Prise en charge du méconium à la naissance

Prise en charge du méconium à la naissance

MISE À JOUR TECHNIQUE DE LA SOGC MISE À JOUR TECHNIQUE DE LA SOGC N° 224, avril 2009 Prise en charge du méconium à la naissance INTRODUCTION La prés...

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MISE À JOUR TECHNIQUE DE LA SOGC MISE À JOUR TECHNIQUE DE LA SOGC

N° 224, avril 2009

Prise en charge du méconium à la naissance INTRODUCTION La présente mise à jour technique a été analysée par le comité de médecine fœto-maternelle et analysée et approuvée par le comité exécutif de la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada. AUTEURS PRINCIPAUX Anne Roggensack, MD, Toronto (Ont.) Ann L. Jefferies, MD, Toronto (Ont.) Dan Farine, MD, Toronto (Ont.) COMITÉ DE MÉDECINE FŒTO-MATERNELLE Dan Farine (président), MD, Toronto (Ont.) Melissa Basso, inf. aut., Vancouver (C.-B .) Marie-France Delisle, MD, Vancouver (C.-B.) Lynda Hudon, MD, Montréal (Québec) William Robert Mundle, MD, Windsor (Ont.) Lynn Carole Murphy-Kaulbeck, MD, Allison (N.-B.) Annie Ouellet, MD, Sherbrooke (Québec) Tracy Pressey, MD, Vancouver (C.-B.)

Résumé Objectif : Fournir aux cliniciens des directives fondées sur les meilleures données disponibles quant à l’aspiration au périnée pour les enfants nés en présence de liquide amniotique teinté de méconium. Résultats : Des recherches ont été menées dans la base de données Medline afin d’en tirer les articles, publiés en anglais entre 2000 et 2008, portant sur la prise en charge du méconium à la naissance. Valeurs : La recommandation a été formulée conformément aux lignes directrices élaborées par le Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs. Recommandation Il est recommandé que les établissements adoptent une politique indiquant que le fait de ne pas procéder à l’aspiration est aussi sûr que la tenue systématique d’une aspiration au périnée pour les enfants nés en présence de liquide amniotique teinté de méconium. (IA) J Obstet Gynaecol Can, vol. 31, n° 4, 2009, p. 355–357

Mots clés : Meconium aspiration syndrome (MAS), intrapartum suctioning, neonatal resuscitation

e syndrome d’aspiration méconiale (SAM) peut se manifester chez un faible pourcentage d’enfants nés en présence de liquide amniotique teinté de méconium. L’aspiration intrapartum des voies respiratoires à la suite de l’accouchement de la tête, mais avant l’accouchement des épaules, a été proposée à titre de moyen de réduire l’incidence du SAM. Cependant, les Neonatal Resuscitation Guidelines publiées en 2005 par la American Heart Association/American Academy of Pediatrics1 et avalisées par le comité directeur du Programme de réanimation néonatale canadien2 ne recommandent plus l’aspiration intrapartum systématique de l’oropharynx et du nasopharynx des nourrissons nés à la suite d’un travail compliqué par la présence de méconium.

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RÉSULTATS ACTUELS

Une analyse attentive de la littérature récente indique clairement qu’une politique de non-aspiration s’avère tout aussi sûre qu’une politique d’aspiration systématique au périnée pour les enfants nés en présence de liquide amniotique teinté de méconium. Parmi les risques de l’aspiration intrapartum, on trouve le déclenchement d’un « gasp » fœtal et l’apparition d’une stimulation vagale et d’une dépression fœtale postnatale et/ou d’une bradycardie. Le nouveau-né devrait plutôt être rapidement transféré à l’équipe néonatale, laquelle procédera à la prise en charge des voies respiratoires néonatales au besoin. La SOGC soutient cette nouvelle politique voulant que le méconium ne soit pas aspiré au périnée par l’équipe obstétricale. Les données sur lesquelles l’efficacité de l’aspiration intrapartum est fondée sont issues des résultats d’une seule étude de cohorte rétrospective3 indiquant une tendance non significative vers l’obtention de meilleures issues. Les résultats de cette étude ont par la suite été contredits par deux autres études4,5 indiquant l’obtention d’issues

Ce document fait état des percées récentes et des progrès cliniques et scientifiques à la date de sa publication et peut faire l’objet de modifications. Il ne faut pas interpréter l’information qui y figure comme l’imposition d’un mode de traitement exclusif à suivre. Un établissement hospitalier est libre de dicter des modifications à apporter à ces opinions. En l’occurrence, il faut qu’il y ait documentation à l’appui de cet établissement. Aucune partie de ce document ne peut être reproduite sans une permission écrite de la SOGC.

