Neurochirurgie 55 (2009) 63–69
Cas clinique
Prise en charge neurochirurgicale de la paraplégie tuberculeuse : à propos de six cas Neurosurgical management of paraplegia complicating Pott’s disease: A six-case study K. Doe ∗ , M. Lopes, S. Taha, B. Leriche, L. Nogues Service de neurochirurgie, CHR de La-Réunion, avenue du Président-Mitterrand, BP 350, 97448 Saint-Pierre, France Rec¸u le 25 octobre 2007 ; accepté le 21 juin 2008 Disponible sur Internet le 12 aoˆut 2008
Abstract Tuberculosis is a rare disease in economically developed countries. Paraplegia is one of its severe complications, occurring in cases of spondylodiscitis with compressive epiduritis and/or pathological fracture of vertebral bodies with subacute kyphosis. Six patients aged 15–75 years were treated in our department from May 2005 to April 2006 by the same operator (L.N.) for paraplegia complicating Pott’s disease. Patients’ neurologic function at admission and their outcomes three and 12 months after surgery were graded using the Frankel classification. MRI showed a single lesion in five cases and skip lesions in one case. Standard antituberculosis chemotherapy was started immediately within the first week of admission in five patients following a 12-month regimen. Principles of surgical treatment were ventral spinal cord decompression (with or without dorsal stage procedure), immediate grafting, correction of subacute spinal deformity and instrumentation in all cases. The diagnosis of Mycobacterium tuberculosis was confirmed by laboratory investigations in four cases and by histopathological examination in all cases. One patient who had undergone prior isolated laminectomy performed by an on call team presented neurological deterioration and progressive kyphosis. Neurological outcome improved in five patients. Four of them were able to walk unaided within the first three months after surgery. No perioperative complication occurred. In paraplegia complicating vertebral tuberculosis, overall neurological outcome appeared to be good in case of delayed emergency surgical management combined with antituberculosis chemotherapy. © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Résumé La tuberculose est une affection rare dans les pays développés. La paraplégie en est une complication grave. Elle survient en cas de spondylodiscite avec épidurite compressive et/ou fracture pathologique avec déformation en cyphose de la vertèbre infectée. Six patients de 15 à 75 ans ont été traités dans notre service de mai 2005 à avril 2006 par le même opérateur (L.N.) pour paraplégie consécutive au mal de Pott. Le statut neurologique à l’admission et le devenir des patients à trois puis 12 mois postopératoires ont été évalués par le score de Frankel. Les lésions étaient unifocales dans cinq cas et multifocales dans un cas. La polyantibiothérapie antituberculeuse selon le schéma standard a été instaurée dès la suspicion du diagnostic pour une durée de 12 mois. Le principe du traitement chirurgical reposait sur une décompression neurale par voie antérieure isolée ou par double voie avec reconstruction correctrice d’emblée et ostéosynthèse dans tous les cas. La confirmation du diagnostic a été bactériologique dans quatre cas et anatomopathologique dans tous les cas. Une aggravation neurologique par déformation en cyphose a été observée dans un cas de décompression médullaire postérieure préalable sans instrumentation réalisée par l’équipe de garde. Les suites neurologiques ont été favorables chez cinq patients avec reprise de la marche sans aide avant le troisième mois postopératoire chez quatre patients. Aucune complication périopératoire
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Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (K. Doe).
