Prise en charge des syndromes coronariens aigus avec sus-décalage du segment ST en Vendée en 2008 : étude observationnelle descriptive

Prise en charge des syndromes coronariens aigus avec sus-décalage du segment ST en Vendée en 2008 : étude observationnelle descriptive

Annales de Cardiologie et d’Angéiologie 59 (2010) 209–213 Article original Prise en charge des syndromes coronariens aigus avec sus-décalage du segm...

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Annales de Cardiologie et d’Angéiologie 59 (2010) 209–213

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Prise en charge des syndromes coronariens aigus avec sus-décalage du segment ST en Vendée en 2008 : étude observationnelle descriptive Care of ST elevated myocardial infarction patients in Vendée in 2008: Observational and descriptive study E. Trebouet a,∗ , P. Fradin a , L. Orion b , J. Dimet c a

Samu, SMUR, urgences, CHD Les Oudairies, boulevard Stéphane-Moreau, 85925 La Roche-Sur-Yon cedex 09, France b Cardiologie, CHD Les Oudairies, boulevard Stéphane-Moreau, 85925 La Roche-Sur-Yon cedex 09, France c DIM, CHD Les Oudairies, boulevard Stéphane-Moreau, 85925 La Roche-Sur-Yon cedex 09, France Rec¸u le 3 avril 2010 ; accepté le 28 juin 2010 Disponible sur Internet le 23 juillet 2010

Résumé But de l’étude. – Évaluer la prise en charge des patients présentant un syndrome coronarien aigu avec sus-décalage du segment ST en Vendée. Patients et méthode. – Étude prospective observationnelle menée sur toute l’année 2008. Les patients inclus présentaient un infarctus du myocarde depuis moins de 24 heures étaient vivants à l’arrivée des secours, et étaient pris en charge par le SMUR, les urgences ou la cardiologie de l’hôpital de La Roche-sur-Yon. Résultats. – Deux cent dix-sept patients ont été inclus, 163 hommes et 54 femmes, d’âge moyen 65 ans. Cinquante-six pour cent des patients ont appelé initialement le Samu, dont la moitié dans l’heure après le début des signes. Ils ont bénéficié de l’envoi d’un SMUR pour 72 % des cas. Vingt-six pour cent ont consulté initialement un médecin libéral et un tiers d’entre eux ont été redirigés vers le Samu. Trente pour cent des patients ont suivi la filière idéale : succession douleur thoracique, appel Samu, prise en charge SMUR, angioplastie ou fibrinolyse. Le délai moyen séparant l’électrocardiogramme du traitement fibrinolytique est de 36 minutes, ou de l’arrivée en salle de coronarographie de 105 minutes. Le ballonnet est gonflé 42 minutes après. Quatre-vingt-six pour cent des patients pris en charge à la phase aiguë ont bénéficié d’une stratégie de reperfusion : angioplastie primaire (63 %) ou fibrinolyse (21 %). Quatre-vingt-dix pour cent des revascularisations ont été des succès. Conclusion. – Dans le cas des douleurs thoraciques, le Samu est sous-utilisé. Le nombre de patients revascularisés est satisfaisant, mais les délais de prise en charge sont trop longs, surtout quand le traitement est l’angioplastie. © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Syndrome coronarien aigu ; ST+ ; Vendée ; Samu ; Délais ; Angioplastie ; Fibrinolyse

Abstract Purpose of the study. – Estimating the quality of care of the patients presenting an ST-elevation myocardial infarction in Vendee. Patients and method. – Prospective observational study carried out over the year 2008. Included patients presenting a myocardial infarction for less than 24 hours, they were alive when emergency team arrived, and were taken care of by the SMUR, the emergencies or the cardiology of the hospital of La Roche-sur-Yon. Results. – Two hundred and seventeen patients were included, 163 men and 54 women, average age: 65 years. Fifty-six percent of the patients called initially the emergency medical service, half of those within an hour after pain began. Seventy-two percent of them were looked after by a SMUR. Twenty-six percent consulted initially a general practitionner, and one third of those were redirected towards the emergency medical service. Thirty percent of all patients followed the ideal procedure defined by succession of chest pain, emergency medical service call, SMUR,



Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (E. Trebouet).

