Archives de pédiatrie 13 (2006) 1107–1111 http://france.elsevier.com/direct/ARCPED/
Mémoire original
Profil épidémiologique et complications des voies veineuses centrales en oncologie pédiatrique : à propos de 125 cas Epidemiological features and complications of central venous catheters in pediatric oncology: prospective study about 125 cases H. Boussen a,*, M.H. Mtaallah b, T. Bouzid b, H. Rifi a, J. Ben Hassouna b, M. Kammoun c, B. Meddeb c, K. Rahal a b
a Service de carcinologie médicale, institut Salah-Azaïz, 1006, boulevard du 9-Avril, Tunis, Tunisie Service de chirurgie carcinologique, institut Salah-Azaïz, 1006, boulevard du 9-Avril, Tunis, Tunisie c Service d’hématologie, hôpital Aziza–Othana, 1007, Jabbari, Tunis, Tunisie
Reçu le 26 août 2005 ; accepté le 4 avril 2006 Disponible sur internet le 22 mai 2006
Résumé Objectif. – Rapporter le profil des indications de pose et les complications précoces et tardives rencontrées lors du maniement des cathéters veineux centraux (CVC) dans une unité d’oncologie pédiatrique en Tunisie. Patients et méthodes. – Notre travail prospectif, mené à l’Institut Salah-Azaïz de 1989 à 2005, a concerné 58 filles et 57 garçons dont l’âge moyen était de 7,9 ans (4 mois à 18 ans) ayant principalement des lymphomes (22 %) et des sarcomes (23,2 %) ou des leucémies (8,5 %) dont le protocole thérapeutique nécessitait la mise en place d’un CVC. Résultats. – En dehors de 2 cas d’échec de pose (1,6 %), nous avons mis en place 123 voies veineuses centrales (double chez 10 enfants), extériorisées (CE) dans 43 cas (35 %) ou reliées à 80 (65 %) sites implantables (SI). Nous avons abordé préférentiellement la veine sous-clavière (59,2 %) vs 32 % (40 fois) pour la jugulaire interne et 8,8 % des cas pour la fémorale. Les complications précoces ont été 15 cas de ponctions multiples avec changement de voie (6,4 %), 4 cas de pneumothorax (3,2 %) et 6 cas de ponction artérielle (4,8 %) à l’origine d’un hématome sous-cutané cervical chez 1 enfant (0,8 %). Les complications tardives ont été dominées par l’infection dans 7 cas (5,7 %). Nous avons également noté 2 cas de migration intracardiaque suite à la déconnexion de la chambre (1,6 %), et 2 thromboses veineuses centrales sur SI (1,6 %). La durée de vie moyenne de la voie veineuse centrale était plus longue pour les SI (305,2 jours) que pour les CE (64,4 jours). Conclusion. – Les SI ont constitué ces dernières années un progrès chez les enfants cancéreux. Ils offrent plus de confort à l’enfant et à l’équipe soignante. © 2006 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract Objective. – To report the indications and early and late catheter-related complications in a Tunisian unit of paediatric oncology. Patients and methods. – This prospective study has been performed in a paediatric oncology unit of the Salah Azaïz Institute between 1989 and 2005. It concerns 58 girls and 57 boys with a median age of 7.9 years(4 months to 18 years) treated for cancer disease predominantly lymphoma (22%), sarcoma (23.2%) or leukaemia (8.5%) proposed for insertion of a central venous catheter (CVC). Results. – Excluding 2 insertion failures (1.6%), we placed 123 CVC (double for 10 patients), 43 (35%) exteriorised (EC) and 80 (65%) connected to an implantable site (IS). Catheters were placed in the subclavian vein in 59.2% of cases vs 32% for internal jugular vein and 8.8% for femoral vein. Early complications included 15 cases of multiple punctures (12%), 4 cases of pneumothorax (3.2%) and 6 of arterial punctures (4.8%) originating a cervical subcutaneous haematoma in 1 patient (0.8%). Late complications were represented by infection in 7 cases (5.7%).