0028-3770/$ – see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.neuchi.2008.06.004
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n’a été observée. Le pronostic après prise en charge neurochirurgicale des paraplégies tuberculeuses reste favorable si une décompression en urgence différée avec stabilisation est proposée en association au traitement antibiotique étiologique, au départ probabiliste. © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Keywords: Paraplegia; Pott’s disease; Surgery Mots clés : Paraplégie ; Mal de Pott ; Chirurgie
1. Introduction La tuberculose est une affection rare dans les pays développés. La paraplégie en est une complication grave. Elle survient en cas de spondylodiscite avec épidurite compressive et/ou fracture pathologique avec déformation en cyphose de la vertèbre infectée (Cotten et al., 1996 ; Gorse et al., 1983 ; Janssens et De Haller, 1990 ; Journeau et al., 1999 ; Loembe, 1995 ; Pertuiset, 1998 ; Turgut, 2001). Le traitement médicochirurgical est largement admis (Benli et al., 2000 ; Hodgson et al., 1960 ; Jin et al., 2004 ; Khoo et al., 2003 ; Moon, 1997 ; Ozdemir et al.,
Fig. 1. A : IRM en coupe sagittale séquence T2 : ostéoépidurite T12-L1 avec compression médullaire. B : TDM en coupe sagittale : décompression médullaire antérieure (DMA). C : TDM reconstruction 3D de face : ostéosynthèse rachidienne, greffon iliaque. D : TDM en coupe sagittale : fusion osseuse à 12 mois postopératoires. A: MRI sagittal view, T2-weighted: T12-L1 osteoepiduritis with spinal cord compression. B: CT scan, sagittal view: ventral spinal cord decompression (VSCD). C: CT scan 3D imaging, front view: vertebral fixation and iliac crest strut graft. D: CT scan, sagittal view: bone fusion (12 months after surgery).
2003 ; Turgut, 2001). Une reconstruction avec instrumentation aussitôt après décompression par résection antérieure ou circonférentielle, et ce, même en cas de suspicion d’affection à germe pyogène est recommandée (Korovessis et al., 2006 ; Rath et al., 1996). Le pronostic en dépend. Nous rapportons une série de six patients présentant une paraplégie sur mal de Pott, traités par décompression neurale par voie antérieure isolée ou par double voie avec reconstruction correctrice d’emblée et ostéosynthèse dans tous les cas avec des suites favorables dans cinq cas.
Fig. 2. A : IRM en coupe sagittale séquence T2 : compression médullaire T4. B : IRM en coupe sagittale séquence T1 avec injection : majoration de la cyphose après laminectomie. C et D : TDM en coupe sagittale et TDM reconstruction de face : décompression médullaire circonférentielle, greffon iliaque et ostéosynthèse antérieure. A: MRI, sagittal view, T2-weighted: spinal cord compression at T4. B: MRI, sagittal view, enhanced T1-weighted: worsening of kyphotic deformity after laminectomy. C and D: CT scan, sagittal view and CT scan, frontal 3D imaging: spinal cord decompression, autologous grafting and anterior instrumentation.
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2. Matériel et méthode
3. Nos observations
Il s’agit d’une série de six patients, cinq femmes et un homme âgés de 15 à 75 ans, pris en charge dans notre service en un an de mai 2005 à avril 2006 pour compression médullaire sur mal de Pott de localisation thoracique ou thoracolombaire. Les patients étaient tous paraplégiques. Tous les patients ont été explorés par scanner et IRM pré- et postopératoires. Le statut neurologique des patients a été évalué à leur admission de même que leur devenir à trois mois puis 12 mois postopératoires par le score de Frankel (Frankel et al., 1969).
Il s’agit de tableaux de paraplégie subfébrile de gravité variable, Frankel A (deux cas), B (un cas), C (deux cas), évoluant depuis une dizaine de jours en moyenne avec des extrêmes de cinq et 45 jours associée à une altération de l’état général et un syndrome inflammatoire biologique. L’intradermoréaction (IDR) à la tuberculine était phlycténulaire dans tous les cas. Deux patients nous ont été adressés de Mayotte et deux autres de Madagascar dont un, en l’occurrence le patient no 5 (Tableau 1), était déjà sous traitement antituberculeux avant son admission.