0003-3928/$ – see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.ancard.2010.06.003

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angioplasty or fibrinolysis. The average time between the ECG and the fibrinolysis is 36 minutes, or of the arrival in coronarography room is 105 minutes. The balloon is inflated 42 minutes later. Eighty-six percent of the patients taken care of in the acute phase benefited from a strategy of reperfusion, primary angioplasty (63%) or fibrinolysis (21%). Ninety percent of revascularisations were successful. Conclusion. – In the case of the chest pain, the emergency medical service is under-used. The number of revascularised patients is satisfactory, but the whole procedure takes too much time, especially when the treatment is the angioplasty. © 2010 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Keywords: Acute coronary syndrome; STEMI; Vendee; Emergency medical service; Delay; Angioplasty; Fibrinolysis

1. Introduction En France, l’incidence des syndromes coronariens aigus (SCA) est proche de 100 000 personnes par an. La mortalité par infarctus du myocarde à la phase aiguë est de l’ordre de 15 % [1]. La conférence de consensus du 23 novembre 2006 préconise une prise en charge la plus précoce possible des patients suspects de présenter un syndrome coronarien aigu, car la morbimortalité à court, moyen et long termes de cette pathologie est directement corrélée à ces délais [1]. Le registre USIC 2000 avait montré que 50 % des patients ne bénéficiaient d’aucune stratégie de reperfusion, le retard diagnostique étant l’élément le plus péjoratif [2]. Le registre FAST-MI en 2005 retrouvait 60 % de patients revascularisés [3]. Actuellement, l’European Society of Cardiology (ESC) préconise la mise en œuvre d’une telle stratégie dans au moins 75 % des cas et idéalement dans les deux heures suivant le début des symptômes [4]. Notre étude est un état des lieux de la prise en charge de cette pathologie à travers l’évaluation des pratiques professionnelles. Elle vise à vérifier le bon fonctionnement du réseau de prise en charge des SCA avec sus-décalage du segment ST (SCA ST + ) en Vendée, et l’adéquation de la prise en charge aux recommandations.

• non décédé avant l’arrivée des secours ; • entre le 1er janvier et le 31 décembre 2008. Les critères de l’électrocardiogramme (ECG) sont : • sus-décalage du segment ST supérieur à : ◦ 0,1 mV dans au moins deux dérivations standards, ◦ 0,2 mV dans au moins deux dérivations précordiales contiguës ; • ou l’apparition d’un bloc de branche gauche méconnu. Les données ont été recueillies dans le service de cardiologie par une infirmière technicienne de recherche clinique, validées par un cardiologue et colligées sur une base Microsoft® Access, puis analysées de fac¸on indépendante à l’aide du logiciel SPSS® 18.0.0. Les variables quantitatives sont exprimées en moyenne ± écart-type et médiane (25e –75e percentiles) et comparées à l’aide d’un test de Mann-Whitney ; les variables qualitatives sont exprimées en pourcentage et comparées avec un test du Khi2 . Une valeur de p inférieure à 0,05 est considérée comme significative. Les patients ont été suivis jusqu’à leur sortie de l’hôpital. 3. Résultats 3.1. Épidémiologie

2. Patients et méthode Il s’agit d’une étude observationnelle, menée de fac¸on prospective en Vendée. Les investigateurs sont les médecins urgentistes et cardiologues de l’hôpital de La Roche-sur-Yon. Les acteurs sont, outre le service de cardiologie du centre hospitalier (CH), les sept services d’urgence du département et les six SMUR. L’hôpital de La Roche-sur-Yon dispose d’une unité de soins cardiologiques intensifs ainsi qu’une coronarographie avec une garde médicale 24 heures sur 24. Critères d’inclusion : • tout patient pris en charge par le SMUR, les urgences ou la cardiologie de l’hôpital de La Roche-sur-Yon ; • ou par tout autre SMUR ou service d’urgence de Vendée quand le patient a été admis finalement au CH de la Rochesur-Yon ; • présentant un infarctus du myocarde depuis moins de 24 heures, diagnostiqué à l’ECG ;

Au total, 217 patients ont été inclus dans notre étude. L’âge moyen des patients est de 65 ± 13,9 ans, la médiane de 67 ans (55–76). Le patient le plus jeune avait 31 ans et le plus âgé 97. Parmi ces patients, 163 étaient des hommes, et 54 des femmes, soit respectivement 75 et 25 %. Les hommes avaient en moyenne 63 ± 13 ans, les femmes 73 ± 13,5 ans. 3.2. Circuits de prise en charge Les premiers interlocuteurs sollicités par les patients sont comme suit. Cent vingt (55 %) des patients présentant un SCA ST+ ont appelé le Samu en première intention, tandis que 56 (26 %) ont consulté leur médecin généraliste et 41 (17 %) se sont présentés directement dans le service d’accueil des urgences (SAU). Parmi les patients ayant fait appel au Samu en première intention, 87 ont bénéficié de l’envoi d’un SMUR, et 65 d’entre eux ont eu un trajet de prise en charge idéal, défini par la combinaison suivante : douleur thoracique → appel Samu → SMUR primaire → fibrinolyse ou salle de coronarographie, soient 74,7 %

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Tableau 1 Délais PEC–ECG qualifiant–traitement.