* Auteur
correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (H. Boussen).
0929-693X/$ - see front matter © 2006 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.arcped.2006.04.007
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We observed 2 cases of intracardiac catheter migration due to catheter disconnection from the IS (1.6%) and 2 cases of thrombosis (1.8%). The mean life of CVC was longer for IS (305.2 days) than for EC (64.4 days). Conclusion. – Implantable sites are effective progress for venous access in children with cancer. They improved the quality of care in pediatric oncology. © 2006 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Sites implantables ; Cathéters centraux ; Oncologie Keywords: Catheterization, central venous; Catheters, indwelling, adverse effects; Equipment failure; Child
La chimiothérapie antitumorale représente en oncologie pédiatrique 1 des piliers du traitement antitumoral avec des protocoles de plus en plus complexes, agressifs et prolongés [1,2]. Les cytotoxiques constituent pour les veines périphériques un facteur d’agression et de fibrose secondaire, imposant la nécessité d’une voie veineuse stable chez ces patients au petit calibre veineux périphérique. Les voies veineuses centrales (VVC) permettent une administration confortable de la chimiothérapie de long cours et des traitements adjuvants tels que transfusions, antibiothérapie ou alimentation parentérale [2,3]. Les VVC disponibles actuellement peuvent être, soit tunnélisées et extériorisées, soit reliées à un site d’injection sous-cutané [3]. Notre travail prospectif, réalisé à l’Institut Salah-Azaïz de Tunis, s’est intéressé au profil épidémiologique et aux complications mécaniques et infectieuses rencontrées lors de la pose et du maniement des VVC. 1. Patients et méthodes De juin 1989 à mai 2005 notre étude prospective a concerné 125 VVC posées chez des enfants cancéreux âgés de 4 mois à 18 ans. Il s’agissait de 57 garçons (47,2 %) et 58 filles (52,8 %) dont l’âge moyen était de 7,9 ans. Les principales affections en cause étaient les lymphomes (22 %), les sarcomes (25,2 %) et les leucémies (8,5 %). La mise en place des VVC a été effectuée au bloc opératoire sous anesthésie générale pour les enfants de moins de 12 ans ou non coopérants dans 72 % des cas, et sous anesthésie locale (28 %) à la lidocaïne chez les enfants plus âgés. La ponction percutanée selon la technique de Seldinger a été utilisée pour aborder la veine et la mise en place du cathéter. Cinq des patients les plus récents de la série avaient eu un repérage échographique cervical bilatéral avant la pose. Trois veines ont été ponctionnées : sous-clavière, jugulaire interne et fémorale. Le cathéter était ensuite tunnélisé pour être, soit extériorisé (CE) et fixé à la peau à quelques centimètres du point de ponction, soit relié à une chambre sous-cutanée (SI) fixée au plan aponévrotique du muscle pectoral ou fémoral. En cas de cathéter fémoral, une longue tunnélisation d’environ 10 cm était réalisée vers la face supéroexterne de la cuisse, afin d’éloigner l’extrémité du CE et de la SI de la région périnéale. Les modèles pédiatriques (Districlass, La Pérouse) comportant des cathéters, des aiguilles de ponction et des dilatateurs de plus petit calibre ont été choisis chez les enfants âgés de moins de 5 ans. Chez les nourrissons, le plus petit modèle (La Pérouse) disponible en Tunisie a été utilisé. Aucune antibiothérapie préventive n’a été