Tableau 1 Présentation de la série et évolution à trois mois postopératoires (stable à 12 mois) Summary of the present series and three months outcome after surgery (unchanged nine months later) Patients
Frankel préopératoire
Localisation lésionnelle
Traitement chirurgical
Diagnostic
Frankel postopératoire
1 : AF, F 47 ans
A depuis 10 jours
T12-L1 (Fig. 1A) (vertébroépidurite, compression médullaire antérieure) + sternum et aile iliaque
Anatomopathologique à j8 postopératoire et bactériologique à j40
D
2 : JL, F 48 ans
B
5 jours
T4 (Fig. 2A) (ostéoépidurite compressive : idem)
Anapath j5 et bactério j21
B
3 : HK, F 50 ans
A
7 jours
T8, T9, T10 (Fig. 3A). idem
Anapath j3 et bactério j35
E
4 : HA, F 75 ans
C
14 jours
T2 (Fig. 4A et B) : idem
Anapath j8 et bactério j18
D
5 : OF, F 15 ans
C
45 jours
T12 et L2 (Fig. 5A–C) : idem
Anapath j7
E
6 : DH, H 61ans
B
5 jours
T4-T5 (Fig. 6A) : idem
Décompression médullaire antérieure (DMA) première en T12-L1 par thoraco-phrénolombotomie gauche (Fig. 1B) Reconstruction secondaire par costotransversectomie, greffon iliaque, ostéosynthèse par matériel Euros Azur* (EA*) [Fig. 1C et D] 1er temps : laminectomie (Fig. 2B) 2e temps de DMA en T4 par thoracotomie droite, Reconstruction par de l’os iliaque, correction et ostéosynthèse (EA*) [Fig. 2C et D] DMA (tricorporectomie) par thoracotomie droite + Reconstruction (os iliaque + côte) et ostéosynthèse (EA*) [Fig. 3B–D] DMA en T1 T2 et T3 partielle par cervico manubriotomie + Reconstruction (os iliaque) et ostéosynthèse par du matériel Senegas Euros* [Fig. 4C et D] DMA en T12 et en L2 par thoraco-phrénolombotomie gauche + reconstruction (côte et substitut osseux synthétique), ostéosynthèse (EA*) (Fig. 5D et E) DMA en T4-T5 par thoracotomie droite + Reconstruction (méthyle métacrylate), ostéosynthèse (EA*) [Fig. 6B–D]
Anapath j12
D
DMA : décompression médullaire antérieure. DMA : ventral spinal cord decompression. H : homme ; F : femme. H : male ; F : female. EA* : matériel d’ostéosynthèse Euros Azur*. EA*: Euros Azur* fixation device.
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Fig. 3. A : IRM séquence T2 : ostéoépidurite compressive ventrale avec fracture pathologique de T9. B et C : TDM coupe sagittale et coupe horizontale : décompression médullaire ventrale, greffon iliaque et costale, ostéosynthèse rachidienne. D : TDM reconstruction de face : ostéosynthèse antérolatérale. A: MRI, sagittal view, T2-weighted: compressive ventral epiduritis with T9 pathological fracture. B and C: CT scan, sagittal and horizontal views: ventral spinal cord decompression, grafting and vertebral instrumentation. D: CT scan, frontal 3D imaging: ventrolateral instrumentation.
Sur les six patients, quatre ont subi une décompression neurale en urgence différée associée à une reconstruction ostéosynthèse concomitante. Chez le premier patient de la série, Frankel A, la reconstruction ostéosynthèse (Fig. 1C) a été différée par rap-
port au débridement chirurgical initial par voie antérolatérale (Fig. 1A et B) du fait d’une suspicion d’affection à pyogène et de notre manque d’expérience. Au final, l’évolution neurologique a été favorable. Le patient no 2, Frankel B, a subi
Fig. 4. A et B : IRM coupe sagittale et coupe horizontale en pondération T1 avec injection de gadolinium : ostéoépidurite abcédée en T2-T3. C et D : TDM en coupe sagittale et coupe horizontale : DMA, greffon iliaque, plaque d’ostéosynthèse rachidienne vissée et ostéosynthèse manubriale. A and B: MRI, sagittal and horizontal views, enhanced T1-weighted: ventral epidural abscess located at T2–T3. C and D: CT scan, sagittal and horizontal views: VSCD, iliac crest graft, vertebral plating and manubrium fixation device.