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MISE À JOUR TECHNIQUE DE LA SOGC

Critères d’évaluation des résultats et de classification des recommandations, fondés sur ceux du Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs Niveaux de résultats*

Catégories de recommandations†

I:

Résultats obtenus dans le cadre d’au moins un essai comparatif convenablement randomisé.

A. On dispose de données suffisantes pour appuyer la mesure clinique de prévention.

II-1 : Résultats obtenus dans le cadre d’essais comparatifs non randomisés bien conçus.

B. On dispose de données acceptables pour appuyer la mesure clinique de prévention.

II-2 : Résultats obtenus dans le cadre d’études de cohortes (prospectives ou rétrospectives) ou d’études analytiques cas-témoins bien conçues, réalisées de préférence dans plus d’un centre ou par plus d’un groupe de recherche.

C. Les données existantes sont contradictoires et ne permettent pas de formuler une recommandation pour ou contre l’usage de la mesure clinique de prévention; cependant, d’autres facteurs peuvent influer sur la prise de décision.

II-3 : Résultats découlant de comparaisons entre différents moments ou différents lieux, ou selon qu’on a ou non recours à une intervention. Des résultats de première importance obtenus dans le cadre d’études non comparatives (par exemple, les résultats du traitement à la pénicilline, dans les années 1940) pourraient en outre figurer dans cette catégorie. III : Opinions exprimées par des sommités dans le domaine, fondées sur l’expérience clinique, études descriptives ou rapports de comités d’experts.

D. On dispose de données acceptables pour déconseiller la mesure clinique de prévention. E. On dispose de données suffisantes pour déconseiller la mesure clinique de prévention. L. Les données sont insuffisantes (d’un point de vue qantitatif ou qualitatif) et ne permettent pas de formuler une recommandation; cependant, d’autres facteurs peuvent influer sur la prise de décision.

*La qualité des résultats signalés dans les présentes directives cliniques a été établie conformément aux critères d’évaluation des résultats présentés dans le Rapport du Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs7. †Les recommandations que comprennent les présentes directives cliniques ont été classées conformément à la méthode de classification décrite dans le Rapport du Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventif7.

équivalentes en l’absence d’aspiration intrapartum. L’aspiration du méconium au périnée est recommandée depuis longtemps aux É.-U. mais, en raison de l’absence de données soutenant cette pratique, n’a jamais été intégrée au cours Newborn Life Support offert par le Resuscitation Council au R.-U. Une étude comparative randomisée menée en 2004 par Vain et coll.6 portait sur 2 514 patientes dans 12 centres (Argentine : 11, É.-U. : 1). Toutes les patientes présentaient un liquide amniotique teinté de méconium à un âge gestationnel d’au moins 37 semaines, ainsi qu’une présentation céphalique. Les patientes ont été affectées, au hasard, au groupe « aspiration de l’oropharynx et du nasopharynx (y compris l’hypopharynx) avant l’accouchement des épaules » (n = 1 263) ou au groupe « aucune aspiration avant l’accouchement » (n = 1 251). La prise en charge postnatale en salle d’accouchement se conformait aux lignes directrices du Neonatal Resuscitation Program2, lesquelles recommandent la tenue d’une aspiration trachéale seulement dans le cas des nouveau-nés non vigoureux. Le critère d’évaluation principal était l’incidence du syndrome d’aspiration méconiale (SAM). Les cliniciens effectuant le diagnostic du syndrome et désignant les autres critères de l’étude n’étaient pas au fait des affectations de groupe. Un protocole de type « absence de consentement éclairé » a été utilisé. Une analyse du projet thérapeutique a été menée. Aucune différence significative n’a été constatée entre les groupes en matière d’incidence du SAM (52 [4 %] 356