prescrite lors de la pose des VVC et les prélèvements sanguins n’ont été faits que sur les CE. Il n’y a pas eu d’héparinisation régulière des VVC si celles-ci étaient perméables lors de la dernière utilisation. Une radiographie du thorax a toujours été pratiquée pour vérifier la position du cathéter et éliminer une complication secondaire à la pose. Les CE ont été utilisés immédiatement après la pose et les SI 24 heures après. Nous avons colligé les informations suivantes : voies de pose, taux d’incidents précoces (dans les 24 heures) et tardifs (infection, thrombose, migration du cathéter), durée de vie moyenne de la VVC, état des patients et du matériel à la date de juillet 2005. Les cathéters ont été utilisés exclusivement pour l’administration de la chimiothérapie antitumorale, en évitant les prélèvements sanguins et les transfusions. La manipulation des CVC était faite en respectant des règles strictes d’asepsie (désinfection préalable de la peau, stérilité et étanchéité des pansements). Devant tout tableau infectieux, des prélèvements bactériologiques étaient faits de façon systématique à partir de tous les foyers suspects ainsi que des hémocultures à partir d’une veine périphérique et de la VVC. Nous avons classé les infections liées au cathéter selon leur point de départ périluminal (tunnélite), endoluminal lors de la manipulation du cathéter ou hématogène à partir d’un foyer infectieux à distance. L’ablation du matériel était indiquée, soit en fin de protocole de traitement, devant des signes inflammatoires locaux, d’un tableau infectieux grave ou lorsque le cathéter devenait non fonctionnel. 2. Résultats En dehors de 2 cas d’échec de pose (1,6 %), nous avons mis en place 80 (65 %) SI et 43 (35 %) CE. La veine la plus fréquemment utilisée a été la sous-clavière (59,2 %) essentiellement par voie sus-claviculaire gauche (71,6 %). La jugulaire interne a été abordée essentiellement à gauche (72,5 %), ponctionnée au niveau du triangle de Sedillot chez 57,5 % des patients et par voie latérale basse de Jernigan dans 42,5 % des cas. La veine fémorale a été abordée chez 11 enfants (8,8 %). Elle a été utilisée de première intention dans 5 cas, et secondairement après échec de pose au niveau cervical chez 3 enfants de moins de 2 ans ou devant la localisation cervicomédiastinale de la tumeur dans 3 cas (Tableau 1). La durée de pose a varié de 25 à 40 minutes pour les CE et de 40 à 80 minutes pour les SI. Les incidents immédiats lors de la mise en place du cathéter ont été (Tableau 1) des difficultés de repérage et de cathétéri-
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Tableau 1 Différentes voies d’abord et complications
Echec de pose Ponctions multiples Ponction artérielle Changement de voie Pneumothorax Infection Migration Thrombose
Sous-clavière 74 (59,2 %) Voie sous-claviculaire Voie sus-claviculaire 58 (46,4 %) 16 (12,8 %) 2 (1,6 %) 2 (3,4 %) 5 (31,2 %) 2 (12,5 %) 5 (31,2 %) 1 2 (12,5 %) 1 (1,7 %) 2 (12,5 %) 2 (3,4 %) 1 (6,2 %)
sation, des ponctions multiples de la veine dans 15 cas (12 %) avec changement de voie dans 8 cas (6,4 %). Les autres complications précoces ont été des ponctions artérielles avec hématome sous-cutané (6 cas = 4,8 %) et des pneumothorax (4 cas = 3,2 %). Les complications tardives ont été dominées par 7 cas d’infections (5,7 %). Il s’agissait de 5 cas de tunnélite avec extériorisation de pus au niveau de l’orifice d’entrée (pour 3 CE, dont 1 fémoral et 2 SI), 1 cas d’infection après ulcération cutanée en regard du SI secondaire à une extravasation d’actinomycine D et 1 cas d’ablation de CE fémoral après surinfection des points de fixation. Ces infections ont intéressé 4 CE (9,3 %), soit un taux de 1,4 infections/1000 CE par jour et 3 SI (3,7 %) soit 0,12 infections/1000 SI par jour. L’étude bactériologique a permis d’isoler un staphylocoque doré chez 2 patients seulement au niveau des hémocultures et du cathéter. Pour les autres