Délai (min) PEC–ECG (moy) (méd) Délai (min) ECG–fibrinolyse (moy) (méd) min (n = 46) Dont les patients ayant un « trajet idéal » (n = 17) Délai (min) ECG–salle de coro (moy) (méd) (n = 125) Dont les patients ayant un « trajet idéal » (n = 48) n < 45 min n < 75 min

SMUR (N = 120)

SAU (n = 78)

Moyenne (n = 198)

9 ± 30 4 [2–6]

35 ± 121 6[3–15]

19 ± 80 5 [2–10]

30 ± 14 29 [21–37,5] (n = 23) 30 ± 16 29 [20–42]

42 ± 19 40 [31–48,5] (n = 23)

36 ± 18 33 [27,5–42]

94 ± 78 72 [60–99] (n = 87) 69 ± 2166 [59,25–25] 9 (10 %) 46 (53 %)

129 ± 140 99,5 [70,75–133,5] (n = 38)

105 ± 101 77 [61–109]

3 (8 %) 10 (26 %)

12 (10 %) 56 (45 %)

des patients pris en charge par un SMUR primaire, et 30 % des patients au total. Environ un tiers des patients qui ont consulté un médecin généraliste en première intention ont été redirigés par ce dernier vers la régulation du Samu (21/56, 37 %). Tous ces appels se sont conclus par un SMUR. 3.3. Délais de prise en charge 3.3.1. Début de la douleur–appel au Samu Ce délai est de deux heures et 18 minutes en moyenne. Parmi les 120 patients qui ont fait appel au Samu, 47,5 % l’ont fait au cours de la première heure après le début de la douleur, 66 % des patients ont appelé dans les deux premières heures. Cent quatre-vingt-dix-huit des 217 patients ont donné l’alerte dans les 12 premières heures. Ces 198 patients doivent bénéficier d’une revascularisation en urgence. Leurs délais de prise en charge sont déclinés dans les tableaux suivants. 3.3.2. Prise en charge (PEC)–ECG qualifiant–traitement Les patients ayant consulté un médecin libéral sont répartis entre SMUR et SAU en fonction de leur prise en charge au sortir du cabinet médical (Tableau 1). Le délai de prise en charge est significativement plus court quand le premier contact médical était un SMUR que quand c’était aux urgences (p < 0,001). Les patients pris en charge par le SMUR ont été fibrinolysés significativement plus rapidement que les patients pris en charge aux urgences (p < 0,02). Les patients qui ont bénéficié d’une angioplastie primaire ont été traités plus rapidement quand le premier contact médical était un SMUR que quand c’étaient les urgences (p < 0,01). Environ 10 % de ces patients sont arrivés en salle de coronarographie dans les 45 minutes. Moins de la moitié (45 %) des patients pris en charge y sont admis dans les 75 minutes. 3.3.3. Salle de coronarographie–ballon Dans notre étude, le temps moyen séparant l’arrivée du patient en salle de coronarographie de la dilatation coronaire (door-to-balloon time) est de 42 ± 18,3 minutes, médiane 40 minutes (33–49,5).

Tableau 2 Traitements rec¸us en fonction des délais de prise en charge. Douleur–PEC (n = 198) Angioplastie (n = 125) Fibrinolyse (n = 46) Rien (n = 27)

< 3 h (n = 138) 86 (62 %) 39 (28 %) 13 (10 %)

3–12 h (n = 60) 39 (65 %) 7 (12 %) 14 (23 %)

