Progrès en urologie (2015) 25, 675—682
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REVUE DE LA LITTÉRATURE
Prise en charge des lésions kystiques du rein : revue de la littérature Management of cystic renal masses: Review of the literature C. Lanchon a,b, G. Fiard a,b, J.-A. Long a,∗,b a
Service d’urologie et transplantation rénale, CHU de Grenoble, 38043 Grenoble cedex 9, France b Laboratoire TIMC-IMAG, domaine de la Merci, 38700 La Tronche, France Rec ¸u le 1er avril 2015 ; accepté le 29 mai 2015 Disponible sur Internet le 29 juin 2015
MOTS CLÉS Kyste rénal ; Kyste complexe du rein ; Tumeur kystique ; Classification de Bosniak ; Carcinome à cellules rénales kystique ; CCR
∗
Résumé Introduction. — Le diagnostic de plus en plus fréquent de kyste rénal implique de savoir identifier et prendre en charge de manière adéquate les lésions ayant un potentiel de malignité. Le but de cet article de revue est de réaliser une mise au point sur les caractéristiques morphologiques, histologiques et thérapeutiques des tumeurs kystiques du rein. Méthode. — Une revue systématique de la littérature sur PubMed et ScienceDirect a été effectuée. Les études prospectives et rétrospectives chez l’adulte, ainsi que les revues de la littérature ont été examinées. Résultats. — La classification de Bosniak, utilisée à travers le monde, permet un langage commun aux radiologues et urologues pour décrire les kystes rénaux selon leur potentiel de malignité. La probabilité de néoplasie est de 0, 15, 50 et 95 % pour les kystes de catégorie I, II, III et IV, respectivement. Il s’agit de carcinome de bas grade le plus souvent. Les kystes IIF (F pour follow-up) sont malins dans 25 % des cas et nécessitent une surveillance par imagerie à 6 mois puis régulièrement pendant 5 ans. Elle peut se faire par TDM, IRM ou échographie de contraste. La biopsie rénale, longtemps non recommandée dans les tumeurs kystiques, pourrait permettre de prévenir 40 % de chirurgies non nécessaires. Les kystes Bosniak I et II symptomatiques peuvent être traités par sclérothérapie ou résection du dôme saillant. Les catégories III et IV doivent bénéficier d’un traitement selon les règles d’exérèse carcinologique. Conclusion. — La catégorie IIF constitue la principale difficulté diagnostique et thérapeutique des tumeurs kystiques du rein. La biopsie permet un diagnostic fiable, sans risque carcinologique. © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (J.-A. Long).
http://dx.doi.org/10.1016/j.purol.2015.05.013 1166-7087/© 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
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KEYWORDS Renal cyst; Complex renal mass; Cystic renal tumor; Bosniak classification; Cystic renal cell carcinoma; RCC
C. Lanchon et al.
Summary Introduction. — The expansion of renal cysts diagnosis in the population entails to learn how to properly identify and treat potentially malignant lesions. The aim of this review article is to discuss anatomical and pathological characteristics as well as treatment of cystic renal tumors. Method. — A literature review of Medline publications on renal cysts and cystic tumors was conducted. Prospective and retrospective studies in adults, and previous reviews were analyzed. Results. — Bosniak classification of renal cysts is used worldwide among urologists and radiologists to categorize cystic lesions according to their potential malignancy. There is a 0, 15, 50 and 95 % chance of cancerous cells in Bosniak I, II, III, and IV, respectively. The most frequent pathology is renal cell carcinoma, usually low grade and low stage. Category IIF cysts (F for follow-up) have a 25 % chance of malignancy and require surveillance at 6 months and regularly for 5 years. The follow-up can be done with CT imaging, MRI or contrast enhanced ultrasonography. Cyst biopsy, which was not recommended for a long time, could prevent 40 % of unnecessary surgeries for benign lesions. Bosniak category I and II cysts can be treated if symptomatic, by sclerotherapy or laparoscopic deroofing of the cyst. Category III and IV lesions must be treated as malignant tumors with security margins. Conclusion. — Diagnosis and treatment of Bosniak category IIF renal cysts remain the primary challenge for physicians in cystic renal tumor management. Biopsies of renal cysts seem reliable, with no risk of malignant cell dissemination. © 2015 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Introduction Les images kystiques rénales de découvertes fortuites ont connu ces dernières décennies un essor considérable du fait du développement de l’imagerie abdominale. Approximativement 50 % de la population de plus de 50 ans est porteur d’un kyste rénal. Si les kystes typiques sont aisément identifiables et le plus souvent bénins, il peut être difficile de distinguer un kyste complexe du rein d’un carcinome à cellules rénales kystiques ou d’une autre lésion kystique maligne. Leur pronostic très différent implique de ne pas méconnaître une lésion potentiellement néoplasique, sans sur-traiter des lésions bénignes. Le but de cet article de revue est de réaliser une mise au point sur le diagnostic et la prise en charge des tumeurs kystiques du rein.