malades, aucun germe n’a été isolé. Deux thromboses profondes (1,6 %) sur SI reliés dans 1 cas à un cathéter fémoral qui a dû être retiré chez un enfant âgé de 11 ans atteint de LAL et dans 1 cas à la jugulaire chez une enfant âgée de 3 ans ayant une histiocytose langerhansienne et chez laquelle le matériel a pu être conservé après héparinothérapie avec évolution favorable ont été observés (Tableau 1). Le tableau clinique des thromboses a été dominé par l’œdème local et la douleur locorégionale, cervicale ou de la cuisse. Nous avons noté 2 cas de migrations intracardiaques secondaires à la déconnexion de la chambre (1,6 %) sur 2 cathéters sous-claviculaires. Le matériel a été récupéré par radiologie interventionnelle. À la date de juillet 2005, 27 cathéters étaient encore en place lors de la dernière consultation (21,9 %) chez des patients vivants et 50 cathéters étaient encore en place au moment du décès des enfants (40,7 %). Pour les autres malades le cathéter a été enlevé soit à la fin du traitement (37 cathéters = 30,1 %), soit à la suite d’une complication (9 cas = 7,3 %). La durée de vie moyenne de la VVC a été de 64,4 jours pour les CE (2 à 270 jours) et de 305,2 jours pour les SI (10 à 1365 jours) pour un nombre total de 27 188 VVC/j. 3. Discussion Le recours aux VVC dans notre service remonte à une quinzaine d’année avec une tendance initiale aux CE qui s’est progressivement inversée au profit des SI [3]. L’utilisation des VVC en oncologie pédiatrique en Afrique et au Maghreb reste
Jugulaire 40 (32 %) Voie de Jernigan Voie de Sedillot 17 (13,6 %) 23 (18,4 %) 3 (17,6 %) 1 (5,9 %) 1 (5,9 %) 1 (5,9 %)
5 3 2 1 1
(21,7 %) (13 %) (8,7 %) (4,3 %) (4,3 %)
Fémorale 11 (8,8 %)
2 (18,2 %) 1 (9,1 %)
limitée à quelques équipes [4,5]. Dans notre série, les indications concernaient les protocoles lourds et prolongés des leucémies aiguës et lymphomes. Sur une population de 530 cas de cancers pédiatriques colligés de 1995 à 1998 où dominaient les leucémies (26,5 %), les cancers du système nerveux central (19,1 %) et les lymphomes (17,7 %), et pris en charge à l’Institut Salah-Azaïz, seuls 20 malades (3,7 %), traités essentiellement pour lymphomes (30 %) ou sarcomes (20 %), avaient bénéficié d’une VVC. Il y a eu cependant une augmentation progressive de pose des VVC lors des dernières années. Au début de notre expérience, la pose des cathéters était dans la plupart des cas, envisagée secondairement devant la détérioration du capital veineux périphérique, puis elle a été proposée d’emblée avant tout traitement en tenant compte de la durée et du type de traitement anticancéreux et de sa veinotoxicité périphérique. Les veines les plus abordées pour la mise en place des cathéters, sont celles de la région cervicale. La voie sous-claviculaire reste préconisée par certains auteurs [2]. Nous avons pour notre part privilégié initialement l’abord de la veine sous-clavière par voie sus-claviculaire qui offre un taux de succès de l’ordre de 100 % et facilite la fixation du cathéter sur la paroi thoracique et sa tunnélisation jusqu’au site sous-cutané. Le cathétérisme de cette veine expose cependant au risque de ponction artérielle et de pneumothorax [2]. Nous avons lors des 3 dernières années abordé de plus en plus la jugulaire interne, pour éviter les complications de la sous-clavière. La pose guidée par l’échographie utilisée récemment pour 5 de nos patients récents, est actuellement proposée pour une mise en place orientée, plus aisée et rapide des VVC [6]. Cette approche préventive est très utile pour le repérage de la veine jugulaire interne surtout chez les enfants de moins de 1 an, ayant un cou court et un tissu adipeux abondant pouvant camoufler