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une laminectomie première en urgence à visée diagnostique et décompressive (Fig. 2A) réalisée par l’équipe de garde avec instauration d’une antibiothérapie probabiliste à large spectre. Une aggravation neurologique rapide s’en est suivie avec installation d’une paraplégie complète Frankel A et majoration de la cyphose locorégionale (Fig. 2B). Une résection du foyer d’abcédation avec stabilisation par voie antérolatérale, siège électif de la lésion, a été ensuite réalisée (Fig. 2C et D) avec récupération neurologique partielle. Le patient no 5 a un antécédent ancien de contage tuberculeux (Fig. 3–5). Le patient no 6 avait des antécédents d’adénocarcinome de l’estomac opéré en 2003. Il nous a été adressé par l’équipe d’oncologie pour traitement chirurgical palliatif d’une compression médullaire thoracique dans un contexte de suspicion de dissémination multimétastatique avec hyperfixations costales multiples à la scintigraphie au technétium. C’est pour cette raison que nous lui avons proposé une reconstruction par greffon acrylique (Fig. 6B–D). Le diagnostic a été redressé par l’examen anatomopathologique et la scintigraphie de contrôle, réalisée sous traitement adapté à six mois, a montré la disparition complète des foyers d’hyperfixation corroborant le diagnostic de miliaire tuberculeuse extrapulmonaire.
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Dans tous les cas, la certitude diagnostique a été apportée par l’examen anatomopathologique des pièces de résection chirurgicale, avec des délais de trois à 12 jours, objectivant une inflammation tuberculoïde granulomateuse épithéliogigantocellulaire avec ou sans nécrose caséeuse. La confirmation bactériologique par culture sur milieu de Löwenstein-Jensen a été obtenue avec des délais de trois à six semaines postopératoires avec mise en évidence de Mycobacterium tuberculosis et, dans le cas du patient no 1, l’identification concomitante de M. africanus et M. canetti. Par ailleurs, de l’ADN du groupe tuberculosis a été identifié au PCR. Chez tous les patients, la sérologie HIV a été négative. Il n’a pas été retrouvé de bacille acido-alcoolorésistant (BAAR) à l’examen des expectorations. La radiographie du thorax, l’analyse d’urines et le tubage gastrique n’ont pas été contributifs. Une polyantibiothérapie antituberculeuse systématique selon le schéma standard a été instaurée dès la suspicion du diagnostic et maintenue pendant 12 mois (In Popy, 2007). Dans notre série, la durée moyenne du séjour postopératoire a été de 21 ± 6 jours. Les suites ont été favorables chez cinq patients sur six avec amélioration, à deux mois postopératoires, d’au moins un grade sur le score de Frankel préthérapeutique ; résultat stable à 12 mois. Quatre patients sur les six ont repris la marche sans aide avant le troisième mois postopératoire. Aucune complication, ni aggravation n’ont été observées. Le Tableau 1 présente un résumé de la série et l’évolution clinique à trois mois postopératoires. 4. Discussion
Fig. 5. A : IRM coupe sagittale en séquence T2 : compression médullaire T12 et L2. B et C : TDM et radiographie standard : lyse vertébrale et déformation cyphotique. D et E : TDM en coupe coronale et radiographie standard : correction de la cyphose, greffon composite et ostéosynthèse. A: MRI, sagittal view, T2-weighted: spinal cord compression at T12 and L2. B and C: CT scan and X-ray: vertebral bone defect and kyphosis. D and E: CT scan, coronal view and X-ray: kyphosis correction, grafting and instrumentation.