Méthodes Une revue systématique de la littérature sur PubMed et sur ScienceDirect a été effectuée en utilisant les termes : « renal cysts, cystic renal tumors, complex renal cysts, Bosniak classification, Bosniak category IIF ». Les études prospectives et rétrospectives effectuées chez l’adulte, en franc ¸ais et en anglais, ainsi que les revues de la littérature sur le sujet ont été examinées. Les case reports, réponses à l’éditeur, séries étudiant les surinfections de kystes, maladies kystiques rénales et autres désordres génétiques (maladie de Von Hippel-Lindau, sclérose tubéreuse de Bourneville) ont été exclus (Fig. 1).
Résultats Histologies et classification des tumeurs kystiques du rein Les tumeurs kystiques sont des proliférations tumorales rénales creusées de cavités. Sur un plan histologique, on distingue les tumeurs kystiques bénignes des tumeurs rénales pour lesquelles la kystisation est la résultante d’une modification architecturale ayant un potentiel de malignité (Tableau 1). Cinq à 7 % des tumeurs du rein sont de nature kystique [1,2]. Parmi les tumeurs kystiques, l’histologie la plus fréquente est le carcinome à cellules claires kystique (63 %), suivi du carcinome papillaire (25 %). Elles sont généralement de bon pronostic car peu agressives et de bas grade. Reese et al. rapportent 79 % de tumeurs pT1 et 73 % de grade de Fuhrman 1 ou 2 en cas de tumeurs kystiques néoplasiques [1].
Tableau 1 [3].
Classification des tumeurs kystiques du rein
Tumeurs malignes
Tumeurs bénignes
Carcinome multiloculaire kystique à cellules claires (CMK) Carcinome tubulo-kystique
Néphrome kystique Tumeur mixte épithéliale et stromale Lymphangiome kystique Angiomyolipome kystique
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Identification
Recherche dans la littérature: Medline, Science direct n = 598
Articles exclus d’après les titres et résumés :
Evaluation
Case reports, articles de même institution, articles non en rapports avec le thème de la revue n = 495
Articles visionnés en entier
Eligibilité
n = 103
Articles exclus après lecture : Faible niveau de preuve, faible effectif, relation insuffisante au sujet
Inclus
n = 62
Figure 1.
Articles inclus dans l’analyse : n = 41
Diagramme de sélection des articles pour la revue d’après les critères PRISMA.