3.4. Traitements Parmi les 198 patients qui ont été pris en charge dans les 12 premières heures, 171 (86 %) ont bénéficié d’une stratégie de reperfusion en urgence. Cette stratégie est décrite dans le Tableau 2). Les patients pris en charge dans les trois premières heures sont plus souvent fibrinolysés que les autres. Sur les 171 patients qui ont bénéficié d’une stratégie de reperfusion, 154 ont finalement été revascularisés avec succès, soient 90 % de ces patients. 3.5. Mortalité intrahospitalière Dans notre étude, parmi les 198 patients pris en charge dans les 12 premières heures, 22 sont décédés à l’hôpital (11,1 %). Neuf patients n’avaient pas été revascularisés, dont trois d’entre eux avaient eu une angioplastie, mais aucun geste de dilatation n’avait pu être fait. Les patients non revascularisés sont associés à un plus grand risque de décès hospitalier que les autres (33 % versus 7,6 %, p < 0,001). Les patients sont décédés de choc cardiogénique (sept), rupture cardiaque (cinq), choc septique (trois), encéphalopathie postanoxique (trois), choc hémorragique (deux), arrêt cardiaque réfractaire (deux). 4. Discussion 4.1. Circuits de prise en charge Le Samu a été contacté directement par le patient dans un peu plus de la moitié des cas, et même si 44 % des patients échappent à cette recommandation, ce chiffre est en progression par rap-

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port à l’étude FACT en 2003, qui retrouvait seulement 31,6 % [5]. Il semble que certains patients ne contactent pas le Samu initiallement pour diverses raisons [6,7] : ils n’identifient pas ces symptômes comme ayant une gravité potentielle, ou bien ils pensent qu’ils se rendront plus rapidement aux urgences par leurs propres moyens. On peut supposer qu’une meilleure information du public sur la gravité de ce symptôme favoriserait un appel plus fréquent au Samu. Soixante-douze pour cent des patients ayant contacté le Samu ont bénéficié d’un SMUR primaire en première intention ; cependant, le cas échéant, il serait souhaitable de préciser la raison pour laquelle un SMUR n’a pas été déclanché : • l’absence d’équipe disponible ; • la symptomatologie téléphonique peu évocatrice ; • l’impossibilité d’obtenir des informations fiables. Seulement 21 patients sur les 56 patients pris en charge par des médecins libéraux ont fait l’objet par ce dernier d’un appel au Samu ; ce qui a toujours entrainé l’engagement d’un SMUR. Dans ces conditions, il est d’autant plus regrettable que les médecins libéraux ne contactent pas davantage le Samu quand ils ont une suspiscion de syndrome coronarien aigu. Hitchcock et al. ont montré que les patients qui consultent un médecin généraliste ont un délai avant la reperfusion coronaire qui est significativement plus long que les patients ayant fait appel au Samu [8]. 4.2. Délais de prise en charge Le délai moyen entre le début de la douleur et l’appel au Samu, qui est de 138 minutes en moyenne, est plus long que celui de 78 minutes retrouvé dans le registre ESTIM 2006 des Pays-de-Loire. Deux tiers des appels sont passés avant la fin de la deuxième heure et près de la moitié au cours de la première heure. Ce résultat est concordant avec les délais retrouvés dans d’autres études. Il est meilleur que celui de six heures qui était retrouvé dans l’étude FACT 2003 [5]. On peut donc penser qu’il y a une meilleure reconnaissance des signes qui est associée à une plus grande précocité de l’alerte. Le délai moyen séparant l’ECG qualifiant de la fibrinolyse est de 36 minutes, ce qui est raisonnable au vu des recommandations. Ce délai est plus court pour les patients pris en charge par un SMUR que pour les patients pris en charge dans un service d’urgence. Il est moins satisfaisant que celui de 27 minutes relevé dans le registre parisien e-MUST 2005 [9]. Le registre RESCUE 2008 indique un délai de 13 minutes en moyenne. Cependant, à Paris, les médecins du Samu prennent eux-même la décision de fibrinolyse, sans concertation avec le cardiologue. La mise en relation avec le médecin régulateur et le cardiologue dans le cadre d’une conférence à trois pour décider de la thérapeutique de désobstruction allonge nécessairement