Le mal de Pott ou spondylodiscite tuberculeuse est la localisation la plus fréquente des tuberculoses ostéoarticulaires (Gorse et al., 1983 ; Jin et al., 2004 ; Journeau et al., 1999 ; Moon, 1997 ; Pertuiset, 1998). Il est dû, en règle générale, au M. tuberculosis (Jin et al., 2004 ; Khoo et al., 2003 ; Rezai et al., 1995 ; Turgut, 2001). Actuellement, dans les pays développés, le mal de Pott atteint essentiellement les sujets immigrants en provenance des zones d’endémie, les sujets issus de milieux défavorisés ainsi que les sujets âgés et/ou immunodéprimés (Cotten et al., 1996 ; Gorse et al., 1983 ; Journeau et al., 1999 ; Khoo et al., 2003 ; Moon, 1997 ; Rezai et al., 1995). La présentation clinique est assez homogène ; on observe des atteintes neurologiques sévères dans 20 à 30 % des cas (Gorse et al., 1983 ; Janssens et De Haller, 1990 ; Pertuiset, 1998). Dans les localisations thoraciques ou thoracolombaires, il s’agit le plus souvent d’une paraplégie fébrile ou subfébrile d’installation progressive, sur un mode subaigu ou chronique avec un passé récent de rachialgies, associée dans 50 % des cas à un amaigrissement, asthénie, fébricule et des sueurs nocturnes (Nussbaum et al., 1995 ; Pertuiset, 1998 ; Yao et Sartoris, 1995). La compression médullaire est le plus souvent liée à l’épidurite tuberculeuse granulomateuse et/ou abcédée (Gorse et al., 1983 ; Janssens et De Haller, 1990, 1990 ; Loembe, 1995 ; Nussbaum et al., 1995 ; Turgut, 2001 ; Yao et Sartoris, 1995), associée ou non à une compression mécanique par déformation en cyphose et à l’instabilité vertébrale (Gorse et al., 1983 ; Nussbaum et al., 1995 ; Turgut, 2001 ; Yao et Sartoris,
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Fig. 6. A : IRM coupe sagittale séquence T1 injectée : fracture pathologique T4-T5. C : Radiographie du thorax standard de face : ostéosynthèse antérolatérale. B et D : DMA, greffon acrylique et ostéosynthèse. A: above, left side. MRI, sagittal view, T1-weighted: pathological fracture at T4–T5. C: below and left side. Standard chest X-ray: ventrolateral instrumentation. B and D: VSCD, methyl methacrylate grafting and instrumentation.
1995). La tuberculose vertébrale peut s’accompagner d’autres localisations ostéoarticulaires ou extrarhumatologiques (Cotten et al., 1996 ; Fam et Rubenstein, 1993 ; Journeau et al., 1999 ; Pertuiset, 1998 ; Turgut, 2001). Un syndrome inflammatoire biologique est présent mais non spécifique (Gorse et al., 1983 ; Khoo et al., 2003). L’IDR à la tuberculine est le plus souvent positive, parfois phlycténulaire (Cotten et al., 1996 ; Fam et Rubenstein, 1993). La présentation radiologique est assez homogène mais également non spécifique (Cotten et al., 1996 ; Khoo et al., 2003 ; Tali, 2004) avec présence d’une spondylodiscite associée à une abcédation vertébroépidurale à prédominance antérieure ou exclusivement antérieure avec tendance à la fracture pathologique et une déformation en cyphose angulaire (Cotten et al., 1996 ; Tali, 2004). Les atteintes à germes banals, les atteintes brucelliennes, les lésions parasitaires, mycosiques et les lésions tumorales constituent les principaux diagnostics différentiels (Khoo et al., 2003 ; Tali, 2004). La confirmation diagnostique est soit anatomopathologique avec la mise en évidence sur le prélèvement tissulaire d’un granulome tuberculoïde polymorphe épithélioïde et gigantocellulaire avec ou sans nécrose caséeuse (Pertuiset, 1998), soit par l’identification de l’ADN mycobactérien par PCR (Khoo et al., 2003 ; Moon, 1997). La preuve bactériologique est plus rarement obtenue du fait du caractère
