont pas paru exercer de conséquence réelle à long terme sur les 2 cas que nous avons observés.
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Fig. 6. A : femme de 52 ans ; B : résultat à 11 mois après endoscopie du front, blépharoplastie supérieure et peeling au phénol atténué selon Hetter.
2.3. Pourquoi la toxine botulique ? Il est inutile de rappeler que l’introduction de la toxine botulique dans le domaine de l’esthétique par J. Carruthers au début des années 1990 puis en France depuis 1995 par B. Ascher [10] puis C. Le Louarn [11] a considérablement modifié notre approche du vieillissement fronto-orbitaire. Il s’agit en effet du premier traitement purement médical de la mimique et de la contracture musculaire résultante qui, s’il ne corrige pas les rides profondes déjà formées, les adoucit indiscutablement, empêche leur pérennisation et l’apparition de nouveaux stigmates (Fig. 7). Ce traitement peut même dans certains cas être véritablement préventif chez les personnes jeunes où une seule séance peut suffire à éliminer un tic de froncement débutant. Nous utilisons les 2 toxines A actuellement disponibles selon les concentrations préconisées, le Botox® (Allergan, 100 unités par flacon diluées dans 2 cc et réparties en 2 seringues de 50 unités chacune), et le Dysport® (Ipsen, 500 unités par flacon diluées dans 2,5 cc et réparties en 4 seringues de 125 unités chacune) ; à efficacité recherchée identique, il faut 3 à 4 unités de Dysport® pour 1 unité de Botox®. Si l’efficacité globale paraît assez comparable, l’action du Dysport® serait un peu plus rapide mais peut être un peu moins prolongée ; en revanche, le volume injecté avec le Dysport® étant plus conséquent les risques de diffusion au-delà de la zone à traiter le sont également et c’est avec ce produit que nous déplorons le plus d’incidents. Les débutants seront sans doute moins pénalisés avec le Botox®, produit qui en revanche, doit être conservé à température de congélation avant utilisation, contrairement au Dysport® qui se conserve à +5 °C. La nouvelle forme de Botox® disponible
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dès cette année pourra également être conservée à cette température. Si l’on considère ces différents paramètres, le rapport prix de revient/efficacité des 2 produits pourrait être légèrement en faveur du Dysport®. Nous n’avons encore aucune expérience de la toxine B, actuellement en cours d’introduction en France (Neurobloc®— Elan Pharma), qui pourrait être utilisée en cas d’échappement ou d’inefficacité de la toxine A (auto-anticorps naturels ou induits). Nous adjoignons volontiers un peu de xylocaïne adrénalinée à la dilution (1/5) qui a le double intérêt de limiter la diffusion et surtout de marquer les limites de celle-ci par la blancheur cutanée induite : on sera ainsi régulièrement surpris d’une diffusion bien au-delà des points d’injection notamment au niveau de la patte d’oie... La sagesse consiste donc à injecter soit très peu de points, soit très peu de produit à chaque point [12] et nous préconisons de tenir le corps de la seringue dans la paume, le piston étant entraîné par une simple pression entre les éminences thénar et hypothénar, beaucoup plus nuancée que la poussée traditionnelle avec le pouce. Les modalités d’injection sont à présent bien codifiées et nous ne les rappellerons pas [10–12]. Parmi les idées novatrices récemment exposées, rappelons la proposition intéressante de P. Kestemont de préparer toute remise en tension frontale de type endoscopique par un blocage franc de l’ensemble du front par la toxine botulique (jusqu’à l’obtention de regard dit « méphisto ») 3 semaines avant l’acte chirurgical pour en garantir la pérennisation durant l’accolement cicatriciel [13]. Nous n’avons pas encore l’expérience de cet intéressant appoint et considérons avant tout la toxine botulique comme un moyen d’entretien (Fig. 8), de perfectionnement (ou d’évitement...) de la remise en tension frontale. Comme chacun sait, le statut médicolégal « esthétique » de la toxine botulique n’est pas encore officialisé en France malgré une AMM qui serait sur le point d’aboutir (uniquement pour la région intersourcillère ...) et qui est déjà en vigueur dans 12 pays, dont le Canada et les États-Unis pour la région glabellaire. 2.4. Série clinique Nous nous sommes limités à l’étude de 70 cas consécutifs de relèvement de type endoscopique disposant d’un recul d’au moins 6 mois, répartis en 66 femmes et 4 hommes. Sept cas n’ont pas été revus et sont donc éliminés des considérations de résultat. L’intervention a été associée 27 fois à une blépharoplastie supérieure, 27 fois à une blépharoplastie inférieure, 5 fois à un relèvement malaire, 34 fois à un lifting cervicofacial, 14 fois à un lipofilling et 30 fois à un peeling dans le même temps. Finalement seuls 8 patients sur 70 ont bénéficié d’un geste isolé de relèvement frontal, essentiellement les 3 premières années, l’observation d’un résultat insuffisant notamment au niveau de la paupière supérieure nous ayant conduit progressivement à associer la blépharoplastie supérieure presque systématiquement. D’un point de vue technique, le relèvement a été de type endoscopique traditionnel 45 fois, effectué par voie latérale
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Fig. 7. Traitement du front par la toxine botulique (Dysport® 125 u, 1 séance), résultat à 3 semaines. A1, A2 : au repos ; B1, B2 : en élévation frontale maximale ; C1, C2 : en froncement maximal.