ces délais. On peut envisager que le médecin du SMUR seul prenne la décision de fibrinolyse, en accord avec un algorythme préétabli. Le délai moyen séparant l’ECG qualifiant de l’angioplastie primaire est de 105 minutes. Il ne respecte pas les recommandations de 2007 qui privilégient ce traitement à condition que le délai prévisible d’acheminement soit inférieur à 45 minutes [1,10], ni celles de 2008 de l’ESC [4], qui ont allongé le délai à 75 minutes quand le patient est pris en charge après la deuxième heure. Ce délai avant angioplastie est respecté pour moins de la moitié des patients (45 % en moyenne). Ce délai est plus long que celui de 80 minutes du registre e-MUST 2005 [9], mais les distances parcourues par les SMUR parisiens sont certainement plus courtes. Il est plus long également que celui de 60 minutes annoncé par l’étude RESCUE 2008. Cependant, les patients répondant à un « trajet idéal » de prise en charge et qui ont bénéficié d’une angioplastie primaire sont arrivés 69 minutes en moyenne après l’ECG qualifiant en salle de coronarographie. Nous avons cherché à expliquer ce retard : 14 patients étaient dans les délais de la fibrinolyse mais présentaient des contreindications. Dans les autres situations, le temps nécessaire pour joindre le centre de coronarographie a été mal évalué, en raison du temps de brancardage qui peut être négligé, d’une part, et le temps séparant l’ECG du moment où est prise la décision thérapeutique en conférence à trois, d’autre part. Enfin, dans 37 cas, le patient a présenté une complication non prévisible, à type de trouble du rythme choqué, ou trouble de conduction grave, dont le traitement a retardé le transport. Mais ces facteurs n’expliquent pas à eux seuls l’importance de ce retard. L’angioplastie primaire a parfois été le traitement privilégié alors que les délais indiquaient plutôt une fibrinolyse, dans les cas où le patient a été pris en charge après la troisième heure. Les risques hémorragiques et thrombotiques de l’angioplastie de sauvetage chez les patients fibrinolysés et l’efficacité moindre au-delà de trois hours expliquent en partie ce choix thérapeutique par certains cardiologues, mais sont en désaccord avec les recommandations. Lorsque le diagnostic est fait aux urgences, tous les délais sont allongés par rapport à une prise en charge préhospitalière ; qu’il s’agisse du temps séparant l’admission de l’ECG qualifiant, ou l’ECG qualifiant du traitement. 4.3. Les traitements Quatre-vingt-huit pour cent des patients qui ont été pris en charge dans les 12 premières heures après le début de la douleur dans notre étude ont bénéficié d’une stratégie de reperfusion à la phase aiguë de leur infarctus, ce qui est satisfaisant au vu des objectifs de l’ESC [4] et comparativement à l’étude USIC 2000 qui constatait que 53 % seulement des patients en bénéficiaient [2], ou l’étude FASTMI en 2005 qui ne retrouvait que 60 % de patients reperfusés à la phase aiguë de leur infarctus [3]. En revanche, 64 % de nos patients ont eu une angioplastie primaire, ce qui est deux fois plus que les patients de l’étude FAST-MI

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en 2005 (33 %) [3], et 28 % une thrombolyse, ce qui est comparable aux 29 % des patients de l’étude FAST-MI 2005 [3].

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transparence-de-l), les auteurs ne déclarent aucun conflit d’intérêt relatif à cet article. Références

4.4. La mortalité hospitalière Nous déplorons 11,1 % de décès intrahospitalier, l’absence de revascularisation étant associée à un plus grand risque de décès (p < 0,01). Ce chiffre est un peu plus élevé que celui de 9,7 % retrouvé en 2006 à partir de la base nationale des séjours hospitaliers [11]. 5. Conclusion Les patients et les médecins libéraux utilisent de plus en plus souvent et de plus en plus rapidement le Samu quand ils présentent un syndrome coronarien aigu, mais les efforts d’information de la population doivent être renforcés, puisque moins de la moitié des patients contactent le Samu au cours de la première heure après l’apparition des symptômes. Le recours aux services d’urgences reste un facteur de retard diagnostique et thérapeutique. Le nombre de patients revascularisés est satisfaisant, mais les délais de prise en charge sont trop longs, surtout quand le traitement choisi est l’angioplastie. La thrombolyse préhospitalière est probablement sousutilisée, alors qu’elle peut être réalisée dans des délais acceptables. De plus, si la décision de fibrinolyse est faite par le médecin sur place sans concertation avec les cardiologues, ces délais peuvent être encore améliorés. Ce travail doit permettre de mettre en œuvre des actions correctrices, dont nous pourrons juger de l’efficacité puisque le recueil exhaustif de ces dossiers continue de fac¸on prospective à l’heure actuelle. Conflit d’intérêt Conformément à l’article L 4113-13 du Code de la santé publique (http://www.formindep.org/La-loi-sur-la-

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