paucibacillaire des tuberculoses ostéoarticulaires (Gorse et al., 1983 ; Journeau et al., 1999 ; Moon, 1997), et ce, au terme d’un délai moyen de cinq semaines nécessaire à la culture du bacille de Koch (BK) (Yao et Sartoris, 1995). Dans notre série, ces délais ont été de trois à six semaines alors que le résultat anatomopathologique a été obtenu en trois à 12 jours postopératoires. Au total, il y a lieu d’évoquer le diagnostic sur des corrélations clinicoradiologiques, l’IDR à la tuberculine, l’anamnèse et de démarrer le traitement antituberculeux au plus tôt. L’intervention chirurgicale sera planifiée en fonction du siège de la compression principale (voie antérieure et/ou postérieure). Dans notre série, le traitement antituberculeux a été instauré une à trois semaines avant la décompression médullaire par voie antérieure (Jin et al., 2004) sauf dans le cas no 6 qui était hautement suspect de localisation secondaire d’un adénocarcinome colique connu et traité par l’équipe d’oncologie qui nous avait adressé ce patient. La durée du traitement antibacillaire a été de 12 mois au total dans chaque cas, mais elle peut tout aussi être écourtée (In Popy, 2007). En présence d’une paraplégie en rapport avec une compression médullaire d’allure pottique, l’intervention se doit d’être au moins diagnostique et décompressive avec libération du site de compression par mise à plat de l’abcès, débridement
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ostéoépidural, mais cela impose alors une contention externe postopératoire ou une mise en décharge stricte. La laminectomie isolée doit être proscrite (Journeau et al., 1999 ; Moon, 1997) en raison du risque de décompression inefficace et de déstabilisation en cyphose avec risque d’aggravation neurologique (cas du patient no 2), dans la mesure où, d’une part, il s’agit d’une atteinte essentiellement ventrale ou ventrolatérale (Journeau et al., 1999 ; Turgut, 2001) et que, d’autre part, même en cas de suspicion de pyogène, l’instrumentation d’emblée sous couverture d’antibiotique(s) est largement admise (Christodoulou et al., 2006 ; Khoo et al., 2003 ; Korovessis et al., 2006 ; Mann et al., 2004 ; Rath et al., 1996). Notre attitude a consisté à proposer une intervention à visée diagnostique, décompressive, stabilisatrice et correctrice de la déformation (Benli et al., 2000 ; Christodoulou et al., 2006 ; Jin et al., 2004 ; Journeau et al., 1999 ; Moon, 1997 ; Ozdemir et al., 2003 ; Turgut, 2001). Le diagnostic confirmé a posteriori par l’examen anatomopathologique est la certitude bactériologique par culture sur milieu de Löwenstein-Jensen. Cette dernière reste inconstante et encore plus tardive (Khoo et al., 2003). La paraplégie pottique est fréquente dans les milieux défavorisés. C’est une complication grave qui pose un problème thérapeutique complexe comportant trois aspects indissociables : le traitement étiologique de la maladie infectieuse bacillaire, le traitement de la compression médullaire par le site de la compression et le traitement de l’instabilité vertébrale avec la déformation qui en résulte. Le débridement optimal du foyer d’abcédation avec greffe autologue diminue la durée de la maladie et accroît la consolidation osseuse. Chez nos patients, l’évolution neurologique a été favorable malgré une présentation clinique et radiologique sévère, ce, après une prise en charge médicale et chirurgicale rapide ; ce profil évolutif consécutif à une telle prise en charge est conforme aux données de la littérature (Benli et al., 2000 ; Christodoulou et al., 2006 ; Janssens et De Haller, 1990 ; Jin et al., 2004 ; Journeau et al., 1999 ; Khoo et al., 2003 ; Ozdemir et al., 2003 ; Rath et al., 1996 ; Rezai et al., 1995 ; Turgut, 2001). 5. Conclusion Le pronostic après prise en charge médico-neurochirurgicale des paraplégies tuberculeuses reste favorable si une décompression rapide (antérieure ou circonférentielle) du foyer avec stabilisation est proposée en association au traitement antibiotique, au départ probabiliste. La difficulté essentielle est d’ordre technique requerrant une maîtrise de la chirurgie vertébrale par voie antérieure (décompression épidurale médiastinale et/ou rétropéritonéale efficiente). L’établissement du diagnostic définitif ne doit pas retarder la mise en place du traitement antibacillaire et chirurgical. Références Benli, I.T., Kis, M., Akalin, S., Citak, M., Kanevetci, S., Duman, E., 2000. The results of anterior radical debridement and anterior instrumentation in Pott’s
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