sans endoscope 8 fois, et par voie palpébrale supérieure sans endoscope 14 fois. La fixation a été assurée par sutures transitoires 26 fois, puis systématiquement par suspensions transcorticales à partir de 1998 (44 fois). L’injection de toxine botulique que nous ne pratiquons que depuis 1998 est venue en complément de l’intervention à 14 reprises mais elle a incontestablement fait reculer l’indication de l’endoscopie frontale chez une patiente hésitante un très grand nombre de fois : en témoigne la chute régulière du nombre d’intervention sur le front ces 7 dernières années puisque si nous considérons le taux de ce type de geste par rapport au nombre total de nos liftings, il a été successivement de 42 % (1995), 36 % (1996), 55 % (1997), 31 % (1998), 48 % (1999), 21 % (2000) et 15 % (2001) ; ce dernier chiffre devrait constituer la moyenne des années à venir...
3. Résultats La qualification des résultats en excellents, bons, passables, mauvais ou insuffisants étant extrêmement subjective, nous ne nous occuperons que de la dernière catégorie en quantifiant la nécessité d’un geste complémentaire chirurgical (reprise de l’endoscopie frontale, blépharoplastie, galéapexie), soit 6 fois (9,3 %). Ceci ne sous-entend pas que tous les autres résultats peuvent être considérés comme satisfaisants, mais du moins ils n’ont pas entraîné de demande expresse de reprise. Toutes celles-ci sont survenues dans les 3 premières années où nous ne pratiquions pas de fixation osseuse. Nous n’avons repris aucune endoscopie depuis même si un résultat plus modeste que prévu nous fait regretter parfois de ne pas avoir proposé aux patientes un traite-
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Fig. 8. A : asymétrie sourcilière chez une femme de 46 ans ; B : correction par endoscopie ; dès le quatrième mois un traitement d’entretien par la toxine botulique a été entrepris.
ment par toxine botulique dès le premier trimestre suivant l’intervention (Fig. 8) ou plus logiquement immédiatement avant l’intervention.
3.1. Complications • La paralysie de la branche supérieure du VII reste le risque majeur de la chirurgie du front et nous l’avons fréquemment observée, toujours de manière unilatérale : 10 cas, soit 7 %. Le fait de privilégier le décollement de la crête temporale à partir de l’incision temporale et l’exclusion de toute tension exagérée des écarteurs dans la région frontale externe paraissent les plus sûrs moyens de se mettre à l’abri d’un tel incident, toujours régressif en quelques jours à quelques semaines dans notre expérience. Un seul cas (thermotraumatisme au cours d’une coagulation directement constaté durant l’intervention) s’est prolongé au-delà du troisième mois, rentrant progressivement dans l’ordre ; cette patiente, qui avait déjà eu un lifting temporal quelques années avant, a bénéficié dans l’intervalle d’une injection de toxine botulique controlatérale afin de rendre cette période de récupération plus acceptable. • L’alopécie (3 cas), toujours régressive, semble en rapport direct avec le maintien de la suspension par sutures transcutanées durant 2 à 3 semaines, aggravée ensuite
Fig. 9. A : patiente de 37 ans ; B : 9 ans plus tard après relèvement endoscopique du front (16 mois), peeling TCL et mentoplastie ; un peeling d’entretien (16 à 24 mois) est régulièrement pratiqué du fait de la réapparition d’un mélasma cervical résistant à tout traitement médical.