les points de repères anatomiques [6]. La veine fémorale, autre voie possible, a été utilisée chez 11 de nos enfants, de 1re intention dans 5 cas, après échec de pose au niveau cervical chez 3 enfants de moins de 2 ans et devant la localisation cervicomédiastinale de la tumeur chez les 3 autres enfants. Cette voie présente un risque de complications infectieuses en raison de sa proximité avec la région périnéale. En effet, nous avons observé 2 épisodes infectieux (18,2 %) chez 11 malades porteurs d’une VVC fémorale vs 5 chez les 112 malades porteurs d’une VVC cervicale (4,5 %). Le cathéter s’est compliqué d’une thrombose veineuse chez 1/11 (9,1 %) malades pour la veine
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fémorale et 1/112 malades pour l’abord cervical (0,85 %). Chez l’adulte, Merrer et al. [7] évaluent le risque pour l’abord fémoral de complications infectieuses majeures et thromboemboliques comparativement à la veine sous-clavière à 4,4 vs 1,5 % et 21,5 vs 1,9 %. L’incidence des infections est estimée à 4,5 vs 1,2 infections/1000 cathéters par jour selon les mêmes auteurs [7]. Dans notre pratique, l’abord fémoral a été suivi d’une longue tunnélisation d’environ 10 cm vers la face supéroexterne de la cuisse pour éloigner le plus possible l’extrémité du CE et la SI de la région périnéale pour diminuer le risque des complications infectieuses. Les VVC seraient à l’heure actuelle à l’origine de 18 à 25 % des infections nosocomiales [8]. Ce risque est de l’ordre de 11 à 45 % pour les CE et 0 à 22 % pour les SI, l’incidence des infections variant pour les CE de 0,3 à 36/1000 cathéters par jour [9]. Nous avons observé dans notre série 4 épisodes infectieux sur CE (9,3 %) correspondant à 1,4 infections/1000 cathéters par jour et 3 infections sur SI (3,7 %) soit 0,12 infections/ 1000 sites par jour. Les facteurs favorisant l’infection semblent être le jeune âge (< 2 ans), une neutropénie, l’utilisation de CE, les manipulations fréquentes et un cathétérisme veineux prolongé [10–12]. Les germes en cause sont les cocci Gram+ ou plus rarement les bacilles Gram négatif [1]. Plusieurs protocoles ont été proposés pour prévenir l’infection sur cathéter, telle l’utilisation de l’héparine associée à la vancomycine ou à la ciprofloxacine, qui permettent de réduire le risque d’infection liée au cathéter chez les enfants immunodéprimés [13]. Les cathéters imprégnés de minocycline et de rifampicine ont été également utilisés pour réduire le risque d’infection [14]. L’administration bimensuelle d’urokinase semble réduire significativement le taux de thrombose sur cathéter et d’infections comparativement à l’héparine pour les VVC extériorisées seulement [15,16]. Plusieurs techniques ont été aussi utilisées pour traiter l’infection liée au cathéter afin de conserver la VVC. La combinaison vancomycine–urokinase a permis de stériliser des cathéters colonisés par des cocci Gram+ chez 10 enfants présentant une bactériémie persistante malgré un traitement antibiotique adapté [17]. L’acide chlorhydrique bimolaire a été utilisé en instillation intraluminale. La technique comporte l’injection initiale de 2 ml de sérum physiologique suivie d’une aspiration jusqu’à un reflux sanguin dont le volume définit l’espace « mort » de la VVC. Le même volume d’acide chlorhydrique bimolaire plus 0,5 ml est injecté dans la VVC et laissé en place pendant 10 minutes avant aspiration. Cette technique a permis, associée à une antibiothérapie systémique, d’éradiquer 67 % d’infections liées au cathéter, résistant à l’antibiothérapie seule [18]. Contrairement aux CE, l’infection du SI nécessite le plus souvent l’ablation du cathéter. Pour notre part, l’ablation du matériel a été indiquée en cas d’extériorisation du site à la peau, de sécrétions purulentes avec désunion des sutures ou de tunnélite douloureuse lors de la manipulation du SI. La VVC est un facteur de risque important de thrombose veineuse profonde. Kuhle et al. [19], dans une étude à large échelle menée aux États-Unis, ont observé que les 2/3 des 1776 thromboses vasculaires colligées étaient survenues chez des enfants porteurs d’une VVC. Glaser et al. [20] évaluent le risque à 50 % chez des enfants cancéreux porteurs d’un SI