Des formes particulières peuvent être rencontrées dans les maladies génétiques comme la maladie de Von HippelLindau, parmi lesquelles une forme rare de CCR kystique uniloculaire, avec survenue d’un cancer développé dans la paroi d’un kyste [3]. Ces lésions sont à distinguer des kystes parasitaires du rein, dont l’incidence est rare en France, mais dont le diagnostic ne doit pas être méconnu du fait du risque de surinfection, voire de fistulisation dans les voies excrétrices. Ces lésions sont principalement rencontrées chez l’adulte jeune, entre 30 et 50 ans, et de localisation polaire dans 80 % des cas [4].
caractéristiques permettent de distinguer les kystes non suspects (catégories I et II) des kystes suspects nécessitant une prise en charge chirurgicale (catégories III et IV). Une nouvelle catégorie, appelée IIF (F pour follow-up) est ajoutée en 1997 [6] correspondant aux lésions intermédiaires entre les types II et III, nécessitant une surveillance régulière par imagerie. L’association entre le score de Bosniak et la probabilité de malignité a largement été démontrée dans la littérature [1,7] et est rapportée dans le Tableau 2. Il n’existe toutefois pas de corrélation entre le score de Bosniak et le type histologique, le stade TNM ou le grade de Fuhrman [1,8].
Imagerie des tumeurs kystiques rénales
TDM abdomino-pelvien
Classification radiologique des tumeurs kystiques du rein
Le scanner abdomino-pelvien sans et avec injection de produit de contraste reste à ce jour la modalité d’imagerie de choix pour le bilan des kystes complexes du rein. Son développement constant ces dernières années, avec la possibilité d’obtenir des coupes de plus en plus fines et des reconstructions de qualité, permet une analyse plus détaillée des structures intra-kystiques. De récentes études évaluant la reproductibilité intraet inter-individuelle des radiologues dans le classement, d’après le scanner, des kystes selon la classification de
En 1986, Morton Bosniak a établi une classification des lésions kystiques basée sur leurs modifications morphologiques tomodensitométriques : épaississement des parois, formation de septa et de végétations, rehaussement après injection de produit de contraste. La présence de calcifications serait en revanche moins péjorative qu’initialement supposé, compte tenu des connaissances actuelles [5]. Ces
678 Tableau 2
C. Lanchon et al. Classification modifiée des lésions kystiques du rein selon Bosniak [2,3].
Classification de Bosniak modifiée
Type I « Kyste simple »
Type II « Kyste atypique »
Type IIF
Type III « Kyste suspect »
Type IV « Cancer à forme kystique »
Critères diagnostiques à la TDM
Prise en charge recommandée
Probabilité de malignité (%)
Sans injection
Après injection
Densité hydrique (< 20 UH) Homogène Limites régulières sans paroi visible Cloisons fines Fines calcifications pariétales Kyste hyperdense (> 50 UH)
Absence de rehaussement (< 10 UH)
Aucune surveillance recommandée
0
Absence de rehaussement (< 10 UH)
15
Cloisons nombreuses et fines Paroi légèrement épaissie Calcifications pariétales et des cloisons, régulières Kyste hyperdense et entièrement intra-rénal, ≥ 3 cm
Absence de rehaussement ou rehaussement douteux
Uniquement les kystes symptomatiques : Typiquement : résection du dôme saillant (laparoscopique ou robotique) Surveillance tous les 6 mois pendant 5 ans par une imagerie en coupes (TDM ou IRM)
Cloisons nombreuses et épaisses Paroi épaisse Limites irrégulières Calcifications épaisses, irrégulières Contenu dense (> 20 UH) Paroi épaisse et irrégulière Végétations ou nodule mural
Rehaussement de la paroi ou des cloisons
Rehaussement de la paroi ou des végétations
Bosniak ont montré sa fiabilité. Le coefficient kappa, qui permet d’évaluer l’intensité et la qualité de la reproductibilité sur un score de 0 à 1, va de 0,69 [9], et jusqu’à 0,85—0,98 [10] selon les séries. De nombreux auteurs ont cherché à identifier des facteurs prédictifs de malignité sur les imageries scanner [11—13]. Un épaississement irrégulier des cloisons ou des septa du kyste, une prise de contraste hétérogène, ou un rehaussement des parois sont des facteurs fortement prédictifs de malignité [12,14]. Le scanner permet par ailleurs d’établir le diagnostic différentiel de kyste hydatique en cas de doute diagnostique en échographie (Fig. 2).