par un prurit résiduel qui peut persister plusieurs semaines. Nous n’avons observé aucune alopécie en cas de fixation transcorticale. • Le peeling TCL sur des phototypes clairs ou moyens entraîne exceptionnellement des risques pigmentaires au niveau du front où le geste doit être nettement plus agressif que sur le reste de la face. Nous avons observé un cas d’eczématisation persistant plus de 6 mois, étendu à la zone pariétale bien en arrière du décollement et dont il est difficile de rapporter la cause au peeling ou à une intolérance aux nombreux produits dits « cicatrisants » ou « hydratants » utilisés par cette patiente. Le retour d’une pigmentation déjà connue ne doit pas être considérée comme une complication mais comme une condition locale particulière qui appelle un complément de peeling ultérieur, tout à fait praticable sans aucune anesthésie (Fig. 9). Nous n’avons pas encore à déplorer d’incident avec le phénol atténué, mais notre expérience est encore évidemment trop récente.
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• Les incidents (on ne peut parler de complications puisqu’ils sont toujours régressifs) observés au niveau du front avec la toxine botulique sont exceptionnels dans le tiers supérieur de la face. Il s’agit essentiellement du ptosis dû à une injection sus-orbitaire médiane trop basse ou à la diffusion du produit via un petit hématome qui peut passer inaperçu : nous en déplorons 2 cas, hors de tout contexte chirurgical, régressifs en 3 semaines. Les patientes réclament souvent le traitement des rides immédiatement sus-sourcilières et il ne faut pas céder à cette exigence dans le même temps sous peine d’entraîner une ptôse sourcilière externe comme nous l’avons observé une fois. De même le traitement trop généreux de la région palpébrale supéro-externe risque de favoriser une ascension frontale déplaisante (regard « mephisto »), mais tous ces petits problèmes de balance musculaire entre l’orbiculaire et le frontal se régularisent soit d’eux-mêmes, soit par une petite retouche à partir de la troisième semaine. Il reste que la dose à employer varie d’un patient à l’autre, et que la concentration de toxine botulique dans les flacons n’étant pas absolument constante, on peut observer des différences de résultats suivant les lots et les patients d’une séance à l’autre. Ce fait doit être reconnu pour ne pas inquiéter les patients sur l’inefficacité suspectée (bien que possible) du produit.
4. Discussion En moins de 5 années, la chirurgie du rajeunissement frontal a connu 2 révolutions majeures. L’endoscopie qui, par sa simplicité, sa discrétion, son efficacité si la ptôse sourcilière n’est pas trop importante a condamné définitivement l’abord bicoronal pour la majeure partie des générations rodées aux abords craniofaciaux. Certes, quelques « îlots de résistance » n’ont toujours pas admis l’intérêt de cette technique, malgré l’absence de cicatrice, d’alopécie, d’anesthésie prolongée du cuir chevelu et le raccourcissement des suites qu’elle autorise. Nous pensons que certaines déceptions tiennent d’abord à l’absence de tenue de la remise en tension frontale et notre unique indication survivante d’une voie coronale serait l’implantation trop basse de la ligne chevelue antérieure ou une ptôse majeure de tout le front avec nécessité d’un relèvement dépassant 1,5 cm. Nous avons néanmoins conscience que bien des praticiens ne conservent aujourd’hui de l’endoscopie que son mode de décollement et pratiquent souvent une chirurgie de « type endoscopique » (sans endoscope), celui-ci ne servant éventuellement qu’en fin d’intervention à vérifier l’achèvement du décollement et l’hémostase ; l’abord transpalpébral supérieur du front permet également de se passer aisément de l’endoscope. Dans le même temps, l’abord des muscles intersourciliers s’est fait moins agressif car l’expérience a montré que leur résection n’était jamais complète et qu’elle pouvait laisser