explorés systématiquement par échographie-doppler veineuse. Nous n’avons pas fait d’exploration veineuse systématique pour notre part, ce qui explique le taux faible (1,6 %) observé dans notre étude. Selon une analyse multivariée menée à partir d’une étude faite dans une unité pédiatrique de soins intensifs, les facteurs prédictifs du risque de thrombose veineuse profonde liée à une VVC ont été la présence d’un cancer et un âge inférieur à 1 an [21]. Cette même étude a révélé une fréquence élevée de thromboses fémorales, avec une différence non significative par rapport à celles du système cave supérieur [21]. Le risque de thrombose était maximal au 4e jour après insertion du cathéter. Pour Nowak-Gottl et al. et Knofler et al. [22,23], le facteur V de Leiden, la protéine C et la lipoprotéine (a) joueraient un rôle important dans la thrombose veineuse sur cathéter chez les enfants. La thrombose peut s’étendre jusqu’au cœur avec une fréquence de 8 % selon Korones et al. [24] chez 156 enfants porteurs d’une VVC, traités pour cancer. Ce taux élevé de thrombose intracardiaque nécessite une surveillance régulière par échographie cardiaque. L’utilisation hebdomadaire ou en perfusion continue de faibles doses d’urokinase, a permis de réduire ou de traiter les thromboses veineuses profondes liées aux cathéters [15]. La thrombose du cathéter est un problème fréquent qui peut se compliquer d’infection et motiver l’ablation du matériel [25]. Le rôle préventif de l’héparinothérapie dans la survenue des thromboses liées aux cathéters reste un sujet de controverse [26]. L’urokinase administrée une fois toutes les 2 semaines semble réduire de façon significative le risque de thrombose des cathéters et des SI par rapport à l’héparine [15]. Cet effet préventif est expliqué par la dissolution des caillots, source potentielle de bactériémie–septicémie sous traitement thrombolytique. Les VVC offrent la possibilité d’un accès veineux durable. La durée de vie des SI est supérieure à celle des CE [27]. Pour un prix initial moins cher des CE (6 à 13 euros vs 180 à 250 euros), le coût après 6 mois d’utilisation était comparable pour ces 2 types de matériel. Par ailleurs, les SI sont plus faciles à maintenir. Ils sont mieux acceptés par les enfants âgés de plus de 11 ans [27]. 4. Conclusion Les VVC représentent depuis une dizaine d’année un outil majeur dans la prise en charge des enfants nécessitant une chimiothérapie pour le traitement d’un cancer. Elles restent encore actuellement peu utilisées en pratique courante dans les pays du Maghreb et en Afrique. Pour notre part, seulement 3,7 % de nos malades en ont bénéficié. Les SI, grâce au confort qu’ils offrent au malade et à l’équipe soignante, constituent actuellement un progrès par rapport aux CE. Une formation adéquate du personnel paramédical permet de réduire les taux de complications et de prolonger la durée de vie du cathéter. Références [1] Fratino G, Molinari AC, Parodi S, et al. Central venous catheter-related complications in children with oncological–hematological diseases: an observational study of 418 devices. Ann Oncol 2005;16:648–54.
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