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« aspiration », par comp. avec 47 [4 %] « aucune aspiration »; risque relatif [RR], 0,9; IC à 95 %, 0,6–1,3), de nécessité de mettre en œuvre une ventilation artificielle en raison du SAM (24 [2 %], par comp. avec 18 [1 %]; RR, 0,8; IC à 95 %, 0,4–1,4), de mortalité (9 [1 %], par comp. avec 4 [0,3 %]; RR, 0,4; IC à 95 %, 0,1–1,5) ou de durée de la ventilation, de l’oxygénothérapie et de l’hospitalisation. Le méconium était « épais » ou « modérément épais » chez 39 % des patientes de chacun des groupes. Aucune différence significative n’a été constatée entre les groupes en matière d’issues; cependant, l’étude ne disposait pas de la puissance statistique nécessaire à cette fin. Les nouveau-nés issus d’autres groupes courant des risques élevés (comme ceux qui présentent une fréquence cardiaque fœtale non rassurante, ceux qui naissent par césarienne ou ceux qui nécessitent une ventilation à pression positive) n’ont pas semblé tirer avantage de l’aspiration intrapartum. Les auteurs en sont donc venus à la conclusion que la tenue systématique d’une aspiration oropharyngée et nasopharyngée intrapartum, chez les enfants nés à terme en présence de liquide amniotique teinté de méconium, ne permet pas de prévenir le SAM. RÉSUMÉ

La SOGC soutient pleinement les lignes directrices de la American Heart Association, de la American Academy of Pediatrics et du comité directeur du Programme de réanimation néonatale canadien, lesquelles ne recommandent plus la

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tenue systématique d’une aspiration oropharyngée et nasopharyngée intrapartum chez les enfants nés à la suite d’un travail compliqué par la présence de méconium.

2. de Caen A, Singhal N. « A summary of the changes in pediatric and neonatal resuscitation guidelines from the International Liaison Committee on Resuscitation document », Paediatr Child Health, vol. 11, 2006, p. 11–3.

Recommandation

3. Carson BS, Losey RW, Bowes WA, Simmons MA. « Combined obstetric and pediatric approach to prevent meconium aspiration syndrome », Am J Obstet Gynecol, vol. 126, 1976, p. 712–5.

La qualité des résultats signalés dans le présent document a été évaluée au moyen des critères d’évaluation des résultats contenus dans le Rapport du Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs (Tableau). Il est recommandé que les établissements adoptent une politique indiquant que le fait de ne pas procéder à l’aspiration est aussi sûr que la tenue systématique d’une aspiration au périnée pour les enfants nés en présence de liquide amniotique teinté de méconium. (IA) RÉFÉRENCES 1. « Neonatal Resuscitation Guidelines; 2005 American Heart Association guidelines for cardiopulmonary resuscitation and emergency cardiovascular Care », Circulation, vol. 112, n° 24 (suppl.), 2005, p. IV188–95.

4. Falciglia HS. « Failure to prevent meconium aspiration syndrome », Obstet Gynecol, vol. 71, 1988, p. 349–53. 5. Falciglia HS, Henderschott C, Potter P, Helmchen R. « Does DeLee suction at the perineum prevent meconium aspiration syndrome? », Am J Obstet Gynecol, vol. 167, 1992, p. 1243–9. 6. Vain NE, Szyld EG, Prudent LM, Wiswell TE, Aguilar AM, Vivas NI. « Oropharyngeal and nasopharyngeal suctioning of meconium-stained neonates before delivery of their shoulders: multicentre, randomised controlled trial », Lancet, vol. 364, 2004, p. 597–602. 7. Woolf SH, Battista RN, Angerson GM, Logan AG, Eel W. Canadian Task Force on Preventive Health Care. « New grades for recommendations from the Canadian Task Force on Preventive Health Care », CMAJ, vol. 169, n° 3, 2003, p. 207–8.

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