une dépression qu’il sera parfois nécessaire de combler dans l’immédiat ou secondairement. De plus il est légitime de se demander si l’ascension sourcillière est systématiquement compatible avec l’impression de jeunesse du regard telle qu’on l’entend généralement : quasiment aucune des femmes considérées comme ces beautés type que l’on admire à longueur de page de nos magazines ne présente ce regard légèrement étonné, ces yeux un peu écarquillés régulièrement rencontrés dans la plupart des publications consacrées à la chirurgie du front... Il apparaît à ce jour que le moyen le plus sûr de traiter naturellement le bandeau orbitofrontal est l’utilisation de la toxine botulique en complément et en entretien de l’intervention dans les années suivantes... ou à sa place tout simplement (Fig. 7 A1, A2). Il est à souligner que depuis la banalisation de cette technique purement médicale, notre taux d’indication de relèvement endoscopique chirurgical a chuté dans des proportions considérables, passant de 55 % des liftings en 1997 à 15 % l’an passé. Même si la nécessaire répétition de ces séances (2 à 3 par an) paraît lassante aux patients lorsqu’on le leur propose, il s’agit plutôt de leur faire admettre le caractère éminemment social de cet acte qui passe toujours inaperçu tant il est progressif autant dans son apparition que dans sa disparition. Il s’agit véritablement de redonner de la sérénité au regard d’une manière subtile mais extrêmement efficace. Si de rares incidents (ptôsis, regard dit méphisto, chute sourcilière externe) émaillent parfois cette thérapeutique, ils sont incontestablement beaucoup plus exceptionnels que les parésies frontales unilatérales relevées toutes les séries de la chirurgie du front, certes quasiment toujours réversibles, mais bien inquiétantes pour le patient. Le resurfacing, qu’il fasse appel à des techniques d’évaporation laser ou d’épidermolyse par peeling, reste pour nous un aspect essentiel du traitement du vieillissement frontal. Les 2 techniques sont certainement aussi efficaces l’une que l’autre sur les ridules et les taches pigmentaires et l’expérience du praticien joue évidemment plus que la technique elle-même. Entre nos mains, le peeling apparaît plus rapide à pratiquer, réserve faite d’une efficacité immédiate assez variable d’un patient à l’autre dans la région frontale, région qui doit être relativement plus agressée que d’autres, au même titre que la région périlabiale ; dans tous les cas, le contrôle du patient vers le cinquième jour permet éventuellement de compléter ce peeling en ambulatoire si l’épidermolyse n’a pas encore débuté. Au total, la combinaison de ces 3 techniques n’est jamais systématique dans le même temps, mais elles se complètent parfaitement tant dans la durée qu’en entretien mutuel ; leur ordre d’application ne saurait répondre à un schéma précis, dépendant essentiellement des motivations et des disponibilités de chaque patient. Toutes les autres options de traitements « doux » (injections, lipofilling) sont évidemment à considérer pour répondre aux mieux aux aspirations générales des patients : minimum de contraintes sociales, réversibilité possible, risques maîtrisés, efficacité tangible etc.
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5. Conclusion
[2]
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Il est devenu tout à fait possible d’améliorer de façon notable, durable et avec un minimum de risque, l’ensemble fronto-orbitaire par l’association d’un relèvement endoscopique, d’un peeling et d’un complément de toxine botulique. Cette association n’est évidemment pas systématique dans le même temps mais elle intervient souvent de manière successive sans qu’il soit nécessaire de rendre prioritaire l’intervention chirurgicale par rapport aux autres procédés qui permettent souvent une approche moins agressive et plus confiante de la restauration esthétique du tiers supérieur du visage. Bien entendu, ce triptyque s’associe très volontiers à de nombreuses autres techniques si nécessaire : blépharoplastie supérieure (très souvent), blépharoplastie inférieure, lifting cervicofacial, implants, lipofilling ou autres injections, qui par leurs combinaisons permettent d’optimiser ou d’entretenir le résultat initialement obtenu tout en évitant des évictions socioprofessionnelles longues qui découragent et inquiètent à juste titre des candidats de plus en plus jeunes et actifs.
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