IRM abdomino-pelvienne Bien qu’initialement décrite à partir de la description tomodensitométriques des kystes rénaux [6], la classification de Bosniak peut être adaptée à l’IRM avec une corrélation histopathologique au moins égale [14]. Israel et al. rapportent un
En cas d’apparition de rehaussement des cloisons : arrêt de la surveillance exérèse selon les règles de la chirurgie oncologique L’exérèse du dôme saillant de kyste est strictement proscrite pour tout kyste ≥ III Chirurgie d’exérèse selon les principes oncologiques Chirurgie d’exérèse selon les principes oncologiques
25
50
> 95
bénéfice de l’IRM sur le scanner sur certaines lésions, grâce à une meilleure résolution spatiale permettant de mieux détecter le nombre et l’épaisseur des septa ainsi que leur prise de contraste [15]. Les facteurs prédictifs de néoplasie sont similaires à ceux décrits pour le scanner. La littérature récente s’est intéressée à l’apport de l’IRM de diffusion, reposant sur le mouvement des molécules d’eau au niveau cellulaire, dans la détection des kystes suspects. La cellularité des tumeurs et des tissus sains étant différente, le signal IRM apparaît modifié. L’avantage est de ne pas nécessiter d’injection de gadolinium. Si les résultats initiaux sont encourageants, cette technique seule ne peut se substituer à l’IRM traditionnelle et une imagerie morphologique reste nécessaire [14] (Fig. 3).
Échographie de contraste L’échographie de contraste associe à l’échographie traditionnelle une injection intraveineuse de microbulles de
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Figure 2. Images scannographiques de kystes rénaux selon la classification de Bosniak. A. Kystes Bosniak I ( ) et II ( ), (la présence de 2 petites calcifications classent le kyste dans la catégorie II). B. Kyste Bosniak IIF (présence de cloisons fines au sein du kyste). C. Kyste Bosniak III. D. Kyste Bosniak IV.
gaz, permettant une étude dynamique et en temps réel du rehaussement lésionnel. Plusieurs auteurs décrivent une résolution supérieure au scanner ainsi qu’une meilleure sensibilité. Park et al. rapportent une précision diagnostique de
74 % au scanner contre 90 % en échographie de contraste, qui permet une meilleure visualisation des septa et des cloisons, ainsi qu’une meilleure appréciation de leur rehaussement [16]. Après analyse de 40 lésions kystiques, Quaia et al.
Figure 3. Images IRM de kystes rénaux en séquence T2. A. Kyste Bosniak I. B. Kyste Bosniak II (présence d’une petite cloison à la partie supérieure). C. Kyste Bosniak III.
680 concluent à la supériorité de l’échographie de contraste sur le scanner dans la détection de lésions kystiques néoplasiques (82 % contre 69 % respectivement) [17]. Toutefois, de rares évènements cardiopulmonaires liés à l’injection des microbulles de gaz ont été décrits dans la littérature, dont les radiologues doivent avoir connaissance pour les patients présentant des facteurs de risques, tels qu’une hypertension artérielle pulmonaire, un antécédent d’infarctus du myocarde ou une cardiopathie instable. Enfin, cette technique présente comme tout examen échographique les limites liées à la variabilité inter-observateur ainsi qu’une visibilité parfois altérée par les côtes ou des interpositions digestives [14].
Que faire des kystes Bosniak IIF ? La classification de Bosniak a été adoptée au sein des communautés urologiques et radiologiques à travers le monde comme outil indispensable de prise en charge thérapeutique, permettant un langage commun et une bonne reproductibilité. Si les kystes de catégories I et IV posent rarement de problème diagnostique, la distinction entre certains kystes complexes II et III est parfois plus difficile. La catégorie IIF a été introduite afin d’identifier ces kystes n’ayant pas tous les critères pour être classés Bosniak III mais nécessitant tout de même un suivi rapproché. Il n’existe pas de consensus sur la fréquence et la durée du suivi, toutefois des protocoles impliquant une imagerie à 6 mois puis au moins une imagerie annuelle pendant 5 ans, par TDM ou IRM, ont généralement été proposés dans la littérature [2,3,6]. En suivant ce mode de surveillance, la littérature rapporte des taux de progression des lésions IIF dans moins de 30 % des cas (14,8 % d’après O’Malley et al. et 5 % dans la série récente de Hindman et al.) avec un délai médian de progression de 11 à 18 mois [8,18—20]. Aucune différence n’a été mise en évidence entre les tumeurs qui progressent ou non, en termes de caractéristiques tumorales ou des patients. Les principaux changements amenant à une décision chirurgicale sont des modifications architecturales ou l’apparition d’un rehaussement aux temps avec injection. L’augmentation de taille seule ne semble pas être une indication opératoire [8,19]. Après chirurgie pour progression, l’histologie retrouve un carcinome à cellules rénales (CCR) dans 89 à 100 % des cas [8,19], soit un taux de malignité globale des kystes IIF de 10,9 à 30 % [5,8,18,20]. On retrouve alors 88 % de stade pT1, et 75 % de grade I de Fuhrman [8]. Bien que la majorité des séries soient rétrospectives et d’effectifs limités, la littérature semble consensuelle sur la place des kystes Bosniak IIF, sous réserve d’une surveillance organisée et d’une information claire garantissant la collaboration des patients.
Biopsie des tumeurs kystiques du rein La place de la biopsie dans les tumeurs kystiques du rein est une question controversée. Elle a longtemps été non recommandée [2,3], les auteurs rapportant un risque élevé de faux négatifs et de dissémination de cellules tumorales en cas de néoplasie [5,8,18]. Les indications étaient jusqu’à présent restreintes aux kystes Bosniak IV avec un contingent tissulaire cible clairement visible à l’imagerie [2]. Toutefois, l’irradiation causée par un suivi scannographique prolongé,
C. Lanchon et al. le développement des traitements ablatifs et de la chirurgie mini-invasive rénale, ainsi que de récentes études aux résultats encourageants, ont ramené la biopsie des lésions kystiques au premier plan. Harisinghani et al. rapportent qu’une association de biopsie et de cytoponction de kyste pourrait prévenir 40 % de chirurgie non nécessaire pour des kystes Bosniak III [21]. Dans une série de 199 biopsies associées à une ponction à l’aiguille pour des lésions IIF et III, Lang et al. retrouvent une valeur prédictive positive de 91 % en cas de lésion maligne et 100 % pour les lésions bénignes [22]. Ils concluent à un diagnostic fiable dans 87,9 % des cas, permettant d’éviter une chirurgie invasive chez 70 % des patients porteurs de kystes bénins, avec un suivi moyen de 5,6 ans, sans progression. La biopsie guidée par l’imagerie permet par ailleurs de classer les lésions trop petites pour être correctement examinées en imagerie seule. Le matériel à analyser est insuffisant dans moins de 10 % des biopsies de kystes, soit une fiabilité des tissus analysés dans plus de 90 % des cas. En cas d’incertitude diagnostique, une prise en charge chirurgicale est recommandée, afin de ne pas méconnaître une lésion néoplasique [8,22,23].
Traitements des lésions kystiques du rein Les kystes de catégories I et II de Bosniak non symptomatiques ne justifient pas de traitement ni de surveillance particulière. En cas de symptomatologie en rapport avec le kyste (pesanteur liée au volume kystique, douleur de colique néphrétique par compression des voies urinaires, hypertension artérielle réno-vasculaire par compression parenchymateuse ou de l’artère rénale), un traitement peut être proposé même en cas de lésion bénigne. Les thérapeutiques validées sont alors la ponction aspiration sclérothérapie par voie percutanée et la résection chirurgicale du dôme saillant [3]. La sclérothérapie peut être pratiquée de fac ¸on unique ou répétée toutes les 24 heures, généralement trois jours de suite. En cas de séance unique, les taux de succès cliniques (disparition des symptômes) et radiologiques (disparition du kyste) sont de 93 % et 17,5 à 19 %, respectivement [24]. Ils augmentent en cas de séances itératives, pour atteindre 97 % de succès cliniques et 73 % de succès radiologiques [3]. Akinci et al. rapportent de plus un retour à une pression artérielle normale chez 88 % de patients hypertendus, après une simple séance [24]. Elle ne doit toutefois pas être réalisée en cas de kyste parapyélique (risque de diffusion de l’agent sclérosant dans le hile rénal). La résection chirurgicale du dôme saillant permet de meilleurs résultats, 97 % de succès cliniques et 94 % de succès radiologiques [25], mais au prix de douleurs postopératoires plus importantes et d’une durée d’hospitalisation plus longue [26]. Atug et al. décrivent des résultats inférieurs en cas de kyste parapyélique (93 % de succès cliniques, 81 % de succès radiologiques). Il n’a pas été rapporté de difficulté chirurgicale majorée après réalisation d’une ponction du kyste [25]. Les lésions de catégories III et IV de Bosniak, ainsi que les lésions IIF ayant progressé lors du suivi, doivent être considérées comme potentiellement néoplasiques et bénéficier d’une exérèse selon les règles carcinologiques (Tableau 2), en incluant des marges de sécurité [2,3]. Le choix entre
Prise en charge des lésions kystiques du rein : revue de la littérature chirurgie conservatrice et chirurgie élargie dépend de la taille du kyste, sa localisation et l’état général du patient. Pour les petites tumeurs, l’approche laparoscopique a été validée comme une voie d’abord permettant une exérèse satisfaisante, tout en diminuant les douleurs postopératoires et la durée d’hospitalisation comparativement à la voie ouverte, sans majoration du risque de rupture kystique [27]. Pinheiro et al. ne rapportent aucune récidive sur un suivi de 43,7 mois. Pus récemment, Akca et al. décrivent des résultats prometteurs de la néphrectomie partielle robotassistée pour tumeurs kystiques comparée à la voie ouverte, retrouvant un taux de succès et de complications équivalents dans les 2 groupes [28]. D’autres équipes se sont intéressées aux traitements ablatifs des kystes Bosniak III et IV. Park et al. ont évalué la radiofréquence chez 14 patients, retrouvant une efficacité satisfaisante sur un suivi médian de 8 mois, avec néanmoins une nécessité de 15 séances en moyenne par patients [29]. Carrafiello et al. ont étudié l’hyperthermie pour tumeurs kystiques de catégories III et IV de moins de 2 cm avec un recul de 24 mois, avec des résultats encourageants [30]. Il s’agit toutefois d’études préliminaires sur un très faible nombre de patients.
Conclusion L’histoire naturelle des kystes et tumeurs kystiques du rein est maintenant connue et leur prise en charge optimale bien identifiée. Elle est basée sur leur description morphologique selon la classification de Bosniak, qui peut se faire par TDM, IRM ou échographie de contraste. Les kystes Bosniak I et II sont considérés comme bénins et ne nécessite de traitement que s’ils sont symptomatiques, alors que les types III et IV nécessitent une exérèse chirurgicale avec respect des règles carcinologiques. Les types IIF peuvent bénéficier d’une surveillance par imagerie, avec un risque de progression de 15 à 30 %, dont le patient doit être informé. La biopsie des lésions kystiques, longtemps controversée, permettrait un diagnostic fiable dans près de 88 % des cas, sans majoration du risque carcinologique. En cas de malignité, l’histologie la plus fréquente est le carcinome à cellules rénales, qui est alors de faible stade et bas grade de Fuhrman. La plupart des études sur les tumeurs kystiques du rein sont toutefois rétrospectives ou de faible effectif, ce qui en fait leur principale limitation.
Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.
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